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20/05/2003 | FRANCE | N°00MA02165

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4 eme chambre, 20 mai 2003, 00MA02165


Vu la requête enregistrée au greffe du Conseil d'Etat le 12 mars 1999 et au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 août 2000, présentée par M. Ahmed X, demeurant ..., les mémoires complémentaires enregistrés les 23 mars et 25 mai 1999 au greffe du Conseil d'Etat et le 24 août 2000 au greffe de la cour administrative d'appel, sous le n° 00MA02165, présentés pour M. Ahmed X, par la SCP WAQUET-FARGE-HAZAN, avocats au Conseil ;

Classement CNIJ : 17-05, 54-01-07-02-04, 335-01-03

C

M. X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n°

99MA00594 en date du 23 février 1999 par lequel le magistrat délégué par le président ...

Vu la requête enregistrée au greffe du Conseil d'Etat le 12 mars 1999 et au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 août 2000, présentée par M. Ahmed X, demeurant ..., les mémoires complémentaires enregistrés les 23 mars et 25 mai 1999 au greffe du Conseil d'Etat et le 24 août 2000 au greffe de la cour administrative d'appel, sous le n° 00MA02165, présentés pour M. Ahmed X, par la SCP WAQUET-FARGE-HAZAN, avocats au Conseil ;

Classement CNIJ : 17-05, 54-01-07-02-04, 335-01-03

C

M. X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 99MA00594 en date du 23 février 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes dirigées contre la décision du 12 décembre 1997 par laquelle le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour et contre la décision du 5 février 1999 par laquelle le préfet du Var a décidé sa reconduite à la frontière, et rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui délivrer un certificat de résidence ;

2°/ d'annuler ces décisions pour excès de pouvoir ;

3°/ d'ordonner au préfet du Var de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours sous astreinte de 500 F (soit 76,22 euros) par jour de retard ;

Il soutient qu'il encourt des risques de mort en cas de retour en Algérie, son pays d'origine, où il était policier et où son neveu a été assassiné par des islamistes à son domicile le 22 novembre 1993 ; que le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; qu'il n'indique pas que la décision du 12 décembre 1997 ne mentionne pas les voies et délais de recours, ce qui faisait obstacle la mise en oeuvre du délai de recours contentieux ; que le magistrat délégué était incompétent en vertu des articles 22 bis de l'ordonnance sous-visée du 2 novembre 1945 et de l'article L.9 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel alors en vigueur pour statuer sur les conclusions dirigées contre la décision de refus de titre de séjour, même pour constater leur irrecevabilité ; que les conclusions dirigées contre la décision du 12 décembre 1997 qui ne mentionne pas les voies et délais de recours n'étaient pas irrecevables pour tardiveté ; que les exactions commises au domicile du requérant établissent l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation, et de menaces de traitements inhumains en cas de retour en Algérie en violation de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme sous-visée et de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que la simple circonstance selon laquelle l'appelant appartenait à la police algérienne suffit à justifier ses craintes de représailles ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision n° 205586 et n° 205951 en date du 28 juillet 2000 par laquelle le Conseil d'Etat a renvoyé les conclusions de la requête de M. X tendant à l'annulation du jugement du 23 février 1999 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice en tant qu'il statue sur les conclusions à fin d'annulation de la décision en date du 12 décembre 1997 par laquelle le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour à la Cour administrative de Marseille et rejeté le surplus des conclusions de la requête ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2002, présenté par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ;

Le ministre demande à la cour le rejet de la requête ;

Il soutient que le requérant ne conteste pas l'irrecevabilité qui a été opposée à ses conclusions par le jugement attaqué ; que le refus de titre de séjour contesté ne lui faisant pas obligation de retourner en Algérie, le moyen tiré des menaces auxquelles il serait exposé dans son pays d'origine ne peut qu'être rejeté ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 19 avril 2002, présenté pour M. X par la SCP WAQUET-FARGE-HAZAN ;

M. X persiste dans ses conclusions et demande en outre à la cour de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1.500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que le ministre n'est pas fondé à soutenir que le requérant n'a pas contesté l'irrecevabilité qui a été opposée à ses conclusions par le jugement attaqué ; qu'il ne lui a pas été délivré un accusé de réception de son recours gracieux lui indiquant à quelle date serait acquise une décision implicite de rejet et le délai pour contester cette décision implicite ; que le recours gracieux a valablement interrompu le délai de recours contentieux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2003 :

- le rapport de M. POCHERON, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. X dirigées contre l'arrêté de reconduite à la frontière et la décision fixant l'Algérie comme pays de destination en date du 5 février 1999 :

