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05/07/2011 | FRANCE | N°09MA01173

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2011, 09MA01173


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er avril 2009 sous le n° 09MA01173, présentée par Me Bonnet, avocat, pour M. A, demeurant ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0506879 du 20 janvier 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Béziers à lui verser les sommes, augmentées des intérêts au taux légal, de 258 526 euros au titre du préjudice résultant des pertes de chances d'avancement et de 10 000 euros au titre de son préjudice moral ;
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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er avril 2009 sous le n° 09MA01173, présentée par Me Bonnet, avocat, pour M. A, demeurant ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0506879 du 20 janvier 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Béziers à lui verser les sommes, augmentées des intérêts au taux légal, de 258 526 euros au titre du préjudice résultant des pertes de chances d'avancement et de 10 000 euros au titre de son préjudice moral ;

2°) de condamner ledit centre hospitalier de Béziers à lui verser les sommes, augmentées des intérêts au taux légal :

- de 34 538 euros en réparation de la perte de chance d'avancement au titre des années 1990 à 2005,

- de 87 300 euros en réparation de la perte de chance d'avancement au titre des années 2006 à 2010,

- de 136 688 euros en réparation de la perte de chance d'avancement au titre des années 2011 à 2026,

- et de 10 000 euros au titre de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence ;

3°) de mettre à la charge dudit centre hospitalier de Béziers la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la n° 68-1250 loi du 31 décembre 1968 ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 75-928 du 9 octobre 1975 relatif au certificat cadre infirmier (création) et le décret n° 93-59 du 14 janvier 1993 le modifiant le décret ;

Vu le décret modifié n° 88-1077 du 30 novembre 1988 portant statut particulier des personnels infirmiers de la fonction publique hospitalière, notamment les décrets modificatifs n° 89-538 du 3 août 1989, n° 91-1271 du 18 décembre 1991, n° 94-73 du 25 janvier 1994 et n° 96-484 du 29 mai 1996 ;

Vu le décret n° 95-926 du 18 août 1995 portant création d'un diplôme de cadre de santé ;

Vu le décret n° 2001-1375 du 31 décembre 2001 portant statut particulier du corps des cadres de santé de la fonction publique hospitalière ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 2011 :

- le rapport de M. Brossier, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public ;

Considérant que M. Michel A, né en 1945, infirmier de secteur psychiatrique diplômé en 1977, titularisé en 1983, affecté au centre hospitalier de Béziers de 1987 jusqu'à 2005, date de sa mise à la retraite, promu à la classe supérieure en 2002, a présenté à de multiples reprises à compter de l'année 1990 sa candidature au grade d'infirmier surveillant, devenu grade de cadre infirmier, mais qu'aucune de ces candidatures n'a été suivie de son inscription sur la liste d'aptitude à ce niveau d'encadrement ; qu'estimant que ces refus successifs de promotion auraient été illégaux et par suite de nature à engager la responsabilité de l'administration, il demande réparation du préjudice de carrière qui en découle, ensemble réparation de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence ; qu'il soutient à cet égard que l'administration lui aurait opposé à tort, d'une part, le fait qu'il ne possède pas le diplôme de cadre de santé, d'autre part et en méconnaissance de son statut, la circonstance qu'il n'a jamais exercé à titre probatoire comme faisant fonction les fonctions d'encadrement recherchées ; qu'il invoque aussi l'erreur manifeste de l'administration dans l'appréciation de ses mérites compte tenu de ses notations et, plus généralement, la violation du principe d'égalité de traitement entre agents publics, s'estimant notamment victime d'une discrimination dans l'avancement de sa carrière en raison de son âge ;

Considérant qu'aux termes de l'article 69 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : Sauf pour les emplois mentionnés à l'article 3, l'avancement de grade a lieu, selon les proportions définies par les statuts particuliers, suivant l'une ou plusieurs des modalités ci-après : 1° Au choix, par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement établi après avis de la commission administrative paritaire par appréciation de la valeur professionnelle des agents (...) ; qu'aux termes de l'article 29 du décret modifié n° 88-1077 du 30 novembre 1988 portant statuts particuliers des personnels infirmiers de la fonction publique hospitalière: Peuvent accéder au grade de surveillant des services médicaux : 1° Dans les conditions prévues à l'article 69 (1°) de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, d'une part les fonctionnaires du corps de classe supérieure, d'autre part les fonctionnaires du corps de classe normale ayant accompli dans ce corps au moins cinq années de services et possédant le certificat d'aptitude aux fonctions d'infirmier surveillant, le certificat d'aptitude aux fonctions d'infirmier moniteur, le certificat de cadre infirmier, le certificat de cadre infirmier de secteur psychiatrique ou le certificat de moniteur de formation professionnelle du personnel soignant de secteur psychiatrique ; 2° Dans les conditions prévues à l'article 69 (2°) de la même loi, les fonctionnaires du corps ayant accompli au moins huit années de services. (...) ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 2001-1375 du 31 décembre 2001 portant statut particulier du corps des cadres de santé de la fonction publique hospitalière : Le présent décret s'applique aux cadres de santé en fonctions dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée qui constituent un corps classé en catégorie A. Le corps de cadres de santé comprend selon leur formation :1° Dans la filière infirmière :- des infirmiers cadres de santé (...) ; et qu'aux termes de son article 2 : Les cadres de santé sont recrutés, à la suite d'un concours sur titres ouvert dans chaque établissement :

