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02/12/2003 | FRANCE | N°99MA01399

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 02 décembre 2003, 99MA01399


Vu, 1°) enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 23 juillet 1999, sous le numéro 99MA01399, le recours présenté par le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie ;

Le ministre demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 7 juin 1999, par lequel le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision en date du 8 mars 1997 par laquelle le directeur du service des pensions de la Poste et France Télécom a refusé d'accorder à Mme le bénéfice d'une allocation temporaire d'invalidité, et de rejeter la demande de Mme ; le ministr

e soutient qu'il est recevable à faire appel en qualité de ministre ...

Vu, 1°) enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 23 juillet 1999, sous le numéro 99MA01399, le recours présenté par le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie ;

Le ministre demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 7 juin 1999, par lequel le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision en date du 8 mars 1997 par laquelle le directeur du service des pensions de la Poste et France Télécom a refusé d'accorder à Mme le bénéfice d'une allocation temporaire d'invalidité, et de rejeter la demande de Mme ; le ministre soutient qu'il est recevable à faire appel en qualité de ministre intéressé, au regard de son rôle dans la procédure de liquidation de l'allocation temporaire d'invalidité ; que le jugement est irrégulier pour avoir oublié d'appeler en la cause son département ministériel ; que, sur le fond, le droit à indemnisation de l'invalidité permanente résultant d'un accident ou d'une maladie liés à l'exercice de la profession est subordonné à trois

Classement CNIJ : 36-08-03-01

C

conditions cumulatives : les symptômes ou lésions doivent figurer dans la liste fixée par le tableau des maladies professionnelles, ils doivent apparaître pendant le délai de prise en charge indiqué et il doivent résulter de l'exécution de travaux expressément désignés, lorsque les tableaux en fixent la liste limitative ; qu'en l'espèce, s'agissant des affections provoquées par le bruit, il est constant que ne figurent pas sur ce tableau les travaux de la nature de ceux effectués par Mme , impliquant le port du casque audio ; que par ailleurs, aucun texte n'est intervenu pour rendre applicable aux fonctionnaires les dispositions de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale sur lequel s'est fondé le tribunal administratif de Bastia pour prendre le jugement critiqué ; que l'article L.496 a été remplacé non par l'article L.461-1 mais par les articles L.461-2 et L.461-3 ; qu'au demeurant, la nouvelle procédure de reconnaissance des maladies professionnelles n'est pas en l'état susceptible d'être mise en oeuvre ;

Vu, 2°) enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 5 août 1999, sous le numéro 99MA01486, la requête présentée par le directeur du service des pensions de la Poste et France Télécom ; le directeur demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 7 juin 1999, par lequel le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision en date du 8 mars 1997 par laquelle il a refusé d'accorder à Mme le bénéfice d'une allocation temporaire d'invalidité, et de rejeter la demande de Mme ; le directeur soutient que le droit à indemnisation de l'invalidité permanente résultant d'un accident ou d'une maladie liés à l'exercice de la profession est subordonné à trois conditions cumulatives : les symptômes ou lésions doivent figurer dans la liste fixée par le tableau des maladies professionnelles, ils doivent apparaître pendant le délai de prise en charge indiqué et il doivent résulter de l'exécution de travaux expressément désignés, lorsque les tableaux en fixent la liste limitative ; qu'en l'espèce, s'agissant des affections provoquées par le bruit, il est constant que ne figurent pas sur ce tableau les travaux de la nature de ceux effectués par Mme , impliquant le port du casque audio ; que la nouvelle procédure de reconnaissance des maladies professionnelles n'est pas en l'état susceptible d'être mise en oeuvre ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 14 janvier 2000, dans les deux instances susvisées, le mémoire en défense présenté pour Mme par Maître Doumé X... ; Mme conclut au rejet du recours et de la requête ; elle fait valoir que le décret du 6 octobre 1960 renvoie à l'article L.496 du code de la sécurité sociale devenu l'article L.461-1, qui dispose que Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. ; que tel est le cas en l'espèce puisque les différentes expertises ont démontré que Mme avait été atteinte d'une maladie

professionnelle directement causée par ses activités d'opératrice à l'Inter au central téléphonique et au télégraphe auprès de son administration ; que l'article L.462-2 précise que les tableaux énumérant les activités professionnelles donnent à titre indicatif la liste des principaux travaux présumés à l'origine de la maladie, ce qui exclut un caractère limitatif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu la loi n°93-121 du 27 janvier 1993 modifiant le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le décret n°60-1089 du 6 octobre 1960 ;

Vu le décret n°86-442 du 14 mars 1986 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 2003 :

- le rapport de Mme LORANT, président assesseur ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant que les deux requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de Bastia ; que par suite il y a lieu de les joindre pour y statuer par une même décision ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le tribunal administratif de Bastia, saisi de conclusions présentées par Mme à l'effet d'obtenir l'annulation de la décision par laquelle le directeur du service des pensions de la Poste et France Télécom a refusé d'accorder à cette dernière le bénéfice d'une allocation temporaire d'invalidité a statué sans mettre en cause le ministre de l'économie et des finances, et ce faisant a méconnu les dispositions combinées de l'article 4, 2ème alinéa du décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 modifié et de l'article R.66 du code des pensions civiles et militaires de retraite qui font obligation au juge d'appeler ledit ministre à produire ses observations sur les pourvois formés contre les décisions prises notamment en matière d'allocation temporaire d'invalidité ; que le ministre de l'économie et des finances est par suite fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit être annulé ; que l'affaire étant en état, il y a lieu pour la cour d'y statuer par la voie de l'évocation ;

