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13/03/2006 | FRANCE | N°03MA00673

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6eme chambre - formation a 3, 13 mars 2006, 03MA00673


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 9 avril 2003 sous le n° 03MA00673, présentée par la SCP d'Ornano-Renucci-Pratx-d'Ornanon, avocats, pour la société CONSEIL GESTION ET FINANCES (CGF), dont le siège est ... ;

La société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a déclaré nul le contrat qu'elle a conclu le 3 mai 1998 avec le centre hospitalier de Salon-de-Provence, et a rejeté ses conclusions indemnitaires ainsi que les conclusions du centr

e hospitalier susmentionné à fin d'injonction ;

2°) de condamner ce centr...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 9 avril 2003 sous le n° 03MA00673, présentée par la SCP d'Ornano-Renucci-Pratx-d'Ornanon, avocats, pour la société CONSEIL GESTION ET FINANCES (CGF), dont le siège est ... ;

La société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a déclaré nul le contrat qu'elle a conclu le 3 mai 1998 avec le centre hospitalier de Salon-de-Provence, et a rejeté ses conclusions indemnitaires ainsi que les conclusions du centre hospitalier susmentionné à fin d'injonction ;

2°) de condamner ce centre hospitalier à lui payer la somme de 59.735 euros au titre de ses prestations, augmentée des intérêts au taux conventionnel à compter du 9 janvier 1999 ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner ledit centre à lui verser la même somme, augmentée des mêmes intérêts, en réparation de la faute commise par le centre hospitalier en signant le contrat ;

4°) de condamner le centre intimé à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de ses frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 1er juillet 2003, présenté par Me X..., avocat, pour le centre hospitalier de Salon-de-Provence, dont le siège est ... ;

Il demande à la Cour de rejeter la requête ;

Vu la lettre en date du 21 décembre 2005 informant les parties, en application de l'article R.611-7 du code de justice administrative, que la décision à venir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2006 :

- le rapport de M. Brossier, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Firmin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a prononcé la nullité, à la demande du centre hospitalier de Salon-de-Provence, du contrat que celui-ci a conclu le 3 mai 1998 avec la société CONSEIL GESTION ET FINANCES (CGF) et a rejeté les conclusions indemnitaires reconventionnelles de cette dernière, qui interjette appel ;

Sur la compétence du juge administratif :

Considérant, en premier lieu, que le contrat en litige du 3 mai 1998 ne présente pas le caractère d'une convention portant mandat de négociation ni d'une convention accessoire à un contrat de prêt, mais a confié à la société CGF une mission d'assistance et de conseil auprès du centre hospitalier de Salon-de-Provence dans sa démarche de gestion active de sa dette, moyennant le paiement par cet établissement public d'un prix calculé proportionnellement aux bénéfices obtenus de la renégociation de ses emprunts ; qu'une telle prestation doit ainsi être regardée comme une prestation de service au sens du code des marchés publics ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'à la date du 3 mai 1998, une prestation de service dont le montant était supérieur à 300.000 F TTC et inférieur à 700.000 F TTC devait faire l'objet d'une mise en concurrence par marché négocié selon les dispositions de l'article 308 du code des marchés publics et lorsque son montant était supérieur à 700.000 F TTC, d'un appel d'offres selon les dispositions des articles 295 et suivants du code des marchés publics, dans sa version alors en vigueur ; qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de sa prestation, la société CGF a émis en janvier 1999 une facture de 391.835 F (59.735 euros), montant qu'elle a réclamé à nouveau devant le Tribunal par mémoire du 27 novembre 2002, puis devant la Cour par le présent appel ; qu'un courrier du centre hospitalier en date du 28 décembre 1999 fait par ailleurs état d'une facture de 349.099 F ; que, dans ces conditions, le contrat en litige, consistant en une prestation de service commandée par une personne publique pour un montant supérieur au seuil précité de 300.000 F, entrait dans le champ d'application du code des marchés publics et aurait dû notamment faire l'objet d'une mise en concurrence appropriée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 : « Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrat administratif. Toutefois, le juge judiciaire demeure compétent pour connaître des litiges qui relevaient de sa compétence et qui ont été portés devant lui avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi. » ; que pour les marchés conclus avant l'entrée en vigueur du décret du 7 mars 2001, le champ d'application de la règle fixée à l'article 2 précité comprend les marchés qui étaient de nature à se voir appliquer les dispositions du code des marchés publics en vertu de dispositions particulières ou des règles jurisprudentielles applicables, y compris ceux qui échappaient aux règles de passation prévues par ce code du seul fait de leur montant ; qu'ainsi qu'il a été dit, le contrat litigieux devait se voir appliquer les dispositions du code des marchés publics ; qu'il entre donc dans le champ d'application de la règle fixée par l'article 2 précité de la loi du 11 décembre 2001 ; que le litige n'ayant pas été porté devant le juge judiciaire avant la date d'entrée en vigueur de la cette loi, le juge administratif est compétent pour en connaître ;