1° Concours sur titres interne ouvert aux candidat titulaires du diplôme de cadre de santé ou certificat équivalent, relevant des corps régis par les décrets du 30 novembre 1988, n° 89-609 du 1er septembre 1989 et n° 89-613 du 1er septembre 1989 susvisés, comptant, au 1er janvier de l'année du concours, au moins cinq ans de services effectifs dans un ou plusieurs des corps précités, pour 90 % des postes ouverts ; 2° Concours sur titres externe (...) ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 93-59 du 14 janvier 1993 modifiant le décret n° 75-928 du 9 octobre 1975 relatif au certificat cadre infirmier : L'article 1er du décret du 9 octobre 1975 susvisé est complété par les dispositions suivantes : par dérogation au premier alinéa de cet article, le certificat cadre infirmier est attribué par équivalence aux personnes titulaires du certificat cadre infirmier de secteur psychiatrique qui en font la demande auprès de la direction régionale des affaires sanitaires et sociales qui leur a délivré ce certificat. ; qu'aux termes en outre de l'article 1er du décret susvisé du 18 août 1995 portant création d'un diplôme de cadre de santé : Il est créé un diplôme de cadre de santé. Ce diplôme porte mention de la profession de son titulaire. ; qu'aux termes de l'article 2 de ce même décret : Les titulaires de l'un des certificats suivants : (...) - certificat de cadre infirmier de secteur psychiatrique (...) peuvent se prévaloir des mêmes droits que les titulaires du diplôme de cadre de santé.

Considérant que si l'appelant invoque le blocage de sa carrière à compter de l'année 1990, il résulte de l'instruction qu'il ne produit aucune lettre de candidature à des fonctions d'encadrement au titre des années 1995 et 1999, années pour lesquelles il invoque une discrimination en raison de son âge, laquelle n'est pas établie en l'absence d'élément probant versé au dossier au titre des années 1995 et 1999 ; qu'il ne produit par ailleurs des lettres de candidature à des fonctions d'encadrement qu'au titre des années 1990, 1991, 1992, 1993, 1997, 1998, 2001 et 2002 et 2003 ; qu'il y a lieu dans ces conditions pour la Cour d'étudier si, pour chacune de ces années, les motifs du refus de promotion qui lui ont été opposés sont illégaux et de nature à engager la responsabilité de l'administration hospitalière ;

S'agissant des refus de promotion au titre des années 1990, 1991, 1992, 1993 et 1998 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'appelant produit ses lettres manuscrites de candidatures datées des 7 juin 1990, 27 mai 1991, 18 novembre 1992, 13 novembre 1993 et 30 avril 1998 ; qu'il ne verse cependant au dossier aucun élément permettant de connaître les raisons pour lesquelles la direction du centre hospitalier aurait refusé de retenir sa candidature au titre de ces années, à supposer même qu'elle ait reçu lesdites lettres ; que dans ces conditions l'appelant, à qui incombe la charge d'établir l'attitude fautive de l'administration, n'établit pas que celle-ci aurait, pour chacune de ces années, commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

S'agissant des refus de promotion au titre des années 1997, 2001, 2002 et 2003 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'appelant produit des lettres manuscrites de candidatures datées des 24 février 1997, 18 janvier 2001, 30 avril 2001, 16 novembre 2001, 7 janvier 2002, 5 avril 2002 et 13 mars 2003 :

Considérant, en premier lieu et s'agissant de l'année 1997, qu'il ressort des éléments versés au dossier, notamment du procès-verbal de la commission administrative paritaire du 20 mars 1997, que l'un des critères de sélection qui a bloqué cette année-là l'appelant a été le fait qu'il n'était pas titulaire du certificat cadre infirmer, mais seulement du certificat de cadre infirmier psychiatrique ; que ce motif, tiré de la circonstance que l'intéressé n'était titulaire que du seul certificat de cadre infirmier de secteur psychiatrique, ne pouvait toutefois lui être opposé lors de sa demande de promotion sans méconnaître l'article 1er précité du décret n° 93-59 du 14 janvier 1993 et les articles 1er et 2 précités du décret susvisé du 18 août 1995 ; que l'administration a ainsi commis, en 1997, une faute dans le traitement de la candidature de l'appelant ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des éléments versés au dossier, notamment des procès-verbaux des commissions administratives paritaires des 20 mars 1997 et 27 février 2001 et des lettres émanant de la direction des soins infirmiers (DSI) des 19 février 2001 et 11 février 2002, qu'un autre motif du refus de promouvoir l'intéressé sur des fonctions d'encadrement a consisté à lui opposer le fait qu'il n'avait pas exercé à titre probatoire de telles fonctions, sur un poste vacant, comme faisant fonction ; qu'à supposer même, comme le soutient l'administration qui ne l'établit pas au demeurant, qu'un tel poste de faisant fonction ait été proposé à plusieurs reprises à l'intéressé et qu'il l'ait refusé par préférence pour un travail de nuit, un tel critère de sélection des candidats s'avère en tout état de cause illégal dès lors qu'il n'est pas prévu par le statut, notamment que les articles 69 et 29 précités ; qu'en particulier, si l'article 69 précité prévoit comme critère principal de sélection l'appréciation de la valeur professionnelle des agents, il ne prévoit pas que cette valeur doive nécessairement être appréciée au cours d'une période probatoire préalable obligatoire à effectuer en qualité de faisant fonction ; qu'au surplus, comme le soutient l'appelant, en l'absence de toute disposition réglementaire organisant l'attribution préalable de tels postes de faisant fonction, la décision discrétionnaire de l'administration de nommer faisant fonction tel candidat plutôt que tel autre, avant de le proposer à l'avancement au tableau devant la commission administrative paritaire, constitue une pratique qui méconnaît le principe d'égalité de traitement des candidats ; que l'administration a ainsi commis, en 1997, 2001, 2002 et 2003, une faute dans le traitement de la candidature de l'appelant ;

Considérant toutefois, et en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les deux critères irréguliers susmentionnés n'ont pas été, non seulement les seuls motifs des refus de la promotion lors des années 1997, 2001, 2002 et 2003 susmentionnées, mais encore les motifs principaux de ce refus ; qu'en effet, l'administration doit être regardée comme ayant à titre principal refusé de nommer l'intéressé à des fonctions de cadre lors du déroulement de sa carrière aux motifs principaux, d'une part, qu'il n'avait exercé tout au long de cette carrière que dans des services de psychiatrie et le plus souvent de nuit, sans montrer sa volonté de travailler dans d'autres fonctions, afin de développer une polyvalence nécessaire au poste d'encadrement recherché et de se mettre à niveau dans l'application de techniques évolutives, d'autre part, qu'il n'a pas manifesté non plus une volonté de s'impliquer dans la gestion participative du centre hospitalier, en ne travaillant notamment pas au sein de groupes de travail infirmiers destinés à l'amélioration du projet de soins infirmiers, alors qu'un tel investissement institutionnel est un critère d'appréciation dans la sélection d'un futur cadre ; qu'à cet égard, il n'est pas établi que l'intéressé aurait subi une discrimination du seul fait de son âge ou de l'ancienneté de l'obtention de son certificat de cadre ; qu'il résulte au contraire de l'instruction qu'il lui est reproché à titre principal, ainsi qu'il a été dit, de ne pas avoir recherché polyvalence et remise à niveau, notamment par des formations au cours de sa carrière ;

Considérant qu'il s'ensuit que les deux motifs susmentionnés, tirés du contenu de son diplôme et de son absence d'expérience de faisant fonction, n'engagent pas la responsabilité de l'administration hospitalière, dès lors que les refus de promotion en litige auraient en tout état de cause été pris pour les motifs précédemment analysés tirés de l'absence de polyvalence et d'investissement institutionnel de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions indemnitaires de l'appelant doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception de prescription quadriennale opposée par la partie intimée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la partie intimée, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à l'appelant la somme qu'il demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'appelant la somme réclamée par la partie intimée au titre de ses frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier de Béziers tendant au remboursement de ses frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Michel A, au centre hospitalier de Béziers et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

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N° 09MA011732


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA01173
Date de la décision : 05/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDOU
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : BONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-07-05;09ma01173 ?
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