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09/04/2024 | FRANCE | N°22LY01372

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 1ère chambre, 09 avril 2024, 22LY01372


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



La société civile immobilière (SCI) des Sœurs a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 21 mai 2019 par lequel le maire de la commune de Saint-Gervais-les-Bains s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux portant sur la création d'un chemin d'accès sur un terrain situé au lieu-dit " La Croix ", sur le territoire de la commune de Saint-Gervais-les-Bains.



Par un jugement n° 1904629 du 7 mars 2002, le tribunal administratif de

Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 mai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société civile immobilière (SCI) des Sœurs a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 21 mai 2019 par lequel le maire de la commune de Saint-Gervais-les-Bains s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux portant sur la création d'un chemin d'accès sur un terrain situé au lieu-dit " La Croix ", sur le territoire de la commune de Saint-Gervais-les-Bains.

Par un jugement n° 1904629 du 7 mars 2002, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 mai 2022, et un mémoire complémentaire enregistré le 19 octobre 2023 et non communiqué, la SCI des Sœurs, représentée par Me Jacques, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 mars 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 mai 2019 par lequel le maire de la commune de Saint-Gervais-les-Bains s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux portant sur la création d'un chemin d'accès sur un terrain situé au lieu-dit " La Croix ", sur le territoire de la commune de Saint-Gervais-les-Bains ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Gervais-les-Bains de prendre une décision de non-opposition à sa déclaration préalable, à défaut de réexaminer sa demande, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Gervais-les-Bains le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit en ce qu'il se fonde sur la méconnaissance des articles N1 et N2 du règlement du plan local d'urbanisme, sans vérifier sa conformité avec les dispositions de l'article N3 du règlement de ce plan ;

- le motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme n'est pas établi.

Par un mémoire enregistré le 4 août 2022, la commune de Saint-Gervais-les-Bains, représentée par Me Duraz, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la SCI des Sœurs le versement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la SCI requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 5 septembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mauclair, première conseillère ;

- les conclusions de Mme Conesa-Terrade, rapporteure publique ;

- les observations de Me Le Priol représentant la SCI des Sœurs et de Me Schiltz, substituant Me Duraz, représentant la commune de Saint-Gervais-les-Bains.

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de Saint-Gervais-Les-Bains, par un arrêté n° 2017/188 du 19 mai 2017 pris sur le fondement de l'article L. 122-11 du code de l'urbanisme, a institué une servitude administrative interdisant en période hivernale, du 15 novembre au 30 avril de chaque année, l'occupation du chalet d'alpage situé sur un tènement composé des parcelles cadastrées ... située au lieu-dit " La Croix ". Cet arrêté a été abrogé et remplacé par un autre arrêté du maire du 1er août 2017 valant servitude administrative et précisant désormais limiter les propriétaires à l'usage du chalet aux conditions de desserte de ce dernier, à savoir un accès piétonnier, libérer la commune de l'obligation d'assurer la desserte par les réseaux, voirie et équipements publics, interdire la circulation des véhicules à moteur sur neige et soumettre la circulation des véhicules à moteur à la règlementation applicable dans ce secteur. M. et Mme A... ont été autorisés à restaurer ce chalet d'alpage par un arrêté du 9 juin 2017 du préfet de la Haute-Savoie, pris sur le fondement de ce même article L.122-11. Par un arrêté du 2 août 2017, le maire de Saint-Gervais-les-Bains a alors accordé un permis de construire à M. A... pour cette restauration de chalet d'alpage, sans création de nouvelle surface de plancher. Ce permis, qui vise l'arrêté préfectoral du 9 juin 2017 et l'arrêté du maire du 1er août 2017, relève, en son article 2, qu'" il est rappelé que la construction n'est pas desservie par une voie carrossable et se situe d'autre part dans une zone naturelle où s'exercent des activités de ski où l'utilisation d'engins à moteur pour l'accès au chalet n'est pas autorisée ". Le 5 octobre 2018, des agents municipaux ont toutefois constaté l'accomplissement de travaux portant sur la création d'un chemin d'accès à ce chalet, d'une surface supérieure à 100 m² et d'une hauteur de plus de 2 mètres, et ont dressé un procès-verbal d'infraction au code de l'urbanisme relevant plus particulièrement l'absence d'autorisation et leur réalisation dans une zone naturelle de protection du plan local d'urbanisme et leur incidence environnementale. C'est dans ce contexte que la société civile immobilière (SCI) des Sœurs, à qui le permis de construire a été transféré par un arrêté du 5 mars 2019, a déposé, le 2 mai 2019, une déclaration préalable portant sur la création de ce chemin d'accès, sur les parcelles cadastrées section 248 A n°s 2190, 2870 et 2997. La SCI des Sœurs relève appel du jugement du 7 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 21 mai 2019 par lequel le maire de la commune de Saint-Gervais-Les-Bains s'est opposé à cette déclaration préalable.

