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05/05/2006 | FRANCE | N°04MA01700

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 05 mai 2006, 04MA01700


Vu la requête enregistrée le 2 août 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n°04MA01700, présentée par Me Aubert, avocat, pour Mme Véronique Y élisant domicile ... ; Mme Véronique Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement 9901743, 9902465, 9902468 et 0101098 du 22 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 29 juillet 1998 par laquelle le préfet des Alpes Maritimes a autorisé le transfert de l'officine de pharmacie de Melle Nadine X, de la décision implici

te par laquelle le ministre de l'emploi et de la solidarité a rejeté s...

Vu la requête enregistrée le 2 août 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n°04MA01700, présentée par Me Aubert, avocat, pour Mme Véronique Y élisant domicile ... ; Mme Véronique Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement 9901743, 9902465, 9902468 et 0101098 du 22 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 29 juillet 1998 par laquelle le préfet des Alpes Maritimes a autorisé le transfert de l'officine de pharmacie de Melle Nadine X, de la décision implicite par laquelle le ministre de l'emploi et de la solidarité a rejeté son recours hiérarchique, de la décision en date du 20 novembre 1998 par laquelle le préfet des Alpes Maritimes a refusé de lui accorder une licence de création d'une officine de pharmacie, de la décision implicite par laquelle le ministre de l'emploi et de la solidarité a rejeté son recours hiérarchique, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 3 961 363 F en réparation du préjudice qu'elle a subi, à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme comprise entre 10 980 093 et 13 180 093 F avec pénalité fiscale de 30 %, et à la condamnation de l'Etat à lui verser au total la somme de 200 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions en date des 29 juillet et 20 novembre 1998 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes Maritimes de prendre une nouvelle décision dans le délai de deux mois sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 134 344 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de sa demande préalable, avec capitalisation de ces intérêts ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 94-43 du 18 janvier 1994 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 janvier 2006 :

- le rapport de M. Pocheron, premier conseiller ;

- les observations de Mme Y, requérante ;

- les observations de Me Aiache-Tirat, avocat de Melle X ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme Y, docteur en pharmacie, a demandé à plusieurs reprises sans succès l'autorisation du préfet des Alpes Maritimes d'ouvrir une officine au 157 avenue de Nice à Cagnes sur Mer ; que postérieurement à sa dernière demande, présentée le 16 mai 1991, un autre pharmacien, M. Kaddouz, déjà titulaire d'une officine à Saint-Laurent du Var, a, le 30 avril 1992, également présenté une demande de création à titre dérogatoire pour l'ouverture d'une pharmacie dans un local situé à vingt mètres de celui envisagé par Mme Y ; que, le 16 février 1994, après la promulgation de la loi susvisée du 18 janvier 1994 qui modifiait le code de la santé publique en autorisant les transferts d'officine et en conférant à leurs demandes un caractère prioritaire, M. Kaddouz a transformé sa demande de création à titre dérogatoire en demande de transfert, l'officine dont il était propriétaire étant située à 350 mètres du lieu d'implantation envisagé ; que, le 2 août 1994, le préfet a autorisé le dit transfert ; que cette décision a été annulée par jugement n° 94-3458 du Tribunal administratif de Nice au motif que le préfet avait omis de saisir préalablement le conseil régional de l'ordre des pharmaciens, jugement lui-même confirmé par arrêt n° 97MA1616 du 16 juin 1998 de la Cour administrative d'appel de Marseille, et par décision n° 198930 du 26 mai 1999 du Conseil d'Etat ; que, ce même 2 août 1994, le préfet rejetait la demande de création d'officine à titre dérogatoire présentée par Mme Y au motif que le secteur géographique dans lequel elle envisageait son installation serait suffisamment desservi par la pharmacie transférée de M. Kaddouz ; que cette décision, ainsi que le jugement n° 95-1085 du Tribunal administratif de Nice rejetant le recours de l'intéressée contre ladite décision, étaient annulés par arrêt n° 97MA1730 du 16 juin 1998 de la Cour administrative d'appel de Marseille ; qu'en exécution de ces deux arrêts de ladite cour, le préfet des Alpes Maritimes a de nouveau instruit les demandes de Melle X, qui avait succédé en 1995 à M. Kaddouz, et de Mme Y ; que, le 19 juillet 1998, il a accordé l'autorisation de transfert d'officine à Melle X ; que, le 20 novembre 1998, il rejetait à nouveau la demande de Mme Y au motif que le secteur géographique était déjà desservi par l'officine transférée de Melle X ; que Mme Y relève appel du jugement en date du 22 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes dirigées contre ces deux dernières décisions et les décisions ministérielles implicites confirmatives et tendant à la réparation de son préjudice par l'Etat ;

Sur la légalité des décisions du préfet des Alpes Maritimes en date des 19 juillet et 20 novembre 1998 et des décisions implicites du ministre chargé de la santé de rejet des recours hiérarchiques formés contre ces arrêtés :

