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21/10/2003 | FRANCE | N°99MA00815

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 21 octobre 2003, 99MA00815


Vu le recours enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 17 mai 1999 sous le n° 99MA00815, présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour :

Classement CNIJ : 19-04-02-05

C+

1°/ d'annuler le jugement n° 95-2785/ 95-4424 en date du 10 novembre 1998 par lequel le Tribunal administratif de Nice a déchargé M. et Mme X des impositions supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1991 et 1992 ;

2°/ de rétablir M. et Mme X aux rôles de l'imp

ôt sur le revenu des années 1991 et 1992 à raison des droits supplémentaires s'élevant à 46.65...

Vu le recours enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 17 mai 1999 sous le n° 99MA00815, présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour :

Classement CNIJ : 19-04-02-05

C+

1°/ d'annuler le jugement n° 95-2785/ 95-4424 en date du 10 novembre 1998 par lequel le Tribunal administratif de Nice a déchargé M. et Mme X des impositions supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1991 et 1992 ;

2°/ de rétablir M. et Mme X aux rôles de l'impôt sur le revenu des années 1991 et 1992 à raison des droits supplémentaires s'élevant à 46.656 F y compris les intérêts de retard pour 1991 et à 95.163 F y compris les intérêts de retard et la majoration de 40 % pour 1992 ;

Le ministre soutient :

- que le tribunal a statué ultra petita dès lors que dans leur réclamation, les époux X avaient limité leurs prétentions à un dégrèvement d'environ 40.000 F , entendu droits et pénalités confondus et qu'une décision d'admission partielle leur a accordé le 19 octobre 1995 la somme de 9.850 F ;

- que contrairement aux dires du tribunal, l'administration a expressément fait valoir que Mme X, à qui il incombe de démontrer que ses revenus ne relèvent pas de la catégorie des traitements et salaires, n'apportait pas cette preuve en affirmant exercer une profession d'agent commercial, à défaut de toute autre démarche, déclarative notamment ;

- qu'alors qu'elle a déclaré la totalité de ses revenus d'agent commercial dans la catégorie des traitements et salaires, Mme X n'apporte aucun élément permettant d'apprécier les conditions d'exercice de son activité et par suite, de déterminer le régime fiscal applicable aux revenus perçus en 1991 et 1992 ;

- que conformément aux dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, il appartient à Mme X d'apporter la preuve que les rehaussements ne sont pas justifiés pour insuffisance de prise en compte de ses frais réels, ce qu'elle ne fait pas ;

- qu'à défaut de justificatifs précis, c'est à bon droit que le service a considéré que les frais non justifiés ne pouvaient être regardés comme des frais professionnels déductibles des revenus salariaux déclarés par Mme X ;

- que c'est à juste titre que la somme de 301.368 F faisant double emploi n'a pas été admise en déduction du revenu global de l'année 1992 des époux X lesquels n'ont, au demeurant, jamais contesté ce redressement ;

- que la majoration pour absence de bonne foi se justifie dès lors qu'un redressement identique non contesté a été effectué par le service au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 1990 ;

- que si la Cour estime que les revenus de Mme X doivent être requalifiés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, l'administration entend procéder, à titre subsidiaire, à une substitution de base légale de manière à fonder l'imposition supplémentaire résultant de la réintégration dans les bases imposables de l'intéressé des frais non justifiés ;

- que dans cette hypothèse, Mme X se trouve en situation d'évaluation d'office pour défaut de déclarations spéciales et n'a pas présenté les documents comptables et pièces justificatives prescrits par l'article 99 du code, ni justifié les frais remis en cause par le service ;

- qu'enfin dans l'hypothèse où la Cour jugerait que les frais peuvent être admis en déduction des recettes imposables, l'administration entend exercer le droit de compensation et faire valoir que la contribuable a indûment bénéficié, au titre des années 1991 et 1992, de l'abattement de 20 % prévu par les dispositions de l'article 158-5 a 4° alinéa du code général des impôts, d'un montant respectivement de 54.961 F et 53.988 F ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré au greffe le 21 octobre 1999, par lequel M. et Mme X concluent au rejet du recours du ministre par les motifs que :