Considérant que le Conseil d'Etat, par une décision n° 205586 et n° 205951 en date du 28 juillet 2000, a rejeté les conclusions sus-analysées ; que, par suite, en tout état de cause, il n'y a pas lieu d'y statuer ;

Sur la régularité du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre la décision du 12 décembre 1997 et les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article 22 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 : L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière peut...demander l'annulation de cet arrêté au président du tribunal administratif. Le président ou son délégué statue dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa saisine...L'audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du commissaire du gouvernement... ; et qu'aux termes de l'article L 8-2 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel : Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public...prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif..., saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure assortie le cas échéant d'un délai d'exécution par le même jugement... ;

Considérant que la compétence spéciale attribuée par l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 au président du tribunal administratif ou à son délégué est limitée au jugement des recours formés contre les arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière ; que, s'il est saisi de conclusions tendant à l'annulation d'une décision préfectorale de refus de titre de séjour, même présentées conjointement à des conclusions dirigées contre un arrêté de reconduite à la frontière faisant suite à cette décision, ou de conclusions fondées sur l'article L. 8-2 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, le président du tribunal administratif ou son délégué n'est pas compétent pour y statuer et doit les renvoyer au tribunal administratif statuant collégialement ; qu'il suit de là que le jugement du 23 février 1999 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nice doit être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions sus-analysées ;

Considérant que la Cour administrative d'appel de Marseille, statuant en formation collégiale, est compétente pour connaître de ces conclusions rejetées par le jugement attaqué ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur ces conclusions ;

Sur la recevabilité en première instance des conclusions dirigées contre la décision du 12 décembre 1997 :

Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret susvisé du 28 novembre 1983 : Les délais opposables à l'auteur d'une demande adressée à l'administration courent de la date de la transmission à l'auteur de cette demande d'un accusé de réception mentionnant :...2°) le délai à l'expiration duquel, à défaut d'une décision expresse, la demande sera réputée acceptée ou rejetée ; 3°) S'il y a lieu, les délais et voies de recours contre la décision implicite de rejet. ;

Considérant d'une part qu'un recours gracieux ou hiérarchique ne présente pas le caractère d'une demande adressée à l'administration au sens de ces dispositions ; que, par suite, si le préfet du Var n'a pas accusé réception dans les conditions prévues à l'article 5 du décret du 28 novembre 1983 du recours gracieux formé par M. X le 20 janvier 1998 contre la décision du 12 décembre 1997 lui ayant refusé la délivrance d'un titre de séjour et qui mentionnait régulièrement les voies et délais de recours, cette circonstance n'a pu faire obstacle à ce que le délai du recours contentieux à l'encontre de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet sur ce recours ait commencé à courir au terme d'une période de quatre mois à compter de la réception de ce recours gracieux, soit le 21 mai 1998 ;

Considérant d'autre part qu'aux termes des dispositions du troisième alinéa de l'article R.102 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel alors en vigueur les intéressés disposent pour se pourvoir contre une décision implicite, d'un délai de deux mois à compter du jour de l'expiration de la période de quatre mois susmentionnée ; que, dés lors, bien que le délai de recours ait été prolongé par le recours gracieux formé le 20 janvier 1998, les conclusions dirigées contre la décision du 12 décembre 1997 sont tardives et donc irrecevables pour avoir été présentées au greffe du Tribunal administratif de Nice le 22 février 1999 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à ce qu'il soit ordonné au préfet du Var de délivrer un titre de séjour à M. X dans un délai de quinze jours sous astreinte de 500 F (soit 76,22 euros) par jour de retard ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. Ahmed X tendant à l'annulation des décisions du 5 février 1999 par lesquelles le préfet du Var a décidé sa reconduite à la frontière et fixé l'Algérie comme pays de destination.

Article 2 : Le jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nice en date du 23 février 1999 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. Ahmed X dirigées contre la décision du préfet du Var du 12 décembre 1997 ayant refusé de lui délivrer un titre de séjour et tendant à ce qu'il lui soit délivré un titre de séjour.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Ahmed X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ahmed X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 6 mai 2003, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS, président assesseur,

M. POCHERON, premier conseiller,

assistés de Mme GIORDANO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 20 mai 2003,

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

François BERNAULT Michel POCHERON

Le greffier,

Signé

Danièle GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieur et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

00MA02165 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4 eme chambre
Numéro d'arrêt : 00MA02165
Date de la décision : 20/05/2003
Sens de l'arrêt : Non-lieu
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. POCHERON
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : SCP WAQUET-FARGE-HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-05-20;00ma02165 ?
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