Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mmes A... et B... D... et M. F... D... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les trois oppositions à tiers détenteur les concernant effectuées par la commune de Champeix pour un montant de 29 759,88 euros chacune, notifiées les 5 et 18 juin 2018.
Par un jugement n°1801385 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif a limité à la somme totale de 69 916 euros les trois oppositions à tiers détenteurs des 5 et 18 juin 2018 et a rejeté le surplus des conclusions de leur requête.
Procédure devant la cour
Par une requête et des mémoires enregistrés le 8 mars 2021, 13 juillet 2022 et 26 juillet 2022, Mmes A... et B... D... et M. F... D..., représentés par Me Roussel-Filippi, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 31 décembre 2020 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de leur requête ;
2°) d'annuler les oppositions à tiers détenteur les concernant effectuées par la commune de Champeix pour un montant de 29 759,88 euros chacune, notifiées les 5 et 18 juin 2018 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Champeix, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement de la somme de 1 800 euros au titre des frais exposés devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand et de la somme de 3 600 euros au titre des frais exposés en cause d'appel ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Champeix les dépens, qui comprendront notamment le droit de plaidoirie en application de l'article 695 du code de procédure civile et du décret modifié du 15 février 1995 relatifs aux droits de plaidoirie et à la contribution équivalente.
Ils soutiennent que :
- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce que la commune ne justifie pas de l'existence d'une créance dont le paiement est sollicité par les oppositions à tiers détenteurs ; la créance dont se prévaut la commune n'existe pas et n'est pas exigible ;
- ils ne sont pas propriétaires des immeubles concernés par les arrêtés de péril et les sommes exigées ne peuvent pas être mises à leur charge ; les premiers juges n'ont pas tenu compte de l'autorité de chose jugée dont est assorti l'arrêt de la cour administrative d'appel du 16 avril 2019, qui annule l'arrêté de péril concernant la parcelle cadastrée section ... ;
- s'agissant de l'arrêté de péril concernant les parcelles cadastrées section ..., les premiers juges ne pouvaient pas retenir les prétendus résultats des démarches effectuées par le directeur des finances publiques de Corse ; les dispositions des articles L. 511-3 et L. 511-4 du code de la construction et de l'habitation ont été méconnues ;
- la commune de Champeix a modifié ses demandes au cours de la procédure en sollicitant le cantonnement de sa créance à la somme de 64 916 euros et les premiers juges n'en ont pas tenu compte ;
- s'agissant des demandes d'annulation des oppositions à tiers détenteur, la commune de Champeix ne justifie pas de la réalité et du montant de la créance dont elle a sollicité le recouvrement ; ils ne sont pas propriétaires de la parcelle cadastrée section ... ni des parcelles cadastrées section ... ; à titre subsidiaire, ils n'ont reçu aucun titre émis le 15 avril 2016, soit le lendemain de la date à laquelle les arrêtés de péril imminent ont été édictés ; ils n'ont reçu que des titres exécutoires en date du 21 décembre 2015, qui ont fait l'objet d'un recours devant le tribunal et qui, en cours de procédure, ont fait l'objet d'une annulation par l'émission d'un mandat de paiement d'un même montant au profit de chacun des requérants ; les factures produites en cours d'instance devant le tribunal ne permettent pas de déterminer le montant des sommes qui seraient dues par les requérants ;
- la commune ne peut pas cantonner les sommes dues en proportion de la parcelle cadastrée section ... du fait de l'arrêté de péril portant sur cette dernière parcelle dès lors que la déduction qu'elle effectue est réalisée à partir du total des surfaces des parcelles cadastrées section ... ; aucune répartition des travaux effectués n'apparaît dans les factures dont se prévaut la commune.
Par des mémoires en défense enregistrés le 20 juin 2022 et 21 août 2023, la commune de Champeix, représentée par Me Duval, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge des requérants le versement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en ce qui concerne les frais exposés devant le tribunal administratif et de la somme de 3 600 euros en cause d'appel.
Elle soutient que :
- il devra être vérifié que la requête d'appel est recevable au regard du délai d'appel ;
- les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par un courrier du 27 juin 2023, les parties ont été informées, sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que, par application des dispositions combinées de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, la cour était susceptible, pour annuler partiellement pour irrégularité le jugement attaqué du 31 décembre 2020 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand et pour rejeter la demande et le surplus des conclusions de la requête de Mmes et M. D..., tendant à l'annulation des trois oppositions à tiers détenteur effectuées les concernant par la commune de Champeix pour un montant de 29 759,88 euros chacune, notifiées les 5 et 18 juin 2018, et à la décharge de l'obligation de payer, de relever d'office l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître du litige.