- son statut d'agent commercial a été communiqué par le greffe du Tribunal de commerce de Nice à tous les organismes ayant à connaître ce statut ;

- il y a contradiction entre les affaires les concernant relatives aux impôts sur le revenu des années 1991 et 1992 dans lesquelles Mme X est considérée comme salarié mandataire et l'affaire relative aux redressements de TVA des années 1993, 1994 et 1995 où est affirmé son statut de travailleur indépendant ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ensemble le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2003 :

- le rapport de M. DUCHON-DORIS, président assesseur ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Sur le régime d'imposition applicable aux revenus de Mme X :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme X ont porté, dans leurs déclarations d'ensemble de leurs revenus des années 1991 et 1992 la double mention que Mme X exerçait la profession d'agent commercial et que les revenus que celle-ci percevait à ce titre relevaient de la catégorie des traitements et salaires ; que Mme X a été, sur ce point, imposée conformément aux énonciations de sa propre déclaration ; que par réclamations en date du 26 décembre 1994 s'agissant de l'année 1991, et en date du 4 août 1995, s'agissant de l'année 1992, les époux X ont contesté les redressements qui leur ont été notifiés au titre de ces deux années seulement en tant qu'ils procédaient de la remise en cause de certains frais professionnels déduits par Mme X ; que si, dans un mémoire du 22 juin 1998, cette dernière a contesté l'imposition de ses revenus dans la catégorie des traitements et salaires au motif tiré de son statut d'agent commercial, elle n'a apporté sur ce point aucune précision ni justification ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, compte tenu de ses conditions de travail et de ses rapports avec la personne déclarée comme étant son employeur, le statut fiscal de travailleur salarié sous lequel elle avait entendu se placer à l'époque, qui n'était pas par lui-même incompatible avec la qualité d'agent commercial et qui n'a pas été remis en cause par le service, ne lui était pas, en fait, applicable ; que par suite, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges d'une part ont considéré qu'il n'était pas contesté que Mme X exerçait au cours des années litigieuses l'activité de représentant mandataire de commerce agissant en toute indépendance sans lien de subordination et que ses revenus relevaient, dès lors de la catégorie des bénéfices non commerciaux et, d'autre part, ont prononcé, pour ce motif, la décharge de la totalité des impositions supplémentaires mises à la charge des époux X au titre des années en litige ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les époux X devant le tribunal administratif de Nice ;

Sur les frais professionnels déductibles des revenus de Mme X :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : lorsque, ayant donné son accord au redressement ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la notification de redressement, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de redressement, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement ;

Considérant en premier lieu qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme X a déclaré la totalité des revenus perçus par elle en 1991 et 1992 dans la catégorie des traitements et salaires et a opté pour le régime de la déduction des frais réels prévu par les dispositions de l'article 83-3° du code général des impôts ; qu'il lui appartient dès lors de justifier par tous moyens que le régime d'imposition qui en découle et que n'a pas remis en cause le service, ne lui est pas applicable ; que si elle a soutenu pour la première fois devant le tribunal administratif, par mémoire en date du 22 juin 1998, que ses revenus relevaient en fait de la catégorie des bénéfices non commerciaux, elle n'apporte sur ce point aucune précision concernant notamment les conditions d'exercice de son activité ; qu'à cet égard, la seule circonstance que pour les années ultérieures, son activité d'agent commercial ait été soumise à la TVA ne saurait à elle seule apporter la preuve que le régime d'imposition des salariés ne lui était pas applicable au titre des années en litige ;

Considérant en second lieu qu'il résulte de l'instruction que par application des dispositions des articles L. 10 et L. 16 1er alinéa du livre des procédures fiscales, l'administration a demandé à Mme X, de justifier de la réalité des frais réels déclarés à hauteur de 223.188 F au titre de l'année 1991 et de 301.368 F au titre de l'année 1992 ; que par notification de redressements en date du 21 janvier 1994, la déductibilité des frais considérés non justifiés dans leur principe ou leur montant, a été remise en cause par le service ; que les époux X n'ont présenté aucune observation dans le délai de trente jours à compter de la réception de la notification de redressements ; qu'il leur appartient dès lors, par application des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales précité, de démontrer le caractère exagéré des redressements ;

