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06/03/2024 | FRANCE | N°24LY00199

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, Juge unique -1ère chambre, 06 mars 2024, 24LY00199


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



La SCI Fonvan a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 juin 2020 par laquelle le maire de la commune d'Annecy a exercé le droit de préemption urbain sur les lots appartenant à Mme B... situés ... avenue du Pont-Neuf à Annecy (Cran-Gevrier), objet du compromis de vente qu'elle avait conclu le 9 janvier, ensemble la décision du 11 mars 2021 refusant de retirer cette décision de préemption.

Par un jugement n° 20038

29 du 11 décembre 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de la SCI ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI Fonvan a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 juin 2020 par laquelle le maire de la commune d'Annecy a exercé le droit de préemption urbain sur les lots appartenant à Mme B... situés ... avenue du Pont-Neuf à Annecy (Cran-Gevrier), objet du compromis de vente qu'elle avait conclu le 9 janvier, ensemble la décision du 11 mars 2021 refusant de retirer cette décision de préemption.

Par un jugement n° 2003829 du 11 décembre 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de la SCI Fonvan.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 janvier 2024 sous le n° 24LY00199, la SCI Fonvan, représentée par la Selarl Conseil Affaires publiques, demande à la cour :

1°) de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision du 26 juin 2020 par laquelle le maire de la commune d'Annecy a exercé le droit de préemption urbain sur les lots appartenant à Mme B..., en tant qu'elle fait obstacle à la vente à son bénéfice ;

2°) à titre subsidiaire, de suspendre cette décision, sur le même fondement, en tant qu'elle permet à la commune de disposer et d'user du bien dans des conditions qui rendraient difficilement réversible la décision de préemption ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Annecy une somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a un intérêt à contester la décision de préemption, en tant qu'acquéreur évincé titulaire d'une promesse de vente sur le bien préempté ;

- la condition d'urgence, qui est présumée pour l'acquéreur évincé, est remplie ;

- le maire de la commune d'Annecy était incompétent pour prendre la décision contestée ;

- l'arrêté attaqué méconnait les dispositions de l'article L. 213-1 du code de l'urbanisme ;

- la décision de préemption a été notifiée tardivement ;

- la commune d'Annecy ne justifie d'aucun projet réel pour le bien préempté ;

- il n'existe pas d'intérêt général suffisant justifiant la préemption.

Par un mémoire enregistré le 14 février 2024, la commune d'Annecy, représentée par la Selarl CDMF-Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCI Fonvan au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, faute pour la requérante de justifier d'un intérêt à agir ;

-à titre subsidiaire, la condition d'urgence n'est pas remplie et il n'existe aucun doute sur la légalité de la décision attaquée.

Vu :

- la requête n° 24LY00139 enregistrée le 18 janvier 2024 par laquelle la SCI Fonvan demande à la cour d'annuler le jugement n° 2003829 du tribunal administratif de Grenoble du 11 décembre 2023 rejetant sa demande d'annulation de la décision de préemption du 26 juin 2020, ensemble la décision du 11 mars 2021 refusant de retirer cette décision de préemption ;

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision par laquelle le président de la cour a désigné Mme Mehl-Schouder, présidente de chambre, comme juge des référés en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2024 à 15 heures :

- le rapport de Mme Mehl-Schouder, présidente de chambre ;

- les observations de Me Djeffal, substituant Me Mollion, représentant la SCI Fonvan, et de Me Martin, substituant Me Fiat, représentant la commune d'Annecy, qui reprennent leurs écritures.

La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Fonvan a signé le 9 janvier 2020 un compromis de vente avec Mme A... B... portant sur les lots 2 à 6 d'une copropriété située sur la parcelle cadastrée section ..., au ... avenue du Pont-Neuf à Annecy (Cran-Gevrier) ainsi que des constructions accessoires assises sur les parcelles section AN n°s 182 à 185 à destination commerciale, pour un prix de 690 000 euros. Une déclaration d'intention d'aliéner a été adressée à la commune d'Annecy le 7 février 2020, qui a été reçue le 10 février suivant. Par une décision du 26 juin 2020, notifiée le 6 juillet, le maire de la commune d'Annecy a décidé d'exercer son droit de préemption. Par un jugement du 11 décembre 2023, frappé d'appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande introduite par la SCI Fonvan tendant à l'annulation de cette décision de préemption du 26 juin 2020, ensemble la décision du 11 mars 2021 refusant de retirer cette décision de préemption. Cette société a également introduit, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, une demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision de préemption, par une requête distincte enregistrée sou le n° 24LY00199 et objet de la présente instance.

Sur la demande de suspension :

2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ".

