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27/05/2003 | FRANCE | N°99MA00379

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre, 27 mai 2003, 99MA00379


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 5 mars 1999 sous le n° 99MA00379, présentée pour M. Abdelkader X, demeurant ... par Me COLONNA D'ISTRIA et Me GASIOR, avocats associés ;

M. X demande que la Cour :

1°/ annule le jugement en date du 17 décembre 1998 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 24 août 1994 du recteur de l'académie d'Aix-Marseille lui retirant l'emploi de directeur adjoint de la section d'éducation spécialisée du collège Loui

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 5 mars 1999 sous le n° 99MA00379, présentée pour M. Abdelkader X, demeurant ... par Me COLONNA D'ISTRIA et Me GASIOR, avocats associés ;

M. X demande que la Cour :

1°/ annule le jugement en date du 17 décembre 1998 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 24 août 1994 du recteur de l'académie d'Aix-Marseille lui retirant l'emploi de directeur adjoint de la section d'éducation spécialisée du collège Louis Armand à Marseille et la décision en date du 20 novembre 1995 du même recteur refusant de faire droit à sa demande de réintégration dans cet emploi ;

Classement CNIJ : 36-09-02-01

C

2°/ annule l'arrêté en date du 24 août 1994 du recteur de l'académie d'Aix-Marseille lui retirant l'emploi de directeur adjoint de la section d'éducation spécialisée du collège Louis Armand à Marseille et la décision en date du 20 novembre 1995 du même recteur refusant de faire droit à sa demande de réintégration dans cet emploi ;

3°/ enjoigne à l'administration de l'éducation nationale de le réintégrer dans cet emploi ou un emploi équivalent dans les trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, avec effet rétroactif sur les salaires et sur l'avancement d'échelon afférents ;

4°/ condamne l'Etat (ministère de l'éducation nationale) à lui verser la somme de 7 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Il soutient que l'arrêté du recteur comporte un certain nombre d'illégalités et d'autre part ne mentionne pas les délais de recours ; que les griefs qui lui sont faits sont matériellement douteux et ne sont pas tirés de l'intérêt du service ; que le recteur a usé de la procédure prévue à l'article 9 du décret n° 81-482 du 8 mai 1981 fixant les conditions de nomination et d'avancement dans certains emplois de direction d'établissement d'enseignement ou de formation relevant du ministre de l'éducation nationale pour lui infliger une sanction disciplinaire déguisée ; que dès lors la procédure disciplinaire et en particulier les obligations relatives à la communication du dossier et à la réunion du conseil de discipline n'ont pas été respectées ; qu'une sanction disciplinaire doit être motivée ; que la décision refusant de le réintégrer est entachée de violation de la loi dès lors qu'elle méconnaît le changement de circonstances de droit intervenues postérieurement à l'arrêté ; qu'en effet est intervenue la loi d'amnistie du 3 août 1995 qui amnistie les sanctions disciplinaires et professionnelles commises avant le 18 mai 1995 ; que dès lors, à l'occasion du recours gracieux formé le 4 juillet, l'administration était tenue, conformément aux principes généraux du droit, d'abroger la décision non réglementaire, non créatrice de droit, devenue illégale à la suite de changements dans les circonstances de fait ou de droit l'ayant motivée ; que cette décision notifiée le 8 janvier 1996 est entachée d'erreur de droit dans la mesure où elle se fonde sur un arrêté irrégulier ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 6 novembre 2000 présenté par le ministre de l'éducation nationale ;

Le ministre demande que la Cour rejette la requête ;

Il soutient que l'absence des voies et délais de recours sur l'arrêté attaqué, n'affecte pas sa légalité ; qu'en ce qui concerne sa légalité externe, cet arrêté ne constitue pas une sanction et dès lors n'a pas à être motivé ; que si M. X soutient qu'il n'a pas disposé d'assez de temps pour consulter son dossier, il a pu le consulter dès lors que la décision en cause a été prise en considération de la personne ; que ne s'agissant pas d'une sanction disciplinaire, à aucun moment la consultation d'un conseil de discipline n'a été envisagée ; que la commission paritaire académique a été consultée en application de l'article 3 du décret n° 81-482 du 8 mai 1981 fixant les conditions de nomination et d'avancement dans certains emplois de direction d'établissement d'enseignement ou de formation relevant du ministre de l'éducation nationale ; qu'en ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté attaqué, la matérialité et la qualification des faits ne sont pas erronées ; qu'il s'agit bien d'une décision prise dans l'intérêt du service notamment eu égard aux difficultés que suscitait le comportement de l'intéressé ;

Vu le mémoire enregistré le 27 août 2001, présenté pour M. X tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 28 novembre 2001, présenté par le ministre de l'éducation nationale tendant aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le décret n° 81-482 du 8 mai 1981 fixant les conditions de nomination et d'avancement dans certains emplois de direction d'établissement d'enseignement ou de formation relevant du ministre de l'éducation nationale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 2003 :

