La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/04/2003 | FRANCE | N°98MA01651

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre, 10 avril 2003, 98MA01651


Vu, 1°/ la requête transmise par télécopie, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 septembre 1998 sous le n° 98MA01651, présentée pour M. et Mme Y, demeurant ..., par Me POLETTI, avocat ;

M. et Mme Y demandent à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 97-909/97-910 en date du 10 juillet 1998 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a, à la demande de M. X et autres, annulé l'arrêté en date du 3 octobre 1997 par lequel le maire de LECCI a délivré, au nom de l'Etat, à M. et Mme Y un permis de construire une maison individuel

le sur le lot ... ;

Classement CNIJ : 68-03-03-01-01

C

2°/ de rejeter la ...

Vu, 1°/ la requête transmise par télécopie, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 septembre 1998 sous le n° 98MA01651, présentée pour M. et Mme Y, demeurant ..., par Me POLETTI, avocat ;

M. et Mme Y demandent à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 97-909/97-910 en date du 10 juillet 1998 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a, à la demande de M. X et autres, annulé l'arrêté en date du 3 octobre 1997 par lequel le maire de LECCI a délivré, au nom de l'Etat, à M. et Mme Y un permis de construire une maison individuelle sur le lot ... ;

Classement CNIJ : 68-03-03-01-01

C

2°/ de rejeter la demande de première instance ;

3°/ de condamner M. X, l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien et l'Association pour le Libre Accès aux Plages et la Défense du Littoral à leur verser conjointement la somme de 15.000 F sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Ils soutiennent, en premier lieu, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé le permis de construire sur le moyen tiré de la violation de l'article L.146-4-III du code de l'urbanisme dès lors que le terrain d'assiette du projet contesté est situé dans un espace urbanisé auquel ne pouvaient être appliquées les dispositions dudit article ; qu'en effet, pour déterminer si un espace est urbanisé au sens de cet article, le juge retient la technique du faisceau d'indices ; qu'en l'espèce, des éléments de fait, tels que la situation du terrain dans un lotissement pour l'essentiel construite, la desserte du terrain par les réseaux, la proximité de constructions et l'existence sur le terrain en cause d'une maison destinée à être démolie, permettent de conclure que le terrain d'assiette est situé dans un espace urbanisé ;

Ils soutiennent, en deuxième lieu, sur les autres moyens invoqués en première instance, en ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme, que ce moyen est inopérant dès lors que la règle de l'extension limitée de l'urbanisation ne s'applique pas dans un espace urbanisé, comme c'est le cas en l'espèce ainsi qu'il a été démontré ci-dessus ; que s'agissant du moyen tiré de la violation de l'article R.111-14-1 a du code de l'urbanisme, il convient de rappeler que les dispositions de cet article ne sont pas applicables dans les espaces urbanisés et qu'en tout état de cause, il n'est pas fondé, au regard de la jurisprudence dégagée en la matière, dès lors que le projet autorisé est situé à proximité de bâtiments existants ; que le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article R.111-21 du même code n'est pas non plus fondé dès lors que tant le volume que l'architecture du projet contesté sont de nature à permettre son insertion harmonieuse dans le site ; qu'en ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L.111-1-2 du code de l'urbanisme, ce moyen est inopérant dès lors que le terrain d'assiette est situé dans un espace déjà urbanisé ; que le moyen tiré de la violation de l'article L.123-5 du même code n'est pas fondé dès lors qu'aucune décision de sursis à statuer n'avait à être prise, le POS de la commune étant simplement en cours d'étude à la date de délivrance du permis de construire attaqué et la construction envisagée n'étant pas de nature à rendre l'exécution de ce plan plus onéreuse ; qu'enfin le moyen tiré de la méconnaissance par le projet contesté des dispositions du cahier des charges du lotissement relatives à l'implantation des constructions n'est pas non plus fondé, le projet respectant les règles de recul fixées par le plan d'aménagement du lotissement ; qu'il en est de même en ce qui concerne les règles de hauteur, la disposition invoquée par les requérants figurant dans le règlement de copropriété, relevant du droit privé, et non dans le cahier des charges du lotissement ;

