La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2003 | FRANCE | N°98MA00766

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre, 07 mai 2003, 98MA00766


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 13 mai 1998, sous le n° 98MA00766, présentée pour la société QUALICHROME, ayant son siège Mas de Courpoiran, Route de Lodève à Juvignac (Hérault), agissant par son gérant en exercice et représentée par Me Michel PIERCHON, avocat ;

La société QUALICHROME demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 93-275, en date du 10 mars 1998, par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté en date du 23 novembre 1992, l'autorisant à exploiter une installati

on classée sur le territoire de la commune de Juvignac ;

2°/ de condamner la comm...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 13 mai 1998, sous le n° 98MA00766, présentée pour la société QUALICHROME, ayant son siège Mas de Courpoiran, Route de Lodève à Juvignac (Hérault), agissant par son gérant en exercice et représentée par Me Michel PIERCHON, avocat ;

La société QUALICHROME demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 93-275, en date du 10 mars 1998, par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté en date du 23 novembre 1992, l'autorisant à exploiter une installation classée sur le territoire de la commune de Juvignac ;

2°/ de condamner la commune de Juvignac à lui verser, sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, une somme de 15 000 F ;

Classement CNIJ : 44-02

C

La société QUALICHROME soutient :

- que c'est à tort que les premiers juges ont retenu la recevabilité de la requête, dès lors que le maire de Juvignac n'avait pas régulièrement reçu du conseil municipal, une délégation pour présenter devant le tribunal une requête en annulation pour le compte de la commune ;

- que le jugement attaqué, en ce qu'il est intervenu plus de cinq ans et demi après le dépôt de la requête, a enfreint les dispositions du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme, en privant le défendeur en première instance du droit à voir le litige, auquel il a été attrait, dans un délai raisonnable ;

- que la zone d'implantation de l'unité de traitement de surfaces de métaux par voie électrolytique et chimique, autorisée par l'arrêté préfectoral litigieux du 23 novembre 1992, était classée NC et non NB, ainsi que l'a à tort retenu le tribunal administratif ;

- que l'installation en cause ne présentait aucun risque pour les populations et ce, d'autant moins que des prescriptions précises lui ont été imposées ;

- que le dossier soumis à l'enquête publique comportait une étude de danger ainsi qu'une étude d'impact conforme à la loi du 19 juillet 1976 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 février 1999, présenté pour la commune de Juvignac par la SCP d'avocats COULOMBIE-GRAS, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société QUALICHROME à lui verser la somme de 5 000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

La commune de Juvignac soutient :

- que la requête de la commune devant le tribunal administratif était parfaitement recevable au regard des dispositions de l'article L.2122-22-16° du code général des collectivités territoriales, la compétence du maire pour ester en justice ayant été acquise dès le 28 avril 1989, et ayant été, en tout état de cause, régularisée antérieurement à la date du jugement, par une délibération, en date du 2 février 1998, du conseil municipal ;

- que l'unité, dont l'exploitation a été autorisée par l'arrêté préfectoral du 23 novembre 1992, se situe en zone NB 1 du POS et non, comme soutenu à tort par l'appelante, en zone NC ;

- que le point 2. du second paragraphe du règlement de la zone NB n'admet la présence des installations classées que dans la mesure où celles-ci sont nécessaires au fonctionnement de la zone, ce qui n'est, à l'évidence pas le cas d'une unité de traitement de surface des métaux ;

- que l'arrêté préfectoral en litige était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- que le dossier soumis à enquête ne comportait ni étude d'impact suffisante, ni étude de danger ;

Vu, enregistré le 25 mai 1999, le mémoire en défense produit par le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, tendant à l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Montpellier en date du 10 mars 1998 ;

Le ministre soutient :

- que le préfet de l'Hérault avait pu, à juste titre, considérer que l'activité d'un atelier de traitement de surface de métaux par voie électrolytique et chimique, ne présentait pas le caractère d'une activité qui, par sa nature et son ampleur, doit nécessairement être regardée comme comptant au nombre de celles qui ne peuvent être autorisées qu'en méconnaissance de la destination de la zone NB ;

- que la distance, de près de 150 mètres entre la localisation de l'atelier et celles des premières habitations, suffit à éloigner tout risque de nuisance pour le voisinage ; qu'au demeurant, des prescriptions précises avaient été imposées à l'exploitant par l'arrêté querellé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu, la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu, la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 ;

Vu, le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2003 :

- le rapport de M. LOUIS, premier conseiller ;

- les observations de Me Y..., substituant Me PIERCHON pour la société QUALICHROME ;

- les observations de Me X..., de la SCP COULOMBIE-GRAS-CRETIN, pour la commune de Juvignac ;

