Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lyon de condamner le centre communal d'action sociale (C.C.A.S) de Lyon à lui verser, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision d'un montant de 36 684 euros, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à la suite de la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie dont elle souffre ; de mettre à la charge du C.C.A.S de Lyon une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; de condamner le C.C.A.S de Lyon aux entiers dépens au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative .
Par une ordonnance n° 2400112 du 19 mars 2024, la juge des référés du tribunal administratif de Lyon a condamné le C.C.A.S de Lyon à verser à Mme A... une provision de 20 000 euros et une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 3 avril 2024, et un mémoire en réplique enregistré le 6 juin 2024, le C.C.A.S de Lyon, représenté par Me Vergnon (société VEDESI), demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 2400112 du 19 mars 2024 ;
2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ordonnance litigieuse est insuffisamment motivée ;
- la créance dont se prévaut Mme A... n'est pas justifiée, et le montant de la provision allouée par le premier juge est excessif.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 avril 2024, Mme A..., représentée par Me Bracq (SELARL Asterio), demande à la cour :
1°) de rejeter la requête du C.C.A.S de Lyon ;
2°) de condamner le C.C.A.S de Lyon à lui verser, en sus de la provision accordée par le premier juge, la somme de 1 684 euros correspondant au montant des frais médicaux restés à sa charge ;
3°) de mettre à la charge du C.C.A.S de Lyon une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner le C.C.A.S de Lyon aux entiers dépens au titre de l'article R. 761-1 du même code.
Elle soutient que :
- l'ordonnance est parfaitement motivée ;
- le montant de la provision allouée au titre du déficit fonctionnel permanent est justifié ;
- les frais médicaux restés à sa charge doivent être pris en compte pour un montant de 1 684 euros.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aide-soignante territoriale de classe normale employée par le C.C.A.S de Lyon, Mme B... A... a sollicité la reconnaissance comme maladie professionnelle des troubles psychiques dont elle souffre. A la suite de l'expertise de l'intéressée réalisée le 27 octobre 2022 par un médecin psychiatre agréé, le conseil médical des agents des collectivités territoriales du département du Rhône a émis, lors de sa séance du 28 février 2023, un avis favorable à la reconnaissance en tant que maladie professionnelle de la pathologie dont est atteinte Mme A... et à son inaptitude permanente et définitive à toutes fonctions. Par courrier du 12 avril 2023, le directeur général du C.C.A.S de Lyon a informé Mme A... de son placement en congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 9 octobre 2018, avant son admission à la retraite pour invalidité, prononcée effectivement à compter du 13 juin 2021. Le 26 octobre 2023, Mme A... a sollicité, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de ladite maladie, le versement d'une indemnité d'un montant total, à parfaire, de 141 621,25 euros. Cette demande indemnitaire préalable a été implicitement rejetée. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, la condamnation du C.C.A.S de Lyon à lui verser une provision. Par une ordonnance n° 2400112 du 19 mars 2024, la juge des référés du tribunal administratif de Lyon a condamné le C.C.A.S de Lyon à verser à Mme A... une provision de 20 000 euros et une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le C.C.A.S de Lyon relève appel de cette ordonnance. Par la voie d'un appel incident, Mme A... demande qu'en sus de la provision accordée par le premier juge, le C.C.A.S de Lyon soit condamné à lui verser la somme de 1 684 euros correspondant au montant des frais médicaux restés à sa charge.
2. Aux termes de l'article L. 555-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais. ". Aux termes de l'article R. 541-1 du même code : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. ". Il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état.
3. En premier lieu, l'ordonnance litigieuse, qui notamment rappelle que le C.C.A.S de Lyon a reconnu l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A... et que cette dernière a également été reconnue inapte à toutes fonctions, et indique qu'elle " apporte la preuve d'un préjudice lié à une incapacité physique et psychique définitive en lien avec l'accident de service " est suffisamment motivée.
4. En second lieu, les dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les intéressés peuvent prétendre, au titre des conséquences patrimoniales de l'atteinte à l'intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font, en revanche, obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des dommages ne revêtant pas un caractère patrimonial, tels que des souffrances physiques ou morales, un préjudice esthétique ou d'agrément ou des troubles dans les conditions d'existence, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager sa responsabilité.
5. Eu égard à ce qui a été mentionné aux points précédents, ainsi qu'aux constatations de l'expertise du 27 octobre 2022, la créance dont se prévaut Mme A... à l'égard du C.C.A.S de Lyon peut être qualifiée d'obligation non sérieusement contestable dans son principe, alors même, comme le soutient l'administration, qu'aucune date de consolidation n'a encore été fixée.
6. Concernant le montant de la provision, si le C.C.A.S de Lyon soutient que la somme allouée par la juge des référés du tribunal administratif de Lyon est trop élevée, il ne résulte pas de l'instruction, au regard notamment du taux de 30% retenu par l'expert, de l'âge de Mme A..., et des barèmes en usage, que le premier juge aurait fait une appréciation excessive du déficit fonctionnel permanent en allouant à ce titre à l'intéressée une provision à hauteur de 20 000 euros.
7. Si Mme A... soutient qu'elle a dû engager depuis 2018 des frais médicaux non pris en charge intégralement par la CPAM et sa mutuelle, et réclame à ce titre le versement d'une somme totale de 1 684 euros, les factures des praticiens qu'elle produit, qui ne comportent pas le montant précis des sommes restées à sa charge, ne permettent toutefois pas de justifier le caractère non sérieusement contestable de la créance.
8. Il résulte de ce qui précède que le C.C.A.S de Lyon n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la juge des référés du tribunal administratif de Lyon a alloué à Mme A... une provision d'un montant de 20 000 euros. Pour sa part, Mme A... n'est pas fondée, par la voie de l'appel incident, à demander la réformation de cette ordonnance et à ce que le montant de la provision allouée soit porté à la somme totale de 21 684 euros.
Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :
9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " Aux termes de l'article R. 761-1 du même code : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas pris en charge par l'Etat. "
10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En l'absence de dépens, la demande de Mme A... ne peut qu'être rejetée.
ORDONNE :
Article 1er : La requête du C.C.A.S de Lyon, les conclusions d'appel incident de Mme A..., la demande présentée par Mme A... sur le fondement de l'article R. 761-1 du code de justice administrative et les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au centre communal d'action sociale (C.C.A.S) de Lyon et à Mme B... A....
Fait à Lyon, le 11 septembre 2024.
Le premier vice-président de la cour
Juge des référés,
Jean-Yves Tallec
La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 24LY008872