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13/04/2004 | FRANCE | N°02MA00559

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 13 avril 2004, 02MA00559


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 29 mars 2002 sous le n° 02MA00559, présentée pour l'Office Public Communal HLM de Toulon Toulon Habitat dont le siège social est situé Le Saint Mathieu , à Toulon (83076), représenté par son président en exercice, domicilié ès qualités au dit siège, par la S.C.P. d'avocats QUENTIN et DEGRYSE ;

L'Office Public Communal HLM de Toulon demande à la Cour :

Classement CNIJ : 39-06-01-02-03

C

1°/ d'annuler le jugement du 21 décembre 2001 par lequel le Tribunal administ

ratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de M. Michel X à lui verser u...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 29 mars 2002 sous le n° 02MA00559, présentée pour l'Office Public Communal HLM de Toulon Toulon Habitat dont le siège social est situé Le Saint Mathieu , à Toulon (83076), représenté par son président en exercice, domicilié ès qualités au dit siège, par la S.C.P. d'avocats QUENTIN et DEGRYSE ;

L'Office Public Communal HLM de Toulon demande à la Cour :

Classement CNIJ : 39-06-01-02-03

C

1°/ d'annuler le jugement du 21 décembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de M. Michel X à lui verser une indemnité de 1.550.193 F avec intérêt au taux légal ;

2°/ de condamner M. Michel X à lui payer ladite somme ;

3°/ subsidiairement de condamner le même à lui payer la somme de 663.311, 58 F au titre de frais financiers ;

4°/ de condamner M. Michel X à lui payer la somme de 15.000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que si, dès l'origine, le maître d'oeuvre avait préconisé des solutions réalisables, il n'aurait pas été amené, en cours de travaux, à procéder dans l'urgence au changement de l'ensemble des chauffages ; que le procédé de réhabilitation retenu n'était manifestement pas à même d'atteindre l'objectif poursuivi ; qu'un tel vice de conception rend l'ouvrage impropre à sa destination et engage la responsabilité du maître d'oeuvre sur le terrain de la garantie décennale et constitue une faute contractuelle ; que la maîtrise d'oeuvre comporte une mission d'assistance au maître de l'ouvrage ; que M. X a manqué à son devoir de conseil ; que le procédé retenu avait déjà causé des accidents ; qu'il a subi un indéniable préjudice résultant du changement de tous les chauffages existants pour les rendre compatibles avec les travaux précédemment réalisés ; qu'il en est résulté un coût supplémentaire dont il a dû supporter une partie en réalisant un prêt auprès de la C.D.C. ; que cette charge financière résulte directement de la faute commise dans le choix du procédé de réhabilitation ; que, subsidiairement, la carence dont a fait preuve M. X dans sa mission de conseil est à l'origine directe du préjudice constitué par les frais financiers liés au prêt qu'il a dû contracter dans l'urgence ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré au greffe le 14 août 2002, présenté pour M. Michel X, demeurant ..., par Me Gérard MINO, avocat ;

M. Michel X demande à la Cour, d'une part, de rejeter la requête et subsidiairement de condamner la société SOCOTEC S.A. à le relever et garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre et, d'autre part, de condamner tous succombants à lui payer une somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la demande de condamnation au titre des frais financiers étant nouvelle en appel est irrecevable ; que Toulon Habitat avait prévu, en toutes hypothèses, l'installation, à terme, de convecteurs électriques ; que la solution préconisée, avalisée par SOCOTEC, n'était incompatible qu'avec 40 % des logements et non la totalité ; que c'est ainsi Toulon Habitat qui a pris le risque de voir l'enveloppe financière initiale dépassée ; que la société SOCOTEC avait pris connaissance du dossier de consultation sans formuler la moindre réserve sur son contenu ; que ce n'est que trois mois après le début des travaux qu'elle l'a alerté ainsi que le maître de l'ouvrage ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le 8 janvier 2004, présenté pour la société SOCOTEC S.A., dont le siège social est situé 31, avenue Pierre de Coubertin, à Paris (75647), prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au dit siège, par la S.C.P. d'avocats TERTIAN - BAGNOLI ;

La société SOCOTEC S.A. demande à la Cour, d'une part, de rejeter les conclusions de M. X en tant qu'elles sont dirigées contre elle et, d'autre part, de le condamner à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que dès le mois de février 1993 elle avait attiré l'attention des constructeurs sur le fait que les installations de VMC devaient tenir compte du mode chauffage ; que dans le dossier de consultation des entreprises qui lui a été soumis en juin 1993 aucun lot chauffage n'était inclus ; qu'elle est enfin intervenue dès réalisation des premiers travaux ; qu'elle a ainsi parfaitement rempli sa mission de prévention ; que la carence de l'architecte est incontestable ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2004 :

- le rapport de M. FIRMIN, premier conseiller ;