- et les conclusions de M. BENOIT, premier conseiller ;

Considérant que, par un jugement en date du 10 mars 1998, le Tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté en date du 23 novembre 1993, par lequel le préfet de l'Hérault a autorisé la société QUALICHROME, sur le fondement des dispositions de la loi susvisée du 19 juillet 1976, à exploiter un établissement de traitement de surface de métaux par voie électrolytique et chimique sur le territoire de la commune de Juvignac ; que la société QUALICHROME interjette appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle... ; que si de telles dispositions sont de nature, dans la mesure où l'appelante s'y croirait fondée, à lui permettre de rechercher la responsabilité de l'Etat, en raison de la longueur, qu'elle juge excessive, de la procédure devant le tribunal administratif, elles sont toutefois inopérantes au soutien de conclusions tendant à remettre en cause la régularité du jugement frappé d'appel ;

Sur la recevabilité de la requête de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article L.2122-22 du code général des collectivités territoriales : Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 16° d'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal... ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne fait toutefois obstacle à ce qu'un conseil municipal, en application des dispositions précitées, autorise à une date postérieure à l'introduction de la requête devant le tribunal administratif, son maire à ester en justice pour le compte de la commune ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'une telle autorisation a été donnée par le conseil municipal de la commune de Juvignac à son maire, au plus tard, le 2 février 1998 ; que la société QUALICHROME n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a jugé recevable la requête de la commune de Juvignac, dirigée contre l'arrêté préfectoral du 23 novembre 1992 ;

Sur la légalité de l'arrêté en date du 23 novembre 1992 du préfet de l'Hérault :

Considérant qu'aux termes de l'alinéa 1er de l'article R.123-31 du code de l'urbanisme : Les opérations, travaux et occupations du sol mentionnées à l'article R.123-26 (1er alinéa) ne peuvent être autorisées que si elles sont compatibles avec les dispositions du plan. ; que l'ouverture d'installations classées compte au nombre des opérations visées par l'article R.123-26 du code de l'urbanisme ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la société QUALICHROME, il ressort de l'examen des pièces du dossier, que l'unité de traitement de surface de métaux par voie électrolytique et chimique, qui a été autorisée par l'arrêté du préfet de l'Hérault en date du 23 novembre 1992, se situait dans une zone classée NB 1 du plan d'occupation des sols de la commune de Juvignac ; qu'aux termes du premier paragraphe de l'article NB dudit règlement : Ne sont admises que les occupations et utilisations du sol ci-après : (...) 7.- les installations classées pour la protection de l'environnement, sous réserve du § II ci-après... ; que le second paragraphe du règlement de la zone NB dispose : Toutefois, les occupations et utilisations du sol suivantes ne sont admises que si elles respectent les conditions ci-après : (...) les installations classées ne sont admises que si elles sont nécessaires au fonctionnement de la zone et si elles ne présentent pas de risque ou de nuisance pour leur voisinage... ; que, nonobstant les circonstances alléguées, que l'atelier exploité par la société QUALICHROME était éloigné des habitations les plus proches, et que les prescriptions qui ont été imposées à la société appelante par l'arrêté préfectoral querellé, étaient de nature à prévenir tout risque de danger ou de nuisance pour le voisinage, il n'en résulte pas moins clairement de ce qui précède, que seule l'exploitation des installations classées nécessaires au fonctionnement de la zone pouvait être regardée comme compatible avec les dispositions applicables du plan d'occupation des sols de la commune ; que l'activité de traitement électrolytique ou chimique des surfaces de métaux ne saurait être regardée comme comptant au nombre des activités nécessaires au fonctionnement de la zone NB ; que dès lors, la société QUALICHROME n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé l'arrêté préfectoral du 23 novembre 1992, valant autorisation d'exploiter une installation classée ;

Sur les conclusions de la société QUALICHROME, tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de la partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. ; que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Juvignac, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la société QUALICHROME, la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

Sur les conclusions de la commune de Juvignac, tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune de Juvignac tendant au remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société QUALICHROME est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Juvignac tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société QUALICHROME, à la commune de JUVIGNAC et au ministre de l'écologie et du développement durable.

Délibéré à l'issue de l'audience du 10 avril 2003, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

M. LAFFET, président assesseur,

M. LOUIS , premier conseiller,

assistés de Mme GUMBAU, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 7 mai 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Marc ROUSTAN Jean-Jacques LOUIS

Le greffier,

Signé

Lucie GUMBAU

La République mande et ordonne au ministre de l'écologie et du développement durable, en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 98MA00766 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 98MA00766
Date de la décision : 07/05/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: M. LOUIS
Rapporteur public ?: M. BENOIT
Avocat(s) : PIERCHON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-05-07;98ma00766 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award