En ce qui concerne la nature et le montant des frais déductibles :

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 13-1 et 83-3° du code général des impôts que, pour être admises en déduction, les dépenses supportées par les salariés doivent avoir été effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu imposable, avoir été nécessitées par l'exercice de la profession, avoir été payées au cours de l'année d'imposition et être justifiées tant dans leur principe que dans leur montant ;

Considérant en premier lieu que si Mme X demande la prise en compte, au titre de l'année 1991, de 6.951 F de frais de péages supplémentaires, elle n'apporte pas la preuve qui lui incombe, notamment par la production de certificats de passage en partie illisibles, que ces frais correspondent à des déplacements nécessités par l'exercice de sa profession ;

Considérant en deuxième lieu que, nonobstant les insuffisances de justificatifs présentés, l'administration a admis en déduction, au titre de l'année 1992, 50 % des frais de transport déclarés, soit 19.201 F et une partie des frais de transports présentés à hauteur de 56.860 F ; que Mme X n'est pas en mesure de justifier que son activité professionnelle a engendré, au titre de ladite année, des frais de voyage et de transports d'un montant supérieur à celui retenu par l'administration ;

Considérant en troisième lieu que les frais de présentation, en particulier vestimentaires, ne sont déductibles du revenu imposable que si le salarié justifie qu'il est tenu, eu égard à sa profession, d'exposer des dépenses à ce titre excédant celles qui correspondraient normalement au niveau de ses revenus ; que si Mme X soutient que sa profession de représentant de commerce a occasionné des dépenses d'acquisition de vêtements, de chaussures, de maquillage, coiffure et parure, d'un montant de 35.700 F au titre de 1991 et 46.000 F au titre de 1992, elle n'apporte sur ce point aucune justification probante ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à contester la remise en cause par le service de la déductibilité des frais non justifiés et les redressements qui en sont la conséquence ;

En ce qui concerne l'application de la majoration de 40 % :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme X ont porté en déduction de leur revenu global déclaré au titre de l'année 1992, une somme de 301.368 F correspondant au montant des frais professionnels de Mme X alors que celle-ci avait par ailleurs déclarée ladite somme, au titre de la même année, pour la détermination de ses salaires imposables ; que cette somme faisant double emploi et ne répondant pas aux conditions prévues par l'article 156.II du code général des impôts, l'administration a procédé à sa réintégration dans le revenu global des époux X, assortie de la majoration de 40 % pour absence de bonne foi prévue à l'article 1729 du code général des impôts ; que si les époux X, qui n'ont pas contesté le redressement en principal, arguent sur ce point de leur bonne foi, ils ne contestent pas qu'un redressement identique, n'ayant pas davantage appelé de remarque de leur part, a été effectué par le service au titre de leur impôt sur le revenu de l'année 1990 et qu'ils ont été informé de ses motifs par notification de redressements en date du 13 février 1992, reçue antérieurement à la date limite de dépôt de la déclaration de leurs revenus de l'année 1992 ; que, dans ces circonstances, l'administration était fondée à assortir le redressement susvisé de la majoration de 40 % pour absence de bonne foi prévue à l'article 1729 du code général des impôts ; que par suite, l'argumentation des époux X sur ce point, ne peut être que rejetée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a prononcé la décharge des impositions supplémentaires mises à la charge des époux X au titre des années 1991 et 1992 ;

Par ces motifs,

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 10 novembre 1998 est annulé.

Article 2 : M. et Mme X sont rétablis aux rôles de l'impôt sur le revenu des années 1991 et 1992 à raison des droits supplémentaires s'élevant à 46.656 F (7.112, 66 €) y compris les intérêts de retard pour 1991 et à 95.163F (14.507, 51€) y compris les intérêts de retard et la majoration de 40 % pour 1992.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 7 octobre 2003, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS, président assesseur,

M. DUBOIS, premier conseiller,

assistés de Mme GIORDANO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 21 octobre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

François BERNAULT Jean-Christophe DUCHON-DORIS

Le greffier,

Signé

Danièle GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

9

N° 99MA00815


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA00815
Date de la décision : 21/10/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. DUCHON-DORIS
Rapporteur public ?: M. BEDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-10-21;99ma00815 ?
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