Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel le 30 décembre 1999 sous le n° 99MA02412, présentée pour M et Mme Guy X , demeurant ..., et par M. Hervé PIGUET, mandataire ;
M. et Mme Guy X demandent à la Cour :
1'/ d'annuler le jugement du 21 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1987, 1988 et 1989, ainsi que des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui ont été réclamés à M. X pour la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1989 ;
Classement CNIJ : 19.01.03.01.02.03
C+
2'/ de faire droit à leur demande de première instance ;
3°/ de condamner l'Etat à leur verser la somme de 150.000 F au titre des frais exposés ;
Ils soutiennent que le jugement attaqué est irrégulier, dès lors que leur avocat, dont la nouvelle adresse était connue du tribunal, n'a reçu l'avis d'audience qu'après sa tenue ; que, contrairement à ce qu'indique le tribunal, la charte du contribuable vérifié, jointe à l'avis de vérification, n'était pas à jour et ne comportait pas l'additif annoncé sur l'avis ; que l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce qu'elle leur a bien adressé ce document ; que le vérificateur leur a adressé des demandes de justifications le 30 août 1990 et le 5 février 1991 sans mentionner leur activité agricole ni le forfait qui leur était appliqué, alors que cette évaluation forfaitaire est, selon la documentation administrative 5B-8221, opposable à l'administration, et que le forfait ne peut être remis en cause dans sa dernière année, selon l'article 69-1 du code général des impôts ; que c'est à tort que le tribunal a admis la valeur probante de l'attestation postale concernant la réception de la demande de justification pour 1988 et 1989, alors que ce document est surchargé et que ni le nom ni le grade de son auteur ne sont indiqués, et que l'enveloppe du document est ouverte ; que l'accusé de réception de l'envoi restituant les pièces bancaires ne peut lui être opposé, dès lors qu'il n'a jamais reçu ce pli ; qu'ainsi ces documents ne peuvent être regardés comme lui ayant été restitués avant la demande de justifications et avant la notification de redressements ; que s'il ne s'est pas présenté devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires lorsqu'elle s'est prononcée sur un rapport concernant la TVA et les BIC, cela ne signifiait pas qu'il renonçait à la saisine qu'il avait demandée à propos des revenus taxés d'office, dont l'imposition est ainsi intervenue en méconnaissance de l'article L.76 du livre des procédures fiscales ; qu'il ne peut se voir attribuer la charge de la preuve pour les autres revenus que ceux taxés d'office ; que d'ailleurs il apporte la preuve de l'exagération des bases retenues par l'administration ; qu'en effet, pour l'année 1987, le montant des factures de matériaux résulte de la réponse du vérificateur du 28 mai 1991, et le montant des charges est indiqué dans la réponse du 1er juillet 1991 ; que pour l'année 1988, le taux de 36% de bénéfice retenu par le vérificateur est excessif, que le prix moyen des tuiles de récupération doit être fixé à 1,78 F et non à 1,60 F l'unité, avec un taux de perte qui ne peut être inférieur à 8 % ; que le nombre de voyages de tuiles s'établit à 42 et non à 378 ; que le nombre de kilomètres parcourus est de 75.000 et non de 50.800 ; que doivent être également augmentés l'évaluation du la consommation de gas-oil, les frais d'entretien du camion, les frais d'assurance et les frais de téléphone ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires en défense enregistrés le 30 juin et le 29 août 2000 par lesquels le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête, en faisant valoir que l'exécution dudit jugement n'est pas de nature à entraîner pour les requérants des conséquences difficilement réparables ; que si les requérants soutiennent ne pas avoir reçu en temps utile l'avis d'audience, ils n'apportent rien pour contredire utilement les mentions du jugement attaqué ; que la charte du contribuable vérifié reçue par les requérants contenait bien l'additif indiquant les différents textes modifiés depuis 1987, ainsi d'ailleurs que le mentionne l'accusé de réception signé par le contribuable ; que ce n'est que postérieurement à l'avis de vérification que les contribuables ont adressé des déclarations faisant état d'un forfait agricole ; qu'en tout état de cause le total des crédits bancaires excédait de plus du double les revenus déclarés, additionnés du maximum du forfait agricole, ce qui justifiait les demandes de justifications adressées par l'administration ; que la seconde demande de justification a bien envoyée à deux reprises à l'adresse des requérants, sans que la poste retourne les accusés de réception ; que le premier de ces plis a été réexpédié à la Réunion ; que le second n' a pas