Mmes et M. D... ont présenté des observations suite à ce moyen d'ordre public, qui ont été enregistrées les 17 juillet et 28 août 2023 et communiquées.
La commune de Champeix a présenté des observations suite à ce moyen d'ordre public, qui ont été enregistrées le 21 août 2023 et communiquées.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le livre des procédures fiscales ;
- loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 ;
- la décision n° 4212 du Tribunal des conflits du 14 juin 2021 ;
- le code de justice administrative.
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Burnichon, première conseillère,
- les conclusions de Mme Conesa-Terrade, rapporteure publique,
- les observations de Me Chinouf substituant Me Roussel-Filippi pour les requérants et de Me Duval pour la commune de Champeix.
Considérant ce qui suit :
1. Le maire de la Commune de Champeix a prononcé, par des arrêtés du 16 janvier 2015, modifiés le 14 avril 2016, le péril imminent, d'une part, de l'immeuble cadastré section ... et d'autre part, de l'immeuble situé sur la parcelle cadastrée section .... Après avoir recherché les propriétaires de ces immeubles, il a émis le 21 décembre 2015 un titre exécutoire n° 285, pour un montant de 29 759,88 euros. Trois oppositions à tiers détenteurs ont été effectuées par la commune de Champeix à l'encontre de M. et Mmes D..., pour un montant de 29 759,88 euros chacune, notifiées les 5 et 18 juin 2018. Mmes et M. D... relèvent appel du jugement du 31 décembre 2020, par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a décidé que les trois oppositions à tiers détenteur des 5 et 18 juin 2018 devaient être limitées à la somme totale de 69 916 euros et a rejeté le surplus des conclusions de leur requête.
Sur la compétence de la juridiction administrative :
2. Aux termes de l'article L. 1617- 5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017 : " (...) / 1° En l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur. / (...) / L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. / 2° La contestation qui porte sur la régularité d'un acte de poursuite est présentée selon les modalités prévues à l'article L. 281 du livre des procédures fiscales. (...) ".
3. Aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction résultant de la loi du 28 décembre 2017 : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances, amendes, condamnations pécuniaires et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / (...) / Les contestations relatives au recouvrement ne peuvent pas remettre en cause le bien-fondé de la créance. Elles peuvent porter : / 1° Sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° A l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, sur l'obligation au paiement, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués et sur l'exigibilité de la somme réclamée. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés dans le cas prévu au 1° devant le juge de l'exécution. Dans les cas prévus au 2°, ils sont portés: / (...) / c) Pour les créances non fiscales des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics de santé, devant le juge de l'exécution. ".
4. Il ressort de ces dispositions, applicables en vertu du XVII de l'article 73 de la loi du 28 décembre 2017, visée ci-dessus, à compter du 1er janvier 2019, y compris aux instances en cours à cette date, que l'ensemble du contentieux du recouvrement des créances non fiscales des collectivités territoriales est de la compétence du juge de l'exécution, tandis que le contentieux du bien-fondé de ces créances est de celle du juge compétent pour en connaître sur le fond.
5. Il résulte de l'instruction que les conclusions de Mmes et M. D... tendant à l'annulation de trois oppositions à tiers détenteurs effectuées par la commune de Champeix pour un montant de 29 759,88 euros chacune, qui ressortissent au contentieux du recouvrement, ne relèvent pas de la compétence de la juridiction administrative mais de celle du juge de l'exécution, sans que puisse être remis en cause dans le cadre de ce contentieux le bien-fondé de la créance.
6. Il résulte de ce qui précède que le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 31 décembre 2020 doit être annulé en tant qu'il a rejeté le surplus de leurs conclusions.
7. Il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions de Mmes et M. D... tendant à l'annulation de ces trois oppositions à tiers détenteurs effectuées par la commune Champeix pour un montant de 29 759,88 euros chacune.
Sur les conclusions tendant à l'annulation des trois oppositions à tiers détenteurs d'un montant de 29 759,88 euros chacune :
8. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 2 à 6, le surplus des conclusions présentées par Mmes et M. D... devant le tribunal administratif doit être rejeté comme porté devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Sur les frais liés au litige :
9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties tendant à l'application des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1801385 du 31 décembre 2020 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. et Mmes D....
Article 2 : Le surplus de la demande de Mmes et M. D... tendant à l'annulation des trois oppositions à tiers détenteur est rejeté comme porté devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D..., représentant unique pour l'ensemble des requérants, et à la commune de Champeix.
Délibéré après l'audience du 5 septembre 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,
Mme Camille Vinet, présidente assesseure,
Mme Claire Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2023.
La rapporteure,
C. BurnichonLa présidente,
M. E...
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 21LY00704 2