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23/09/2003 | FRANCE | N°00MA00702

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 23 septembre 2003, 00MA00702


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel le 6 avril 2000 sous le n 00-0702, présentée pour M. Roger X, ... par M° Alain-François ROGER ;

M. X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 99-1995 en date du 10 février 2000 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête tendant à la décharge de l'obligation, notifiée par dénonciation de saisie-conservatoire de créances en date du 1er février 1999, de payer la somme de 1.635.290 F, correspondant au paiement de taxes sur la valeur ajoutée mises à sa charge

au titre de son activité d'agent de publicité pour la période du mois de janvi...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel le 6 avril 2000 sous le n 00-0702, présentée pour M. Roger X, ... par M° Alain-François ROGER ;

M. X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 99-1995 en date du 10 février 2000 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête tendant à la décharge de l'obligation, notifiée par dénonciation de saisie-conservatoire de créances en date du 1er février 1999, de payer la somme de 1.635.290 F, correspondant au paiement de taxes sur la valeur ajoutée mises à sa charge au titre de son activité d'agent de publicité pour la période du mois de janvier 1987 au mois de décembre 1989 ;

2°/ de prononcer la nullité des saisies-conservatoires critiquées et le dégrèvement des impositions toujours contestées ;

Classement CNIJ : 19-05-01

Le requérant soutient :

- que les deux avis de mise en recouvrement du 14 mai 1992 et du 2 juin 1993 ont fait l'objet de réclamations en date du 18 juin 1992 et du 13 septembre 1993 qui ne paraissent pas avoir fait l'objet de décisions expresses ni du directeur ni du tribunal administratif ;

- qu'ils sont donc formellement contestés et que des mesures d'exécution ou même conservatoires ne pouvaient être engagées aussi longtemps qu'il n'y avait pas été statué ;

- qu'il n'y a pas eu de lettre de rappel avant la mise en oeuvre des saisies conservatoires ;

- qu'il y a violation de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ;

- qu'il n'est pas nécessaire pour assurer le paiement de l'impôt dont la validité est contestée de mettre en oeuvre des mesures telles que la saisie-conservatoire de créances et la saisie conservatoire si bien qu'il y a eu, dans cette mesure, violation de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré au greffe le 19 juillet 2002, par lequel le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête par les motifs que :

- la mainlevée d'une mesure conservatoire ne pouvant être prononcée que par le juge de l'exécution, la cour est incompétente pour trancher le différend ;

- Subsidiairement, au fond, les mesures conservatoires engagées en vertu de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales résultent du fait que les impositions mises en recouvrement sont contestées ;

- l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme est inapplicable aux procédures relatives aux taxations fiscales ;

- la circonstance que les mesures conservatoires ont eu pour effet de porter une atteinte irrémédiable à la considération et au crédit du requérant reste à démontrer, sa réputation étant largement entamée par sa condamnation pour fraude fiscale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et son protocole additionnel ;

Vu le Code général des impôts ensemble le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu à l'audience publique du 9 septembre 2003

- le rapport de M. DUCHON-DORIS, président assesseur ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a présenté les 18 juin et 9 juillet 1992 deux réclamations tendant à la décharge des rappels de TVA qui lui ont été assignés au titre des années 1987, 1988 et 1989 par avis de mise en recouvrement en date des 14 mai 1992 et 2 juin 1993, assortie d'une demande de sursis de paiement, puis, à la suite de l'émission d'un nouveau titre exécutoire le 2 juin 1993, une nouvelle réclamation en date du 13 septembre 1993, également assortie d'une demande de sursis de paiement ; que par lettres en date des 22 avril et 27 septembre 1993, le receveur de Montpellier-Est lui a adressé des demandes de constitution de garanties, puis, estimant insuffisantes les garanties proposées, a rejeté la demande de sursis de paiement par lettres des 16 juin et 20 juillet 1995 ; que deux mises en demeure ont été adressées à M. X les 24 mai et 30 juin 1995 ; que M. X a alors formé opposition à poursuites en contestant l' exigibilité de l'imposition en raison du sursis de paiement sollicité dans ses réclamations d'assiette ; que par jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 10 avril 1997, confirmé en appel par arrêt de la cour administrative d'appel le 20 novembre 2000, ses prétentions à ce titre ont été rejetées ; que le 27 janvier 1999, un procès-verbal de saisie conservatoire était signifié par voie d'huissiers aux sièges de sociétés clientes de M. X lequel en était informé par signification d'un acte de dénonciation de saisie conservatoire de créances ; que M. X demande l'annulation du jugement susvisé du Tribunal administratif de Montpellier en date du 10 février 2000 en tant qu'il a refusé de prononcer la nullité des mesures conservatoires précitées ;

Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article L. 277 du Livre des procédures fiscales : le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge peut, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation ... être autorisé à différer le paiement de la partie contestée de ses impositions et des pénalités y afférentes. Le sursis de paiement ne peut être refusé au contribuable que s'il n'a pas constitué auprès du comptable les garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor ; qu'aux termes de l'article R. 277-1 du même livre : le comptable compétent invite le contribuable qui a demandé à différer le paiement des impositions à constituer les garanties prévues à l'article L. 277. Le contribuable dispose d'un délai de quinze jours à compter de la réception de l'invitation formulée par le comptable pour faire connaître les garanties qu'il s'engage à constituer ; qu'aux termes de l'article L. 277 alinéa 3, du même livre : à défaut de constitution de garanties ou si les garanties offertes sont estimées insuffisantes, le comptable peut prendre des mesures conservatoires pour les impôts contestés, jusqu'à la saisie inclusivement ... Lorsque le comptable a notifié un avis à un tiers détenteur ou a fait procéder à une saisie en application de l'alinéa précédent, le contribuable peut demander au juge du référé prévu, selon le cas, aux articles L. 279 et L. 279 a, de prononcer la limitation ou l'abandon de ces mesures si elles comportent des conséquences difficilement réparables... ; qu'aux termes enfin de l'article L. 279 du même livre : en matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires, lorsque les garanties offertes par le contribuable ont été refusées, celui-ci peut, dans les quinze jours de la réception de la lettre recommandée qui lui a été adressée par le comptable, porter la contestation, par simple demande écrite, devant le juge du référé administratif... ; qu'il ressort des pièces du dossier que le comptable a expressément rejeté la demande de sursis de paiement présentée par M. X, lequel n'a pas saisi d'une contestation sur ce point le juge du référé administratif ; que dès lors, le comptable du Trésor était en droit, comme l'y autorise l'article L. 277 précité du livre des procédures fiscales, de prendre des mesures conservatoires ; que par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que les mesures conservatoires litigieuses ne pouvaient pas être engagées aussi longtemps qu'il n'avait pas été définitivement statué sur le bien-fondé de l'imposition ;

Considérant en deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que le comptable du Trésor, à la suite du rejet de la demande de sursis de paiement présentée par M. X, a adressé à celui-ci deux mises en demeure de régler les impositions litigieuses ; qu'aucune disposition n'impose au comptable du Trésor d'envoyer préalablement à la mise en oeuvre des mesures conservatoires des lettres de rappel ; que par suite, le moyen sur ce point de M. X ne peut être que rejeté ;

Considérant en troisième lieu que le juge de l'impôt ne statue pas en matière pénale sauf lorsqu'il connaît de contestations relatives aux pénalités fiscales ; qu'il ne tranche pas non plus des contestations sur des droits et obligations de caractère civil, même si, lorsqu'il statue sur un litige relatif au recouvrement de l'impôt, sa décision est susceptible de produire des effets de caractère patrimonial ; que M. X ne peut dès lors utilement invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme ; que son moyen sur ce point ne peut être que rejeté ;

Considérant en dernier lieu qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'Homme : toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ; qu'il résulte des termes mêmes de cet article que le droit au respect de ses biens reconnu à toute personne physique ou morale ne porte pas atteinte au droit de chaque Etat de mettre en oeuvre les lois qu'il juge nécessaires pour assurer le paiement des impôts ; qu'en autorisant le comptable du Trésor, nonobstant l'existence d'une contestation au fond de la créance fiscale, après rejet d'une demande de sursis de paiement, à mettre en oeuvre des mesures conservatoires, les dispositions précitées du livre des procédures fiscales ne sauraient être regardées, compte tenu de leur objectif et de leur portée, comme portant atteinte au respect des biens du contribuable au sens de cet article ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Montpellier attaqué ;

Par ces motifs,

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre de l'économie des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 9 septembre 2003, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS, président assesseur,

M. DUBOIS, premier conseiller,

assistés de Mme GIORDANO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 23 septembre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

François BERNAULT Jean-Christophe DUCHON-DORIS

Le greffier,

Signé

Danièle GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

6

N° 00MA00702


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA00702
Date de la décision : 23/09/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. DUCHON-DORIS
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : ROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-09-23;00ma00702 ?
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