Sur les conclusions de Mme :

Considérant qu'aux termes de l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984 : Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 p. 100 ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement dont le montant est fixé à la fraction du traitement minimal de la grille mentionnée à l'article 15 du titre Ier du statut général, correspondant au pourcentage d'invalidité. Les conditions d'attribution ainsi que les modalités de concession, de liquidation, de paiement et de révision de l'allocation temporaire d'invalidité sont fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine également les maladies d'origine professionnelle. ; qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 6 octobre 1960, dans sa rédaction alors applicable : L'allocation temporaire d'invalidité prévue à l'article 65 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est attribuée aux agents maintenus en activité qui justifient d'une invalidité permanente résultant soit d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'un taux rémunérable au moins égal à 10 %, soit de l'une des maladies d'origine professionnelle énumérées par les tableaux mentionnés à l'article L.496 du code de la sécurité sociale. Les agents qui sont atteints d'une de ces maladies ne peuvent bénéficier de cette allocation que dans la mesure où l'affection contractée serait susceptible, s'ils relevaient du régime général de sécurité sociale, de leur ouvrir droit à une rente en application des dispositions du livre IV dudit code et des textes d'application. ;

Considérant qu'il est constant que Mme fonctionnaire de la Poste, qui travaille à un central téléphonique, avec port d'un casque d'écoute, a présenté un déficit audiométrique bilatéral par lésion cochléaire irréversible et qu'elle reste atteinte d'une invalidité ayant entraîné une incapacité de 15% ; que la commission de réforme réunie le 28 novembre 1996 s'est prononcée favorablement sur l'imputabilité au service de la maladie professionnelle et que France Télécom a reconnu le caractère professionnel de l'affection de l'intéressée ; que cependant si l'affection dont souffre Mme figure au tableau n°42 des maladies professionnelles, les travaux qu'elle exécutait ne figurent pas dans la liste des travaux limitativement énumérés susceptibles d'être la cause d'une surdité d'origine professionnelle ; que, pour ce motif, le directeur du service des pensions de la Poste et France Télécom a, par une décision du 8 mars 1997, opposé un refus à la demande d'allocation temporaire d'invalidité présentée par Mme ;

Considérant que l'article L.496 susvisé est devenu l'article L.461-2 du nouveau code de la sécurité sociale ; que cet article dispose que : Des tableaux annexés aux décrets en Conseil d'Etat.... peuvent déterminer des affections présumées résulter d'une ambiance ou d'attitudes particulières nécessitées par l'exécution des travaux limitativement énumérés. ; que s'il est demeuré inchangé dans sa rédaction issue de la loi du susvisée du 27 janvier 1993, en revanche, l'article L.461-1 du même code, dans sa rédaction issue de la même loi, a défini de manière plus extensive la notion de maladie professionnelle en disposant que : les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. (....)

Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L.315-1. ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les indications du tableau qui n'ont plus un caractère limitatif quant à la nature des travaux accomplis ouvrent à l'administration la possibilité, lorsque la maladie de l'agent figure sur un de ces tableaux et que l'une ou plusieurs des autres conditions ne sont pas remplies, et après avoir obtenu l'avis de la commission de réforme prévue par l'article L.31 du code des pensions civiles et militaires de retraite et qui, aux termes de l'article 13 du décret susvisé du 14 mars 1986 est consultée notamment sur (... ) 5. La réalité des infirmités résultant d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle, la preuve de leur imputabilité au service et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, en vue de l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité instituée à l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ; 6. L'application des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite. , d'apprécier l'origine professionnelle de la maladie, et de la reconnaître lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime ; que par suite, en l'espèce, l'administration a commis une erreur de droit en s'estimant liée par l'énumération des travaux figurant au tableau n°42 du code de la sécurité sociale et en refusant de reconnaître l'origine professionnelle de la maladie de Mme ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme est fondée à demander l'annulation du 8 mars 1997 opposant un refus à sa demande d'allocation temporaire d'invalidité ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 7 juin 1999 est annulé.

Article 2 : La décision du directeur du service des pensions de la Poste et France Télécom du 8 mars 1997 est annulée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme , à France TELECOM, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre délégué à l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 4 novembre 2003, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

M. ZIMMERMANN, premier conseiller,

assistés de Melle FALCO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 2 décembre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Guy LAPORTE Nicole LORANT

Le greffier,

Signé

Sylvie FALCO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N°'''''''''''''''''''''''

8

N° MA


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: Mme LORANT
Rapporteur public ?: M. BOCQUET
Avocat(s) : FERRARI

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Date de la décision : 02/12/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 99MA01399
Numéro NOR : CETATEXT000007584217 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-12-02;99ma01399 ?
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