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17/06/2004 | FRANCE | N°00MA00559

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 17 juin 2004, 00MA00559


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 20 mars 2000 sous le n°00MA00559, présentée pour la COMMUNE DE MONTPELLIER, représentée par son maire en exercice à ce habilité par délibération du conseil municipal en date du 3 juillet 1995, par la SCP FERRAN, VINSONNEAU-PALIES ET NOY, avocats ;

La commune de MONTPELLIER demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 99-443 du 19 janvier 2000 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé, à la demande du Comité de défense des riverains de la route de la mer

et de la Fédération des associations pour la défense des usagers et consomma...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 20 mars 2000 sous le n°00MA00559, présentée pour la COMMUNE DE MONTPELLIER, représentée par son maire en exercice à ce habilité par délibération du conseil municipal en date du 3 juillet 1995, par la SCP FERRAN, VINSONNEAU-PALIES ET NOY, avocats ;

La commune de MONTPELLIER demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 99-443 du 19 janvier 2000 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé, à la demande du Comité de défense des riverains de la route de la mer et de la Fédération des associations pour la défense des usagers et consommateurs du centre ville (FADUC), la délibération en date du 26 novembre 1998 du conseil municipal de Montpellier, en tant que cette délibération décide d'une part de classer dans le domaine public communal la route départementale 21/21E dans sa portion comprise entre les places Christophe Colomb et Ernest Y..., d'autre part de créer un parc de stationnement sur ladite portion de route ;

Classement CNIJ : 24-01-02-025

C

2'/ de rejeter les conclusions auquel le jugement attaqué a fait droit ;

3'/ de condamner les associations intimées à lui verser une somme de 10.000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

La commune de MONTPELLIER soutient :

- que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la délibération critiquée, en tant qu'elle a décidé le classement dans le domaine public communal de la route départementale 21, était intervenue sur une procédure irrégulière ; qu'il ressort en effet de l'article R. 1 du code de la route qu'un changement d'appartenance domaniale n'est pas susceptible d'affecter le statut applicable à une voie rangée par décret dans la catégorie des voies à grande circulation ;

- qu'en considérant que la création d'un parking sur l'emprise d'une voie à grande circulation valait désaffectation de cette dernière et qu'une telle désaffectation devait être précédée du déclassement opéré par décret de ladite voie, le tribunal administratif a fait prévaloir une interprétation de l'article R. 1 du code de la route qui méconnaît le principe de libre administration des collectivités territoriales, lequel implique nécessairement que ces dernières conservent la maîtrise de l'affectation des voies dont la gestion leur est confiée en vertu de la loi ;

- que le parallélisme des formes, s'il impose que le déclassement d'une voie à grande circulation soit effectué par décret, n'impose pas que ce déclassement précède le changement d'affectation qui le rend nécessaire ; que, dès lors que ce dernier est intervenu, l'autorité compétente par application du parallélisme des formes et des procédures se trouve en situation de compétence liée pour prononcer ledit déclassement ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré au greffe le 3 mai 2004, le mémoire en défense présenté pour la Fédération des associations pour la défense des usagers et consommateurs du centre ville (FADUC) et le Comité de défense des riverains de la route de la mer de Montpellier à Carnon ; lesdites associations concluent au rejet de la requête et en outre à la condamnation de la commune de MONTPELLIER à payer à chacune la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elles font valoir :

- que les dispositions de la délibération critiquée relatives à la seule RD 21 ne sont pas divisibles ;

- que la RD 21 ayant été classée route à grande circulation par décret, sa suppression ne pouvait être réalisée qu'après qu'un décret lui ait fait perdre cette qualité ;

- que les articles L. 131-4 et R. 131-3 et suivants du code de la voirie routière prévoient que le président du conseil général, et non le maire, est compétent pour diligenter l'enquête publique préalable au déclassement ;

- que le préfet de l'Hérault n'a pas été consulté, en méconnaissance de l'article R. 225 du code de la route ;

Vu, enregistré au greffe le 28 mai 2004, le mémoire en réplique présenté par la COMMUNE DE MONTPELLIER, qui persiste dans ses précédentes écritures ; elle fait valoir en outre :

- que le maire de Montpellier était compétent pour diligenter l'enquête publique préalable à la mutation domaniale en cause ; que cette enquête n'est pas soumise aux dispositions de l'article R. 131-3 du code de la voirie routière ;

- que la consultation du préfet de l'Hérault en application de l'article R. 225 du code de la route n'était pas nécessaire, dès lors que la délibération attaquée ne constitue pas une mesure de police de la circulation ;

- que la création d'un parking dans l'emprise de la route départementale n° 21 ne constituant pas une désaffectation, elle n'emporte pas en elle-même le retrait de cette route des voies à grande circulation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n°72-611 du 8 juin 1972 ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de la voirie routière ;

Vu le code des communes ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2004 :

- le rapport de M. CHERRIER, premier conseiller ;

- les observations Me Z... de la SCP FERRAN, VINSONNEAU-PALIES et NOY pour la commune de MONTPELLIER ;

- les observations de Me X... pour le Comité de défense des riverains de la route de la mer de Montpellier à Carnon et la Fédération des associations pour la défense des usagers et consommateurs du centre ville (FADUC) ;

- et les conclusions de M. HERMITTE, premier conseiller ;