Sur la nullité du contrat :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces versées au dossier que le centre hospitalier de Salon-de-Provence ait organisé, en vue de se faire assister dans la gestion active de sa dette, une mise en concurrence des entreprises par appel d'offres ou par marché négocié, accompagnée des formalités de publicité adéquates, contrairement à ce que soutient l'appelante qui n'apporte aucun élément sérieux de nature à établir son allégation ; qu'il s'ensuit que le contrat litigieux conclu pour la prestation de service susmentionnée a été signé dans des conditions irrégulières, en méconnaissance des principes de liberté et d'égalité d'accès à la commande publique prévus par le code des marchés publics ; qu'il y a lieu, dès lors, de constater la nullité de ce contrat ;

Sur les conclusions indemnitaires reconventionnelles de la société CGF :

Considérant que par mémoire du 27 novembre 2002, la société CGF alors défenderesse a présenté des conclusions indemnitaires reconventionnelles dirigées contre le centre hospitalier et tendant au paiement de la somme de 59.735 euros ; que le tribunal a rejeté cette demande aux motifs qu'une indemnité contractuelle ne pouvait se fonder sur un contrat nul ;

Considérant, en premier lieu, et à supposer même que de telles conclusions reconventionnelles soient recevables dans un litige en déclaration de nullité introduit le 5 mai 2000 et qui repose sur une cause juridique distincte, le fondement contractuel invoqué par la société ne saurait, en tout état de cause, justifier une indemnisation sur la base d'un contrat déclaré nul ;

Considérant, en deuxième lieu, et à supposer que la société CGF ait entendu se placer sur le terrain de l'enrichissement sans cause en soutenant que le centre hospitalier aurait réalisé des économies grâce à son intervention auprès des organismes prêteurs, en tout état de cause elle n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère utile de cette intervention ; qu'en effet, elle se contente d'invoquer, sans les préciser, les propositions de réaménagement de ces organismes et de faire état d'une assiette de rémunération de 5.118.370 F d'économies, qui n'est justifiée par aucun document bancaire et qui ne correspond pas, au demeurant, au montant de 6.007.535 F mentionné par ailleurs sur un courrier du 28 septembre 1999 ; que dans ces conditions, compte tenu de ces contradictions et en l'absence de précisions suffisantes notamment chiffrées, la société CGF n'est pas fondée à demander une indemnisation sur le terrain de l'enrichissement sans cause invocable à tout moment de la procédure d'appel ;

Considérant, en troisième lieu, que la société CGF qui a soutenu à titre subsidiaire, dans son mémoire de première instance du 27 novembre 2002, que l'hôpital « a engagé sa responsabilité en signant le contrat », doit être regardée comme se plaçant sur le terrain de la faute quasi-délictuelle consistant pour la personne publique à avoir signé un contrat nul et non avenu ; que ce terrain de responsabilité a été réitéré devant le juge d'appel ; qu'il résulte toutefois de l'instruction qu'aucune réclamation préalable n'a été formée à ce titre auprès du centre hospitalier, lequel n'a lié ni le contentieux de première instance, en l'absence de réplique à ce mémoire du 27 novembre 2002, ni le contentieux d'appel en se contenant de répondre sur le terrain de la responsabilité contractuelle ; que dans ces conditions, en l'absence de liaison du contentieux, les conclusions de la société CGF fondées sur la faute quasi-délictuelle du centre hospitalier s'avèrent irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ; qu'en tout état de cause, l'appelante n'établit sérieusement aucun préjudice en l'absence de précisions suffisamment probantes, dès lors qu'elle se contente d'invoquer, sans les préciser, les propositions de réaménagement des organismes prêteurs et de faire état d'une assiette de rémunération de 5.118.370 F d'économies qui n'est justifiée par aucun document bancaire et qui ne correspond pas au montant de 6.007.535 F mentionné par ailleurs sur un courrier du 28 septembre 1999 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la tardiveté de la requête d'appel, que la société appelante n'est pas fondée à demander que la Cour annule le jugement attaqué en tant qu'il a déclaré nul le contrat du 3 mai 1998 ; qu'elle n'est pas non plus fondée à se plaindre que les premiers juges ont rejeté sa demande indemnitaire ;

Sur les frais exposés par les parties et non compris dans les dépens :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties tendant au remboursement de leurs frais exposés et non compris dans les dépens, présentées sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société CONSEIL GESTION ET FINANCES (CGF) est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier de Salon-de-Provence tendant au remboursement de ses frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société CONSEIL GESTION ET FINANCES (CGF), au centre hospitalier de Salon-de-Provence et au ministre de la santé et des solidarités.

N° 03MA00673 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03MA00673
Date de la décision : 13/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GANDREAU
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: M. FIRMIN
Avocat(s) : SCP D'ORNANO RENUCCI-PEPRATX

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-03-13;03ma00673 ?
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