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04/10/2012 | FRANCE | N°10MA04354

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 04 octobre 2012, 10MA04354


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 6 décembre 2010, sous le n° 10MA04354, présentée pour M. , demeurant ... (06510), par la SCP d'avocats Benoît Guillon ;

M. demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803906 du 7 octobre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision référencée 48 SI en date du 9 juin 2008 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré deux points au capital affecté à son permis de c

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 6 décembre 2010, sous le n° 10MA04354, présentée pour M. , demeurant ... (06510), par la SCP d'avocats Benoît Guillon ;

M. demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803906 du 7 octobre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision référencée 48 SI en date du 9 juin 2008 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré deux points au capital affecté à son permis de conduire, à la suite de l'infraction au code de la route qu'il a commise le 21 avril 2008, a rappelé les réductions de quatorze points cumulés antérieures, a constaté que son titre de conduite avait perdu sa validité pour solde de points nul et lui a enjoint de restituer ledit titre, ensemble à l'annulation des décisions successives de retrait de points afférentes aux infractions commises, et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui restituer lesdits points ;

2°) d'annuler la décision référencée 48 SI susmentionnée ainsi que les décisions référencées 48 portant retrait de points dont il a fait l'objet consécutivement aux infractions qu'il a commises les 10 juin 2002, 19 juin 2002, 2 mars 2006, 29 mai 2006 et 21 avril 2008 ;

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Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2011, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, qui conclut au rejet de la requête, par les mêmes motifs que ceux retenus par le premier juge ;

Vu l'avis d'audience adressé le 05 juillet 2012 portant clôture d'instruction en application des dispositions de l'article R.613-2 du code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2012 :

le rapport de M. Férulla, président ;

Considérant qu'à la suite d'infractions au code de la route qu'il a commises les 10 juin 2002, 19 juin 2002, 2 mars 2006, 29 mai 2006 et 21 avril 2008, le ministre de l'intérieur a respectivement retiré trois, quatre, un, six et deux points au capital affecté au permis de conduire de M. ; qu'après avoir constaté que le nombre de points de ce permis, initialement crédité de douze points, était nul, ledit ministre a décidé, le 9 juin 2008, d'en prononcer l'invalidation et l'a invité à restituer ce permis dans le délai de dix jours francs à compter de la réception de cette décision ; que, par la présente requête, M. relève appel du jugement n° 0803906 du 7 octobre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et des cinq décisions de retrait de points dont il a fait l'objet consécutivement aux infractions susmentionnées ;

Sur la réalité des infractions relevées les 10 juin 2002 et 19 juin 2002 :

Considérant qu'aux termes de l'article L.223-1 du code de la route : " La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive. (...) " ;

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles L.225-1 du code de la route et des articles 529 et suivants du code de procédure pénale que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L.223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention ou formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée ;

Considérant que M. fait valoir qu'il ne s'est pas acquitté de l'amende forfaitaire afférente à l'infraction constatée le 10 juin 2002 ; que, toutefois, dans la mesure où il soutient également n'avoir pas présenté de requête à fin d'exonération dans les conditions prévues à l'article 529-2 du code de procédure pénale, le défaut de paiement de l'amende forfaitaire et de requête à fin d'exonération entraîne de plein droit l'émission d'un titre rendu exécutoire par le ministère public en vue du recouvrement de l'amende forfaitaire majorée ; qu'il ressort des mentions portées sur le relevé d'information intégral de M. que le ministère public près le tribunal d'instance ou de police de Fréjus a établi le 20 novembre 2002 un titre exécutoire le rendant redevable de l'amende forfaitaire majorée pour l'infraction du 10 juin 2002 ; qu'il est constant que M. n'a pas présenté, à l'encontre de ce titre exécutoire, la réclamation prévue à l'article 530 du code de procédure pénale ; que, par suite, la réalité de l'infraction constatée le 10 juin 2002 est établie par l'émission dudit titre exécutoire ;

