Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2008, présentée pour la SA SUBRA RF, dont le siège est au 55 avenue de la Porte de France à Bourg Madame (66760), par la SCP Godin Citron et Associes ;
La SA SUBRA RF demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0407077 du 22 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes réclamés à la SA Jumex au titre de la période de janvier 1997 à décembre 1999 et de l'amende fiscale prévue par l'article 1740 ter du code général des impôts ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du vice-président du Conseil d'Etat du 27 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 février 2011 :
- le rapport de Mme Haasser, rapporteur,
- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;
Considérant que la SA Jumex, société de droit andorran exerçant une activité d'import-export de matériel hi-fi, dont le représentant fiscal en France est la SA SUBRA sise à Bourg Madame, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité en matière de TVA, à la suite de laquelle l'administration a remis en cause le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 262-ter-I du code général des impôts pour des livraisons intracommunautaires de biens intervenues au cours des années 1997, 1998 et 1999, au motif que la preuve n'avait pas été apportée de l'expédition réelle de ces marchandises, acquises en France, de France en Espagne ; qu'en outre, elle lui a appliqué l'amende prévue par l'article 1740 ter alinéa 2 du code général des impôts alors en vigueur pour des opérations déclarées à la TVA en France, mais pour lesquelles aucune justification des flux physiques d'entrée et de sortie de France des marchandises, tant pour les achats que pour les livraisons intracommunautaires, n'avait été apportée ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que la Société SUBRA soutient avoir demandé au juge, dans sa requête de première instance, de constater qu'un grand nombre d'opérations ne rentrait pas dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée française, au motif que les marchandises n'avaient fait l'objet d'aucune livraison en France avant leur livraison intracommunautaire directement dans un autre Etat membre, lequel n'aurait pas répondu audit moyen ; que ce moyen vise les transactions qualifiées de fictives par l'administration et le juge de première instance ; qu'il y a été répondu dans le paragraphe du jugement concernant les pénalités, indiquant que le montant desdites opérations n'a pas été soumis à la TVA ; que seule l'amende de l'article 1740 ter du code a été appliquée ; que le jugement est dès lors régulier ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Sur la réalité des exportations :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa du 1° du paragraphe I de l'article 262 ter du code général des impôts, sont exonérées de TVA, les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté économique européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie ; qu'aux termes de l'article 289 du même code : I. Tout assujetti doit délivrer une facture ou un document en tenant lieu pour les biens livrés ou les services rendus à un autre assujetti ou à une personne morale non assujettie...II. La facture ou le document en tenant lieu doit faire apparaître :...2° Les numéros d'identification à la taxe sur la valeur ajoutée du vendeur et de l'acquéreur pour les livraisons désignées au I de l'article 262 ter et la mention Exonération de TVA , art . 262 ter I du code général des impôts ... ; qu'il appartient au redevable de la TVA, qui se prévaut de cette exonération, d'apporter la preuve, par tous moyens, pour chaque livraison, que les biens ont été effectivement expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne ; que cette preuve, ainsi que l'admet d'ailleurs une instruction du 28 mars 1997 n° 3 A-3-97 invoquée par la société requérante, est appréciée au cas par cas et résulte de différents documents constituant un faisceau d'indices de la réalité de la livraison, plus rarement d'un seul document ;
Considérant que l'administration a remis en cause le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 262-ter-I du code général des impôts pour des opérations concernant des achats en France justifiés mais dont la livraison intracommunautaire (ou l'exportation hors de France vers les clients étrangers, notamment espagnols) a été regardée comme non justifiée ; qu'elle fait valoir que les documents produits par la requérante, de surcroît non étayés par la comptabilité dont le défaut avait été constaté par procès-verbal du 28 juillet 2000, ne sont pas de nature à apporter cette preuve ; qu'en effet, la copie de la déclaration d'échange de biens atteste seulement de la déclaration formelle des acquisitions intracommunautaires réalisées par la société Prisunic auprès de la Société Jumex, que les copies de factures portant le cachet et la signature du client sans mentionner de date attestent seulement de la réception de la facture et que les copies des avis de crédit fournies en réponse attestent simplement du règlement des clients à la Société Jumex et valident uniquement