Vu la requête, enregistrée le 23 avril 2009, présentée pour Mme Fabienne A, demeurant ..., par Me Hilaire-Lafon, avocat ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800670 du 12 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à ce que France Télécom soit condamnée à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral nés du caractère abusif des mises en disponibilité d'office et du refus de réintégration dans un délai raisonnable dont elle a fait l'objet ;
2°) de mettre à la charge de France Télécom la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 2011 :
- le rapport de M. Fédou, président-rapporteur,
- et les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public ;
Considérant que Mme A interjette appel du jugement en date du 12 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à ce que France Télécom soit condamnée à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral nés du caractère abusif des mises en disponibilité d'office et du refus de réintégration dans un délai raisonnable dont elle a fait l'objet ;
Sur la responsabilité de France Télécom :
Considérant que Mme Fabienne A, agent d'exploitation du service général Gard Lozère de France Télécom, a été placée en disponibilité pour convenances personnelles du 1er novembre au 31 octobre 2002 ; que par courrier du 10 juin 2002, elle a sollicité sa réintégration ; que celle ci n'étant intervenue que le 1er novembre 2004, Mme A recherche la responsabilité de France Télécom pour avoir refusé de la réintégrer dans un délai raisonnable et pour l'avoir abusivement placée en disponibilité pendant la période précédant sa réintégration ;
Considérant qu'aux termes de l'article 49 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 : (...) la réintégration est subordonnée à la vérification par un médecin agréé et, éventuellement, par le comité médical compétent, saisi dans les conditions prévues par la réglementation en vigueur, de l'aptitude physique du fonctionnaire à l'exercice des fonctions afférentes à son grade. (...) Trois mois au moins avant l'expiration de la disponibilité, le fonctionnaire fait connaître à son administration d'origine sa décision de solliciter le renouvellement de la disponibilité ou de réintégrer son corps d'origine. Sous réserve des dispositions du deuxième alinéa du présent article et du respect par l'intéressé, pendant la période de mise en disponibilité, des obligations qui s'imposent à un fonctionnaire même en dehors du service, la réintégration est de droit. A l'issue de sa disponibilité, l'une des trois premières vacances dans son grade doit être proposée au fonctionnaire. S'il refuse successivement trois postes qui lui sont proposés, il peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. (...) Le fonctionnaire qui a formulé avant l'expiration de la période de mise en disponibilité une demande de réintégration est maintenu en disponibilité jusqu'à ce qu'un poste lui soit proposé dans les conditions fixées aux deux alinéas précédents. Toutefois, au cas où il ne peut être réintégré pour cause d'inaptitude physique, il est soit reclassé dans les conditions prévues par la réglementation en vigueur, soit mis en disponibilité d'office dans les conditions prévues à l'article 43 du présent décret, soit radié des cadres s'il est reconnu définitivement inapte. ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A, en disponibilité pour convenances personnelles jusqu'au 30 octobre 2002, a sollicité sa réintégration de manière anticipée le 10 juin 2002 ; que l'administration était, dès lors, tenue de lui proposer au moins trois postes parmi lesquels une des trois premières vacances dans son grade ; que s'il ressort des pièces du dossier que France Télécom lui a proposé le 23 décembre 2002, à l'issue de sa disponibilité, un poste correspondant à son grade, à savoir le poste de télé-conseiller au centre de traitement des appels Wanadoo à Montpellier, il n'est à l'inverse nullement établi, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, que les postes d'opérateur au centre de traitement des appels du 712 à Villeneuve les Avignon et de télé-conseiller TFC à Avignon aient fait l'objet de propositions fermes de la part de son employeur ; que si la requérante a émis des réserves sur son aptitude physique à assurer le poste de télé-conseiller à Montpellier, malgré l'avis d'aptitude sous réserve de certains aménagements émis par le médecin de prévention le 4 février 2003, et a finalement rejeté cette proposition le 6 juin 2003, il n'en demeure pas moins que France Télécom a méconnu les obligations qui étaient les siennes, aux termes de l'article 49 du décret du
16 septembre 1985 précité, en maintenant Mme A en disponibilité jusqu'au
1er novembre 2004 sans lui proposer d'autre poste à la vacance que celui de télé-conseiller au centre de traitement des appels Wanadoo à Montpellier ; que la requérante fait en outre valoir, sans être utilement contredite, que des postes vacants en novembre et en décembre 2002 ne lui ont pas été proposés alors qu'ils correspondaient pourtant à son niveau 2.1/2.2 ; qu'une telle attitude révèle une faute de France Télécom de nature à ouvrir droit à réparation pour Mme A, laquelle est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler ledit jugement et, statuant par l'effet dévolutif de l'appel, de se prononcer sur les conclusions indemnitaires de Mme A ;
Sur les préjudices invoqués :
Considérant en premier lieu qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de fixer au 1er janvier 2003 la date d'expiration du délai raisonnable au cours duquel l'employeur de Mme A devait la réintégrer ; qu'il sera fait une juste appréciation de son préjudice matériel, en tenant compte des circonstances que, durant la période du 1er janvier 2003 au 1er novembre 2004, Mme A n'a perçu que le revenu minimum d'insertion et que sa carrière a été bloquée, en condamnant France Télécom à lui verser de ce chef la somme de 22 000 euros ;
Considérant en deuxième lieu qu'eu égard à la situation de précarité dans laquelle elle a été mise pendant plus de deux ans par France Télécom et eu égard au délai anormalement long qui s'est écoulé entre la fin de sa disponibilité et sa réintégration effective, Mme A a subi un préjudice moral qu'il y a lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de fixer à la somme de 3 000 euros ;
Sur les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant d'une part que ces dispositions font obstacle à ce que Mme A, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à France Télécom la somme qu'elle demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Considérant d'autre part qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner France Télécom à verser à Mme A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 12 mars 2009 est annulé.
Article 2 : France Télécom est condamnée à verser à Mme A une somme totale de 25 000 euros (vingt cinq mille euros) en réparation de ses préjudices.
Article 3 : Le surplus des conclusions indemnitaires de Mme A est rejeté.
Article 4 : France Télécom versera à Mme A une somme de 1 500 euros
(mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de France Télécom présentées au titre des dispositions de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Fabienne A, à France Télécom et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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N° 09MA014462