Vu l'exemplaire original de la requête susvisée, enregistré le 18 septembre 1998 ;

Vu le mémoire en défense, enregistrée le 4 décembre 1998, présenté par M. X, l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien (A.D.I.S.C.) et l'Association pour le Libre Accès aux Plages et la Défense du Littoral (A.L.A.P.D.L.) et par lequel ils concluent au rejet de la requête et à ce que M. et Mme Y et/ou le ministre de l'équipement, des transports et du logement soient condamnés à leur verser la somme de 7.500 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Ils font valoir, en premier lieu, que c'est à bon droit que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé le permis de construire contesté sur le moyen tiré de la violation de l'article L.146-4-III du code de l'urbanisme dès lors d'une part qu'il est constant que le projet doit s'implanter dans la bande des cent mètres du rivage et qu'il ressort des pièces versées aux débats que le terrain d'assiette est situé dans un espace qui ne peut être considéré comme urbanisé dès lors qu'il se situe dans un environnement naturel et boisé, environné que de quelques constructions éparses et n'est pas relié de façon complète aux réseaux publics ; qu'à tout le moins, sans se questionner sur les conditions d'application de l'article L.146-4-III du code précité, le tribunal administratif aurait pu soulever d'office, les dispositions de la loi littoral étant d'ordre public, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L.146-6 du même code dès lors que l'espace en cause constitue un espace remarquable au sens de cet article ; qu'à cet égard, il convient de noter que le schéma d'aménagement de la Corse a classé le secteur en cause parmi les espaces particulièrement sensibles ;

Ils soutiennent, en second lieu, à titre subsidiaire, sur les autres moyens de première instance, que le projet contesté méconnaît également les dispositions de l'article L.146-4-I et II du code de l'urbanisme dès lors, qu'à supposer que le projet constitue une extension limitée de l'urbanisation, celle-ci n'était pas justifiée par le POS dès lors qu'aucun POS n'était applicable sur le territoire de la commune et qu'à défaut d'un tel document le projet devait être soumis à l'avis de la commission départementale des sites, ce qui n'a pas été fait ; que la violation des dispositions de l'article R.111-14-1 et L.111-1-2 du même code est également certaine dès lors que l'espace en cause a conservé son caractère naturel ; qu'il en est de même de la violation de l'article R.111-21 du code de l'urbanisme compte tenu de la hauteur de la construction envisagée ; qu'enfin une décision de sursis à statuer aurait dû être prise sur la demande de permis de construire ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 mars 1999, présenté pour M. et Mme Y et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leur requête et par les mêmes moyens ;

Ils font valoir, en outre, que pour déterminer si un espace doit être regardé comme urbanisé, il faut prendre en compte le voisinage immédiat du terrain d'assiette ; que pour cette qualification, le classement au POS est indifférent ; qu'enfin, le secteur d'implantation du projet n'est pas boisé ; que le projet ne constitue pas une extension de l'urbanisation puisque le projet permet uniquement la reconstruction pour une même surface de la maison qui était existante et qui a été démolie ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 juin 1999, présenté par M. X et autres et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leur mémoire susvisé et par les mêmes motifs ;

Ils font valoir, en outre, en ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme, que contrairement à ces dispositions, l'accord explicite du préfet n'a pas été sollicité ni a fortiori obtenu ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 1999, présenté par M. X et autres et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 janvier 2000, présenté pour M. et Mme Y et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leur requête et leur mémoire susvisé et par les mêmes moyens ;

Ils font valoir, en outre, qu'il convient, pour déterminer le caractère urbanisé de l'espace en cause, en l'espèce d'appliquer la même solution que celle dégagée par l'arrêt de la Cour de céans rendu le 3 juin 1999 dans l'espèce S.C.I. MARE ET FIORI ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er février 2000, présenté par M. X et autres et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ;

