Vu la requête, enregistrée le 14 février 2008, présentée pour Mme Tamara A née B demeurant ... par Me Belzic ; Mme B demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0500885 du 3 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande de décharge du complément d'impôt sur le revenu qui lui a été assigné au titre de l'année 1998 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions demeurant en litige, après sursis à exécution du jugement attaqué, et de condamner l'Etat à lui payer une somme de 4 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales, ainsi que la convention fiscale du 14 avril 1997 signée entre la Lettonie et la France ;
Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du vice président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2010,
- le rapport de Mme Haasser, rapporteur ;
- les conclusions de M. Emmanuelli, rapporteur public ;
- et les observations de Me Belzic pour Mme B ;
Considérant que Mme B relève appel du jugement du 3 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu qui lui a été assignée au titre de l'année 1998 ; qu'elle demande à n'être assujettie en France pour ladite année qu'à des obligations fiscales restreintes portant sur ses seuls revenus de source française, à savoir ceux imposés dans la catégorie des BIC (bénéfices industriels et commerciaux) et des RCM (revenus de capitaux mobiliers) ;
Considérant que les moyens invoqués dans le mémoire présenté pour Mme B le 23 décembre 2009 ne peuvent être qualifiés de nouveaux dès lors qu'ils avaient déjà été exposés ; que les pièces produites à cette occasion sont identiques à celles produites lors de la procédure de référé suspension devant la Cour de céans, qui a donné lieu à un arrêt de la présente Cour du 11 juin 2008 puis à un arrêt du Conseil d'Etat du 10 décembre 2008 ; qu'il n'y a pas lieu dès lors de donner suite à la demande de renvoi sollicitée par l'administration dans son mémoire du 24 décembre 2009 ;
Sur le principe de l'assujettissement à l'impôt en France de Mme B au titre de l'année 1998 seule en litige :
Considérant qu'aux termes de l'article 4 B-1 du code général des impôts : Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France ... a) les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b) celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non...c) celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques... ; que le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, et que le lieu de séjour principal, qui est le pays où il séjourne plus de six mois par an, ne déterminera son domicile fiscal que dans l'hypothèse où l'intéressé ne dispose pas de foyer ;
Considérant qu'en 1998, Mme B était célibataire sans enfant ; que sa famille résidait à Riga où elle-même disposait d'un appartement acquis en 1995 et revendu en 2002 ; qu'elle exerçait depuis le 10 janvier 1998, pour un salaire de 2 600 $ par mois, une activité professionnelle de traductrice interprète dans la Société Elegant Capital dirigée par son père, qui en a attesté par un courrier adressé le 14 octobre 1998 au préfet des Alpes-Maritimes auquel se réfère expressément le service dans sa notification de redressements ; que ces éléments, joints au fait que l'intéressée disposait en Lettonie d'un véhicule personnel dont la carte grise et le certificat d'assurance sont fournis, était enregistrée auprès des services fiscaux lettons, bénéficiait du système de soins grâce à sa carte nationale fournie, enfin disposait d'un compte bancaire à la Banque Baltique de Riga et d'un compte d'investissement auprès de la Banque de Commerce de Riga, démontrent que son foyer fiscal se trouvait en 1998 en Lettonie ;
Considérant que l'administration soutient que le lieu de séjour principal de Mme B se trouvait en France durant l'année 1998 ; qu'elle est chargée de la preuve de cette affirmation ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme B a suivi en 1998 respectivement à Bordeaux, Paris et Nice Sophia Antipolis des cursus universitaires au terme lesquels elle a obtenu le diplôme correspondant, en juin 1998 à Bordeaux et en août 1998 à Paris ; que l'administration n'établit pas que, comme elle l'allègue, lesdits cursus nécessitaient une présence sur place de 15 heures par semaine, soit plus de six mois dans l'année, alors que la requérante affirme, sans être contredite, que les cours et examens étaient spécialement aménagés pour les étudiants étrangers inscrits en tant qu'auditeurs libres, et pouvaient être regroupés sur quelques brèves périodes de temps ; que la location, dès novembre 1997, d'un appartement à Pessac ne démontre pas un séjour principal en France, alors que Mme B affirme qu'elle l'occupait temporairement lors de ses brefs séjours à Bordeaux, et que la disposition de cette adresse lui facilitait l'obtention des titres de séjour ; que le bien acquis à Cap Ferret a été immédiatement mis en location par elle, et ses produits d'ailleurs imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux par le vérificateur ; qu'elle n'y séjournait donc pas ; que l'administration n'apporte aucune contradiction à l'affirmation que la villa d'Antibes constituait une résidence secondaire et non la résidence principale de Mme B durant l'année 1998 ; que si elle a ouvert en France successivement deux comptes bancaires, c'était pour faciliter ses acquisitions immobilières ; que si le service invoque l'existence d'opérations sur ces comptes attestant de sa présence physique en France ou des adresses d'envoi des relevés situées sur le territoire national, il n'en précise ni la nature, ni la fréquence ;
Considérant qu'il suit de là que l'administration n'établit pas que Mme B, qui a son foyer en Lettonie, aurait eu en France le lieu de son séjour principal en 1998 ; que la requérante n'était donc pas passible de l'impôt sur le revenu en France pour ses revenus de source étrangère, et doit être déchargée des impositions et pénalités auxquelles le service l'a assujettie dans la catégorie des traitements et salaires et des revenus d'origine indéterminée au titre de l'année 1998 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu de condamner l'Etat à verser à Mme B la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle devant la Cour et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu assigné à Mme A née B au titre de l'année 1998 est réduite d'une somme de 157 248 F au titre des salaires et d'une somme de 5 321 905 F au titre des revenus d'origine indéterminée.
Article 2 : Mme A née B est déchargée des droits et pénalités correspondant à la réduction en base visée à l'article 1er.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A née B la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative .
Article 4 : Le jugement du 3 janvier 2008 du tribunal administratif de Nice est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Tamara A née B et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
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N° 08MA00695 2