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07/02/2012 | FRANCE | N°10MA01398

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 07 février 2012, 10MA01398


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 8 avril 2010 sous le n° 10MA01398, présentée pour Mme Sandra A, demeurant ..., par la SCP Morelli Maurel Santelli-Pinna Recchi, avocat ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900897 du 4 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a condamnée au titre d'une contravention de grande voirie, d'une part, à payer à l'Etat une amende de 1 500 euros et, d'autre part, à remettre les lieux qu'elle occupait irrégulièrement sur le domaine public maritime dan

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 8 avril 2010 sous le n° 10MA01398, présentée pour Mme Sandra A, demeurant ..., par la SCP Morelli Maurel Santelli-Pinna Recchi, avocat ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900897 du 4 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a condamnée au titre d'une contravention de grande voirie, d'une part, à payer à l'Etat une amende de 1 500 euros et, d'autre part, à remettre les lieux qu'elle occupait irrégulièrement sur le domaine public maritime dans leur état naturel, sans délai à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

2°) de la relaxer des poursuites de contravention de grande voirie engagées à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le décret n° 2003-172 du 25 février 2003 relatif aux peines d'amende applicables aux infractions de grande voirie commises sur le domaine public maritime en dehors des ports ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 janvier 2012 :

- le rapport de M. Chanon, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant que, par arrêté du 13 avril 2007, le préfet de la Corse-du-Sud a autorisé Mme A à occuper temporairement, pour la période allant du 1er mai au 31 octobre 2007, une parcelle d'environ 384 m² appartenant au domaine public maritime sur la plage de Mare e Sole, sur le territoire de la commune de Coti Chiavari, afin d'y exploiter un établissement de restauration ; que Mme A n'a pas libéré les lieux après le 31 octobre 2007 ; que, saisi d'un procès-verbal de contravention de grande voirie établi le 11 décembre 2007, le Tribunal administratif de Bastia, par jugement du 20 mars 2008, a condamné Mme A à payer à l'Etat une amende de 1 000 euros et à remettre les lieux dans leur état naturel, dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; que, par arrêt du 13 avril 2010, la Cour, après avoir annulé ce jugement pour irrégularité, a prononcé la même condamnation ; que, par jugement du 4 mars 2010, le Tribunal administratif de Bastia, saisi d'un nouveau procès-verbal de contravention de grande voirie relatif à une extension de 196 m2 de la parcelle illégalement occupée, pour un usage de restaurant, bar de plage et local de vente d'objets divers, a condamné Mme A, d'une part, à payer à l'Etat une amende de 1 500 euros et, d'autre part, à remettre les lieux dans leur état naturel sans délai à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ; que Mme A relève appel de ce dernier jugement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, devant le Tribunal, Mme A soutenait que la parcelle litigieuse n'était pas située sur les lais et relais de la mer et n'était pas touchée par la plus haute vague ; que les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen en défense, qui n'était pas inopérant ; que par suite, l'intéressée est fondée à demander pour ce motif l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par le préfet de la Corse-du-Sud devant le Tribunal administratif de Bastia tendant à la condamnation de Mme A à remettre les lieux dans leur état naturel, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à autoriser l'Etat à faire exécuter d'office la remise en état des lieux aux frais de la contrevenante et à payer à l'Etat une amende de 1 500 euros ;

Sur la régularité des poursuites :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2132-21 du code général de la propriété des personnes publiques : Sous réserve de dispositions législatives spécifiques, les agents de l'Etat assermentés à cet effet devant le tribunal de grande instance et les officiers de police judiciaire sont compétents pour constater les contraventions de grande voirie ; qu'il résulte de l'instruction que le procès-verbal de constat de l'infraction a été rédigé par un agent ayant le grade de contrôleur des travaux publics de l'Etat, commissionné et assermenté devant le Tribunal de grande instance d'Ajaccio, et expressément habilité à constater les infractions portant atteinte au domaine public maritime, ainsi que le mentionne la copie de la carte professionnelle de cet agent, versée aux débats ; que, dès lors qu'il n'est pas argué que cette copie serait un faux, la circonstance qu'elle ne soit pas certifiée conforme à l'original n'a aucune incidence ; qu'aucune disposition en vigueur à la date de la saisine du Tribunal n'imposait que le procès-verbal de constat fasse l'objet d'une affirmation ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin d'ordonner au préfet de communiquer le procès-verbal d'assermentation du contrôleur, doit être écarté le moyen tiré de ce que le procès-verbal a été dressé par un agent qui ne justifie pas d'une assermentation régulière ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 774-2 du code de justice administrative : Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal (...). Il est dressé acte de la notification ; cet acte doit être adressé au tribunal administratif et y être enregistré comme les requêtes introductives d'instance ; que ce délai de dix jours, qui ne présente au demeurant pas un caractère impératif, a été respecté en l'espèce dès lors que le procès-verbal, rédigé le 9 septembre 2009 à la suite d'une visite sur place du 18 août 2009, a été notifié à Mme A le 16 septembre 2009 ; qu'est à cet égard sans incidence la circonstance que l'acte de notification n'a été enregistré au Tribunal administratif que le 26 septembre 2009 ; qu'en outre l'intéressée n'allègue pas qu'il aurait été porté atteinte aux droits de la défense ; que, dès lors, l'appelante ne peut se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées ;

Sur la contravention de grande voirie :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques : Le domaine public maritime naturel de L'Etat comprend : 1° Le sol et le sous-sol de la mer entre la limite extérieure de la mer territoriale et, côté terre, le rivage de la mer. Le rivage de la mer est constitué par tout ce qu'elle couvre et découvre jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ; 2° Le sol et le sous-sol des étangs salés en communication directe, naturelle et permanente avec la mer ; 3° Les lais et relais de la mer : a) Qui faisaient partie du domaine privé de l'Etat à la date du 1er décembre 1963, sous réserve des droits des tiers ; b) Constitués à compter du 1er décembre 1963 (...) ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 25 février 2003 : Toute infraction en matière de grande voirie commise sur le domaine public maritime en dehors des ports (...) est punie de la peine d'amende prévue par l'article 131-13 du code pénal pour les contraventions de 5ème classe ; qu'aux termes de l'article 131-13 du code pénal : Constituent des contraventions les infractions que la loi punit d'une amende n'excédant pas 3 000 euros. Le montant de l'amende est le suivant : (...) 5° 1 500 euros au plus pour les contraventions de la 5e classe, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit, hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit ;

Considérant qu'il résulte clairement des pièces du dossier, et notamment des plans produits par le préfet de la Corse-du-Sud, que la parcelle en cause est située sur un lais de la mer ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques, seul applicable en l'espèce sur ce point, les lais et relais font automatiquement partie du domaine public maritime, quelle que soit la date à laquelle ils ont été formés et sans qu'il soit besoin de procéder à leur délimitation préalable ; que, par suite, Mme A ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer l'irrégularité de l'arrêté du 3 novembre 1992 par lequel le préfet a procédé à la délimitation du domaine public maritime sur la plage de Mare e Sole et Verghia ou de celle d'un précédent arrêté d'incorporation des lais et relais de mer, qui serait intervenu en 1979 ; que, dès lors qu'il est situé sur un lais de la mer, la circonstance que le terrain d'assiette des installations en litige n'est pas touché par les plus hauts flots de l'année, ainsi que l'indiquent les attestations produites, n'a pas davantage d'influence ; qu'enfin, les photographies annexées au procès-verbal et les éléments cadastraux produits ne sont pas de nature à établir que ces installations seraient implantées, même partiellement, sur une parcelle privée appartenant à la SCI du domaine de la Pinède ;

Considérant, sans qu'il soit besoin de confier une expertise à un géomètre, que les faits reprochés à Mme A sont constitutifs d'une contravention de grande voirie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner Mme A à remettre dans leur état naturel les dépendances du domaine public maritime qu'elle occupe irrégulièrement, si ce n'est déjà fait, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sous peine d'une astreinte de 200 euros par jour de retard, et de la condamner à payer à l'Etat une amende de 1 500 euros ; que l'administration pourra procéder d'office à la démolition des installations litigieuses aux frais de la contrevenante en cas d'inexécution ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que ces dispositions font obstacle aux conclusions de Mme A, partie essentiellement perdante, tendant à la mise à la charge de l'Etat d'une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Bastia du 4 mars 2010 est annulé.

Article 2 : Mme A est condamnée à payer à l'Etat une amende de 1 500 (mille cinq cents) euros.

Article 3 : Mme A devra, sous le contrôle de l'Etat, remettre, si elle ne l'a déjà fait, les lieux en l'état dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous peine d'une astreinte de 200 euros par jour de retard. L'administration pourra procéder d'office à la démolition des installations litigieuses aux frais de la contrevenante en cas d'inexécution.

Article 4 : Les conclusions de Mme A tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Sandra A et à la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Copie en sera adressée au préfet de la Corse-du-Sud.

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N° 10MA01398

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA01398
Date de la décision : 07/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

24-01-03-01 Domaine. Domaine public. Protection du domaine. Contraventions de grande voirie.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP MORELLI MAUREL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-02-07;10ma01398 ?
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