Considérant, s'agissant de l'infraction qu'il a commise le 19 juin 2002, qu'il résulte de l'instruction que M. a été condamné par jugement du tribunal d'instance ou de police de Cannes à une suspension de son permis de conduire, accompagnée d'une perte de quatre points, pour non respect de l'arrêt à un feu rouge fixe ou clignotant ; que M. , qui a eu connaissance de ce jugement au moins depuis la réception de la décision référencée 48 SI du 9 juin 2011, n'indique pas en avoir interjeté appel ; qu'ainsi, cette condamnation étant devenue définitive, la réalité de cette infraction est, là encore, établie, conformément aux dispositions précitées de l'article L.223-1 du code de la route ;

Sur l'imputabilité des infractions relevées les 10 juin 2002 et 19 juin 2002 :

Considérant que M. ne saurait utilement contester devant la juridiction administrative l'imputabilité de ces deux infractions dès lors qu'il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire dans le cadre de la procédure pénale, de se prononcer sur les conditions dans lesquelles a été constatée par les services de police une infraction au code de la route ; que, par suite, faute d'avoir été invoquée en temps utile devant le juge judiciaire, la contestation de cette imputabilité ne constitue pas un moyen susceptible d'être invoqué devant le juge administratif à l'encontre des décisions de retraits de points prises par le ministre de l'intérieur ; que, dès lors, le moyen susmentionné soulevé par M. doit être écarté ;

Sur le défaut d'information préalable :

Considérant qu'aux termes de l'article L.223-3 du code de la route : " Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L.223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L.225-1 à L.225-9. / Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. / Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif. " ; qu'aux termes de l'article R.223-3 du même code : " I.- Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L.223-1. / II.- Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. (...) III.- Lorsque le ministre de l'intérieur constate que la réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie dans les conditions prévues par le quatrième alinéa de l'article L.223-1, il réduit en conséquence le nombre de points affecté au permis de conduire de l'auteur de cette infraction. / (...) Si le retrait de points aboutit à un nombre nul de points affectés au permis de conduire, l'auteur de l'infraction est informé par le ministre de l'intérieur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du nombre de points retirés. Cette lettre récapitule les précédents retraits ayant concouru au solde nul, prononce l'invalidation du permis de conduire et enjoint à l'intéressé de restituer celui-ci au préfet du département ou de la collectivité d'outre-mer de son lieu de résidence dans un délai de dix jours francs à compter de sa réception. (...) " ; que l'information prévue par ces dispositions constitue une formalité substantielle dont l'accomplissement, qui est une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre d'en contester la réalité et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis, est une condition de la régularité de la procédure suivie et, partant, de la légalité du retrait de points ; qu'il appartient donc à l'administration d'apporter la preuve, par tous moyens, qu'elle a satisfait à cette obligation ;

En ce qui concerne les infractions des 21 avril 2008 et 29 mai 2006 :

Considérant qu'il est constant que, lors de la constatation de ces deux infractions relevées à son encontre avec interception du véhicule, M. a procédé au paiement des amendes forfaitaires correspondantes entre les mains de l'agent verbalisateur ; qu'à ces occasions, il s'est vu remettre une quittance de paiement qui comportait, au recto, les éléments relatifs à la constatation de l'infraction et à sa qualification ainsi que la mention " oui " dans la case " retrait de points " et, au verso, les informations prévues par les articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route ; qu'il résulte de l'instruction que l'appelant a signé les deux quittances sous la mention précisant que le paiement entraîne reconnaissance définitive de la réalité de l'infraction et, par là même, la réduction du nombre de points correspondant ; que si M. allègue n'avoir pas été informé que les reconstitutions de points font l'objet d'un traitement informatisé, cette circonstance ne l'a pas privé d'une information constituant, par elle-même, une garantie substantielle ; qu'à supposer que M. n'ait pas été informé par les agents verbalisateurs, préalablement au paiement des amendes, des conséquences du paiement de ces dernières, il pouvait encore renoncer à la modalité du paiement immédiat entre les mains de ces agents avant de procéder à la signature desdites quittances ou, le cas échéant, inscrire sur celles-ci une réserve sur les modalités selon lesquelles l'information lui avait été délivrée ;

qu'en l'espèce, M. n'a pas renoncé au paiement immédiat des deux amendes et n'a émis aucune réserve ; que, par suite, M. n'est pas fondé à soutenir que les retraits de points opérés à la suite de la commission de ces deux infractions seraient intervenus au terme d'une procédure irrégulière ;