Ils font valoir, en outre, que l'arrêt cité par M. et Mme Y n'est pas transposable en l'espèce, les circonstances de fait étant différentes ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 avril 2000, présenté par M. X et autres et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ;

Vu le mémoire transmis par télécopie, enregistré le 31 mai 2000, présenté, au nom de l'Etat, par le ministre de l'équipement, des transports et du logement et par lequel il conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête de M. et Mme Y ;

Il soutient, en premier lieu, que le tribunal administratif ne pouvait retenir le moyen tiré de la violation de l'article L.146-4-III du code de l'urbanisme dès lors que le projet contesté était situé dans un espace urbanisé ;

Il soutient, en deuxième lieu, s'agissant du moyen tiré de la violation de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme, que si cet article s'applique, selon un arrêt récent du Conseil d'Etat, dans les espaces urbanisés, le permis contesté est conforme aux dispositions de cet article dès lors qu'il n'avait pas à respecter les critères fixés par cet article dans la mesure où il était compatible avec le schéma d'aménagement de la Corse et qu'en présence d'un tel document, l'avis de la commission départementale des sites n'est pas requis ;

Il soutient, en troisième lieu, que les dispositions de l'article L.146-6 du code de l'urbanisme ne sont pas en l'espèce applicables dès lors que le secteur en cause est urbanisé ;

Il soutient, enfin, que le projet contesté respecte les dispositions du règlement national d'urbanisme ; que les moyens tirés du non-respect de certaines dispositions du cahier des charges du lotissement et du POS de la collectivité doivent être rejetés dès lors d'une part que le permis de construire n'a pas pour objet de sanctionner des règles de droit privé et que d'autre part le POS de la commune en cours d'élaboration n'était pas opposable aux tiers au jour de la délivrance du permis contesté ;

Vu l'exemplaire original du mémoire susvisé, enregistré le 5 juin 2000 ;

Vu le mémoire transmis par télécopie, enregistré le 6 juin 2000, présenté par M. X et autres et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ;

Ils soutiennent, en outre, que, contrairement à ce que soutient le ministre, en ce qui concerne les conditions d'application de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme, ce n'est qu'en l'absence de POS, que la commission des sites doit être consultée, sans que le ministre puisse invoquer le caractère opposable du schéma d'aménagement de la Corse, dont, au demeurant, la carte Mise en valeur de la Mer ne prévoit concernant ce large secteur qu'un espace à dominante de structuration urbaine et non d'un espace entièrement urbanisé ; que le cahier des charges du lotissement est opposable au permis de construire contesté dès lors que le lotissement en cause a été approuvé par le préfet avant 1977 ;

Vu l'exemplaire original du mémoire susvisé, enregistré le 7 juin 2000 ;

Vu le mémoire transmis par télécopie, enregistré le 17 juillet 2000, présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement et par lequel il conclut aux mêmes fins que son mémoire susvisé et par les mêmes moyens ;

Il fait valoir, en outre, que l'arrêt du Conseil d'Etat de 1997, invoqué par M. X et autres dans leur mémoire et concernant l'application de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme, n'est pas transposable dès lors que cet arrêt a été rendu concernant un permis de construire délivré avant l'approbation du schéma d'aménagement de la Corse ;

Vu l'exemplaire original du mémoire susvisé, enregistré le 20 juillet 2000 ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 septembre 2000, présenté par M. X et autres et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 janvier 2001, présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement et par lequel il conclut aux mêmes fins que ses mémoires susvisés et par les mêmes moyens ;

Il fait valoir, en outre, que la demande de frais irrépétibles présentée par M. X et autres, qui n'ont pas recouru au ministère d'un avocat est surévalué ; que concernant l'application de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme, le Conseil d'Etat a précisé dans un arrêt de 1998 que l'avis de la commission départementale des sites n'était pas requis lorsque comme en l'espèce le projet de construction est compatible avec un schéma d'aménagement de la mer ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 février 2001, présenté par M. X et autres et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ;

