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23/04/2024 | FRANCE | N°22LY02336

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 1ère chambre, 23 avril 2024, 22LY02336


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



La SCI du Fesc a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 9 octobre 2019 approuvant le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de Grand Lac.



Par un jugement n° 2002231 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2022, la SCI du Fesc, représentée par Me Le Gulludec, demande à la cour :


> 1°) d'annuler ce jugement du 7 juin 2022 ;



2°) d'annuler la délibération du 9 octobre 2019 approuvant le pla...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI du Fesc a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 9 octobre 2019 approuvant le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de Grand Lac.

Par un jugement n° 2002231 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2022, la SCI du Fesc, représentée par Me Le Gulludec, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 juin 2022 ;

2°) d'annuler la délibération du 9 octobre 2019 approuvant le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de Grand Lac et, subsidiairement, de l'annuler en tant qu'elle classe en zone Nd les parcelles cadastrées section B n°s 508, 934, 1412, 1413 et 936 situées sur la commune de Tresserve, ou, à tout le moins, en tant seulement qu'elle classe le pourtour des parcelles cadastrées section B n°s 508, 934, 1412, 1413 et 936 en espace boisé classé (EBC) ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Grand Lac le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le rapport de présentation est lacunaire sur le volet de la protection de l'environnement ; si des compléments ont été apportés après l'enquête publique, ceux-ci n'ont pas été soumis à l'avis du public ; ainsi, l'enquête publique est irrégulière ; la détermination des besoins en logements n'a pas été actualisée après l'enquête publique et le taux de croissance retenu n'est pas crédible ;

- l'absence d'avis formels de l'architecte des bâtiments de France (ABF) et de la commission locale du patrimoine entache d'illégalité l'enquête publique ;

- en se contentant d'un elliptique " dont acte ", la commission d'enquête ne répond pas à son obligation de motivation ;

- le rapport de présentation du PLUi aurait dû exposer " les dispositions qui favorisent la densification de ces espaces " ;

- les modifications apportées au projet de PLUi après l'enquête publique portent atteinte à son économie générale et auraient nécessité une nouvelle enquête publique ;

- le PLUi méconnaît les dispositions de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme dès lors que le PLUi a augmenté de manière significative les obligations en stationnement pour les projets immobiliers à usage d'habitation ;

- le parti d'aménagement retenu à Tresserve, fondé sur une optimisation du tissu existant, consiste plus en une limitation de l'urbanisation qu'en un renouvellement urbain et il n'est pas cohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables ;

- le classement en zone Nd des parcelles cadastrées section B n°s 508, 934, 1412, 1413 et 936 lui appartenant, situées à Tresserve, est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; le classement du pourtour de cette propriété en espaces boisés classés est également entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- pour le surplus, elle entend expressément se référer à ses écritures de première instance qu'elle joint en appel.

Par un mémoire enregistré le 22 novembre 2022, la communauté d'agglomération Grand Lac, représentée par Me Lacroix, conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à l'application des dispositions de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme et à ce qu'il soit mis à la charge de la SCI du Fesc le versement de la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la SCI du Fesc ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mauclair, première conseillère ;

- les conclusions de Mme Conesa-Terrade, rapporteure publique ;

- les observations de Me Plénet, représentant la communauté d'agglomération Grand Lac.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 9 octobre 2019, la communauté d'agglomération Grand Lac a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi). A l'issue de cette procédure, les parcelles cadastrées section B n° 508, 934, 1412, 1413, 936 appartenant à la SCI du Fesc, situées sur la commune de Tresserve, ont été classées en zone Nd et en espaces boisés classés à leur pourtour. La SCI du Fesc a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de cette délibération. Par un jugement du 7 juin 2022, dont il est relevé appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur la légalité de la délibération du 9 octobre 2019 :

2. En premier lieu, devant la cour, la SCI du Fesc se borne à reprendre, à l'identique, l'argumentation soumise au tribunal administratif de Grenoble tirée de l'irrégularité de l'enquête publique, des insuffisances du rapport de présentation, de ce que les modifications apportées au projet de PLUi après enquête publique portent atteinte à son économie générale et auraient nécessité une nouvelle enquête publique, de ce que le PLUi méconnaît les dispositions de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme et de l'incohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables (PADD). Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges, dès lors que la réponse du tribunal est elle-même suffisante et n'appelle pas de nouvelles précisions en appel.

3. En deuxième lieu, l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme prévoit que : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; / 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues ".

4. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. A cet effet, ils peuvent être amenés à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés par les dispositions citées ci-dessus, un secteur qu'ils entendent soustraire, pour l'avenir, à l'urbanisation. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

5. En l'espèce, le règlement du PLUi en litige définit la zone Nd comme correspondant aux " domaines composés d'un ensemble bâti patrimonial et un parc paysager attenant aux caractères patrimoniaux ". Le rapport de présentation relève à cet égard que : " La création de la zone Nd (d pour domaine), participe pleinement à la préservation du patrimoine bâti bourgeois et des parcs attenants, où la présence des parcs privés participe à la qualité de vie des espaces urbanisés (îlot de fraîcheur, respiration en milieu dense, dégagement vers le lac...) ". Enfin, un des objectifs du PADD est également d'" identifier les espaces agricoles et paysagers, véritables relais " nature " au sein des espaces urbanisés (parcs, prés, vergers, jardins, vignes, espace de respiration...) ayant une valeur paysagère, écologique ou patrimoniale afin de les préserver ou de les recomposer ".