Sur la légalité de l'arrêté du 21 mai 2019 :

2. Aux termes de l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme, relatif aux occupations et utilisations du sol interdites : " (...) / - Les exhaussements de sol sans lien avec des constructions ou liés à la construction d'un bâtiment ou d'un équipement ou qui seraient susceptibles de porter atteinte à l'intérêt des lieux, au sol et au paysage naturel ou bâti sauf s'ils sont destinés à des installations nécessaires au fonctionnement des services publics ou d'intérêt collectif ". Aux termes de l'article N2 de ce règlement, relatif aux occupations et utilisations du sol admises sous conditions : " (...) - Dans les zones N1 uniquement : / Sur l'ensemble de la zone : / Les affouillements et exhaussements du sol strictement nécessaires aux constructions autorisées dans la zone. ".

3. La décision d'opposition à déclaration préalable du 21 mai 2019 en litige, qui relève que le projet implique des travaux d'affouillement d'une profondeur d'un mètre et d'exhaussement d'une hauteur de 2 mètres, sur une superficie de 575 m², se fonde sur les dispositions des articles N1 et N2 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU), en relevant, d'une part et après avoir rappelé l'autorisation préfectorale et la servitude administrative prises sur le fondement de l'article L. 122-11 du code de l'urbanisme et rappelées par les prescriptions de l'article 2 du permis de construire du 2 août 2017, que les travaux ne peuvent être regardés comme étant en lien avec une construction ou installation autorisée dans la zone à cet égard et, d'autre part, que les exhaussements du sol réalisés sont de nature à porter atteinte au caractère naturel et à l'intérêt des lieux et du sol.

4. D'une part, ainsi qu'il a été dit au point 1, si la restauration du chalet a été autorisée, une servitude administrative a été instaurée limitant son usage par des véhicules en l'absence de voirie communale, et le permis de construire rappelle d'ailleurs également l'interdiction de circulation des véhicules à moteur édictée par l'article L. 362-1 du code de l'environnement, ce que la bénéficiaire ne pouvait ignorer. Le chemin projeté ne peut, dans ce contexte, être regardé comme étant en lien avec cette construction ou strictement nécessaire à cette dernière au sens des dispositions précitées des articles N1 et N2 du règlement du PLU, alors même qu'il respecterait les dispositions de l'article N3 du règlement du PLU, et plus particulièrement les caractéristiques des voies de desserte des constructions.

5. D'autre part, ce même projet induit, sur une partie du trajet, des travaux d'affouillement d'une profondeur d'un mètre et d'exhaussement d'une hauteur de deux mètres sur une superficie de 575 m², dans un secteur de montagne ne supportant pas d'urbanisation et classé en zone naturelle de qualité à préserver. Dans ces conditions, eu égard à l'importance des travaux, la SCI des sœurs, qui se borne à indiquer que le chemin d'accès ne passe au droit d'aucun élément ayant un intérêt particulier, les pistes de ski voisines n'étant pas impactées et que des travaux d'envergure, lesquels porteraient atteinte à l'intérêt des lieux, sont réalisés pour l'aménagement de pistes de skis sur des parcelles proches du chalet, n'apporte aucun élément de nature à justifier que son projet ne serait pas, compte tenu des caractéristiques qui viennent d'être rappelées, de nature à porter atteinte à l'intérêt des lieux, au sol et au paysage naturel au sens des dispositions précitées.

6. Il résulte de ce qui précède que la SCI des Sœurs n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais du litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la SCI des Sœurs demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de la commune de Saint-Gervais-les-Bains, qui n'est pas partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la SCI des Sœurs le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Saint-Gervais-les-Bains.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI des Sœurs est rejetée.

Article 2 : La SCI des Sœurs versera à la commune de Saint-Gervais-les-Bains une somme de

2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI des Sœurs et à la commune de Saint-Gervais-les-Bains.

Copie sera adressée au Procureur de la République près le tribunal judiciaire de Bonneville.

Délibéré après l'audience du 19 mars 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente chambre,

Mme Anne-Gaëlle Mauclair, première conseillère,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 avril 2024.

La rapporteure,

A.-G. Mauclair La présidente,

M. B...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 22LY01372 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01372
Date de la décision : 09/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-045-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses. - Régimes de déclaration préalable. - Déclaration de travaux exemptés de permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Anne-Gaëlle MAUCLAIR
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : LIOCHON DURAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-09;22ly01372 ?
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