Vu la requête, enregistrée le 26 juin 2000, présentée pour M. Fernand X, élisant domicile ...), par Me Ducrey ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 21 avril 2000, notifié le 18 mai 2000, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté ministériel en date du 6 octobre 1994 le radiant des cadres de la gendarmerie nationale à compter du 21 décembre 1994,
2°) d'annuler ledit arrêté ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser 20.000 F (3.048,98 euros) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne des droits de l'homme ;
Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le décret n° 73-259 du 9 mars 1973 ;
Vu le décret n° 74-385 du 22 avril 1974 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 novembre 2004,
- le rapport de Mme Lorant, présidente assesseur ;
- et les conclusions de Mme Fernandez, commissaire du gouvernement ;
Sur la compétence de l'auteur de l'acte :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 29 de la loi susvisée dispositions 13 juillet 1972 : Les sanctions statutaires sont prononcées ou provoquées par le ministre et les autorités habilitées. ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1 du décret n° 88-91 du 27 janvier 1988 : Le ministre de la défense peut donner par arrêté délégation pour signer tous actes individuels ou réglementaires à l'exception des décrets, ainsi que toutes ordonnances de paiement, de virement ou de délégation et tous ordres de recettes :
1° Aux directeur, directeur adjoint et chefs de son cabinet en ce qui concerne les affaires pour lesquelles délégation n'a pas été donnée à l'une des personnes mentionnées au 2° ;
2° En ce qui concerne les affaires des services relevant de leur autorité :
a) Au secrétaire général pour l'administration, aux directeurs, chefs de service, directeurs adjoints, sous-directeurs de l'administration centrale ;
b) Au chef d'état-major des armées, au délégué général pour l'armement, aux chefs d'état-major de l'armée de terre, de la marine et de l'armée de l'air, au major général des armées, aux majors généraux de l'armée de terre, de la marine, de l'armée de l'air et de la gendarmerie, aux sous-chefs d'état-major des armées et à ceux de l'armée de terre, de la marine et de l'armée de l'air, au délégué aux programmes d'armement, au délégué aux relations internationales et aux membres du corps du contrôle général des armées en service à l'administration centrale.
En cas d'absence ou d'empêchement d'une des personnes mentionnées au 2° sous l'autorité de laquelle il se trouve directement placé, délégation peut être donnée à un fonctionnaire appartenant à un corps de catégorie A ou à un officier de carrière ou assimilé. ;
Considérant que ces dispositions prévoient une possibilité générale de délégation de signature, sans distinction selon la nature des mesures concernées ; qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre de la défense avait, par arrêté du 10 janvier 1994, donné régulièrement délégation de signature au directeur général de la gendarmerie nationale, et, en cas d'empêchement de ce dernier, avait, par arrêté du 25 janvier 1994, donné régulièrement délégation de signature au général Jacquet, signataire de la décision attaquée ;
Sur la motivation de la décision litigieuse :
Considérant que la décision litigieuse, qui mentionne l'ensemble des textes applicables, rappelle le déroulement de la procédure, précise les faits reprochés à M. X, et qualifie lesdits faits, satisfait aux exigences de motivation prévues par la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;
Sur le respect des droits de la défense :
Considérant qu'il résulte des stipulations de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme qu'elles ne sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale et qu'elles n'énoncent aucune règle ou aucun principe dont le champ d'application s'étendrait au-delà des procédures contentieuses suivies devant les juridictions, et qui gouvernerait l'élaboration ou le prononcé de sanctions, quelle que soit la nature de celles-ci, par les autorités administratives qui en sont chargées par la loi ;
Considérant qu'aux termes de l'article 15 du décret susvisé du 22 avril 1974 : Le dossier relatant les faits de la cause ainsi que le dossier individuel du militaire déféré devant le conseil sont adressés au rapporteur dès la désignation de ce dernier. ; que l'article 16 précise que : Le rapporteur convoque le militaire soumis à l'enquête et son défenseur. Il leur donne communication personnelle et confidentielle de toutes les pièces constituant les dossiers visés à l'article 15 ci-dessus, recueille leurs explications et reçoit les pièces présentées en défense. Le comparant ou son défenseur font en outre connaître au rapporteur l'identité des personnes qu'ils demandent à faire entendre par le conseil d'enquête.
Le rapporteur dresse un procès-verbal mentionnant qu'il y a en communication effective des dossiers. Il le date et le signe ainsi que le comparant ; si celui-ci refuse de signer, mention est faite de son refus.
Si le militaire déféré devant le conseil n'a pas répondu à la convocation, le rapporteur, en son absence, poursuit l'étude du dossier.
Un exemplaire du procès-verbal est adressé au président du conseil d'enquête. (...) ; qu'aux termes de l'article 17 du même décret : Au reçu du procès-verbal, le président fixe la date de la réunion du conseil et convoque soit d'office, soit sur la demande du militaire déféré devant le conseil les personnes dont l'audition est utile pour l'examen de l'affaire.
