La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2020 | FRANCE | N°19LY04115

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 12 mars 2020, 19LY04115


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du préfet de la Côte-d'Or du 5 avril 2019 rejetant sa demande de regroupement familial au profit de son épouse, d'enjoindre au préfet d'accueillir sa demande et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1901537 du 27 août 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :
<

br>Par une requête enregistrée le 6 novembre 2019, M. B..., représenté par la SCP Bergeret ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du préfet de la Côte-d'Or du 5 avril 2019 rejetant sa demande de regroupement familial au profit de son épouse, d'enjoindre au préfet d'accueillir sa demande et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1901537 du 27 août 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 novembre 2019, M. B..., représenté par la SCP Bergeret et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1901537 du 27 août 2019 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du préfet de la Côte-d'Or du 5 avril 2019 rejetant sa demande de regroupement familial au profit de son épouse ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or d'accueillir sa demande dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- du fait de son épargne et des revenus qu'il en tire, il justifie de ressources suffisantes ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 janvier 2020, le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Pin, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. Par une demande déposée auprès de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 28 novembre 2018, M. B..., ressortissant algérien né le 29 décembre 1938, a sollicité le regroupement familial en faveur de son épouse, de même nationalité. Par une décision du 5 avril 2019, le préfet de la Côte-d'Or a refusé de faire droit à cette demande. Par le jugement attaqué du 27 août 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Côte-d'Or du 5 avril 2019.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente. Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1. Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales. L'insuffisance des ressources ne peut motiver un refus si celles-ci sont égales ou supérieures au salaire minimum interprofessionnel de croissance ; (...) ". Si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité, il n'a toutefois pas entendu écarter, sauf stipulations contraires expresses de l'accord, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour. Aux termes de l'article R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période (...) ". Aux termes de l'article R. 421-4 du même code : " A l'appui de sa demande de regroupement, le ressortissant étranger présente les copies intégrales des pièces suivantes : (...) 3° Les justificatifs des ressources du demandeur et, le cas échéant, de son conjoint, tels que le contrat de travail dont il est titulaire ou, à défaut, une attestation d'activité de son employeur, les bulletins de paie afférents à la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande, ainsi que le dernier avis d'imposition sur le revenu en sa possession, dès lors que sa durée de présence en France lui permet de produire un tel document, et sa dernière déclaration de revenus. La preuve des revenus non salariaux est établie par tous moyens ; (...) ".

3. La condition de ressources définie par les stipulations précitées de l'article 4 de l'accord franco-algérien vise à permettre à l'administration de s'assurer que le budget familial sera, dans la durée, alimenté régulièrement par des revenus stables et d'un montant suffisant. Compte tenu de cet objectif, l'épargne constituée par le demandeur ou son conjoint ne présente pas le caractère d'une ressource pouvant être prise en compte pour l'instruction d'une demande de regroupement familial. Seuls les intérêts générés par cette épargne sont susceptibles d'être pris en compte, sous réserve d'être suffisamment stables.

4. Il ressort des dires mêmes de M. B... que ses ressources susceptibles d'être prises en compte, composées de pensions de retraite et de revenus de capitaux mobiliers, se situent à un niveau net mensuel de 1 054 euros, inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance, lequel s'établit, sur la période de référence, au montant net mensuel de 1 153,82 euros. Contrairement à ce que soutient M. B..., l'épargne qu'il a constituée ne présente pas le caractère d'une ressource pouvant être prise en compte pour l'instruction d'une demande de regroupement familial. Par suite, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que les ressources de M. B... ne pouvaient être regardées comme suffisantes au sens et pour l'application des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien.

5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Pour apprécier l'atteinte à la vie privée et familiale, il y a lieu de prendre en considération la durée et l'intensité des liens familiaux dont il est fait état.

7. M. B..., demeurant depuis 1963 en France où sa première épouse, décédée en 2007, l'avait rejoint en 2000, s'est remarié le 30 avril 2018 avec Mme C..., ressortissante algérienne née le 2 décembre 1975, au profit de laquelle il a sollicité le bénéfice du regroupement familial. M. B..., qui ne soutient ni même n'allègue avoir eu une vie commune avec son épouse, n'apporte aucun élément sur les liens affectifs qu'il entretiendrait avec celle-ci à la date de la décision contestée. Au demeurant, Mme C... a toujours vécu au Algérie, où la vie familiale du couple peut se poursuivre et où M. B..., qui fait état de problèmes de santé, peut bénéficier de la présence de son épouse. Dans ces conditions, le préfet de la Côte-d'Or n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision aurait été édictée en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Dès lors, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 20 février 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Drouet, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 mars 2020.

2

N° 19LY04115


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04115
Date de la décision : 12/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SCP BERGERET ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-03-12;19ly04115 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award