été réclamé puis a également été réexpédié à la réunion, puis retourné avec la mention non réclamé , ainsi qu'en font foi les attestations postales ; que l'attestation provenant de la Réunion sont probantes malgré les surcharges, dès lors que ces surcharges sont de la même main et sont conformes à l'avis de réception joint et aux mentions figurant sur l'enveloppe ; que M. X étant au Canada à la date à laquelle lui ont été renvoyés les documents bancaires, il n'a répondu à aucun des courriers qui lui étaient adressés ; que le moyen tiré de l'absence d'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est inopérant dès lors qu'il ne vise que les impositions établies d'office et que M. X s'est expressément désisté, par lettre du 24 mars 1992, de sa demande de consultation de la commission ; que l'examen des comptes bancaires de l'intéressé à mis en évidence l'existence d'une activité commerciale non déclarée de négoce de tuiles anciennes ; que le requérant s'étant borné, dans les 30 jours de la mise en demeure qui lui était adressée, à déclarer qu'il n'exerçait aucune activité de ce type, était ainsi en situation d'être taxé d'office , même si, pour les années 1988 et 1989, l'administration a utilisé la procédure contradictoire ; qu'il en résulte que la charge de la preuve lui incombe ; que le requérant n'apporte pas cette preuve ;
Vu le mémoire enregistré le 23 novembre 2000 par lequel M. et Mme Guy X confirment leurs précédentes écritures ;
Vu le mémoire enregistré le 6 février 2001 par lequel le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie confirme ses précédentes écritures ;
Vu le mémoire enregistré le 11 août 2003 par lequel M. et Mme Guy X confirment leurs précédentes écritures, et font valoir en outre que le vérificateur n'a effectué aucune démarche pour tenter de les rencontrer ou de rencontrer leur conseil ;
Vu le mémoire enregistré le 2 mars 2004 par lequel le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie confirme ses précédentes écritures, et fait, en outre, valoir que la vérification a eu lieu, sur la demande de M. X, avec son conseil et dans les locaux de l'administration, à partir des documents communiqués par ce dernier ; qu'ainsi le débat oral et contradictoire a pu avoir lieu ; que le rendez-vous du 24 mai 1991 n'ayant pas comporté l'examen de documents comptables, la vérification n'a pas duré plus de trois mois ; que le mandataire de M. X a attesté de la restitution des pièces comptables le 29 avril 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11mars 2004 :
- le rapport de M. GUERRIVE, président assesseur ;
- et les conclusions de M. TROTTIER, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que l'article R.193 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, en vigueur à la date du jugement attaqué, dispose que : Toute partie doit être avertie, par une notification faite conformément aux articles R.139 et R.140, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience ; que l'article R.139 du même code impose une notification de l'avis d'audience par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; qu'il résulte de l'avis de réception produit par les requérants que leur conseil a été convoqué à l'audience du 7 octobre 1999, au cours de laquelle leur requête a été examinée par le Tribunal administratif de Montpellier, par un courrier recommandé daté du 20 septembre 1999, qui a été présenté à l'adresse dudit conseil le 22 septembre 1999 ; qu'ainsi, et alors même que le conseil des requérants n'a retiré ce pli que le 12 octobre suivant , soit postérieurement à l'audience, les parties doivent être regardées comme ayant été régulièrement avisées de la date de l'audience ;
Sur la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L 10 du LPF : Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux article L 12 et L 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ; que l'avis d'envoi recommandé postal de l'avis de vérification de n° 3929 remis au requérant le 22 mars 1990 portait expressément la mention que l'envoi dont s'agit comportait la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, ainsi qu'un additif ; que, dans ces conditions, à supposer même que, nonobstant les indications contraires de l'avis de vérification, le pli postal ne comportait pas la mise à jour de ladite charte, il appartenait à M. X de faire diligence pour obtenir communication de cette mise à jour ; que celui-ci n'établit, ni même n'allègue avoir effectué les démarches nécessaires pour s'assurer du contenu dudit pli ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;
