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29/11/2011 | FRANCE | N°09MA03312

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 29 novembre 2011, 09MA03312


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 31 août 2009 sous le n° 09MA03312, présentée par Me Hilaire Lafon, avocat, pour Mme Céline A, demeurant ...) ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703732 du 30 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat (ministère de l'éducation nationale) à lui verser :

- les sommes de 16.579 euros et 2.848,20 euros au titre de l'allocation de soutien familial qu'elle estime lui être due pour les périodes courant respectivement du 1er

mars 1999 au 30 septembre 2003 et du 1er octobre 2003 au 30 juin 2004, augmen...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 31 août 2009 sous le n° 09MA03312, présentée par Me Hilaire Lafon, avocat, pour Mme Céline A, demeurant ...) ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703732 du 30 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat (ministère de l'éducation nationale) à lui verser :

- les sommes de 16.579 euros et 2.848,20 euros au titre de l'allocation de soutien familial qu'elle estime lui être due pour les périodes courant respectivement du 1er mars 1999 au 30 septembre 2003 et du 1er octobre 2003 au 30 juin 2004, augmentées de la réévaluation de ladite allocation au montant actuel et des intérêts de retard sur les sommes dues depuis l'année 1999,

- des dommages et intérêts à raison du mauvais traitement du dossier, du refus obstiné de l'administration de répondre, et de la longueur de la procédure ;

2°) de condamner l'Etat (ministère de l'éducation nationale) à lui verser les sommes susmentionnées de 16.579 et 2.848 euros au titre de cette allocation de soutien familial ;

3°) de condamner l'Etat (ministère de l'éducation nationale) à lui verser une indemnité de 3.000 euros du fait de carences dans la gestion de son dossier ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2011 :

- le rapport de M. Brossier, rapporteur,

- les conclusions de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur public ;

En ce qui concerne les droits de Mme A au versement de l'allocation de soutien familial ;

Considérant que Mme A a demandé au tribunal le versement des sommes de 16.579 euros au titre de l'allocation de soutien familial pour la période du 1er mars 1999 au 30 septembre 2003, de 2.848,20 euros au titre de la même allocation pour la période du 1er octobre 2003 au 30 juin 2004, ensemble l'actualisation de ladite allocation pour ces périodes et les intérêts de retard sur lesdites sommes à compter de l'année 1999 ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 222-13 du code de justice administrative : Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller ou ayant une ancienneté minimale de

deux ans statue en audience publique et après audition du rapporteur public : 1° Sur les litiges relatifs aux déclarations préalables prévues par l'article L. 421-4 du code de l'urbanisme ; 2° Sur les litiges relatifs à la situation individuelle des fonctionnaires ou agents de l'Etat et des autres personnes ou collectivités publiques, ainsi que des agents ou employés de la Banque de France, à l'exception de ceux concernant l'entrée au service, la discipline et la sortie du service ; 3° Sur les litiges en matière de pensions, d'aide personnalisée au logement, de communication de documents administratifs, de service national ; 4° Sur les litiges relatifs à la redevance audiovisuelle ; 5° Sur les recours relatifs aux taxes syndicales et aux impôts locaux autres que la taxe professionnelle ; 6° Sur la mise en oeuvre de la responsabilité de l'Etat pour refus opposé à une demande de concours de la force publique pour exécuter une décision de justice ; 7° Sur les actions indemnitaires, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ; 8° Sur les requêtes contestant les décisions prises en matière fiscale sur des demandes de remise gracieuse ; 9° Sur les litiges relatifs aux bâtiments menaçant ruine ; 10° Sur les litiges relatifs au permis de conduire. ; qu'aux termes de l'article R. 222-14 du même code : Les dispositions du 7° de l'article précédent sont applicables aux demandes dont le montant n'excède pas 10 000 euros. ; et qu'aux termes de l'article R. 811-1 du même code : Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. Toutefois, dans les litiges énumérés aux 1°, 4°, 5°, 6°, 7°, 8° et 9° de l'article R. 222-13, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort. Il en va de même pour les litiges visés aux 2° et 3° de cet article, sauf pour les recours comportant des conclusions tendant au versement ou à la décharge de sommes d'un montant supérieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15. (...) ;

Considérant que la combinaison des articles précités R. 811-1, R. 222-13 et R. 222-14 du code de justice administrative a pour conséquence de fermer la voie de l'appel pour une série de litiges limitativement énumérés et que l'appel demeure la règle pour les litiges qui n'entrent pas exactement dans la liste établie par ces dispositions ; que cette liste n'inclut aucunement des litiges qui échapperaient à la compétence de la juridiction administrative ; qu'il s'ensuit que la voie de l'appel demeure ouverte devant une cour administrative d'appel contre un jugement qui a statué en première instance sur un litige ne relevant pas de la compétence de la juridiction administrative ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale : Les prestations familiales comprennent : 1°) la prestation d'accueil du jeune enfant ; 2°) les allocations familiales ; 3°) le complément familial ; 4°) l'allocation de logement ; 5°) l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé ; 6°) l'allocation de soutien familial ; 7°) l'allocation de rentrée scolaire ; 8°) l'allocation de parent isolé et la prime forfaitaire instituée par

l'article L. 524-5 ; 9°) l'allocation journalière de présence parentale. ; qu'aux termes de

l'article L. 142-1 dudit code: Il est institué une organisation du contentieux général de la sécurité sociale. Cette organisation règle les différends auxquels donnent lieu l'application des législations et réglementations de sécurité sociale..., et qui ne relèvent pas, par leur nature, d'un autre contentieux...; et qu'aux termes de l'article L. 142-2 du même code : Le tribunal des affaires de sécurité sociale connaît en première instance des litiges relevant du contentieux général de la sécurité sociale... ;