3. La SCI Fonvan soutient qu'il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision du 26 juin 2020 par laquelle le maire de la commune d'Annecy a décidé d'acquérir par voie de préemption les locaux situés ... avenue du Pont-Neuf à Annecy (Cran-Gevrier). A cet égard, en premier lieu, elle soutient que le maire d'Annecy était incompétent pour prendre cette décision. Elle relève à ce titre que la communauté d'agglomération du Grand Annecy est compétente de plein droit depuis le 1er juin 2017, qu'il n'est pas justifié du caractère exécutoire de la délibération du 13 janvier 2017 par laquelle le conseil de cette communauté a délégué sa compétence à ses communes membres, moyen sur lequel le tribunal a en outre omis de statuer. Elle ajoute encore que l'existence et le caractère exécutoire de la délégation donnée à son maire par le conseil municipal d'Annecy le 24 septembre 2018 ne sont pas justifiés, plus particulièrement par les visas de la décision de préemption, et qu'il n'appartenait en outre pas au DGS de certifier l'affichage et la publication de cette dernière délibération. En deuxième lieu, la SCI Fonvan soutient que Mme B... n'est pas propriétaire du terrain d'assiette du terrain, qui fait l'objet d'un bail emphytéotique passé entre la Congrégation des sœurs de Saint-Joseph d'Annecy et le syndicat des copropriétaires, sans clause de transfert de propriété, et qu'il en résulte que la décision en litige n'entre pas dans le champ d'application du droit de préemption tel que fixé par les dispositions de l'article L. 213-1 du code de l'urbanisme. En troisième lieu, elle soutient que la décision de préemption a été notifiée tardivement, à défaut d'indiquer et d'établir son caractère exécutoire avant l'expiration du délai de deux mois et de justifier, par un tampon numérique, de sa réception en préfecture. Elle ajoute encore que le délai imparti pour préempter était expiré, quand bien même les délais avaient été suspendus par les ordonnances relatives à la période d'urgence sanitaire, en ce que, d'une part, la demande de pièces complémentaires, bien qu'intervenue pendant la période de suspension liée à l'état d'urgence, a suspendu le délai de préemption, et que, d'autre part, son effet suspensif ne pouvait se cumuler avec celui lié à la demande de visite du bien, étant au surplus ajouté que la demande de visite du bien ne pouvait avoir d'effet suspensif en raison de son irrégularité, les formalités requises aux articles D. 213-13-1, R. 213-25 et D. 213-13-4 du code de l'urbanisme, et plus particulièrement les mentions exigées ou encore l'exigence d'une remise contre décharge, n'ayant pas été respectées. En quatrième lieu, la SCI Fonvan soutient qu'il n'y a pas de projet réel d'aménagement dans ce secteur, simplement identifié comme présentant un enjeu communautaire, et qu'il n'existe pas d'intérêt général suffisant répondant aux objectifs de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme et justifiant la préemption. Elle relève notamment à cet égard, d'une part l'absence d'inscription dans un projet urbain cohérent, dont la nécessité est pourtant rappelée par le plan local de l'habitat, d'autre part une contrariété avec les objectifs, d'ailleurs obsolètes, de l'OAP du Pont Neuf de 2012, qui, tout en relevant les difficultés rencontrées, entend, précisément, favoriser les commerces et services et préconise une mixité fonctionnelle. Elle souligne encore l'absence d'acquisitions récentes par la collectivité dans ce secteur ou encore, enfin, l'absence d'utilité, eu égard notamment au coût élevé, à la difficulté propre liée à l'absence de possibilité d'acquisition du foncier, ou encore au caractère improbable et lointain de la réunion par la commune de l'ensemble des droits nécessaires à la réalisation d'un projet avant l'échéance du bail à construction sur lequel se situe l'immeuble dans lequel se trouvent les locaux objets du compromis de vente.

4. En l'état de l'instruction, aucun des moyens de la requête n'est de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision de préemption en litige. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense et sur la condition d'urgence, la requête tendant à la suspension de l'exécution de cette décision de préemption doit être rejetée.

Sur les frais liés à l'instance :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune d'Annecy, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse quelque somme que ce soit à la SCI Fonvan au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Fonvan une somme de 1 500 euros à verser à la commune d'Annecy au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de la SCI Fonvan est rejetée.

Article 2 : La SCI Fonvan versera la somme de 1 500 euros à la commune d'Annecy sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la SCI Fonvan et à la commune d'Annecy.

Copie en sera adressée à Mme A... B....

Fait à Lyon, le 6 mars 2024.

La juge des référés,

M. Mehl-Schouder

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 24LY00199


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : Juge unique -1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24LY00199
Date de la décision : 06/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-035-02 Procédure. - Procédures instituées par la loi du 30 juin 2000. - Référé suspension (art. L. 521-1 du code de justice administrative).


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Monique MEHL-SCHOUDER
Avocat(s) : SELARL CAP - ME MOLLION

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-06;24ly00199 ?
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