Considérant qu'aux termes de l'article L.570 du code de la santé publique, dans sa rédaction en vigueur à la date des arrêtés en litige : …Un transfert d'officine peut être demandé à l'intérieur d'un même département…Les demandes de transfert bénéficient d'une priorité par rapport aux demandes d'ouverture d'une nouvelle officine. Parmi les demandes d'ouverture d'une nouvelle officine, celles qui sont présentées par des pharmaciens n'ayant jamais été titulaires d'une licence d'officine ou n'en étant plus titulaires depuis au moins trois ans à la date du dépôt de la demande bénéficient d'une priorité. Toute demande ayant fait l'objet du dépôt d'un dossier complet bénéficie d'un droit d'antériorité par rapport aux demandes ultérieures concurrentes. Les transferts d'officine ne peuvent être autorisés qu'à la double condition qu'ils ne compromettent pas l'approvisionnement normal en médicaments de la population du quartier d'origine et qu'ils répondent à un besoin réel de la population résidant dans le quartier d'accueil. Dans le cas d'un transfert entre communes, les besoins de la nouvelle population à desservir s'apprécient selon les règles fixées à l'article L.571. Cette licence fixe l'emplacement où l'officine sera exploitée… ;

Considérant qu'il résulte notamment de ces dispositions qu'une demande de transfert, régulière et fondée, d'une officine d'une commune vers une autre commune du même département doit être examinée en priorité sur toute autre demande concurrente, même antérieure, d'ouverture d'une nouvelle officine dans cette dernière commune ;

Considérant que si les dispositions de l'article 23 de la loi du 18 janvier 1994 prévoient que les demandes de créations d'officines déposées avant le 1er janvier 1994 seront examinées au vu des dispositions antérieures à la présente loi, ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires à leur adoption auxquels il convient de se référer dés lors que la manière dont elles doivent être combinées avec les principes régissant l'ordre d'examen des demandes concurrentes de licence ne ressort pas clairement de la seule lecture du texte précité, n'ont pas pour objet ni pour effet de faire obstacle à l'application, y compris pour les demandes présentées avant le 1er janvier 1994, de la règle de priorité des demandes de transfert par rapport aux demandes de création d'officine ;

Considérant que la cour administrative d'appel de Marseille après avoir rappelé que pour rejeter la requête de Mme Y tendant à l'annulation de la décision ministérielle et de l'arrêté précité du 2 août 1994 le Tribunal administratif de Nice a estimé que les dispositions de la loi du 18 janvier 1994 étaient d'application immédiate aux affaires en cours lors de son entrée en vigueur et notamment à la demande de Mme Y et que l'autorité administrative n'avait commis aucune erreur de droit en se fondant sur ladite loi qui imposait l'examen prioritaire de la demande de transfert d'officine de M. Kaddouz, a jugé que toutefois, il résulte des dispositions susmentionnées de l'article 23 de la loi du 18 janvier 1994 que les demandes de création d'officine déposées avant le 1er janvier 1994 devaient être examinées sous l'empire des dispositions antérieures à l'intervention de la loi nouvelle ; qu'il ressort des motifs précités, dans les termes où ils sont rédigés, que l'exécution de l'arrêt impliquait seulement que la demande de Mme Y fût de nouveau instruite conformément aux dispositions de l'article 23 de la loi du 18 janvier 1994 mais non pas qu'elle fût impérativement examinée de manière prioritaire sur la demande de transfert d'officine formulée par Melle X ;

Considérant qu'il ne ressort pas du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas expressément soutenu que lors du réexamen de la demande de Mme Y en exécution de l'arrêt précité de la cour administrative d'appel de Marseille, le préfet ne se soit pas livré à une instruction de cette demande, conforme aux dispositions de l'article 23 susmentionné de la loi du 18 janvier 1994 en s'appuyant sur les critères d'appréciation régis par la législation antérieure ; qu'en outre, en examinant la demande de transfert d'officine présentée par Melle X prioritairement à celle de Mme Y, il n'a ni méconnu l'autorité de la chose jugée à l'égard de l'intéressée, ni commis d'erreur de droit ;

Considérant, s'agissant de la légalité de la seule autorisation de transfert, que Melle X qui avait acquis l'officine de M. Kaddouz alors que l'autorisation de transfert en litige était encore en vigueur, devait, contrairement à ce que soutient la requérante, être regardée comme venant légalement aux droits et obligations de son prédécesseur pour solliciter une nouvelle autorisation de transfert ; que la circonstance qu'elle ait, par l'effet rétroactif qui s'attachait à l'annulation contentieuse de l'autorisation qui lui était dévolue par l'acquisition de l'officine, exploité illégalement cette officine qui avait fait l'objet d'un transfert effectif à son nouvel emplacement est, en tant que telle sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;

Considérant enfin que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Sur la responsabilité de l'Etat, et les conclusions de Mme Y aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le préfet des Alpes Maritimes, en examinant la demande de transfert de Melle X avant la demande de création d'officine par la voie dérogatoire présentée par Mme Y, n'a d'une part pas méconnu l'autorité de la chose jugée par la Cour administrative de Marseille et a, d'autre part, fait une exacte application des dispositions des articles L.570 et L.571 du code de santé publique ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions aux fins de condamnation de l'Etat à réparer le préjudice qu'elle allègue avoir subi ; que, de même, les conclusions de la requête aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas en l'espèce la partie perdante, soit condamné à verser à Mme Y la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner Mme Y à verser à Melle X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme Y est rejetée.

Article 2 : Mme Y versera à Melle X, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Melle X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Véronique Y, au ministre des solidarités, de la santé et de la famille et à Melle X.

N° 04MA01700 4

cf


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 04MA01700
Date de la décision : 05/05/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : AUBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-05-05;04ma01700 ?
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