Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, le 24 décembre 1997 sous le n° 97MA05541, présentée pour M. Hervé Y..., demeurant Val Chantant, Valcros à Aix-en-Provence (13090), par Me X..., avocat ;
M. Y... demande à la Cour d'annuler le jugement n° 94-6927 en date du 6 novembre 1997 par lequel le Tribunal administratif de Marseille :
1°) a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des différentes décisions le privant de la possibilité de reprendre ses fonctions du 30 mars 1992 au 2 mai 1994 et à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 42.096,99 F au titre du préjudice matériel et la somme de 100.000 F au titre du préjudice moral ;
2°) a mis à sa charge le montant des frais d'expertise ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 septembre 2000 :
- le rapport de M. BEDIER, premier conseiller ;
- les observations de Me X... pour M. Y... ;
- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;
Considérant que, par jugement en date du 6 novembre 1997, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté les demandes de M. Y... tendant à l'annulation des différentes décisions le plaçant d'office en congé de longue maladie puis en congé de longue durée du 30 mars 1992 au 2 mai 1994 et à la condamnation de l'Etat à lui payer respectivement les sommes de 42.096,99 F et de 100.000 F au titre du préjudice matériel et du préjudice moral qu'il aurait subis du fait de l'intervention de ces décisions ; que M. Y... relève régulièrement appel de ce jugement;
Considérant qu'aux termes de l'article 34 du décret du 14 mars 1986 relatif notamment au régime de congés de maladie des fonctionnaires : "Lorsqu'un chef de service estime, au vu d'une attestation médicale ou sur le rapport des supérieurs hiérarchiques, que l'état de santé d'un fonctionnaire pourrait justifier qu'il lui soit fait application des dispositions de l'article 34 (3° ou 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, il peut provoquer l'examen médical de l'intéressé dans les conditions prévues aux alinéas 3 et suivants de l'article 35 ci-dessous. Un rapport écrit du médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire concerné doit figurer au dossier soumis au comité médical" ;
Considérant que M. Y..., en demandant l'annulation des différentes décisions le privant de la possibilité de reprendre ses fonctions du 30 mars 1992 au 2 mai 1994, doit être regardé comme demandant l'annulation de la décision en date du 1 er avril 1992 de l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale des Bouches-du-Rhône le plaçant d'office, sur le fondement de l'article 34 du décret du 14 mars 1986 précité, en congé de longue maladie pour six mois et des décisions de prolongation de ce congé ou de placement en congé de longue durée en date des 9 novembre 1992, 2 juillet 1993, 26 octobre 1993, 5 décembre 1993 et 25 mars 1994 ;
Sur la légalité externe des décisions attaquées :
Considérant, en premier lieu, qu'en vertu de l'article 18 du décret du 14 mars 1986 précité: "Le fonctionnaire intéressé et l'administration peuvent ... faire entendre le médecin de leur choix par le comité médical ou la commission de réforme" ; que le tribunal administratif a relevé que l'administration avait adressé, avant que ne soit prise chacune des décisions de placement en congé ou de prolongation de congé concernant M. Y..., une lettre à l'intéressé l'informant de la date prévue pour l'examen de son cas par le comité médical, de la possibilité pour lui d'adresser au comité médical toutes observations écrites et de faire entendre par le comité médical un médecin de son choix; qu'il a également relevé que M. Y... s'était fait représenter par un médecin de son choix devant le comité médical ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, qui ne sont pas critiqués en appel par le requérant, de rejeter le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure ;
Considérant, en second lieu, que l'octroi, à l'initiative de l'administration, d'un congé pour raisons de santé et les décisions de prolongation de ce congé ne sont pas au nombre des décisions qui doivent être motivées en application des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;
Considérant, en troisième lieu, que M. Y... soutient qu'ayant souhaité faire appel de l'avis du comité médical départemental rendu le 23 mars 1992, il n'a reçu aucune réponse de la part de l'administration ,
