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06/11/2006 | FRANCE | N°04MA00704

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 06 novembre 2006, 04MA00704


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 29 mars 2004 sous le n° 04MA00704, présentée par Me Voisin-Moncho, avocat, pour M. André X élisant domicile ... ;

Il demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement du 28 novembre 2003, notifié le 30 janvier 2004, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Office public d'habitations à loyer modéré de Nice et des Alpes-Maritimes (OPAM) à lui verser le solde d'un montant d'honoraires de 118.196, 20 F, augmenté des intérêts au t

aux légal, relatifs au marché d'architecture et d'ingénierie signé le 2 mars ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 29 mars 2004 sous le n° 04MA00704, présentée par Me Voisin-Moncho, avocat, pour M. André X élisant domicile ... ;

Il demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement du 28 novembre 2003, notifié le 30 janvier 2004, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Office public d'habitations à loyer modéré de Nice et des Alpes-Maritimes (OPAM) à lui verser le solde d'un montant d'honoraires de 118.196, 20 F, augmenté des intérêts au taux légal, relatifs au marché d'architecture et d'ingénierie signé le 2 mars 1983 et portant sur les travaux de voirie et réseaux divers (VRD) de la construction de 105 logements à Biot, ensemble la somme de 20.000 F au titre des frais non compris dans les dépens ;

2) de condamner l'OPAM à lui verser les sommes de 18.018, 89 euros (118.196, 20 F) augmentée de intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 1998, de 10.000 euros compte-tenu de sa résistance abusive et de 5.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

Vu le code civil, notamment son article 1153 ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2006 :

- le rapport de M. Brossier, premier conseiller,

- les observations de Me Voisin-Moncho pour M. X,

- et les conclusions de Mlle Josset, commissaire du gouvernement ;

Considérant que pour la réalisation de la voirie et des réseaux divers (VRD) de l'opération de construction de 105 logements sis chemin de Saint-Julien à Biot, l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Nice et du département des Alpes-Maritimes (OPAM) a passé un marché d'ingénierie et d'architecture n° 83046, rendu exécutoire le 17 février 1983 pour un montant de 307.700, 38 F TTC, avec un groupement conjoint et solidaire composé du cabinet d'architectes Semmel et de M. X, ingénieur ; que ce dernier invoque, d'une part, une facture de 105.545, 50 F TTC en date du 21 octobre 1998 (TVA à 20, 6 %), afférente au paiement d'un « devis-facture » rédigé le 26 septembre 1984 pour la reprise des plans d'exécution d‘un montant de 103.795 F TTC (TVA à 18, 6 %), d'autre part, un montant de 12.650, 70 F lui revenant dans le solde non réglé du marché, soit un total de 118.196, 20 F (18.018, 89 euros) ;

Sur la fin de non recevoir tirée de l'absence de conciliation préalable :

Considérant qu'il est exact que la convention de droit privé du 24 janvier 1984, conclue entre les deux membres susmentionnés du groupement titulaire du marché d'ingénierie et d'architecture du 13 février 1983, stipule que, dans l'hypothèse d'un litige affectant leurs relations de droit privé, l'engagement de toute procédure judiciaire devait être précédée des avis du directeur des services départementaux du ministère de l'équipement et du conseil régional de l'ordre des architectes ; que ces stipulations, qui n'ont toutefois pas été reprises dans le cadre du marché public du 13 février 1983, ne peuvent être opposées à M. X dans le cadre d'un litige de droit public entre ce dernier et l'OPAM intimé ; que la fin de non recevoir ainsi opposée par l'OPAM ne peut dès lors être accueillie ;

Sur l'exception de prescription quadriennale :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 susvisée: «Sont prescrites… toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis… » ; que selon les dispositions de l'article 2 du même texte: « La prescription est interrompue par: toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (…) Tout recours formé devant une juridiction, toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (…) Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption (…) » ;

Considérant que contrairement à ce que soutient l'OPAM, ces dispositions s'appliquent aux créances de nature contractuelle et, par suite, aux deux créances litigieuses de 103.795 F TTC (TVA à 18, 6 %) et 12.650, 70 F ;

En ce qui concerne la créance de 12.650, 70 F :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'architecte Semmel, mandataire commun du groupement titulaire du marché d'ingénierie et d'architecture du 13 février 1983, a démissionné de sa mission avant d'avoir étudié et proposé au maître de l'ouvrage un projet de décompte final ; qu'aucune note définitive des honoraires de la maîtrise d'oeuvre n'a été émise ; qu'aucun des éléments versés au dossier ne permet d'établir le date exacte à laquelle le montant réel des travaux a été connu et, par suite, le montant des honoraires de la maîtrise d'oeuvre a pu être calculé ; que, dans ces conditions, le délai de quatre ans précité n'a pu courir avant que M. André X ne réclame sa part dans le solde dudit marché par sa note de frais et honoraires émise le 21 octobre 1998 et portant sur la somme de 12.650, 70 F ; qu'il s'ensuit que M. André X est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a écarté sa demande afférente à cette somme en retenant l'exception de prescription quadriennale ; qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur cette demande indemnitaire ;

