Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 26 juillet 1999 sous le n° 99MA01411, présentée pour la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE, représentée par son président en exercice, par Mes DEPIEDS et LACROIX, avocats associés ;
La CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement en date du 20 mai 1999 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a annulé, à la demande de Melle Claude Y, la décision de révocation prise à son encontre de cette dernière le 16 janvier 1995 par son président ;
2°/ de rejeter la demande de Melle Y tendant à l'annulation de la décision de révocation prise à son encontre de cette dernière le 16 janvier 1995 par le président de la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE ;
Classement CNIJ : 36-09-05
C
Elle soutient qu'elle a fait application de l'article 58 du statut du personnel administratif des chambres de métiers prévoyant la procédure d'urgence et permettant au président de l'établissement de suspendre provisoirement un agent ; que la procédure prévue à cet article 58 a été intégralement respectée ; que l'avis du conseil de discipline a été faussé par la présence d'un de ses membres opposant du président ; que le bureau de la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE n'a pas été dessaisi de son pouvoir puisqu'il a été réuni en séance extraordinaire le 16 décembre 1994 ; que dès lors le tribunal administratif ne pouvait retenir le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 57 du même statut ; qu'il y avait bien urgence justifiant la mise en oeuvre de cette procédure ; qu'en effet Melle Y n'obéissait plus à la hiérarchie et les comptes du Fond d'assurance formation dont elle était chargée, n'étaient plus à jour depuis plusieurs mois ; qu'elle diffamait les élus alors qu'en réalité elle était impliquée dans une escroquerie relative à la gestion du Fond d'assurance formation et tenant au paiement par cet organisme, à tort, de stages de formation des artisans taxi, facturés frauduleusement ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire enregistré le 24 mars 2000 présenté pour la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE tendant au sursis à exécution du jugement attaqué ;
Elle soutient que Melle Y a sollicité par acte d'huissier le 3 mars 2000 sa réintégration et sa reconstitution de carrière ; que pourtant la mesure de révocation prise à l'encontre de Melle Y a été prise selon une procédure régulière et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que de plus la réintégration effective ne peut avoir lieu dès lors que cette dernière n'est pas en raison de son invalidité en état de reprendre ses fonctions ; que la reconstitution de carrière ne saurait être due du fait du bien-fondé de la mesure de révocation ; que le sérieux des moyens et les conséquences difficilement réparables de l'exécution du jugement par la réintégration et la reconstitution de carrière de Melle Y justifie la demande de sursis ;
Vu le mémoire enregistré le 11 septembre 2000, présenté pour Melle Y, par Me SINDRES, avocat ;
Melle Y demande à la Cour :
1°/ de rejeter la demande de la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE tendant au sursis à exécution du jugement attaqué ;
2°/ de condamner la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE à lui verser la somme de 8.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Elle soutient que la procédure disciplinaire prise à son encontre est entachée d'irrégularité du fait de la méconnaissance de l'article 57 du statut des chambres de métiers ; que les motifs retenus par l'autorité disciplinaire pour tenter de justifier l'application de la procédure d'urgence ne sont pas ou ne sont que partiellement corroborés par les pièces produites et n'avaient fait l'objet d'aucune sanction disciplinaire avant la révocation ; que les moyens de l'appelante tirés de l'exécution du jugement sont inopérants ; que les moyens de fond invoqués pour l'appel du jugement ne peuvent être regardés comme de nature à justifier l'annulation dudit jugement et le rejet des conclusions à fins d'annulation de la décision la révoquant qu'elle a présentées devant le tribunal administratif ;
Vu le mémoire enregistré le 13 octobre 2000, présenté pour la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE réitérant ses conclusions à fins de sursis à exécution du jugement attaqué ;
Elle soutient que le comportement de Melle Y relatif au refus d'obéissance à tout ordre de ses supérieurs, ses assertions mensongères jetant le discrédit sur le secteur artisanal et les malversations qu'elle a opérées dans la gestion du Fond d'assurance formation dont elle était chargée empêche toute réintégration et justifie la demande de sursis à exécution du jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le statut du personnel administratif des chambres de métiers approuvé par l'arrêté du 19 juillet 1971 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2003 :
- le rapport de Mme FERNANDEZ, premier conseiller ;
