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30/05/2023 | FRANCE | N°22LY02581

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 30 mai 2023, 22LY02581


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 5 mars 2021 par lequel le préfet de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101143 du 15 mars 2022, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée

le 22 août 2022, M. B... A..., représenté par Me Faure Cromarias, demande à la cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 5 mars 2021 par lequel le préfet de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101143 du 15 mars 2022, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 22 août 2022, M. B... A..., représenté par Me Faure Cromarias, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 15 mars 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Allier du 5 mars 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui incluent notamment la somme de 13 euros au droit de plaidoirie laissée à la charge du requérant ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros hors taxe en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de séjour :

- elle est entachée d'un défaut de motivation s'agissant de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation au regard de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article L. 313-11 7° de ce code et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 dudit code ;

- elle méconnaît l'article 3,1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3,1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour et de la décision d'obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3,1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire, enregistré le 19 avril 2023, la préfète de l'Allier conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 6 juillet 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. François Bodin-Hullin, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant albanais né le 10 mai 1994 à Tirana (Albanie), est entré en France avec ses parents et ses deux sœurs le 19 décembre 2016. Sa demande d'asile a été rejetée le 14 avril 2017 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et le 6 octobre 2017 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). M. A... a présenté une demande tendant à l'obtention d'un titre de séjour le 8 septembre 2020. Par un arrêté du 5 mars 2021, le préfet de l'Allier a rejeté cette demande. Il a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. A... relève appel du jugement du 15 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la décision portant refus de séjour :

2. En premier lieu, la décision litigieuse vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pertinentes, et plus particulièrement les articles L.313-11, 7° et L 313-14 de ce code, et se fonde sur les éléments de faits qu'elle précise, comme la date et les conditions de son entrée en France en 2016, la précédente mesure d'éloignement dont il fait l'objet, sa situation personnelle et familiale ou encore les décisions de refus des instances chargées de l'examen de sa demande d'asile. Il en résulte que la décision attaquée énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle est fondée. Elle est ainsi suffisamment motivée.

3. En deuxième lieu, il ressort de l'arrêté en litige du 5 mars 2021 que l'examen a porté sur la situation de M. A... également au regard de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce moyen doit, dès lors, être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...] 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Selon l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Si M. A..., célibataire et sans enfant, est entré en France en décembre 2016, il a déjà fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en 2017 et ses parents et ses deux sœurs, avec lesquels il est également entré et dit résider, sont eux-mêmes en situation irrégulière. Il ne justifie pas, par les pièces produites, d'une intégration professionnelle particulière. S'il fait état de la volonté d'intégration de sa famille, par sa participation active à des activités bénévoles depuis le mois d'avril 2019, y compris pendant la période de confinement, ces circonstances ne suffisent pas à établir que le préfet aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels sa décision a été prise. S'il soutient, au demeurant sans précisions, que sa mère souffrirait de diverses pathologies nécessitant la présence de sa sœur aînée ou qu'un retour dans son pays d'origine aurait un effet néfaste sur l'éducation de sa jeune sœur mineure et scolarisée en France, ces circonstances sont, en l'absence de précisions suffisantes, sans incidence sur sa propre situation. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent qu'être écartés. Pour les mêmes motifs, l'arrêté litigieux n'est pas non plus entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

6. En quatrième lieu, M. A... ne démontre pas davantage que les éléments précédemment décrits permettraient de caractériser des considérations exceptionnelles ou humanitaires au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur. Le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions doit, dès lors, être écarté.

7. En cinquième lieu, si M. A... soutient que le retour dans son pays d'origine de sa jeune sœur porterait atteinte à la scolarité de cette dernière, en méconnaissance de l'article 3,1 de la convention internationale des droits de l'enfant, elle n'y serait toutefois pas séparée de sa famille, qui n'a pas vocation à rester sur le territoire français, et il n'est en outre pas le responsable légal de cette dernière.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de séjour n'étant pas illégale, M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision.

9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 5 et 7, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3,1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste doivent être écartés.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

10. Il résulte de ce qui précède que les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ne sont pas illégales. M. A... n'est, par suite, pas fondé à exciper de l'illégalité de ces décisions.

11. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus du titre de séjour sollicité, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3,1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.

12. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

13. M. A... soutient qu'il serait exposé à des risques de traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Albanie du fait de son appartenance à la communauté Jevgjit. Toutefois, il n'apporte aucune justification ni élément probant de nature à établir qu'il serait susceptible d'être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, étant au surplus relevé que ses allégations ont été écartées par l'OFPRA et la CNDA. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

14. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 9 mai 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,

M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2023.

Le rapporteur,

F. Bodin-Hullin

La présidente,

M. C...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02581


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02581
Date de la décision : 30/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: M. François BODIN-HULLIN
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : FAURE CROMARIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-05-30;22ly02581 ?
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