Vu les ordonnances du président de la formation de jugement portant successivement clôture de l'instruction au 5 juin 2000, au 17 juillet 2000, ensemble les ordonnances en date des 14 juin et 4 septembre 2000 portant réouverture de l'instruction ;

Vu, 2°/, le recours sommaire transmis par télécopie, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 18 septembre 1998 sous le n° 98MA01674, présenté au nom de l'Etat par le ministre de l'équipement, des transports et du logement ;

Le ministre demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 97-909/97-910 en date du 10 juillet 1998 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a, à la demande de M. X et autres, annulé l'arrêté en date du 3 octobre 1997 par lequel le maire de Lecci a délivré, au nom de l'Etat, à M. et Mme Y un permis de construire une maison individuelle sur le lot ... ;

2'/ de rejeter la demande de première instance de M. X et autres ;

Il soutient, en premier lieu, que la demande de première instance était irrecevable dès lors que ni M. X, qui n'était pas un voisin immédiat du projet contesté, ni l'Association de défense des intérêts de Saint Cyprien ne justifiaient d'un intérêt à contester le permis de construire en litige ;

Il soutient, en deuxième lieu, qu'en annulant le permis de construire contesté, le tribunal administratif a commis une erreur dans l'appréciation des faits ; qu'en effet, la parcelle d'assiette du projet contesté, qui se situe dans le lotissement de la Testa Rossa, est située en continuité de l'urbanisation entreprise depuis l'édification de ce lotissement en 1959 et doit être regardée comme incluse dans un espace urbanisé ; qu'il développera son argumentation dans un mémoire ampliatif qu'il déposera ultérieurement ;

Vu l'exemplaire original de la requête susvisée, enregistré le 28 septembre 1998 ;

Vu le mémoire complémentaire transmis par télécopie, enregistré le 24 novembre 1998, présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement et par lequel il conclut aux mêmes fins que la requête et par les mêmes moyens ;

Il fait valoir, en outre, que s'il est constant que le terrain d'assiette du projet litigieux se situe dans une bande de cent mètres à compter du rivage, il se situe, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif dans un espace urbanisé ; qu'en effet, deux des trois propriétés contiguës à la parcelle d'assiette du projet contesté sont bâties et d'autres constructions se trouvent à proximité ; que la construction litigieuse ne jouxte pas l'espace naturel dès lors que le chemin de service qui borde ledit terrain constitue une limite de l'urbanisation et le sépare de la zone naturelle de la presqu'île de la Testa Rossa, vierge de toute construction, et à laquelle le projet contesté ne porte pas atteinte ; que le terrain en cause se trouve dans un lotissement ancien complètement équipé, ce secteur se caractérisant par un habitat diffus ; que ledit terrain est desservi par les réseaux d'eau et d'électricité et peut disposer d'un système d'assainissement individuel même s'il n'est pas desservi par un réseau d'assainissement collectif ; que la construction litigieuse sera édifiée sur une parcelle sur laquelle existait antérieurement une construction ; qu'ainsi, il existe un faisceau d'indices permettant d'affirmer que le terrain en cause est situé dans un espace urbanisé, circonstance qui exclut la possibilité de l'application de l'article L.146-4-III du code de l'urbanisme ; qu'ainsi le moyen tiré de la violation de cet article doit être rejeté ;

Il soutient, également, que cette urbanisation, qui est conforme aux dispositions du schéma d'aménagement de la Corse et compatible avec celles du schéma de mise en valeur de la mer de la Corse, et pour laquelle en conséquence les critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau, tels que fixés par l'article L.146-4-II du même code, ne sont pas applicables, ne saurait être regardée comme constitutive d'une extension de l'urbanisation au sens dudit article dès lors que le terrain d'assiette est situé dans un espace urbanisé ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme doit être rejeté ;