la transaction financière ; qu'il n'a été joint à la réclamation aucune lettre CMR attestant de la réalité de la livraison aux clients mentionnés sur les factures alors que les destinataires doivent en avoir en leur possession ; que la requérante a fourni des attestations de réception des biens par le client établies en janvier 2001, soit postérieurement à la confirmation des redressements du 22 décembre 2000 par fax, lesquelles se bornent à l'énumération des factures ; qu'à cet égard, il ne lui est pas reproché d'avoir fourni lesdits documents postérieurement au contrôle, mais d'avoir fourni des documents établis postérieurement à celui-ci, en janvier 2001 s'agissant des attestations de réception de marchandises censées avoir été reçues au cours des années contrôlées de 1997 à 1999, documents qui auraient dû être établis au fur et à mesure de la réception des biens et non corroborés par des pièces comptables ; qu'en outre, aucune preuve du transport, par exemple facture du transporteur, bon de commande ou autre correspondance précisant le lieu d'expédition n'est produite ; que le circuit réel physique des marchandises n'est donc pas établi ; qu'en l'absence de justification de la réception des marchandises par le client, le redressement ne peut qu'être confirmé, sans que soient violés les principes communautaires de proportionnalité, de neutralité, de libre circulation des marchandises et de sécurité juridique ;
Considérant que la Société SUBRA RF n'apporte aucune réponse sur les faits énoncés ci-dessus ; qu'il résulte de ce qui précède que la Société SUBRA RF doit être regardée comme n'établissant pas la livraison hors de France des marchandises en cause ; que le service a pu à bon droit taxer lesdites opérations à la TVA pour des montants de 23 630 F en 1997, 44 042 F en 1998 et 33 424 F en 1999 ; qu'elle n'est dès lors fondée ni à demander la décharge de l'imposition contestée, ni à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement en date du 22 janvier 2008 du Tribunal administratif de Montpellier ;
Considérant que si la Société SUBRA fait valoir que certaines opérations seraient exonérées de la TVA française par application des dispositions de l'article 262-II ter 3° du code général des impôts et de la 6ème directive, les opérations ainsi citées ne sont pas celles soumises à TVA par le vérificateur, mais celles ayant donné lieu à application de l'amende de l'article 1740 ter alinéa 2 du code général des impôts, actuellement codifié sous l'article 1737 du code général des impôts ;
Sur l'amende de l'article 1740 ter du code général des impôts :
Considérant que ladite amende a été motivée par l'absence de justification des flux physiques d'achats et de ventes de marchandises concernant des factures pourtant déclarées à la TVA en France, visant des biens provenant de fournisseurs en Espagne et expédiés à des clients en Espagne, sans qu'aucun transit effectif en France justifiant leur déclaration en TVA ait été démontré ; que ces opérations ont été qualifiées de fictives par le service ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1740 ter alinéa 2 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 85 de la loi n° 97-1269 du décembre 1997 applicable à compter du 1er janvier 1998 : Lorsqu'il est établi qu'une personne a délivré une facture ne correspondant pas à une livraison ou à une prestation de service réelle, elle est redevable d'une amende fiscale égale à 50 % du montant de la facture ; que c'est à juste titre que ladite amende a été mise à la charge de la Sté Jumex par l'avis de mise en recouvrement du 7 février 2001 adressé à la Société SUBRA ;
Considérant que le juge de l'impôt, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués par l'administration, décide, dans chaque cas, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir l'amende litigieuse ou d'en prononcer la décharge, s'il estime que le contribuable ne s'est pas rendu coupable des faits précités ; qu'il dispose ainsi d'un pouvoir de pleine juridiction conforme aux stipulations du § 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lesquelles n'impliquent pas, alors même que le législateur a retenu un taux unique pour la majoration en cause, que le juge puisse moduler le taux de cette dernière en lui substituant un taux inférieur à 50 % ; que la pénalité n'enfreint pas davantage le principe de présomption d'innocence visé à l'article 6-2 de la même convention dès lors qu'il est toujours loisible à la personne accusée de se défendre devant un tribunal conforme aux autres stipulations de la convention ; que dans ces conditions la Société SUBRA n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article 1740 ter alinéa 2 du code général des impôts seraient incompatibles avec les stipulations du § 1 de l'article 6 de ladite convention ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Société SUBRA RF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la Société SUBRA RF est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA SUBRA RF et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
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N° 08MA01772