Vu l'ordonnance en date du 29 août 1997 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a transmis à la Cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 97-457 du 9 mai 1997, la requête présentée pour M. Y... ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 21 août 1997 sous le n° 97LY02028, présentée pour M. Ibrahima Y..., demeurant ..., par Me X..., avocat ;
M. Ibrahima Y... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 avril 1997 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 3 octobre 1994 rejetant sa demande de titre de séjour en qualité de travailleur salarié ;
2°) de faire droit à sa demande de première instance ;
Vu les autres pièces du dossier;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;
Vu le décret n° 1574 du 30 juin 1946 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2000 :
- le rapport de M. GUERRIVE, président assesseur ;
- et les conclusions de M. DUCHON-DORIS, premier conseiller ;
Considérant que, pour demander l'annulation de la décision du 3 octobre 1994 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer une carte de résident temporaire en qualité de salarié, M. Y... a soulevé un moyen tiré de la motivation insuffisante de cette décision, en faisant valoir notamment que la décision du directeur départemental du travail en date du 4 novembre 1992, à laquelle elle se réfère expressément, n'était pas jointe à la décision notifiée ; que les premiers juges n'ont pas statué sur ce moyen ; que, dès lors qu'en l'espèce aucun des motifs de la décision attaquée ne liait la compétence du préfet pour rejeter la demande de M. Y..., ledit moyen n'était pas inopérant ; que le jugement attaqué est, par suite, entaché d'irrégularité ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Y... devant le Tribunal administratif de Marseille ;
Considérant qu'en vertu des articles 4, 7 et 8 du décret du 30 juin 1946 réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, l'étranger qui vient en France pour y exercer une activité salariée ne peut obtenir une carte de séjour que s'il justifie d'un contrat de travail visé par les services compétents du ministre chargé du travail ou d'un titre de travail délivré par lesdits services ; qu'aux termes de l'article R. 341-4 du code du travail : "... pour accorder ou refuser le titre de travail sollicité, le préfet du département où réside l'étranger prend notamment en considération les éléments suivants d'appréciation : 1 - la situation de l'emploi présente et à venir dans la profession demandée par le travailleur étranger et dans la zone géographique où il compte exercer cette profession ..." ; que la décision du préfet refusant le titre de travail est au nombre des actes qui doivent être motivés par application de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;
Considérant que pour rejeter la demande de M. Y..., le préfet des Bouches-du-Rhône mentionne que l'article 7 du décret du 30 juin 1946 soumet l'admission au séjour des travailleurs salariés à la production d'une autorisation de travail, et précise : "cette autorisation vous a été refusée par décision du 4 novembre 1992 dont vous trouverez ci-joint une copie. En effet, compte tenu du nombre de demandeurs d'emploi inscrits dans la région et dans le département s'élevant respectivement à 6588/1933 et 3388/1022 et le nombre des offres s'élevant respectivement à 137/143 et 32/48 et du fait qu'il est constaté une pérennité dans le déséquilibre de la situation de l'emploi et notamment dans la spécialité concernée, qui ne permet pas de penser que cette situation puisse s'améliorer dans un proche ou moyen avenir, il n'a pas été possible de réserver une suite favorable à votre demande" ;
Considérant que pour rejeter la demande de M. Y..., le préfet des Bouches-du-Rhône mentionne que l'article 7 du décret du 30 juin 1946 soumet l'admission au séjour des travailleurs salariés à la production d'une autorisation de travail, et précise : "cette autorisation vous a été refusée par décision du 4 novembre 1992 n'était pas jointe à la décision du préfet des Bouches-du-Rhône ; qu'elle n'a pas non plus été produite au dossier ; que le préfet s'est borné à citer des chiffres se rapportant à la situation de l'emploi dans la région et le département sans même désigner la ou les professions auxquelles ils se rapportent, ni la date à laquelle ils ont été collectés ; qu'une telle décision, qui est insuffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979, est entachée d'un vice de forme ; qu'il y a lieu, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande, de l'annuler ;
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 29 avril 1997, ainsi que la décision du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 3 octobre 1994, sont annulés.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ibrahima Y... et au ministre de l'intérieur.