Considérant toutefois que, par lettre en date du 17 septembre 1992, l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale des Bouches-du-Rhône, a indiqué au requérant que l'appel qu'il souhaitait interjeter devait être "libellé à l'ordre du comité médical supérieur en double exemplaire" , que le requérant n'établit pas avoir adressé, suite à cette information, une demande d'appel au comité médical supérieur : que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la procédure aurait été viciée du fait de l'impossibilité dans laquelle il se serait trouvé, du fait de l'administration, de faire valoir ses droits devant le comité médical supérieur ou que les décisions de prolongation de son congé seraient irrégulières du fait d'une telle impossibilité ;
Considérant, en quatrième lieu, que, si l'article 7 du décret du 14 mars 1986 précité rend obligatoire la consultation du comité médical avant toute prolongation de congé de longue maladie ou de congé de longue durée, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose de soumettre l'agent à un nouvel examen médical avant cette consultation ;
Considérant, en cinquième lieu, que M. Y... soutient qu'il n'a pas été informé de son passage en congé de longue durée, "alors qu'il aurait dû choisir" ; qu'à supposer que l'intéressé ait entendu se prévaloir des dispositions du 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, en vertu duquel, sur demande de l'agent, l'administration a la faculté de maintenir en congé de longue maladie le fonctionnaire qui peut prétendre à l'octroi d'un congé de longue durée, M. Y... n'établit pas avoir adressé à l'administration une demande de maintien en congé de longue maladie alors qu'il ressort des propres écrits du requérant que celui-ci a été destinataire le 27 mars 1993, soit en temps utile pour adresser une telle demande, de la convocation à la séance du comité médical qui s'est réuni le 10 mai 1993 et a proposé le placement en congé de longue durée, puis, le 3 juin 1993, de la décision le plaçant en congé de longue durée ;
Considérant, en sixième lieu, qu'à supposer que M. Y... ait entendu invoquer les dispositions des articles 35 et 36 du décret du 14 mars 1986 précité, il y a lieu de rejeter comme n'étant pas assorti de précisions suffisantes le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ;
Considérant, en septième lieu, qu'il résulte des pièces du dossier que l'administration a usé, à l'égard de M. Y... des pouvoirs qu'elle tient de l'article 34 du décret du 14 mars 1986 précité et qui lui permettent de placer d'office en congé de longue maladie puis en congé de longue durée un agent dont l'état de santé parait justifier ces mesures ; que M. Y... n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été victime d'un détournement de procédure ou d'une sanction disciplinaire déguisée ; que, par suite, les moyens relatifs à la méconnaissance de la procédure disciplinaire doivent être rejetés comme inopérants ;
Sur la légalité interne des décisions attaquées :
Considérant que M. Y... soutient que l'existence de la maladie mentale dont il serait atteint selon l'administration ne saurait être établie par un rapport d'expertise daté du 28 décembre 1996, rédigé plus de quatre années après la date de son placement d'office en congé de longue maladie et que les examens passés à la fin de l'année 1992 et au début de l'année 1993 attestent en revanche de son parfait état mental , que le requérant ajoute qu'il n'a jamais fait l'objet de soins pour une pathologie d'ordre psychiatrique ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte des pièces du dossier et notamment du rapport de l'expert commis par les premiers juges, qui a pu régulièrement être établi quatre années après la constatation par l'administration de divers troubles de la personnalité de l'agent, que M. Y... a connu, à la date de son placement d'office en congé de longue maladie puis en congé de longue durée, des troubles psychiques sévères caractérisés par des épisodes de répit ou d'exaltation compromettant l'exercice normal des fonctions ; qu'en outre, les premiers juges ont relevé à juste titre que les éléments d'ordre médical produits par M. Y... et affinant le caractère normal de sa personnalité ne remettaient pas en cause la validité de l'expertise dans la mesure où les troubles manifestés par l'intéressé ne présentaient pas un caractère permanent ; que, par suite, l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale des Bouches-du-Rhône, n'a pas fait une inexacte appréciation des faits en estimant que l'état de santé de M. Y... ne lui permettait pas d'assurer normalement ses fonctions et nécessitait de le placer d'office en congé de longue maladie puis en congé de longue durée ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y... et au MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE.