Vu la requête, enregistrée le 18 juin 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n°09MA02142, présentée pour M. Ali A, demeurant à La Garde chez Mme B à ..., par Me Jamet-Elzière, avocat ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0901406 du 18 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 30 janvier 2009, par lequel le préfet des Alpes de Haute-Provence a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination ;
2°) d'annuler l'arrêté précité ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes de Haute-Provence de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu l'article 1er de l'arrêté du 27 janvier 2009 qui autorise la Cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret du 7 janvier 2009, situant l'intervention du rapporteur public avant les observations des parties ou de leurs mandataires ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2011 :
- le rapport de Mme Simon, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Chenal-Peter, rapporteur public ;
- et les observations de Me Jamet-Elzière, avocat pour M. Ali A ;
Considérant que, par arrêté du 30 janvier 2009, le préfet des Alpes de Haute-Provence a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A, ressortissant tunisien, et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination ; que M. A interjette appel du jugement en date du 18 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant, en premier lieu, que le second mémoire présenté par le préfet des Alpes de Haute-Provence n'a été enregistré au greffe du Tribunal que le 4 mai 2009, soit après la date de clôture de l'instruction ; que, par suite, le Tribunal n'avait pas à analyser le contenu dudit mémoire mais devait se borner, ainsi qu'il l'a fait à bon droit, à le viser dans son jugement ; que, par ailleurs, les premiers juges ne se sont pas fondés, pour rejeter la requête de M. A, sur des éléments contenus dans ce mémoire par lequel d'ailleurs le préfet s'est borné à informer le Tribunal de ce que le mémoire en réplique de M. A ne contenait aucun nouvel élément de nature à modifier sa position ;
Considérant, en second lieu, que M. A a soutenu devant le Tribunal qu'il remplissait les conditions légales et conventionnelles pour se voir délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de salarié ; que, dans ces conditions, les premiers juges ont pu, sans erreur de droit et conformément à leur office, s'emparer des dispositions applicables tant de l'accord franco-tunisien que du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour examiner le bien fondé de ce moyen ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Considérant, en premier lieu, si l'arrêté litigieux fait uniquement état de la demande de titre de séjour présenté par l'employeur potentiel de M. A en omettant d'indiquer que son conseil avait également déposé une demande, il ressort des pièces du dossier que le préfet des Alpes de Haute-Provence a procédé à l'examen de l'ensemble de la situation de droit et de fait de l'appelant au regard du fondement de sa demande ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'erreur de droit manque en fait et doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 susvisé : Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable et portant la mention salarié (...) ; qu'aux termes de l'article 11 du même accord : Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation ; qu'aux termes de l'article L.311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour compétences et talents sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, M. A est entré en France sans être muni du visa d'une durée supérieure à trois mois requis par les dispositions précitées de l'article L.311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, d'autre part, il n'était pas titulaire d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes ; que ces motifs, qui figurent parmi ceux que le préfet des Alpes de Haute-Provence a retenus pour lui refuser la délivrance de la carte de séjour temporaire qu'il sollicitait en qualité de salarié, pouvaient légalement justifier, à eux seuls, à supposer même que le motif tenant à la situation de l'emploi n'ait pas été valablement opposé à l'intéressé, ledit refus de séjour ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L.311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ; et qu'aux termes de l'article R.313-21 du même code : Pour l'application du 7ºde l'article L.313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. ;
Considérant que si M. A fait valoir qu'il réside sur le sol national depuis plus de cinq années, qu'il a été marié avec une ressortissante française, qu'il n'a plus de famille en Tunisie, à l'exception de son père avec lequel il entretient des rapports distants, et que trois de ses soeurs et deux de ses frères habitent en France et ont des enfants, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, célibataire et sans enfant était âgé de trente-six ans à la date de l'arrêté contesté et n'est arrivé en France qu'à l'âge de trente et un ans ; que, dans ses conditions, le préfet des Alpes de Haute-Provence, en prenant l'arrêté litigieux, n'a, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, ni commis d'erreur manifeste en appréciant les conséquences de son arrêté sur sa situation, ni porté une atteinte au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et n'a, par suite, méconnu ni les dispositions précitées de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations précitées de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en quatrième lieu, que si un apiculteur souhaite embaucher dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée M. A en raison de ses compétences particulières il n'est pas établi par les pièces versées au dossier que ledit employeur a effectué en vain des recherches sérieuses sur le marché national de l'emploi dans l'année précédant l'édiction de l'arrêté querellé ; que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit dés lors être écarté ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; qu'aux termes de l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Considérant que M. A n'établit pas que le préfet des Alpes de Haute-Provence aurait méconnu les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en se bornant à faire état de la présence de sa fratrie sur le sol national ;
Considérant, en dernier lieu, que si le préfet des Alpes de Haute-Provence a entaché son arrêté d'inexactitude matérielle s'agissant de la date d'entrée sur le sol national de l'appelant, il ressort des pièces du dossier qu'il aurait pris la même décision s'il n'avait commis cette erreur de fait ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2009 ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. ;
Considérant que le présent arrêt qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu par suite de rejeter les conclusions susvisées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à M. A la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. Ali A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes de Haute-Provence.
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