- les observations de Me MOUROUX de la SCP QUENTIN et DEGRYSE pour Toulon Habitat et de Me TERTIAN de la SCP TERTIAN BAGNOLI pour SOCOTEC SA ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Considérant que par un marché, conclu le 9 juillet 1993, l'Office Public Communal d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon, Toulon Habitat , a confié à M. Michel X, en sa qualité d'architecte, une mission complète normalisée de maîtrise d'oeuvre de l'opération de réhabilitation d'un groupe de 198 logements dit La Poncette , situé boulevard des Armaris à Toulon, ayant essentiellement pour but de remédier aux problèmes d'humidité résultant de la condensation affectant lesdits logements ; que, sur six scénarii proposés par le maître d'oeuvre, c'est le scénario n° 5, prévoyant la mise en place d'une ventilation mécanique contrôlée, la réalisation d'une isolation extérieure et impliquant, à terme, le remplacement des dispositifs de chauffage individuels existants par des convecteurs électriques, qui fut retenu par le maître de l'ouvrage ; que, toutefois, la société SOCOTEC, chargée dans le cadre de l'opération précitée d'une mission de contrôle technique, a, par courriers du 16 décembre 1994 et du 23 janvier 1995, informé M. Michel X et Toulon Habitat du danger qu'il y aurait à faire fonctionner une ventilation mécanique contrôlée en présence de dispositifs de chauffage individuels à combustion de type à foyer ouvert , ce qui concernait, aux termes d'une étude préalable, environ 40 % des logements ; que, pour ces motifs et en raison de la nécessité de terminer l'opération, l'Office Public Communal d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon a alors fait procéder au remplacement de tous les dispositifs de chauffage existants par un chauffage au gaz dont il évalue le surcoût restant à sa charge à la somme de 1.550.193 F ; que Toulon Habitat relève appel du jugement du 21 décembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de M. Michel X à lui verser ladite somme ;

Considérant que, pour mettre en cause la responsabilité de M. Michel X devant le Tribunal administratif de Nice, l'Office Public d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon, agissant en qualité de maître de l'ouvrage, s'est fondé à la fois sur la garantie découlant des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil et sur la faute commise par le maître d'oeuvre en lui proposant un procédé de réhabilitation inadapté ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier, ni des allégations des parties, que les installations de VMC et de chauffage finalement remises à l'Office, et d'ailleurs réceptionnées par lui le lendemain de l'introduction de l'instance devant le tribunal administratif, soient atteintes de vices portant atteinte à leur intégrité ou les rendant impropres à leur destination ; que l'Office ne saurait donc fonder son action sur les principes dont s'inspirent les articles 1792 et 227O du code civil ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'à supposer même, comme le soutient l'Office Public d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon, que le maître d'oeuvre ait commis une faute dans l'exercice de sa mission, le préjudice dont il se prévaut, découlant du remplacement de la totalité des dispositifs de chauffage individuels par des chauffages individuels au gaz, alors que le scénario n° 5, adopté par le maître de l'ouvrage prévoyait la mise en place à terme de convecteurs électriques et n'était incompatible dans l'immédiat qu'avec 40 % des dispositifs de chauffage existants, est dépourvu de lien direct avec la prétendue faute de l'architecte ; qu'il suit de là que l'Office Public d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à la condamnation de M. Michel X à lui verser une indemnité de 1.550.193 F avec intérêt au taux légal ; que si l'Office Public d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon demande à la Cour, à titre subsidiaire, de condamner M. Michel X à lui verser une somme de 663.311, 58 F, qui représenterait le surcoût financier des travaux relatifs aux installations de chauffage au gaz, il ne démontre pas davantage que ce surcoût serait imputable à une faute de l'architecte consistant à ne pas avoir prévu la mise en place de ces installations avant la mise en fonctionnement de la VMC, en se bornant à alléguer l'urgence dans laquelle il se serait trouvé d'y procéder, et par suite d'obtenir le financement correspondant, alors qu'une lettre du bureau SOCOTEC S.A. l'avait informé dès le 16 décembre 1994 de l'impossibilité de mettre en service la VMC dans les appartements équipés de poêles et que les nouveaux appareils ont été installés au plus tôt au cours du mois de juin de 1994 ;

Considérant que la Cour ayant, par le présent arrêt, rejeté la requête de l'Office Public d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon, les conclusions de M. Michel X tendant à ce que la société SOCOTEC le garantisse de toute condamnation prononcée à son encontre sont dépourvues d'objet ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par l'Office Public d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon doivent, dès lors, être rejetées ; que M. Michel X n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions présentées à son encontre sur le même fondement par la société SOCOTEC doivent être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Office Public d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon à payer à M. Michel X la somme de 1.000 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'Office Public d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société SOCOTEC tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : l'Office Public d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon paiera à M. Michel X la somme de 1.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office Public d'Habitations à Loyer Modéré de Toulon, à M. Michel X, à la société SOCOTEC et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 16 mars 2004, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS, président assesseur,

M. FIRMIN, premier conseiller,

assistés de M. AGRY, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 13 avril 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

François BERNAULT Jean-Pierre FIRMIN

Le greffier,

Signé

Pierre AGRY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

6

N° 02MA00559


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA00559
Date de la décision : 13/04/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. FIRMIN
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : SCP QUENTIN ET DEGRYSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-04-13;02ma00559 ?
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