Il soutient, par ailleurs, en ce qui concerne les moyens tirés de la violation des dispositions des articles L.110, L.111-1-2 et L.111-1-3 du code de l'urbanisme, que ceux-ci doivent également être rejetés ; qu'en effet, les requérants n'établissent pas en quoi le projet contesté méconnaîtrait l'article L.110 du code de l'urbanisme alors qu'au demeurant cet article affirme des principes généraux et que ses dispositions ne sont pas d'application directe ; que l'article L.111-1-2 du même code est inapplicable au cas d'espèce dès lors que le terrain est dans un espace urbanisé ; que le moyen tiré de la violation de l'article L.111(1(3 dudit code n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ;

Il soutient, en outre, que le projet contesté ne peut être regardé comme favorisant une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants dès lors que le terrain d'assiette est situé dans un espace urbanisé et ne porte atteinte ni à l'environnement ni au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants ; que les requérants n'établissent pas que le maire aurait commis une erreur d'appréciation en accordant le permis en litige ; qu'ainsi, les moyens tirés de la violation des articles R.111-14-1, R.111(14-2 et R.111-21 du code de l'urbanisme doivent être rejetés ;

Il soutient, enfin, que l'autorité compétente n'est jamais tenue d'opposer un sursis à statuer ; qu'en outre, le plan d'occupation des sols (POS) de la commune de Lecci était seulement à l'étude et la construction projetée n'était pas de nature à rendre plus onéreuse l'exécution du futur POS ; qu'ainsi le moyen tiré de l'obligation pour l'autorité compétente de surseoir à statuer sur la demande de permis de construire en litige doit être rejeté ;

Vu l'exemplaire original du mémoire susvisé, enregistré le 27 novembre 1998 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 1999, présenté par M. X, l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien (A.D.I.S.C.) et par l'Association pour le Libre Accès aux Plages et la Défense du Littoral (A.L.A.P.D.L.) et par lequel ils concluent au rejet de la requête et à ce que M. et Mme Y et/ou le ministre de l'équipement, des transports et du logement soient condamnés à leur verser la somme de 7.500 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Ils soutiennent, en premier lieu, que M. X, tant en sa qualité de contribuable de la commune de Lecci que de sa qualité de propriétaire du lot n° 131 du lotissement Saint Cyprien situé en bordure de la baie de Saint Cyprien et un peu au Nord de la pointe de la Testa où se situe le projet contesté, justifie d'un intérêt à contester le permis en litige ; qu'il en est de même de l'A.D.I.S.C. et de l'A.L.A.P.D.L. , au regard de leurs objets statutaires ;

Ils soutiennent, en second lieu, sur le fond, que le terrain d'assiette du projet en litige est situé dans la bande des cent mètres et dans un secteur naturel et boisé ainsi qu'il ressort des photographies versées aux débats ; que ledit terrain, distant de 6 kilomètres de l'agglomération, n'est environné que d'une seule construction située à vingt mètres et cinq autres espacées sur plusieurs centaines de mètres aux alentours ; qu'ainsi, l'espace en cause n'est pas urbanisé ; qu'il n'existe pas de limite de l'urbanisation, le lotissement existant ne constituant ni une agglomération ni un hameau nouveau au sens de la loi Littoral ; qu'on ne peut considérer qu'un chemin de service, privé et étroit, desservant un terrain, constitue une limite de l'urbanisation ;

Ils soutiennent, en outre, que l'habitat éloigné et diffus à l'ouest seulement du terrain en litige ne justifie pas une extension dans un espace proche du rivage vierge de toute construction ; qu'une extension dans un tel espace ne peut être envisagée à défaut de justification précise et motivée dans le POS et d'avis préalable de la commission départementale des sites, ainsi que l'exigent les dispositions de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme ; que le terrain d'assiette n'est pas complètement desservi par les réseaux publics ; que la circonstance qu'une construction existait plus de cinq ans avant la délivrance du permis de construire en litige est sans influence sur la délivrance dudit permis de construire ; que la pointe de la Testa et la baie de Saint Cyprien font partie des pays côtiers déterminés par le schéma d'aménagement de la Corse pour lesquels seule une extension limitée de l'urbanisation est autorisée ; qu'en l'espèce, le projet se situant dans un espace non urbanisé, le projet de construction ne pouvait être autorisé ;

