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05/02/2007 | FRANCE | N°03MA02419

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 05 février 2007, 03MA02419


Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2003 pour la société SARL AGENCE DU COURS, représentée par son gérant en exercice, dont le siège est 44 cours Napoléon à Ajaccio (20000), par Me Muscatelli ; la SARL AGENCE DU COURS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0200204 en date du 16 octobre 2003, notifié le 21 octobre 2003, par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à condamner la commune d'Ajaccio à lui verser une indemnité de 190 071,23 francs TTC (28 976,25 euros) et à supporter les dépens de l'instance, en raison du non

-paiement de divers mémoires et de prestations supplémentaires effectuées ...

Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2003 pour la société SARL AGENCE DU COURS, représentée par son gérant en exercice, dont le siège est 44 cours Napoléon à Ajaccio (20000), par Me Muscatelli ; la SARL AGENCE DU COURS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0200204 en date du 16 octobre 2003, notifié le 21 octobre 2003, par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à condamner la commune d'Ajaccio à lui verser une indemnité de 190 071,23 francs TTC (28 976,25 euros) et à supporter les dépens de l'instance, en raison du non-paiement de divers mémoires et de prestations supplémentaires effectuées dans le cadre du marché négocié n°24-95 ;

2°) de condamner ladite commune d'Ajaccio à lui payer le solde encore dû de 13 745,72 euros, augmenté des intérêts au taux légal et la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

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Vu la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 modifiée ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code monétaire et financier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2007 ;

- le rapport de M. Brossier, rapporteur ;

- les observations de Me Bras pour la commune d'Ajaccio ;

- et les conclusions de Mlle Josset, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société appelante SARL AGENCE DU COURS a passé avec la ville d'Ajaccio un marché négocié n°24-95, signé le 5 décembre 1995 et transmis en préfecture le 14 du même mois, relatif à la commercialisation de locaux des zones artisanales et commerciales du port de plaisance Charles Ornano ; qu'elle demande à être indemnisée au titre de divers mémoires d'honoraires non réglés selon elle et de prestations supplémentaires effectuées lors de l'exécution dudit marché ;

Sur les fins de non-recevoir soulevées par la commune intimée :

Considérant, en premier lieu, que la commune intimée oppose à la demande une fin de non-recevoir tirée de ce que la créance litigieuse a été cédée, en cession dite «Dailly», par la société SARL AGENCE DU COURS à l'établissement Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprise (CEPME) et qu'ainsi cette société ne justifiait pas d'un intérêt à réclamer en justice le solde non payé de la créance litigieuse ; que cette fin de non-recevoir peut être soulevée pour la première fois en appel, s'agissant d'une exception d'ordre public ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 2 janvier 1981, dite loi «Dailly», codifié à l'article L.313-23 du code monétaire et financier: «Tout crédit qu'un établissement de crédit consent à une personne morale de droit privé ou de droit public, ou à une personne physique dans l'exercice par celle-ci de son activité professionnelle, peut donner lieu au profit de cet établissement, par la seule remise d'un bordereau, à la cession ou au nantissement par le bénéficiaire du crédit, de toute créance que celui-ci peut détenir sur un tiers, personne morale de droit public ou de droit privé ou personne physique dans l'exercice par celle-ci de son activité professionnelle (...)» ; qu'aux termes de l'article L.313-24 du même code : «Même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation d'un prix, la cession de créance transfère au cessionnaire la propriété de la créance cédée. Sauf convention contraire, le signataire de l'acte de cession ou de nantissement est garant solidaire du paiement des créances cédées ou données en nantissement» ; que selon l'article 4 de ladite loi, codifié à l'article L.313-27 dudit code monétaire et financier : «La cession (...) prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date portée sur le bordereau. A compter de cette date, le client de l'établissement de crédit bénéficiaire du bordereau ne peut, sans l'accord de cet établissement, modifier l'étendue des droits attachés aux créances représentées par ce bordereau» ; qu'en vertu de l'article 5 de ladite loi, à l'article L.313-28 dudit: «L'établissement de crédit peut à tout moment, interdire au débiteur de la créance cédée (...) de payer entre les mains du signataire du bordereau. A compter de cette notification, dont les formes sont fixées par le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 13, le débiteur ne se libère valablement qu'auprès de l'établissement de crédit» ; qu'aux termes enfin de l'article 6 de la même loi dont les dispositions ont été codifiés à l'article L.313-29 du même code: Sur la demande du bénéficiaire du bordereau, le débiteur peut s'engager à le payer directement : cet engagement est constaté, à peine de nullité, par un écrit intitulé : Acte d'acceptation de la cession ou du nantissement d'une créance professionnelle. / Dans ce cas, le débiteur ne peut opposer à l'établissement de crédit les exceptions fondées sur ses rapports personnels avec le signataire du bordereau, à moins que l'établissement de crédit, en acquérant ou en recevant la créance, n'ait agi sciemment au détriment du débiteur. ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la créance de 597 118,70 francs, correspondant au montant du marché, a été cédée en totalité à l‘établissement CEPME et que cette cession a été notifiée au comptable public le 14 novembre 1996 ; que la commune débitrice n'ayant toutefois pas formellement accepté cette cession par l'acte d'acceptation prévu par l'article 6 précité, la seule notification au comptable de ladite cession n'a pu ôter à la société cédante SARL AGENCE DU COURS, qui conservait son compte bancaire auprès de l‘établissement CEPME, son intérêt à agir en justice à fin de recouvrer le solde non versé du marché de 597 118,70 francs qu'elle estime lui être dû ; qu'en effet, le transfert de propriété prévu par l'article L.313-24 précité ne fait pas obstacle à ce que le créancier saisisse le juge du contrat à fin d'obtenir le paiement de sa créance, dès lors qu'il reste le cocontractant de la commune et qu'il a intérêt à ce que cette commune paie sa dette sur le compte bancaire ouvert à son nom auprès du CEPME ;

