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17/01/2008 | FRANCE | N°06MA01630

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 17 janvier 2008, 06MA01630


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 08 juin 2006 sous le nppppppppppp, présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE (direction générale des douanes et des droits indirects) ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0206001 en date du 13 avril 2006 par lequel le tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser à Mme X, après déduction de la somme de 76 000 euros précédemment perçue en vertu de l'ordonnance du 1er juill

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Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 08 juin 2006 sous le nppppppppppp, présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE (direction générale des douanes et des droits indirects) ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0206001 en date du 13 avril 2006 par lequel le tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser à Mme X, après déduction de la somme de 76 000 euros précédemment perçue en vertu de l'ordonnance du 1er juillet 2003, la somme de 12 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 août 2002 ;
……………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le décret n° 63-1104 du 30 octobre 1963 relatif au régime d'allocations viagères des gérants de débits de tabac ;

Vu le code de justice administrative ;
Vu le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 9903597, 9903608, 9904856 du 19 novembre 1999, ensemble l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Marseille n° 00MA00486 du 22 janvier 2002 ;

Vu l'ordonnance en date du 1er juillet 2003 par laquelle le président de la 7ème chambre de la Cour administrative d'appel de Marseille a ordonné à l'Etat de verser à Mme une provision de 76 000 euros ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 décembre 2007 :

- le rapport de M. Duchon-Doris, président assesseur ;
- les observations de Me Milhe-Colombain, avocat, pour Mme ;
- et les conclusions de Mme Steck-Andrez, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement, ont fait l'objet d'une instruction commune et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu en conséquence de les joindre afin qu'il y soit statué par un même arrêt ;

Considérant qu'à la suite d'un jugement du tribunal correctionnel de Marseille du 15 septembre 1998 condamnant M. pour recel de tabac volé, l'administration, après l'avoir à compter du 21 novembre 1996 suspendu, a résilié définitivement le contrat de gérance du débit de tabac n° 8400112V dont il bénéficiait à Cavaillon ; que par une décision du 9 mars 1999, le directeur régional des douanes et des droits indirects de Provence a refusé la demande de Mme tendant à la permutation dudit contrat de gérance avec son époux ; que par un jugement en date du 19 novembre 1999, devenu définitif, cette décision a été annulée par le Tribunal administratif de Marseille au motif que « la résiliation du traité de gérance opposé à M. ne pouvait constituer pour l'administration un motif légal de refus d'agrément à Mme » ; qu'à la suite d'un nouvel examen de la demande d'agrément sollicité par Mme , celle-ci a été finalement agréée en qualité de gérante du débit de tabac susvisé à compter du 1er juin 2002 ; que Mme a déposé sans succès le 7 août 2002 auprès de l'administration des douanes un recours préalable en indemnisation pour le préjudice financier qu'elle a subi à la suite de la décision de refus d'agrément ; que par ordonnance du 1er juillet 2002, le juge des référés lui a accordé une provision de 76 000 euros au titre de ce préjudice ; que par jugement en date du 13 avril 2006, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser à Mme une somme de 12 000 euros supplémentaires portant intérêts au taux légal à compter du 7 août 2002 ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande l'annulation de ce jugement ; que Mme en demande la réformation en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande d'indemnisation à hauteur de la somme totale de 286 226,47 euros ;
Sur le droit à indemnisation :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, par jugement du 19 novembre 1999 devenu définitif, le Tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 9 mars 1999 par laquelle le directeur régional des douanes et des droits indirects de Provence a refusé la demande d'agrément de Mme ; que si le jugement précité censure le motif tiré de la résiliation du traité de gérance opposé à Mme , il ne résulte pas de l'instruction ni même n'est soutenu que le refus du ministre aurait pu être légalement fondé sur un autre motif ; qu'il résulte au contraire de l'instruction qu'à la suite de l'annulation prononcée par le tribunal, un nouvel examen de la demande d'agrément déposée par Mme a permis à l'administration de constater que les conditions réglementaires d'agrément étaient remplies et de lui donner satisfaction ; que par suite, Mme est fondée à demander l'indemnisation du préjudice résultant de l'illégalité du refus qui lui a été opposé le 9 mars 1999 et de ce que l'agrément ne lui a été finalement accordé que le 1er juin 2002 ;

Sur les préjudices indemnisables :

En ce qui concerne la perte de bénéfice résultant de la vente de tabac :

Considérant qu'aux termes de l'article 570 du code général des impôts : « 1. Selon les modalités fixées par voie réglementaire, tout fournisseur est soumis aux obligations suivantes : (…) 3° Consentir à chaque débitant une remise dont les taux sont fixés par arrêté pour la France continentale (…). Cette remise comprend l'ensemble des avantages directs ou indirects qui lui sont alloués (…) » ; que le taux de cette remise a été fixé à 8 % par un arrêté du 21 septembre 1976 ;