- le rapport de Mme FERNANDEZ, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant que M. X, instituteur spécialisé, a été affecté, à compter du 1er septembre 1992, sur l'emploi de directeur-adjoint de la section d'éducation spécialisée du collège Louis Armand à Marseille, après avoir exercé des fonctions similaires dans divers établissements depuis 1984 ; que sur le fondement de la procédure prévue à l'article 9 du décret susvisé du 8 mai 1981 fixant les conditions de nomination et d'avancement dans certains emplois de direction d'établissement d'enseignement ou de formation relevant du ministre de l'éducation nationale, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a décidé, par un arrêté du 24 août 1994, pour des motifs tirés de l'intérêt du service, de lui retirer les fonctions de directeur adjoint qu'il occupait à la section d'éducation spécialisée au collège Louis Armand ; que M. X ayant contesté cette décision, le recteur a refusé, par une décision du 20 novembre 1995, de faire droit à la demande de réintégration dans lesdites fonctions présentée par celui-ci ;

Sur la légalité des décisions attaquées :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport de l'inspecteur d'académie établi le 27 juin 1994 qu'il est fait grief à M. X d'avoir tenu des propos violents dans le bureau du principal le 18 octobre 1993, en présence d'enseignants de la section d'éducation spécialisée et d'avoir insulté le principal adjoint, d'avoir usurpé les prérogatives de l'ordonnateur de l'établissement en passant directement commande de fournitures sans en référer au gestionnaire, d'avoir agressé verbalement des membres du personnel de l'établissement en accusant certains de vol, d'avoir agressé physiquement des élèves, de ne pas avoir assuré un suivi des élèves, d'avoir des relations conflictuelles avec la chargée de mission à l'intégration des élèves handicapés en exerçant, sans que cela relève de sa compétence, un contrôle des auxiliaires d'intégration ayant en charge l'aide à des élèves handicapés fréquentant le collège ; que de tels faits, s'ils sont de nature à nuire à l'intérêt du service, doivent être également regardés, en tout état de cause, comme constituant, ainsi d'ailleurs que l'administration l'a souligné devant la commission consultative paritaire académique des directeurs adjoints de section d'éducation spécialisée réunie le 13 juillet 1994, des fautes et des manquements à ses obligations professionnelles retenus à l'égard de M. X ; qu'ainsi la mesure retirant à celui-ci, l'emploi de directeur adjoint de la section d'éducation spécialisée du collège Louis Armand, a revêtu le caractère d'une sanction disciplinaire ; qu'il s'ensuit que cette mesure disciplinaire, laquelle constitue un déplacement d'office, ne pouvait, en application des dispositions combinées de l'article 19 de la loi susvisée du loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de l'article 66 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, intervenir qu'après consultation du conseil de discipline compétent ; qu'il est constant qu'il n'a pas été satisfait à cette obligation ; qu'au surplus, l'arrêté attaqué ne comporte aucune motivation précise en fait, et ce en méconnaissance des dispositions de l'article 19 de la loi précitée du 13 juillet 1983 ; que dès lors l'arrêté en date du 24 août 1994 retirant à M. X l'emploi de directeur adjoint de la section d'éducation spécialisée du collège Louis Armand est entaché d'irrégularités et doit être annulé ; que par voie de conséquence, la décision du 20 décembre 1995 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a refusé de réintégrer l'intéressé dans ses fonctions doit être également annulée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L.911-3 du même code : Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L.911-1 et L.911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. ;

Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que l'administration de l'éducation nationale d'une part, réintègre M. X dans l'emploi qu'il occupait avant qu'il soit déplacé d'office par l'arrêté annulé ou dans un emploi équivalent et d'autre part, le rétablisse dans ses droits afférents ; qu'il y sera procédé dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser la somme de 1 000 euros à M. X au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement en date du 17 décembre 1998 du Tribunal administratif de Marseille, l'arrêté du 24 août 1994 et la décision du 20 novembre 1995 du recteur de l'académie d'Aix-Marseille sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'éducation nationale, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 500 euros (cinq cents euros) par jour de retard, de réintégrer M. X dans son emploi de directeur adjoint de la section d'éducation spécialisée au collège Louis Armand à Marseille ou dans un emploi équivalent et de le rétablir dans ses droits afférents.

Dans un délai d'un mois à compter de leur intervention ou au plus tard à compter de l'expiration du délai de 3 mois prévu au 1er alinéa du présent article, le ministre de l'éducation nationale justifiera auprès de la Cour des mesures prises pour assurer l'exécution du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

Délibéré à l'issue de l'audience du 29 avril 2003, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

Mme FERNANDEZ, premier conseiller,

assistés de Melle FALCO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 27 mai 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Guy LAPORTE Elydia FERNANDEZ

Le greffier,

Signé

Sylvie FALCO

La République mande et ordonne au ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

7

N° 99MA00379


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 99MA00379
Date de la décision : 27/05/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: Mme FERNANDEZ
Rapporteur public ?: M. BOCQUET
Avocat(s) : COLONNA D'ISTRIA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-05-27;99ma00379 ?
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