- les observations de Me DEPIEDS pour la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE ;
- les observations de Me SINGER substituant Me SINDRES pour Melle Y ;
- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article 57 du statut du personnel administratif des chambres de métiers, dans sa version applicable à l'espèce : L'agent susceptible d'encourir une sanction du deuxième degré en est avisé par lettre signée du président de l'organisme employeur et suivant la procédure prévue à l'article 5, dans les huit jours de la décision du bureau. Il est en droit d'obtenir aussitôt la communication intégrale de son dossier. Il est entendu, sur sa demande, par le bureau de la chambre de métiers. Le président de la chambre de métiers doit saisir le conseil de discipline dans les quinze jours de la date de la lettre visée à l'alinéa 1er. Le conseil donne son avis dans les deux mois suivant la date à laquelle il est lui-même saisi. ; que l'article 58 de ce même statut, dans sa version applicable à l'espèce, dispose : En cas d'urgence, le président peut prononcer la suspension provisoire de l'agent. Cette mesure est immédiatement notifiée dans les formes prévues à l'article 5. Dans ce cas, le président doit saisir, dans les vingt-quatre heures, le conseil de discipline qui émet un avis dans la quinzaine de la réception sur le caractère d'urgence, sur le maintien total ou partiel ou sur la suppression du traitement pendant la durée de la suspension déjà intervenue, et sur la sanction du deuxième degré éventuellement applicable à l'agent. ;
Considérant que si les dispositions de l'article 58 précité donnent au président de la chambre de métiers le pouvoir de prononcer la suspension provisoire d'un agent, elles n'ont ni pour objet, ni pour effet, d'une part, de retirer au bureau d'une chambre de métiers les compétences que lui confère l'article 57 précité et d'autre part, de faire obstacle à la communication de son dossier à l'agent en cause et à son audition, à sa demande, par le bureau ;
Considérant que si la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE soutient que l'insubordination de Melle Y ainsi que son incurie à tenir à jour les comptes du Fond d'assurance formation dont elle avait la charge, étaient de nature à justifier la mise en oeuvre de la procédure de suspension et de convocation immédiate du conseil de discipline pour que celui-ci statue sur le cas de celle-ci dans la quinzaine de sa saisine, ces seules circonstances ne peuvent être utilement être invoquées pour justifier la méconnaissance des garanties susmentionnées prévues à l'article 57 précité au bénéfice de l'agent ; qu'en l'espèce, eu égard à la durée de la procédure disciplinaire, à compter de la notification de la lettre du 14 décembre 1994 en avisant Melle Y jusqu'à la prise de la décision de révocation du 16 janvier 1995 par le président de la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE, aucune urgence ne peut être retenue pour justifier la méconnaissance du droit de Melle Y à communication de son dossier ; qu'au surplus, et ce alors que l'avis favorable à Melle Y rendu par le conseil de discipline ne liait pas l'autorité disciplinaire en ce qui concerne la suspension de celle-ci et que cette dernière avait présenté une demande d'audition par le bureau, il n'est pas établi que l'urgence imposait au président de la Chambre de métiers requérante, de prendre dès le 16 janvier 1995, jour de réception de cette demande par l'établissement public en cause et en méconnaissant cette garantie substantielle, la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du président de la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE en date du 16 janvier 1995 prononçant la révocation de Melle Y ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune de Salon-de-Provence à verser la somme de 1.000 euros à Melle Y au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la partie perdante puisse obtenir, à la charge de son adversaire, le remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées à ce titre par la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE, doivent dès lors être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE est rejetée.
Article 2 : La CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE versera à Melle Y une somme de 500 euros (cinq cents euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la CHAMBRE DE METIERS DES BOUCHES-DU-RHONE, à Melle Y et au secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
Délibéré à l'issue de l'audience du 24 juin 2003, où siégeaient :
M. LAPORTE, président de chambre,
Mme LORANT, présidente assesseur,
Mme FERNANDEZ, premier conseiller,
assistés de Melle FALCO, greffier ;
Prononcé à Marseille, en audience publique le 16 septembre 2003.
Le président, Le rapporteur,
Signé Signé
Guy LAPORTE Elydia FERNANDEZ
Le greffier,
Signé
Sylvie FALCO
La République mande et ordonne au secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
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N° 99MA01411