6. Il est constant que la propriété appartenant à la SCI du Fesc, d'une superficie totale de 2,50 hectares et désormais entièrement classée en zone Nd, est composée, au nord, des parcelles cadastrées section B n°s 560, 562, 1542 et 1543 supportant un ensemble bâti présentant un caractère patrimonial et, au sud, des parcelles cadastrées section B n° 508, 934, 1412, 1413, 936 et seules en litige, qui supportent les vestiges d'une ancienne exploitation d'horticulture. Cette propriété, qui doit être prise dans son ensemble en l'absence de séparation physique établie, est ainsi constituée d'un parc arboré attenant à une propriété bâtie d'apparence bourgeoise, et, insérée dans une zone urbanisée, elle répond, alors même que le parc ne serait pas entretenu, à la définition donnée par le règlement de la zone Nd, en cohérence avec l'objectif précité du PADD. Si la partie sud du parc comprend encore des vestiges d'une ancienne exploitation d'horticulture, constitués d'un ancien hangar, de serres et de deux cuves à gasoil, cette présence n'est pas de nature, compte tenu de leur taille, modeste, des caractéristiques globales de la propriété prise dans son ensemble au regard des objectifs poursuivis en zone Nd et de l'unité paysagère qu'elles constituent, ou encore au fait que la partie sud reste enherbée et comprend de nombreux arbres de hautes tiges, à faire obstacle au classement litigieux. Enfin, contrairement à ce que soutient la SCI requérante, la définition de la zone Nd n'exige pas, pour la reconnaissance du caractère patrimonial du bâti implanté sur le tènement, que celui-ci fasse par ailleurs l'objet d'une protection au titre des dispositions de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme, et la circonstance selon laquelle les bâtiments existants sur sa propriété ne seraient plus, dans le PLUi approuvé, identifiés à ce titre comme un tel patrimoine bâti à protéger, alors qu'ils l'étaient dans le PLUi arrêté, est sans incidence sur le classement en litige. Dans ces conditions, et sans que la SCI du Fesc puisse utilement faire état du classement antérieur de la partie sud de ce tènement en zone II NA d'urbanisation future, le classement en zone Nd des parcelles en litige n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements ".

8. En l'espèce, le pourtour des parcelles cadastrées section B n° 508, 934, 1412, 1413, 936 appartenant à la SCI du Fesc est grevé d'un espace boisé classé (EBC), lequel a d'ailleurs, par rapport au précédent document d'urbanisme, été réduit sur sa partie nord et a été agrandi sur sa partie sud, et ce classement, en l'espèce, est justifié par la présence d'arbres de hautes tiges. Ce classement s'inscrit d'ailleurs, selon le rapport de présentation, s'agissant de la commune de Tresserve, dans la volonté de " classer en EBC les boisements implantés sur les pans de la colline, pour leur intérêt paysager et patrimonial mais également écologique ainsi que leur rôle dans la prévention des risques. Au cœur de la commune, plusieurs secteurs de domaines classés auparavant en EBC ont été modifiés. L'objectif recherché par l'actualisation des EBC au sein des domaines patrimoniaux est de permettre l'évolution du bâti existant (limitée au sein du règlement de PLUi). En effet, une part de la surface d'EBC empiétait sur les constructions ou encore les voiries ". Contrairement à ce que soutient la SCI requérante, ce classement du pourtour des parcelles en EBC ne fait obstacle ni à l'exercice d'une activité agricole sur la partie sud du tènement non grevée par l'EBC ni à l'utilisation de l'accès existant depuis la rue Belledonne. Au surplus, la SCI requérante ne peut utilement soutenir que l'aire située au niveau de cet accès n'aurait pas dû être intégrée à l'EBC, dès lors qu'il ressort des photographies produites au dossier que, de faible taille, elle est entourée des arbres constituant l'EBC. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation du classement d'une partie des parcelles cadastrées section B n° 508, 934, 1412, 1413, 936 en espaces boisés classés ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède que la SCI du Fesc n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur les frais du litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération Grand Lac, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la SCI du Fesc au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI du Fesc une somme de 2 000 euros à verser à ce même titre à la communauté d'agglomération Grand Lac.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI du Fesc est rejetée.

Article 2 : La SCI du Fesc versera à la communauté d'agglomération Grand Lac une somme de

2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI du Fesc et à la communauté d'agglomération Grand Lac.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Anne-Gaëlle Mauclair, première conseillère,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 avril 2024.

La rapporteure,

A.-G. Mauclair La présidente,

M. A...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 22LY02336 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02336
Date de la décision : 23/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Anne-Gaëlle MAUCLAIR
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : LE GULLUDEC

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-23;22ly02336 ?
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