Considérant que le code de sécurité sociale ne comporte aucune disposition attribuant compétence pour connaître des contestations relatives au paiement des prestations familiales à des juridictions autres que celles compétentes pour connaître du contentieux général de la sécurité sociale, sauf en ce qui concerne les litiges appartenant par leur nature à un autre contentieux ; qu'il en va ainsi même dans le cas où les décisions contestées sont prises par des autorités administratives, dès lors que ces décisions sont inhérentes à la gestion d'un régime de sécurité sociale ;

Considérant qu'il en résulte que les conclusions de Mme A relatives à ses droits au versement de l'allocation de soutien familial, prestation familiale au sens de l'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale, ne peuvent être tranchées par la juridiction administrative, incompétente pour en connaître, nonobstant la circonstance que la partie gestionnaire mise en la cause soit l'Etat et non une caisse d'allocations familiales ; que le ministre intimé a pu opposer cette exception d'incompétence pour la première fois en appel, s'agissant d'une question d'ordre public ; que, par suite, c'est à tort que le premier juge s'est estimé compétent pour statuer sur de telles conclusions et que, dès lors, le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il statue sur ces conclusions ; que statuant par la voie de l'évocation, il appartient à la Cour de rejeter ces conclusions comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires de Mme A :

Considérant que Mme A, outre la réclamation relative à ses droits à la prestation familiale en litige, a demandé au tribunal de condamner l'Etat (ministre de l'éducation nationale) à lui verser des dommages et intérêts à raison du mauvais traitement de son dossier, du refus obstiné de son administration de lui répondre et de la longueur de la procédure qu'elle a intentée ;

Considérant, en premier lieu, que la juridiction administrative reste compétente pour statuer sur l'action en responsabilité intentée contre l'Etat, qui a été le gestionnaire du paiement de l'allocation familiale en cause jusqu'en 2005, du fait de carences dans sa gestion, dès lors qu'il ne s'agit pas alors de statuer sur les droits mêmes de l'intéressée à cette prestation, dont le contentieux relève du juge judiciaire comme il a été dit, mais sur l'éventuelle faute de l'administration gestionnaire ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A n'avait pas chiffré ses conclusions indemnitaires devant le tribunal, qu'elle chiffre désormais devant la Cour à 3.000 euros ; qu'en l'absence de chiffrage, et donc d'un montant indemnitaire réclamé supérieur au montant de 10.000 euros prévu par l'article R. 222-14 précité, le tribunal, qui pouvait statuer par juge unique, a rejeté ces conclusions indemnitaires comme non fondées, sans qu'il ait estimé nécessaire de demander à l'intéressée de régulariser sa demande indemnitaire par un chiffrage de sa demande de condamnation ; qu'il résulte des dispositions combinées des articles précités R. 222-13, R. 222-14 et R. 811-1 du code de justice administrative que la voie de l'appel contre un tel jugement statuant en premier et dernier ressort est fermée ; que la lettre de notification du 30 juin 2009 de ce jugement avait au demeurant indiqué à l'intéressée que la voie de recours ouverte était le pourvoi en cassation ; qu'il s'ensuit qu'il appartient à la Cour de renvoyer au Conseil d'Etat la requête susvisée enregistrée à son greffe sous le n° 09MA03312, en tant qu'elle conteste le jugement attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires dirigées contre l'Etat du fait des carences de gestion invoquées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat intimé, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à l'appelante la somme qu'elle demande au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés devant la Cour ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement attaqué susvisé du tribunal administratif de Nîmes est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de Mme A tendant au versement des sommes de 16.579 euros (seize mille cinq cent soixante-dix-neuf euros) au titre de l'allocation de soutien familial pour la période du 1er mars 1999 au 30 septembre 2003, de 2.848,20 euros (deux mille huit cent quarante-huit euros et vingt centimes d'euros) au titre de la même allocation pour la période du 1er octobre 2003 au 30 juin 2004, ensemble l'actualisation de cette allocation pour ces périodes et les intérêts de retard sur lesdites sommes à compter de l'année 1999.

Article 2 : Les conclusions de Mme A tendant au versement des sommes de 16.579 euros (seize mille cinq cent soixante-dix-neuf euros) au titre de l'allocation de soutien familial pour la période du 1er mars 1999 au 30 septembre 2003, de 2.848,20 euros (deux mille huit cent quarante-huit euros et vingt centimes d'euros) au titre de la même allocation pour la période du 1er octobre 2003 au 30 juin 2004, ensemble l'actualisation de cette allocation pour ces périodes et les intérêts de retard sur lesdites sommes à compter de l'année 1999, sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 3 : Les conclusions de Mme A tendant à la condamnation de l'Etat (ministre de l'éducation nationale) à lui verser des dommages et intérêts du fait de carences dans la gestion de son dossier sont renvoyées au Conseil d'Etat.

Article 4 : Les conclusions de Mme A tendant au remboursement des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés devant la Cour sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Céline A et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.

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N°09MA03312 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA03312
Date de la décision : 29/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

17-03-01-02-04 Compétence. Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction. Compétence déterminée par des textes spéciaux. Attributions légales de compétence au profit des juridictions judiciaires. Compétence des juridictions judiciaires en matière de prestations de sécurité sociale.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Mme VINCENT-DOMINGUEZ
Avocat(s) : HILAIRE-LAFON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-11-29;09ma03312 ?
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