Ils soutiennent, également, que cet espace naturel était inconstructible en vertu des dispositions de l'article L.146-6 du code de l'urbanisme ; qu'ils maintiennent leur argumentation relative aux règles générales d'utilisation du sol et aux dispositions du règlement national d'urbanisme (RNU) ; que l'autorité compétente était tenue d'opposer un sursis à statuer à la demande de permis de construire compte tenu de l'état d'avancement du POS de la commune et de ce que la construction, à défaut de desserte par le réseau d'assainissement collectif, était de nature à rendre plus onéreuse l'exécution du plan ; qu'en fin, le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R.111-21 du code de l'urbanisme ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 1999, présenté par M. X et autres et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leur mémoire susvisé et par les mêmes motifs ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 avril 2000, présenté par M. X et autres et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ;

Vu l'ordonnance du président de la formation de jugement fixant la clôture de l'instruction au 5 juin 2000 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code général des impôts ;

Vu la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2003 :

- le rapport de Mme BUCCAFURRI, premier conseiller ;

- les observations de Me CUGNET substituant Me TIRARD pour M. et Mme Y ;

- les observations de M. Paul X en son nom propre et en sa qualité de président de l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien ;

- et les conclusions de M. BENOIT, premier conseiller ;

Sur la jonction des requêtes :

Considérant que les requêtes susvisées enregistrées sous les n° 98MA01651 et 98MA01674 sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statuer par une seule décision ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par l'Etat à la demande de première instance :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, que les requêtes déposées par M. X et autres devant le tribunal administratif comportaient le timbre fiscal prévu par les dispositions de l'article 1089 B du code général des impôts ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée à ce titre par le préfet de Corse, préfet de Corse du Sud, doit être écartée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le permis délivré à M. et Mme Y avait pour objet d'autoriser la construction d'une maison à usage d'habitation R+1, d'une SHON de 411 m², sur un terrain situé sur la commune de Lecci dans un site boisé sur une presqu'île proche du rivage ; que l'A.D.I.S.C. a, en vertu de l'article 2 de ses statuts, notamment pour objet la protection de l'environnement, des sites et plages, du respect des lois et règlements d'urbanisme dans la commune de Lecci ; qu'eu égard à son objet statutaire, ladite association justifiait d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation du permis de construire délivré à M. et Mme Y ; qu'il en est de même pour l'A.L.A.P.D.L. dès lors que cette association a pour objet notamment sur le territoire de la commune de Lecci de protéger et de sauvegarder l'environnement naturel et le cadre de vie desdites communes, de défendre et sauvegarder l'espace littoral, de mettre en oeuvre toute action pour faire appliquer les lois et règlements relatifs à la protection de l'environnement à l'urbanisme ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'intérêt à agir de M. X, la fin de non-recevoir opposée à ce titre par le ministre doit être écartée ;

Sur la légalité du permis de construire en date du 3 octobre 1997 :

