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24/10/2023 | FRANCE | N°22LY03419

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 24 octobre 2023, 22LY03419


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme F... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2021 par lequel le maire de la commune de Megève a délivré à M. A... B... un permis de construire en vue de l'extension d'un chalet existant et la construction d'un nouveau chalet composé de deux logements, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2200115 du 19 septembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur requête.

Procédure de

vant la cour

Par une requête enregistrée le 21 novembre 2022, M. E... F... et Mme D......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme F... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2021 par lequel le maire de la commune de Megève a délivré à M. A... B... un permis de construire en vue de l'extension d'un chalet existant et la construction d'un nouveau chalet composé de deux logements, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2200115 du 19 septembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur requête.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 21 novembre 2022, M. E... F... et Mme D... H..., représentés par le SELARL LVI Avocats Associés, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 septembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2021 du maire de la commune de Megève ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Megève le versement de la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il ne contient pas, dans ses visas, les dispositions sur lesquelles il se fonde ;

- le plan de masse fait ressortir l'existence d'un ruisseau qui traverse le terrain servant d'assiette au projet avec un passage sous forme de busage, sans que le dossier ne permette de déterminer avec précision le tracé de ce ruisseau, ses caractéristiques et sa profondeur, alors pourtant que le projet prévoit la création d'un chalet sur ce tracé supposé de ce réseau ; ces incertitudes n'ont pas permis au service instructeur d'instruire le dossier en parfaite connaissance de cause et d'apprécier l'impact du projet sur ce ruisseau ;

- le dossier de permis de construire ne précise pas l'emplacement, les dimensions et les caractéristiques du bassin de rétention prévu et, en tout état de cause, le maire ne pouvait pas délivrer le permis de construire avec une simple prescription ;

- la création du chalet n° 4 " Nouvel Altaïr " porte atteinte au tracé supposé du ruisseau et à l'écoulement des eaux, en méconnaissance de l'article L. 425-14 du code de l'urbanisme ;

- le ruisseau busé n'a pas été identifié, à tort, dans le document graphique de l'OAP patrimoniale 5.2 qui identifie les différents espaces et secteurs protégés au titre de la trame verte et bleue, dont les cours d'eau ; l'identification de ce ruisseau sur la cartographie de l'OAP aurait conduit à refuser le permis de construire en litige, en application de l'article UH 13 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) et de l'OAP patrimoniale ;

- le projet méconnaît les dispositions des articles 2 UH et 3 UH du règlement du PLU.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2023, M. C... I... A... B..., représenté par le SCP Ducrot Associés " DPA ", conclut au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et à ce que soit mis à la charge des requérants le versement de la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable, pour tardiveté et en l'absence des justifications des notifications prévues à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; les requérants ne démontrent pas leur intérêt à agir à l'encontre du projet en litige ;

- à titre subsidiaire, les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mars 2023, la commune de Megève, représentée par la SELAS Legal Performances, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge des requérants le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 20 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, première conseillère,

- les conclusions de Mme Conesa-Terrade, rapporteure publique,

- les observations de Me Antoine pour la commune de Megève et de Me Magnon substituant Me Giraudon pour M. C... I... A... B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 7 juillet 2021, le maire de Megève a délivré à M. A... B..., sur des parcelles cadastrées section ... situées ..., un permis de construire portant sur l'édification d'un bâtiment à usage d'habitation individuelle de deux logements pour une surface de 986,20 m² et sur l'agrandissement d'un bâtiment à usage d'habitation individuelle, pour une surface totale de plancher de 3 084,60 m². Le projet est situé en zone UH2 du plan local d'urbanisme (PLU) de Megève. M. et Mme F... relèvent appel du jugement du 19 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur requête tendant à l'annulation de ce permis de construire.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision [...] contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application ". Les premiers juges ont mentionné, dans les visas des moyens du jugement attaqué, les articles du code de l'urbanisme et du règlement du plan local d'urbanisme de Megève dont la méconnaissance est invoquée, et ont, dans les motifs, repris leur contenu et répondu aux moyens soulevés. La circonstance qu'ils se soient bornés, au titre des visas des textes applicables, à mentionner ces code et règlement ainsi que le code de justice administrative, n'entache pas d'irrégularité le jugement attaqué. Ce moyen doit, par suite, être écarté.