En ce qui concerne l'infraction du 2 mars 2006 :

Considérant, en ce qui concerne l'infraction commise le 2 mars 2006, que les mentions du relevé d'information intégral de M. , corroborées par l'attestation du trésorier principal de la trésorerie du contrôle automatisé en date du 11 mai 2009, établissent que ce dernier a payé l'amende forfaitaire d'un montant de quarante-cinq euros relative à cette infraction relevée par radar automatique, ainsi que le prouvent les mentions " tribunal d'instance ou de police de CNT-CSA (Centre National de Traitement - Contrôle Sanction Automatisé) " ; qu'il découle de cette seule constatation que M. a nécessairement reçu l'avis de contravention pour cette infraction ; qu'il suit de là que l'administration doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, et alors que l'intéressé n'établit pas, à défaut de produire le document qui lui a été remis, que celui-ci serait inexact ou incomplet, comme apportant la preuve qu'elle a satisfait à son obligation d'information préalable du contrevenant ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré un point de son permis de conduire à la suite de cette infraction aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière ;

En ce qui concerne l'infraction du 19 juin 2002 :

Considérant que lorsque la réalité de l'infraction a été établie par une condamnation devenue définitive prononcée par le juge pénal qui a statué sur tous les éléments de fait et de droit portés à sa connaissance et que l'auteur de l'infraction a ainsi pu la contester, le défaut d'information préalable est sans influence sur la régularité du retrait de points résultant de la condamnation ; qu'en l'espèce, la réalité de l'infraction commise le 19 juin 2002 par M. ayant été établie, ainsi qu'il a été déjà dit, par une condamnation pénale devenue définitive, le moyen tiré du manquement à l'obligation d'information préalable prévue aux articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route ne saurait être utilement invoqué à l'encontre du retrait de quatre points correspondant à cette infraction ; que ce moyen doit, dès lors, être écarté ;

En ce qui concerne l'infraction du 10 juin 2002 :

Considérant qu'en réponse à l'affirmation de M. selon laquelle il n'aurait pas reçu les informations requises par les dispositions précitées avant de faire l'objet d'un retrait de trois points à la suite de l'infraction dont il s'est rendu coupable le 10 juin 2002, et alors qu'il ne peut utilement se prévaloir des seules mentions du relevé d'information intégral relatives à l'émission d'un titre exécutoire d'amende forfaitaire majorée pour cette infraction, le ministre de l'intérieur ne produit aucune pièce de nature à établir que l'administration a satisfait à son obligation d'information préalable requise par les dispositions précitées des articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route ; que, dès lors, M. est fondé à soutenir que la décision référencée 48 portant retrait de trois points du capital attaché à son permis de conduire, opérée consécutivement à cette infraction, est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière et doit donc être annulée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que trois des seize points retirés au permis de conduire de M. l'ont été irrégulièrement et que, compte tenu d'un ajout de quatre points intervenu le 11 juin 2006, le solde de points dudit permis n'était pas nul à la date du 9 juin 2008 ; que, par suite, l'intéressé est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ainsi que celle de la décision référencée 48 portant retrait de trois points prise par le ministre de l'intérieur suite à l'infraction commise le 10 juin 2002 et de la décision 48 SI du 9 juin 2011 portant invalidation de son permis de conduire ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision référencée 48 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré trois points au capital affecté au permis de conduire de M. à la suite de l'infraction qu'il a commise le 10 juin 2002 et la décision référencée 48 SI du 9 juin 2008 sont annulées.

Article 2 : Le jugement n° 0803906 du 7 octobre 2010 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et au ministre de l'intérieur.

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N° 10MA04354

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA04354
Date de la décision : 04/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-04 Police administrative. Police générale. Circulation et stationnement. Permis de conduire.


Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: M. Gérard FERULLA
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : SCP BENOIT GUILLON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-10-04;10ma04354 ?
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