Considérant que la COMMUNE DE MONTPELLIER conteste le jugement en date du 19 janvier 2000 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé, à la demande du Comité de défense des riverains de la route de la mer et de la Fédération des associations pour la défense des usagers et consommateurs du centre ville (FADUC), la délibération en date du 26 novembre 1998 du conseil municipal de Montpellier, en tant que cette délibération décide, d'une part de classer dans le domaine public communal la route départementale n° 21 dans sa portion comprise entre le rond-point Christophe Colomb et le rond-point Ernest Garnier, d'autre part de créer un parc de stationnement sur l'emprise de ladite portion de route ;

Sur la décision de classement dans le domaine public communal :

Considérant qu'aux termes de l'article R.1 du code de la route : Le terme routes à grande circulation désigne, quelle que soit leur appartenance domaniale, des routes qui assurent la continuité d'un itinéraire à fort trafic, justifiant des règles particulières en matière de police de la circulation ; la liste des routes à grande circulation est fixée par décret, pris sur le rapport du ministre de l'intérieur et de la décentralisation et du ministre chargé des transports ;

Considérant que si une section de la route départementale 21 concernée par le présent litige a été inscrite à la nomenclature des voies à grande circulation par le décret susvisé du 8 juin 1972, il résulte des termes mêmes des dispositions précitées que cette inscription n'est pas susceptible d'être affectée par un changement d'appartenance domaniale ; que, dès lors, la COMMUNE DE MONTPELLIER est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance desdites dispositions pour annuler la délibération du 26 novembre 1998 du conseil municipal de Montpellier, en tant que cette délibération porte classement d'une partie de la route départementale n° 21 dans le domaine public communal ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés devant le tribunal administratif par le Comité de défense des riverains de la route de la mer et par la Fédération des associations pour la défense des usagers et consommateurs du centre ville (FADUC) ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 131-4 du code de la voirie routière : Le classement et le déclassement des routes départementales relèvent du conseil général... les délibérations du conseil général interviennent après enquête publique sauf dans les cas prévus aux articles L. 123-2 et L. 123-3 du présent code, à l'article 6-1 du code rural et à l'article L. 318-1 du code de l'urbanisme ; qu'aux termes de l'article R. 131-3 du même code : L'enquête publique prévue au deuxième alinéa de l'article L. 131-4 s'effectue dans les conditions fixées par la présente section. Un arrêté du président du conseil général désigne un commissaire enquêteur ou une commission d'enquête dont il nomme le président ... ;

Considérant que le classement d'une portion de la route départementale 21 dans le domaine public de la commune de MONTPELLIER implique le déclassement de cette portion de voie du domaine public routier du département de l'Hérault ; que ce déclassement n'entre pas dans le champ des exceptions prévues par les dispositions précitées ; que, par suite, il devait être précédé d'une enquête publique organisée par le président du conseil général ; qu'il est constant que l'enquête publique à laquelle il a été procédé en l'espèce a été ouverte par le seul maire de Montpellier ; qu'ainsi, la décision de classement critiquée est intervenue sur une procédure irrégulière ; que, dès lors, la commune de MONTPELLIER n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif a annulé cette décision ;

Sur la décision de création d'un parc de stationnement :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 131-3 du code des communes, repris à l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales : Le maire a la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et les voies de communication à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation ; qu'aux termes de l'article R. 131-1 du code des communes : Pour l'application de l'article L. 131-3, les routes à grande circulation sont définies par des décrets pris sur le rapport du ministre chargé de l'équipement et du ministre de l'intérieur ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article R. 131-1 précité, elles-mêmes fondées sur des dispositions législatives dont la conformité au principe de libre administration des collectivités territoriales ne peut être utilement discutée devant le juge administratif, que ces collectivités ne sont pas compétentes pour prendre des mesures ayant pour objet ou pour effet de prononcer le retrait d'une route de la nomenclature des voies à grande circulation ;

Considérant que la décision de création d'un parc de stationnement dans l'emprise de la route départementale 21 a pour effet de rompre la continuité d'un itinéraire à fort trafic tel qu'il a été défini par le décret susmentionné du 8 juin 1972 et, par voie de conséquence, de retirer une portion de route de la nomenclature des voies à grande circulation ; qu'ainsi, la COMMUNE DE MONTPELLIER n'était pas compétente pour prendre la décision critiquée ; que dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé ladite décision ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de MONTPELLIER n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les associations intimées, qui ne succombent pas dans la présente instance, soient condamnées à verser à la commune de MONTPELLIER la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la commune de MONTPELLIER à payer une somme de 500 euros respectivement à la Fédération des associations pour la défense des usagers et consommateurs du centre ville (FADUC) et au Comité de défense des riverains de la route de la mer de Montpellier à Carnon ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête susvisée de la commune de MONTPELLIER est rejetée.

Article 2 : La commune de MONTPELLIER versera une somme de 500 euros (cinq cent euros) respectivement à la Fédération des associations pour la défense des usagers et consommateurs du centre ville (FADUC) et au Comité de défense des riverains de la route de la mer de Montpellier à Carnon.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de MONTPELLIER, à la Fédération des associations pour la défense des usagers et consommateurs du centre ville (FADUC), au Comité de défense des riverains de la route de la mer de Montpellier à Carnon et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 3 juin 2004, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

M. CHERRIER et Mme FEDI, premiers conseillers,

assistés de Mme EJEA, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 17 juin 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Marc ROUSTAN Philippe CHERRIER

Le greffier,

Signé

Françoise EJEA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

8

N°'''MA00559


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA00559
Date de la décision : 17/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: M. Philippe CHERRIER
Rapporteur public ?: M. HERMITTE
Avocat(s) : SCP FERRAN VINSONNEAU-PALIES NOY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-06-17;00ma00559 ?
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