La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/06/2023 | FRANCE | N°22LY02675

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 13 juin 2023, 22LY02675


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 21 mai 2022 par lequel la préfète de l'Allier l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2201144 du 29 juillet 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour
<

br>Par une requête, enregistrée le 29 août 2022, M. B... A..., représenté par Me Remedem, demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 21 mai 2022 par lequel la préfète de l'Allier l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2201144 du 29 juillet 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 29 août 2022, M. B... A..., représenté par Me Remedem, demande à la cour :

1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 29 juillet 2022 ;

3°) d'annuler l'arrêté de la préfète de l'Allier du 21 mai 2022 ;

4°) d'enjoindre à la préfète de l'Allier de lui délivrer un titre de séjour d'une durée d'un an à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son avocat en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la préfète de l'Allier a méconnu ses pouvoirs en n'exerçant pas son pouvoir de régularisation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision de refus de délai de départ volontaire :

- elle méconnaît l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est illégale par les mêmes moyens que ceux invoqués en première instance.

La préfète de l'Allier a présenté un mémoire, enregistré le 23 mai 2023, après clôture de l'instruction et qui n'a pas été communiqué.

Le 8 novembre 2022, le bureau d'aide juridictionnelle a classé sans suite la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. François Bodin-Hullin, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant angolais né le 14 avril 1988 à Luanda, déclare être entré en France en février 2018. Par une décision du 27 juin 2018, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile. Le 5 décembre 2019, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté le recours de M. A... dirigé contre cette décision de l'Office. A la suite de son interpellation par les services de gendarmerie, la préfète de l'Allier l'a, par un arrêté du 21 mai 2022, obligé à quitter sans délai le territoire français, l'a interdit de retour pour une durée de deux ans et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 29 juillet 2022 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. M. A... soutient que la préfète de l'Allier a méconnu ses pouvoirs en n'instruisant pas sa situation au regard de la possibilité de bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2022, et relève, contrairement aux indications erronées portées dans la décision contestée sur sa situation personnelle et familiale, remplir les conditions lui ouvrant droit à une telle régularisation. Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'il aurait présenté une telle demande de titre de séjour et un étranger ne détient aucun droit à l'exercice par le préfet de son pouvoir de régularisation et ne peut pas plus, au demeurant, utilement se prévaloir des orientations générales de cette circulaire. Le moyen ne peut dès lors qu'être écarté.

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal d'audition par les services de la gendarmerie de l'Allier dressé le 21 mai 2022, que le requérant, qui n'est entré qu'en 2018 sur le territoire français, a déclaré être célibataire, disposer d'une domiciliation postale dans le Val-de-Marne et être hébergé chez un ami dans le département de la Seine-Saint-Denis. S'il déclare également effectuer régulièrement des séjours à Clermont-Ferrand pour rendre visite à ses filles nées en 2013 et 2015, qui résident chez leur mère, de nationalité angolaise, il n'établit pas une participation effective à leur entretien et éducation par la production d'un seul courrier du 23 mai 2022 de la mère de leurs enfants se bornant à indiquer qu'il s'occupe d'elles et leur fournit de la nourriture et des habits. Il ne ressort en tout état de cause pas plus des pièces du dossier, et il n'est pas allégué, que le séjour en France de la mère de ses enfants serait régulier et qu'elle aurait donc vocation à y rester, ni qu'ils ne pourraient créer une cellule familiale dans le pays dont ils ont tous deux la nationalité. Par ailleurs, le requérant ne se prévaut d'aucun autre lien qu'il serait susceptible d'avoir noué sur le territoire français et ne conteste pas disposer d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine, où réside notamment sa mère avec qui il déclare être en contact. Dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté. Pour les mêmes motifs, la décision contestée n'est pas non plus entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

5. A l'appui de ses conclusions, M. A... soulève le même moyen que celui soulevé devant le tribunal administratif, tiré de ce que la décision attaquée méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le premier juge.

Sur la décision de refus d'accorder un délai de départ volontaire :

6. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Aux termes de l'article L. 612-3 de ce code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) / 2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) / 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) ".

7. M. A... ne conteste pas s'être maintenu sur le territoire français sans solliciter la délivrance d'un titre de séjour et s'être soustrait à la mesure d'éloignement prononcée par un arrêté du préfet du Val-de-Marne du 11 juin 2020. Dans ces conditions, la préfète de l'Allier a pu légalement et sans détournement de pouvoir refuser de lui accorder un délai de départ volontaire au motif qu'il existait, au sens du 2° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. M. A... n'est par suite pas fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaît l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

8. En l'absence de délai de départ volontaire, la préfète de l'Allier pouvait légalement prononcer une interdiction de retour sur le territoire français à l'encontre de M. A..., lequel ne démontre aucune circonstance humanitaire qui serait de nature à emporter l'illégalité de cette décision. Ainsi qu'il a été dit précédemment, il n'établit pas l'existence d'attaches privées ou une intégration particulière sur le territoire français, et il n'établit pas plus que la mère de ses filles, de même nationalité, ne pourrait le rejoindre en Angola. Dans ces circonstances, il n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans serait entachée d'erreur d'appréciation et méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou encore les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'elle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,

M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juin 2023.

Le rapporteur,

F. Bodin-Hullin

La présidente,

M. C...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02675


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02675
Date de la décision : 13/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: M. François BODIN-HULLIN
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : REMEDEM

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-13;22ly02675 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award