Sur la légalité du permis de construire :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. /(...) ".

4. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

5. D'une part, le dossier de demande de permis de construire comporte un plan de masse " état des lieux " qui précise le tracé " buse ruisseau tracé supposé " ainsi qu'un autre plan de masse " projet " qui indique clairement " ruisseau tracé existant ". Par ailleurs, la notice descriptive indique, dans la présentation de l'état initial du terrain, qu' " un ruisseau busé traverse la propriété depuis les constructions des 2 chalets principaux ". Les pièces du dossier ne permettent pas d'établir que le chalet projeté serait implanté sur le busage de ce ruisseau, ni, en tout état de cause, en l'absence d'éléments suffisants, que le projet aurait un impact significatif sur ce busage ou que l'absence de définition des caractéristiques dudit busage n'aurait pas permis aux services instructeurs de se prononcer sur la conformité du projet aux dispositions en vigueur.

6. D'autre part, la notice du dossier de demande de permis de construire indique, s'agissant des eaux pluviales, que " la totalité des eaux pluviales des toitures et des surfaces imperméables du sol aménagé sera collectée dans un bassin de rétention à créer dont le volume sera déterminé par le géotechnicien et rejetée dans le ruisseau busé, via un regard de régulation assurant le respect du débit de fuite règlementaire. ". La localisation du bassin de rétention des eaux pluviales apparaît sur le plan de masse du chalet n° 4 " nouvel Altaïr " et la direction des services techniques a émis un avis le 10 mai 2021 le prenant en compte en donnant des prescriptions techniques sur les modalités de raccordement au réseau d'assainissement situé sous le chemin de Leonberg. Dans ces conditions, et alors même que les caractéristiques ou le dimensionnement du bassin envisagé n'est pas précisé, la composition du dossier de demande de permis de construire n'a pas été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

7. En deuxième lieu, les requérants ne peuvent utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-14 du code de l'urbanisme relatives à la mise en œuvre du permis de construire préalablement à la délivrance d'une autorisation environnementale au titre de la loi sur l'eau dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet en litige emporterait une modification du tracé de la buse du ruisseau existant induisant la nécessité d'une autorisation environnementale au sens de l'article L. 181-1 du code de l'environnement.

8. En troisième lieu, l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) patrimoniale du PLU de Megève comporte, comme fiche d'action (n° 1), de " protéger et de mettre en valeur la trame verte et bleue de la commune ", et porte sur les zones humides au sens des articles L. 211-1 et R. 211-18 du code de l'environnement ainsi que sur les cours d'eau. Elle n'inclut pas le ruisseau busé en cause dans sa cartographie et le moyen tiré de ce que l'article 13 UH du règlement du PLU est méconnu en ce que l'identification du ruisseau sur la cartographie de l'OAP aurait imposé de refuser le permis de construire ne peut qu'être écarté. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que cette orientation entendrait également inclure les simples ruisseaux, ou encore leur canalisation, lorsque rien ne laisse supposer, comme en l'espèce, qu'ils constitueraient une zone humide au sens du code de l'environnement. Par voie de conséquence, et en l'absence de précisions suffisantes, le moyen tiré de l'illégalité de cette OAP en tant qu'elle aurait omis d'inclure le ruisseau busé se trouvant sur le terrain d'assiette du projet, doit, en tout état de cause, être écarté.

9. En dernier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles 2 UH et 3 UH du règlement du PLU de Megève alors en vigueur doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation du permis de construire du 7 juillet 2021 du maire de Megève.

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Megève, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à verser à M. et Mme F... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme F... le versement d'une part, à la commune de Megève et, d'autre part, à M. A... B..., à chacun d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme F... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme F... verseront à la commune de Megève la somme de 1000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : M. et Mme F... verseront à M. A... B... la somme de 1000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... F... en application des dispositions de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la commune de Megève et à M. C... I... A... B....

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente assesseure,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2023.

La rapporteure,

C. BurnichonLa présidente,

M. G...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 22LY03419 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03419
Date de la décision : 24/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : DPA DUCROT AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-10-24;22ly03419 ?
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