En ce qui concerne la créance de 103.795 F TTC (TVA à 18, 6 %) :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'émission le 26 septembre 1984 du « devis-facture » de 103.795 F (TVA à 18, 6 %), la note d'honoraire correspondante a été rappelée par un courrier du 18 avril 1987 reçue le 21 avril 1987 ; que le débiteur a répondu au créancier le 6 mai 1991 qu'il attendait la solution du litige en cours l'opposant aux constructeurs et au géomètre devant la juridiction administrative ; qu'après jugement du 14 décembre 1993 du Tribunal administratif de Nice, M. X a renouvelé le 7 juin 1995 sa demande de paiement ; que le 20 juin 1995, le maître d'ouvrage a répondu qu'il attendait l'arrêt de la Cour administrative d'appel saisie par lui en appel dudit jugement ; qu'après le prononcé de cet arrêt le 7 juillet 1998, une nouvelle demande de règlement de ses honoraires par M. X était présentée par lettre du 28 juillet 1998 reçue le 28 juillet 1998 ; que le 15 juillet 1999, l'Office public d'habitations à loyer modéré de Nice et des Alpes-Maritimes (OPAM) a rejeté la demande de M. X, faisant notamment valoir la prescription quadriennale ;

Considérant qu'il résulte de la chronologie qui précède que les demandes successives de paiement et les recours juridictionnels susmentionnés ont interrompu la prescription quadriennale, en application des dispositions de l'article 2 précité ; que, dans ces conditions, l'exception de prescription quadriennale opposée au paiement de la somme litigieuse de 103.795 F TTC (TVA à 18, 6 %, soit 105.545, 50 F à 20, 6 %) doit être rejetée ;

Sur la responsabilité :

En ce qui concerne la créance de 12.650, 70 F :

Considérant que le montant de 12.650, 70 F calculé par M. X au titre du solde de son marché n'est pas contesté par l'OPAM ; que, dans ces conditions, M. X est fondé à demander à la Cour de condamner l'OPAM à lui verser la somme de 12.650, 70 F (1.928, 59 euros) ;

En ce qui concerne la créance de 103.795 F TTC :

Considérant, en premier lieu, que, dans sa lettre du 26 septembre 1984 accompagnant son « devis-facture » du même jour, M. X justifiait le travail supplémentaire réalisé en faisant état de la nécessité de reprendre les plans d'exécution, compte-tenu des erreurs affectant le plan de base du géomètre, et de l'obligation de reprendre les plans de branchements ; que ces reprises de plan, réalisées de mai à septembre 1984, effectivement nécessitées par les erreurs non contestées du géomètre dans son relevé des lieux, doivent être regardées comme présentant un caractère indispensable à la poursuite du chantier ; que, dans ces conditions, M. X est fondé à demander au maître de l'ouvrage le paiement de ces travaux supplémentaires, sans que ce dernier puisse utilement invoquer l'absence d'acceptation des ces travaux, d'avenant ou de décompte ;

Considérant, en deuxième lieu, que le quantum de 87.517 F HT de ces travaux indispensables n'est pas contesté par l'OPAM ; qu'il y a lieu d'augmenter cette somme du taux de TVA applicable à la date de leur facturation, soit un total TTC de 103.795, 16 F TTC pour un taux 18, 6 % (15.823, 47 euros) ;

Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que certaines erreurs du relevé du géomètre, notamment en ce qui concerne l'emplacement des arbres, étaient grossières et pouvaient être facilement détectées sur le terrain par un homme de l'art ; que M. X n'a toutefois pris conscience des insuffisances dudit relevé que lors du démarrage des travaux de terrassement, sans avoir émis de réserves avant l'exécution de ses plans de maîtrise d'oeuvre ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en imputant à M. X la responsabilité de la moitié du préjudice dont il demande réparation ; qu'il s'ensuit que l'OPAM doit être condamné à verser à M. X la somme de 51.897, 58 F TTC (7.911, 74 euros) au titre des travaux indispensables à la poursuite du chantier ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à demander à la Cour de réformer le jugement attaqué ; qu'il y a lieu de condamner l'OPAM à lui verser la somme totale de 9.840, 33 euros TTC (1.928, 59 + 7.911, 74) ;

Sur les intérêts au taux légal :

Considérant que M. X a réclamé les intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 1998, date de réception de sa demande préalable du 28 juillet 1998 ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande, en application des disposition de l'article 1153 du code civil ;

Sur la résistance abusive :

Considérant que si M. X réclame 10.000 euros de dommages et intérêts au titre de la résistance, abusive selon lui, de l'office intimé, il n'établit pas sérieusement qu'il aurait, à la suite du non-paiement de sa créance, subi un préjudice autre que celui indemnisé par les intérêts au taux légal susmentionnés ;

Sur l'application de l' article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par l'OPAM doivent dès lors être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche et dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de M. X en condamnant l'OPAM à lui verser la somme de 2.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er: Le jugement attaqué du 28 novembre 2003 du Tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : L'Office public d'habitations à loyer modéré de Nice et des Alpes-Maritimes (OPAM) est condamné à verser à M. X la somme de 9.840, 33 euros (neuf mille huit cent quarante euros et trente-trois centimes). Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 1998.

Article 3 : L'Office public d'habitations à loyer modéré de Nice et des Alpes-Maritimes (OPAM) versera à M. X la somme de 2.000 euros (deux mille euros) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. X est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. André X, à l'Office public d'habitations à loyer modéré de Nice et des Alpes-Maritimes (OPAM) et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 04MA00704 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 04MA00704
Date de la décision : 06/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Melle JOSSET
Avocat(s) : SCP VOISIN-MONCHO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-11-06;04ma00704 ?
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