Considérant que la circonstance que les requérants aient été avisés que leurs bénéfices agricoles seraient imposées selon le régime du forfait ne privait pas l'administration de leur demander des justifications, en application de l'article L.16 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elle disposait d'éléments, issus notamment, comme en l'espèce, de leurs comptes bancaires, permettant d'établir que les contribuables pouvaient avoir de revenus non agricoles plus importants que ceux qu'ils avaient déclarés ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à M. et Mme X une demande de justification concernant les années 1988 et 1989 à l'adresse de leur domicile, à deux reprises ; qu'il résulte des attestations des services postaux que ces deux plis ont été réexpédiés, selon l'ordre de réexpédition déposé par le contribuable, à l'île de la Réunion ; que l'un de ces plis a été présenté à cette adresse, puis a été retourné à l'administration faute d'avoir été réclamé ; que les surcharges que comporte l'attestation des services postaux ne permettent pas de remettre en cause la valeur probante de ce document, dont le contenu est corroboré par les éléments du dossier, et notamment par les mentions figurant sur l'enveloppe et sur la copie de l'avis de réception ;
Considérant qu'en réponse à la lettre du 11 juin 1990, par laquelle le vérificateur lui proposait un rendez-vous afin de lui restituer les relevés bancaires qu'il lui avait remis, le contribuable a fait savoir qu'il était au Canada ; que ces documents ont été alors renvoyés par courrier à son domicile, ainsi qu'en fait foi un avis de réception du 24 juillet 1990 ; que, dans ces conditions, ces documents doivent être regardés comme ayant été restitués en temps utile au contribuable ;
Considérant que, par lettre du 24 mars 1992, M. X a clairement indiqué à l'administration qu'il renonçait à ses demandes de consultation de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires pour toute la période vérifiée, tant pour la vérification de comptabilité que pour l'examen de sa situation fiscale d'ensemble, et que le vérificateur lui en a donné acte par lettre du 26 mars 1992 ; que, dans ces conditions, il ne peut utilement se plaindre de ce que l'administration n'aurait pas saisi la commission du différend concernant les revenus taxés d'office ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les revenus perçus en 1987 par M. X de son activité de négoce de tuiles anciennes, ont été évalués d'office ; que ce dernier, qui avait été mis en demeure de souscrire des déclarations de résultat et de chiffre d'affaires pour les années 1988 et 1989, n'a souscrit, dans le délai de trente jours qui lui était imparti, qu'une déclaration portant la mention néant ; que l'absence de toute autre indication permettant au service de vérifier la situation du contribuable au regard de ses obligations fiscales équivalait à un défaut de déclaration ; qu'il se trouvait, dès lors, pour ces deux années, en situation d'évaluation et de taxation d'office, alors même que l'administration s'est conformée à la procédure contradictoire ; qu'il en résulte que les moyens que tire M. X de l'irrégularité de la vérification de la comptabilité de son activité commerciale sont inopérants ;
Sur le bien fondé :
Considérant qu'ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, M. X se trouvait en situation d'imposition d'office ; qu'il en résulte, en application de l'article L.193, qu'il lui appartient d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition fixées par l'administration ; que, pour tenter d'apporter une telle preuve, le requérant se borne à reproduire les éléments des correspondances qu'il a échangées avec le vérificateur au cours de la procédure de vérification, à propos de l'évaluation du prix d'achat des tuiles anciennes et de ses charges d'exploitation ; qu'il n'apporte à l'appui des affirmations issues de ces correspondances aucun élément permettant d'en justifier l'exactitude ; que, dans ces conditions, il ne peut être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe ;
Sur l'application de l'art L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, en l'espèce, la partie perdante, soit condamné à verser à M. et Mme X la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme Guy X est rejetée .
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Guy X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie .
Copie en sera adressée au directeur du contrôle fiscal Sud-est et à Me PIGUET.
Délibéré à l'issue de l'audience du 11 mars 2004, où siégeaient :
M. DARRIEUTORT, président de chambre,
M. GUERRIVE, président assesseur,
M CHAVANT, premier conseiller,
assistés de Melle MARTINOD, greffier ;
Prononcé à Marseille, en audience publique le 25 mars 2004.
Le président, Le rapporteur,
Signé Signé
Jean-Pierre DARRIEUTORT Jean-Louis GUERRIVE
Le greffier,
Signé
Isabelle MARTINOD
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
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N° 99MA02412