Considérant, en second lieu, que la commune intimée invoque la forclusion de l'appelante, dès lors qu'elle n'aurait pas présenté sa demande indemnitaire dans le délai contractuel de trente jours à compter de sa connaissance du différend et qu'elle n'aurait pas attaqué, dans le délai de recours contentieux de deux mois, les deux décisions implicites rejetant sa demande ; que les stipulations de l'article 4.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché renvoient au cahier des clauses administratives générales, applicable aux marchés publics de fournitures courantes et de services et approuvé par le décret n° 77-699 du 27 mai 1977 modifié, dont l'article 34, intitulé «différend avec la personne responsable du marché», dispose : «34.1. Tout différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet de la part du titulaire d'un mémoire de réclamation qui doit être communiqué à la personne responsable du marché dans le délai de trente jours compté à partir du jour où le différend est apparu. 34.2. La personne publique dispose d'un délai de deux mois compté à partir de la réception du mémoire de réclamation pour notifier sa décision. L'absence de décision dans ce délai vaut rejet de la réclamation.» ; qu'aucun élément versé au dossier ne permet d'établir sérieusement la date de naissance du différend entre les deux cocontractants qui a fait l'objet d'une première réclamation de la société reçue le 16 juillet 1999 selon la commune ; qu'en l'absence de réponse de la commune, la société a réitéré sa réclamation le 5 novembre 2001 ; qu'aucune tardiveté ne peut toutefois lui être opposée, dès lors que le délai de recours contentieux de deux mois ne court pas, en matière de plein contentieux, à l'encontre des décisions implicites de rejet, en vertu de l'article R.421-3 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune d'Ajaccio n'est pas fondée à soutenir que les prétentions indemnitaires de la société appelante seraient irrecevables ;

Sur la responsabilité :

Considérant que l'appelante, après le rejet par le Tribunal administratif de Bastia de sa demande de paiement de la somme de 190 071,23 francs TTC (28.976,25 euros) au titre de divers mémoires d'honoraires non réglés et de prestations supplémentaires effectuées lors de l'exécution dudit marché, a ramené devant la Cour ses prétentions à hauteur de 13 745,72 euros ; qu'il résulte de l'instruction que le marché public de prestations de service dont s'agit prévoyait une rémunération basée sur le taux de 5% du montant des transactions effectuées, pour une somme globale maximale de 597 118,70 francs TTC ; qu'aucun avenant n'a été signé augmentant cette rémunération maximale ; qu'il ressort des pièces versées au dossier par le trésorier payeur général, communiquées le 3 avril 2006, que les sommes de 59 690,07 francs (mémoire n°1), de 321.709,26 francs (mémoires n° 2 à 14) et de 185.243,38 francs (mémoires n° 15,17, 20 et 22) ont été réglées respectivement les 26 avril 1996, 7 et 24 octobre 1997, pour un total de 566 643,34 francs TTC ; que compte tenu du montant maximal susmentionné de 597 118,70 francs TTC, le solde restant dû réclamé au titre des mémoires n°16, 18, 19 et 21 ne peut être supérieur à la somme de 30 475,36 francs TTC (4.645,94 euros TTC) ; que la commune, qui soutient sans l'établir avoir versé un montant total de 626 638,30 francs, ne démontre pas avoir réglé les mémoires n°16, 18, 19 et 21 qui lui ont été adressés ; que, dans ces conditions, la société appelante est fondée à demander à la Cour d'annuler le jugement attaqué et de condamner la commune d'Ajaccio à lui verser la somme de 30 475,36 francs TTC (4 645,94 euros TTC) au titre du solde du marché susmentionné ;

Sur les intérêts au taux légal :

Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article 1153 du code civil, d'augmenter cette somme des intérêts au taux légal à compter du 18 décembre 2003, date de leur première demande ;

Sur les frais exposés par les parties et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle au remboursement à la commune d'Ajaccio, partie perdante, des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société appelante tendant au remboursement de ses frais exposés et non compris dans les dépens, pour un montant de 1 500 euros ;

DECIDE

Article 1er: Le jugement attaqué du Tribunal administratif de Bastia en date du 16 octobre 2003 est annulé.

Article 2 : La commune d'Ajaccio est condamnée à verser à la société SARL AGENCE DU COURS l'indemnité de 4 645,94 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 18 décembre 2003.

Article 3 : La commune d'Ajaccio versera à la société SARL AGENCE DU COURS la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris les dépens.

Article 4 : Le surplus de la requête n°04MA02419 de la société SARL AGENCE DU COURS est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune d'Ajaccio tendant au remboursement de ses frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société SARL AGENCE DU COURS, à la commune d'Ajaccio et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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N°0302419


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 03MA02419
Date de la décision : 05/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Melle JOSSET
Avocat(s) : CABINET MUSCATELLI CRETY MERIDJEN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2007-02-05;03ma02419 ?
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