Il notifie la date de la réunion du conseil ainsi que la liste des personnes susvisées au comparant de manière que celui-ci dispose, au reçu de cette notification, d'un délai de huit jours francs au moins avant la date de ladite réunion. Il l'invite à se présenter aux lieu, jour et heure indiqués et l'avise que, s'il ne se présente pas, le conseil pourra passer outre. Il informe le défenseur de ces notifications. ; qu'enfin aux termes de l'article 19 dudit décret : Le rapporteur donne lecture de son rapport. Le conseil prend ensuite connaissance des renseignements fournis par écrit et entend successivement et séparément les personnes visées à l'article 17 qui ont répondu à la convocation. Le rapporteur, le comparant et son défenseur ainsi que les membres du conseil peuvent, sous l'autorité du président, leur poser les questions qu'ils jugent nécessaire. ;
Considérant, en premier lieu, que le rapporteur a demandé à M. X de bien vouloir se rendre disponible le 31 mai 1994 à partir de 9 heures ; que M. X, pourtant prévenu depuis le 11 avril 1994, n'avait pas alors désigné de défenseur ; que la circonstance qu'il n'a pas été fait droit à la demande formulée par son défenseur, depuis lors désigné, de report d'une entrevue avec le rapporteur destinée à prendre contact avec lui, fixée le 26 juillet 1994, ne peut suffire à constituer une irrégularité de la procédure ; que d'ailleurs la date du conseil d'enquête a été reportée du 16 août au 16 septembre 1994 afin de permettre à l'avocat de M. X de mieux préparer la défense de l'intéressé ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions précitées du décret du 22 avril 1974, qu'elles ne prévoient pas, parmi les pièces devant être communiquées, le rapport au conseil d'enquête ; que le rapporteur, qui ne dispose d'aucun pouvoir propre d'investigation ou d'appréciation, se borne à établir un exposé de l'affaire à partir des pièces du dossier, qu'il a lui-même communiquées au militaire concerné, et du procès-verbal de l'audition de ce militaire, que ce dernier a signé ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que, faute de lui avoir communiqué préalablement à l'audience le rapport du rapporteur, lequel n'est pas non plus communiqué aux membres du conseil d'enquête, mais lu en début de séance, le ministre de la défense aurait méconnu les règles de procédure applicables, notamment l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, et plus généralement le principe des droits de la défense ;
Sur l'erreur de droit :
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que le rapporteur recueille les explications du militaire sur les faits qui lui sont reprochés ; qu'il appartenait à M. X de lui fournir des informations sur l'ensemble des faits à l'origine de la procédure disciplinaire engagée ;
Sur la règle non bis in idem :
Considérant qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1972, Les militaires sont soumis à la loi pénale du droit commun ainsi qu'aux dispositions du code de justice militaire.
Sans préjudice des sanctions pénales qu'elles peuvent entraîner, les fautes commises par les militaires les exposent :
1° A des punitions disciplinaires qui sont fixées par le règlement de discipline générale dans les armées ;
2° A des sanctions professionnelles prévues par décret, qui peuvent comporter le retrait partiel ou total, temporaire ou définitif, d'une qualification professionnelle ;
3° A des sanctions statutaires qui sont énumérées par les articles 48 et 91 ci-après. , et qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 29 de la même loi, Peuvent être prononcées cumulativement une punition disciplinaire, une sanction professionnelle et une sanction statutaire. ;
Considérant que, à supposer que ce moyen ait été soulevé par M. X, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté litigieux de radiation des cadres est la seule sanction statutaire dont ait fait l'objet l'intéressé alors que les faits fautifs antérieurs, ainsi que les derniers faits reprochés, n'ont fait l'objet que de punitions disciplinaires ; que ces mesures pouvaient être cumulées, ainsi que le prévoient les dispositions précitées ;
Sur l'erreur manifeste d'appréciation :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, depuis son entrée dans la gendarmerie, M. X a fait l'objet de reproches incessants relatifs à son insouciance, sa nonchalance, son absence de sens des responsabilités, son refus d'appliquer les consignes, son mauvais état d'esprit, qui ont donné lieu à de nombreuses punitions disciplinaires ; qu'il est par ailleurs établi que, le 7 juillet 1993, à l'occasion d'un contrôle routier, M. X a usé de l'autorité attachée à ses fonctions pour importuner plusieurs jeunes femmes, dont une en particulier, qui a porté plainte, auprès de laquelle il avait insisté pour obtenir son numéro de téléphone et qu'il a rappelée à son domicile ;
Considérant que, eu égard aux fonctions exercées par M. X, à la circonstance que, nonobstant plusieurs punitions disciplinaires, son comportement n'avait connu aucune amélioration, et au caractère de particulière gravité des derniers faits reprochés, la sanction litigieuse n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle le radiant des cadres de la gendarmerie ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ; que M. X étant la partie perdante, ses conclusions présentées de ce chef ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1e : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre de la défense.
00MA01359
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