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06/07/2023 | FRANCE | N°22LY03065

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 06 juillet 2023, 22LY03065


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 à 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1603903 du 23 novembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a constaté un non-lieu à statuer partiel, a prononcé la décharge partielle de ces impositions et rejeté le surplus des conclusions de sa dem

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Par un arrêt n° 19LY00169 du 1er avril 2021, la cour administrative d'appel d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 à 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1603903 du 23 novembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a constaté un non-lieu à statuer partiel, a prononcé la décharge partielle de ces impositions et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un arrêt n° 19LY00169 du 1er avril 2021, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé l'article 4 de ce jugement et déchargé M. B... des impositions restant à sa charge.

Par une décision n° 452964 du 20 octobre 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'économie, des finances et de relance, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 1er avril 2021 et a renvoyé l'affaire devant la même cour.

Procédure devant la cour après renvoi du Conseil d'Etat

Par des mémoires, enregistrés le 23 novembre 2022 et le 2 mars 2023, M. B..., représenté par Me Palomares, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 4 du jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions demeurant en litige et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la proposition de rectification qui lui a été notifiée est insuffisamment motivée en ce que la proposition de rectification adressée à la SARL L'Escale, à laquelle il est fait référence, n'a pas été jointe et qu'il n'est fait aucune référence expresse à sa motivation ;

- il n'est pas établi que la proposition de rectification adressée à la société aurait été remise en main propre, alors que la proposition de rectification qui lui était personnellement adressée ne l'a jamais touché ; il n'a ainsi pas eu connaissance des motifs du redressement en temps utile ;

- contrairement à ce qu'a estimé le vérificateur pour rejeter la comptabilité de la SARL L'Escale, il n'existe aucun stock négatif ;

- la méthode reconstitution des recettes de la SARL L'Escale utilisée par l'administration est radicalement viciée dans son principe et excessivement sommaire dès lors que le prix de trois euros retenu pour le chocolat et le thé est erroné, le taux de perte sur la bière pression doit être porté à 16,6 %, la quantité d'alcool consommée par client est supérieure à celle retenue par le vérificateur, ce dernier n'ayant en outre pas tenu compte des unités de vente de la société, et à tout le moins égale à 28,8 cl par personne, les galettes ne sont pas systématiquement vendues avec du cidre et les crêpes et glaces peuvent être consommées en dessert à l'issue d'un repas ; à tout le moins, la moyenne des coefficients issus de la moyenne des exercices clos en 2010 et en 2012 devrait être appliquée à l'exercice clos en 2011 ; le chiffre d'affaires " galette " doit être compris dans le chiffre d'affaires " repas traditionnel " sous peine de les comptabiliser deux fois ; les coefficients de marge retenus par l'administration pour chaque exercice révèlent des incohérence.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pin, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'une vérification de comptabilité de la SARL L'Escale, qui exerçait une activité de restauration et dont M. B... était le gérant et l'associé majoritaire, l'administration, après avoir rejeté sa comptabilité comme non probante et reconstitué ses recettes, a réintégré dans les bases imposable à l'impôt sur le revenu de M. B... des années 2010, 2011 et 2012 les distributions correspondant aux recettes non comptabilisées qu'elle a imposées entre ses mains, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le double fondement du 1° et du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts. Par un jugement du 23 novembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble, après avoir constaté un non-lieu à statuer partiel, a prononcé la décharge partielle des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des majorations auxquelles M. B... a été assujetti en conséquence du rehaussement de ses revenus imposables et rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par un arrêt du 1er avril 2021, la cour administrative d'appel de Lyon a déchargé M. B... du surplus des impositions et pénalités restant à sa charge. Par une décision du 20 octobre 2022, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'économie, des finances et de la relance, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour.

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition (...) ". résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Hormis le cas où elle se réfère à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, l'administration peut satisfaire à cette obligation en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification, ou une réponse aux observations du contribuable, consécutive à un autre contrôle et qui lui a été régulièrement notifiée, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit elle-même suffisamment motivée.

3. La proposition de rectification du 20 décembre 2013 relative à la situation de M. B..., notifiée à l'adresse du contribuable par lettre recommandée dont l'avis de réception signé, versé à l'instance, établit qu'elle lui est parvenue le 24 décembre 2013, ne mentionne pas les motifs de fait ou de droit pour lesquelles l'administration estimait devoir rehausser les chiffres d'affaires et les résultats de la SARL L'Escale. Si cette proposition de rectification peut, dans les circonstances de l'espèce, être regardée comme se référant, pour le calcul des bases d'imposition, aux rehaussements envisagés par l'administration dans la proposition de rectification destinée à la société à la suite de la vérification de comptabilité dont il est précisé qu'elle a été " adressée " à cette société le même jour, M. B... conteste, dans le dernier état de ses écritures après renvoi de l'affaire à la cour, l'avoir réceptionnée en temps utile. Le ministre se borne à faire valoir que la proposition de rectification destinée à la SARL L'Escale a été remise en mains propres à M. B... en sa qualité de gérant de cette société le 20 décembre 2013 sans apporter aucun élément de nature à établir la date de la remise en mains propres de ce document. S'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification destinée à la société est bien parvenue à l'intéressé qui, en sa qualité de gérant de l'entreprise, a présenté des observations en réponse à cette proposition de rectification par courrier du 17 février 2014, le ministre, qui s'est abstenu de répondre à la critique du requérant, n'apporte aucun élément de nature à établir que cette proposition de rectification a été effectivement réceptionnée par M. B... préalablement ou, au plus tard, concomitamment à la proposition de rectification qui lui a été adressée personnellement le 24 décembre 2013. Il suit de là que la proposition de rectification destinée à la SARL L'Escale ne peut être regardée comme ayant été régulièrement notifiée de sorte que M. B... n'a pas été mis à même de formuler ses observations dans le délai prévu à l'article R. 57-1 du livre des procédures fiscales cité au point précédent. Il en résulte que les impositions auxquelles il a été assujetti ont été établies suivant une procédure irrégulière.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... dans l'instance en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : M. B... est déchargé des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales restant à sa charge au titre des années 2010, 2011 et 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 2 : L'article 4 du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 novembre 2018 est annulé.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2023.

Le rapporteur,

F.-X. Pin

Le président,

D. PruvostLa greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03065


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03065
Date de la décision : 06/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Rectification (ou redressement) - Proposition de rectification (ou notification de redressement) - Motivation.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués - Imposition de la personne morale distributrice.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : PALOMARES

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-07-06;22ly03065 ?
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