Considérant que, par l'arrêté contesté en date du 3 octobre 1997, le maire de Lecci, agissant au nom de l'Etat, a délivré à M. et Mme Y un permis de construire, en vue de la réalisation d'une maison à usage d'habitation R+1 d'une SHON de 411 m², sur le lot ... situé sur le territoire de la commune de Lecci (Corse du Sud) ; que, par le jugement attaqué en date du 10 juillet 1998, le Tribunal administratif de Bastia a annulé ledit permis de construire sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L.146-4-III du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.146-4-III du code de l'urbanisme, dans sa rédaction résultant de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 applicable au présent litige : En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée./ Cette interdiction ne s'applique pas aux constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Leur réalisation est toutefois soumise à enquête publique suivant les modalités de la loi n° 83(630 du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement... ; qu'il résulte de ces dispositions que, dans la bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage, sont interdits, sous réserve des exceptions limitativement énumérées, les constructions et installations en dehors des espaces en fait urbanisés ; qu'eu égard au but en vue duquel le législateur a posé cette règle, l'espace à prendre en considération, pour déterminer s'il était en fait urbanisé à la date de délivrance du permis de construire, doit être regardé comme constitué par le voisinage immédiat du terrain d'assiette du projet de construction ;

Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que le terrain d'assiette du projet de construction en litige est situé dans la bande de cent mètres du rivage, et plus spécifiquement à 25 m de la plage ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan produit par M. et Mme Y, qu'à la date de délivrance du permis de construire attaqué, le terrain d'assiette du projet de construction en cause, dont il est constant qu'il est distant de 6 kilomètres du village de Lecci, était environné à l'Ouest par la presqu'île de La Testa Rossa, zone naturelle ne comprenant qu'une seule construction ultérieurement détruite contiguë au terrain d'assiette et au Nord par la baie de San Ciprianu ; que si à l'Est dudit terrain, deux constructions étaient édifiées dont l'une se situait sur une parcelle contiguë à une distance de 20 m et si deux autres constructions étaient implantées au Sud à 140 m de distance, il ressort des pièces du dossier, et notamment des photographies produites au dossier que l'habitat environnant le terrain d'assiette se caractérisait par un habitat diffus inséré dans un massif couvert de végétation ; que si le ministre fait valoir en appel que le terrain d'assiette du projet contesté était bordé à l'Ouest par un chemin de service qui avait pour effet de le séparer de la partie naturelle de l'espace dans lequel s'insérait le projet de construction, il ne ressort pas des pièces du dossier que les caractéristiques dudit chemin, qui assurait l'accès des piétons à la plage, puissent le faire regarder comme formant une coupure entre un espace urbanisé et un espace naturel ; qu'il est par ailleurs constant que le terrain d'assiette n'était pas relié au réseau public d'assainissement ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que ledit terrain, alors même qu'il est intégré dans un lotissement et qu'il avait supporté quelques années auparavant une construction ultérieurement démolie, doit être regardé comme inséré dans un espace non urbanisé au sens des dispositions législatives précitées ; qu'il suit de là que la construction y était interdite sur la bande de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ; que, par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé le permis de construire en litige sur le motif tiré de la violation des dispositions de l'article L.146-4-III du code de l'urbanisme ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X et autres, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, soient condamnés à payer à M. et Mme Y une somme au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à l'A.D.I.S.C et à l'A.L.A.P.D.L. la somme de 500 euros au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de l'appel interjeté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement, que les requêtes susvisées doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes susvisées, enregistrées sous les n° 98MA01651 et 98MA01674 sont rejetées.

Article 2 : L'Etat (ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer) est condamné à payer à l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien et l'Association pour le Libre Accès aux Plages et la Défense du Littoral la somme de 500 euros (cinq cents euros) sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions formulées par M. X et l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien et l'Association pour le Libre Accès aux Plages et la Défense du Littoral sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Y, au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, à M. X, à l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien, à l'Association pour le Libre Accès aux Plages et la Défense du Littoral et à la commune de Lecci.

Délibéré à l'issue de l'audience du 27 mars 2003, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

M. HERMITTE et Mme BUCCAFURRI, premiers conseillers,

assistés de Mlle RANVIER, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 10 avril 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Marc ROUSTAN Isabelle BUCCAFURRI

Le greffier,

Signé

Patricia RANVIER

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 98MA01651 98MA01674 14


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 98MA01651
Date de la décision : 10/04/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: Mme BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. BENOIT
Avocat(s) : TIRARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-04-10;98ma01651 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award