Considérant que durant la période du 9 mars 1999 au 1er juin 2002, la décision du 9 mars 1999 a eu pour effet de priver Mme des commissions qui auraient dû lui être versées sur les ventes de tabac et qu'elle est en droit de demander l'indemnisation de la perte de bénéfice net correspondant ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 570 du code général des impôts que la rémunération du débitant de tabac est égale à la remise brute de 8 % sur son chiffre d'affaires de vente de tabac de laquelle il convient de déduire d'une part une retenue de 2 points correspondant à la redevance due par le débitant à l'administration des douanes en contrepartie de la gérance qui lui est concédée et la cotisation au régime d'allocation viagère des gérants des débits de tabac et d'autre part les charges pesant sur cette activité et qui constituent une fraction des charges que doit supporter le commerce de l'intéressé dans sa globalité ; que si, sur ce dernier point, l'administration fait valoir que les professionnels estiment généralement leur bénéfice net après charges à 3, 4 % du chiffre d'affaires tabac, Mme démontre, sans être contredite, qu'eu égard aux caractéristiques de son commerce, peu de charges spécifiques relatives notamment aux locaux et au personnel sont induites par l'activité de débit de tabac ; que, par ailleurs, pour procéder à l'évaluation de la perte de bénéfice net sur vente de tabacs, il y a lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, de se référer non pas aux dernières années de gestion de M. antérieures à 1996 et trop anciennes au regard des fluctuations importantes du marché, mais à l'année de gestion effective effectuée par la requérante à compter du 1er juin 2002 ; qu'en tenant compte de l'ensemble de ces éléments, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par Mme au titre de la perte de bénéfice net sur les ventes de tabac en le fixant à la somme de 70.000 euros ;

En ce qui concerne le préjudice commercial :

Considérant en premier lieu que la circonstance qu'il y ait lieu de distinguer juridiquement le fonds de commerce et le débit de tabac, le premier étant régi par le droit commercial et le second, du fait du monopole de l'Etat, étant concédé par contrat administratif, ne fait pas obstacle à ce que le débitant de tabac qui a annexé un fonds de commerce à son activité soit indemnisé, le cas échéant, des pertes de bénéfices subies par son fonds de commerce résultant de la baisse de son attractivité du fait de l'absence de la vente de tabac durant plus de trois années ; que par suite le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu ce préjudice au titre des préjudices indemnisables supportés par Mme ;

Considérant en deuxième lieu que si pour contester l'évaluation de son préjudice à ce titre par les premiers juges à hauteur de la somme de 34.000 euros et demander qu'elle soit portée à la somme de 86 226,47 euros, Mme fait valoir que son chiffre d'affaires, hors commissions tabac, s'est accru entre l'exercice 2001, année sans contrat de gérance du débit de tabac, et l'exercice 2003, première année pleine avec contrat de gérance du débit de tabac, de plus de 137 376 euros, elle ne démontre pas, par les documents qu'elle produit, que cet accroissement a pour seule conséquence l'agrément dont elle a bénéficié à compter du 1er juin 2002 ; qu'il sera fait par suite une juste appréciation de ce chef de préjudice en lui allouant une somme de 50 000 euros ;

En ce qui concerne le préjudice né des troubles dans les conditions d'existence :

Considérant que la somme de 2 000 euros constitue une juste appréciation du préjudice né des troubles dans les conditions d'existence de Mme engendrés d'une part par la durée durant laquelle elle a été illégalement privée d'un titre de gérance de débit de tabac et, d'autre part, par les difficultés financières qu'a dû affronter son fonds de commerce ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer sur ce point le jugement de première instance ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le montant total des dommages-intérêts que Mme est fondée à réclamer à l'Etat en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la décision illégale du 9 mars 1999 s'élève au total à la somme de 122 000 euros ;

Sur les intérêts :

Considérant qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, les sommes allouées à Mme doivent porter intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'administration de la demande préalable d'indemnisation du 7 août 2002 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à verser à Mme une somme de 1500 euros au titre des frais supportés par elle et non compris dans les dépens ;


D E C I D E :

Article 1er : L'Etat est condamné à verser à Mme , déduction faite de la somme précédemment perçue en vertu de l'ordonnance du 1er juillet 2003, soit 76 000 euros, une somme supplémentaire de 46 000 euros (quarante six mille euros) laquelle portera intérêt au taux légal à compter du 7 août 2002.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à Mme une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La requête du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et le surplus des conclusions de la requête de Mme sont rejetés. X
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Corinne et au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI.
N° 06MA01630 - 06MA01730 2

CL


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA01630
Date de la décision : 17/01/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe DUCHON-DORIS
Rapporteur public ?: Mme STECK-ANDREZ
Avocat(s) : MILHE-COLOMBAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-01-17;06ma01630 ?
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