Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 26 février 2014 par laquelle le préfet de la région Rhône-Alpes a refusé de lui délivrer la carte professionnelle permettant d'exercer la profession de moniteur de ski nordique de fond et d'enjoindre au préfet de la région Rhône-Alpes de prendre une nouvelle décision dans un délai de deux mois à compter du prononcé du jugement sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1403522 du 27 avril 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 26 février 2014 par laquelle le préfet de la région Rhône-Alpes a refusé de délivrer à M. C... une carte professionnelle lui permettant d'exercer la profession de moniteur de ski nordique de fond et a enjoint au préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes de prendre une nouvelle décision dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par un recours enregistré le 22 juin 2017, le ministre des sports demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 27 avril 2017 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Grenoble.
Il soutient que :
- la définition de la différence substantielle est fixée à l'article R. 212-90-1 du code du sport ; la capacité du moniteur de ski nordique de fond à assurer la sécurité de ses clients est appréciée au regard de deux compétences essentielles, une compétence technique et une compétence relative à la sécurité et au secours dans le milieu spécifique montagnard enneigé ; les diplômes nationaux, brevet d'Etat d'éducateur sportif de premier degré, option ski nordique de fond remplacé par le diplôme d'Etat de moniteur national de ski nordique de fond, permettent à leur titulaire d'exercer la promenade nordique sur les pistes de ski de fond d'une durée maximale d'une journée, la randonnée nordique en dehors des pistes de ski de fond qui peut durer plusieurs jours, le raid nordique qui peut durer plusieurs jours en autonomie complète ; l'unité de formation spécifique liée à la sécurité, qui est éliminatoire, prévue dans le cursus de formation conduisant à l'obtention du diplôme national est évaluée au travers d'un raid, d'épreuves pratiques et théoriques de sécurité générale, d'épreuves d'utilisation d'outils, d'une évaluation d'un dossier relatif aux cinq randonnées ; le tribunal administratif a fait une inexacte appréciation des faits en considérant que le certificat de sécurité en moyenne montagne de niveau 3 obtenu en 2012 à l'issue d'une formation de 42 heures garantit un niveau de qualification conforme aux exigences de sécurité prévue dans la formation nationale dès lors qu'il ne s'est pas interrogé sur les modalités d'évaluation conduisant à l'obtention du certificat de sécurité en montagne de niveau 3 obtenu par M. C... et fait exclusivement référence aux aptitudes préalables à l'entrée en formation relatives à la connaissance des avalanches, la recherche d'émetteur récepteur, la direction d'un groupe hors-pistes, les bases de la navigation, les performances personnelles hors-piste, la condition physique personnelle, la connaissance de la montagne, les raquettes et le traçage ;
- le tribunal administratif a fait une inexacte application des dispositions de l'article R. 212-90 du code du sport en considérant que les fonctions de navigateur dans l'armée de l'air au Royaume-Uni de 1985 à 2008 doivent être regardées comme étant des expériences professionnelles permettant de couvrir une différence substantielle ; les expériences professionnelles de M. C... ne sont pas en lien direct avec l'exercice de la profession de moniteur de ski nordique de fond ; ces expériences sont relativement anciennes et ne sont pas constitutives de compétences professionnelles ; elles ne couvrent pas la totalité du champ des compétences sécuritaires exigées pour assurer en sécurité l'activité de moniteur nordique de ski de fond puisqu'elles sont limitées à la cartographie-orientation ;
- la demande de M. C... relevait des conditions de recevabilité fixées au point 2 de l'article R. 212-90 et il devait être en mesure de justifier avoir exercé l'activité de moniteur de ski nordique de fond dans un Etat membre autre que la France pendant deux ans au cours des dix dernières années ; le préfet était tenu de rejeter la demande car M. C... n'a pas été en mesure de justifier être qualifié au sens de la directive 2005/36CE et donc être placé dans l'une des quatre situations fixées à l'article R. 212-90 du code du sport ;
- la qualification présentée par M. C... ne vise pas spécifiquement l'exercice d'une profession réglementée au Royaume-Uni, ne présente pas un niveau et un contenu de formation réglementairement déterminé par les autorités compétentes au Royaume-Uni, n'a pas été acquise dans un Etat tiers et admise en équivalence dans un Etat membre.
Par un mémoire enregistré le 3 novembre 2017, M. C..., représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête, à la condamnation du ministre des sports à lui verser la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive en se réservant la possibilité de solliciter ultérieurement l'indemnisation de ses préjudices liés à l'impossibilité d'exercer sa profession en France depuis 2008, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes de lui délivrer la carte professionnelle de moniteur de ski de fond dans un délai d'un mois suivant le prononcé de l'arrêt sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à ce que la somme de 10 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens comprenant tous les frais de traduction qu'il a été contraint d'exposer dans le cadre de la procédure.
Il soutient que :
- la décision a méconnu le respect des délais prévus à l'article 51 de la directive européenne n° 2005/36/CE relative à la procédure de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles ; les dispositions de la directive sont d'application directe dès lors que l'ordonnance n° 2008-507 du 30 mai 2008, reprise à l'article R. 212-89 du code du sport, a transposé ces dispositions ; l'inspecteur du pôle national des métiers de l'encadrement du ski et de l'alpinisme n'a accusé réception de la demande que par lettre du 27 août 2013 qui n'a été envoyée que le 10 septembre 2013 ; à la date du 11 mars 2014, aucune décision dûment motivée n'a été notifiée par l'autorité compétente de l'Etat qui a attendu le 31 mars 2014 pour lui notifier pour la première fois une décision dûment motivée ; la décision du préfet méconnaît les délais prévus au 2 et 3 de l'article R. 212-90-1 du code du sport dès lors que la commission de reconnaissance des qualifications a été saisie avec plus de quatre mois de retard ; l'Etat devra justifier que la commission de reconnaissance des qualifications a été saisie autour du 20 janvier 2014 ;
- la décision méconnaît le principe de proportionnalité consacré par l'article 14 de la directive ; en application de ce principe, l'autorité compétente doit d'abord vérifier si la différence de qualification professionnelle n'est pas entièrement ou en partie couverte par les connaissances acquises par le demandeur au cours de son expérience professionnelle et ce n'est qu'ensuite et si l'autorité compétente venait à estimer qu'il existe des différences substantielles entre les deux formations professionnelles qu'une mesure de compensation peut être demandée ; il ressort des pièces du dossier que l'Etat n'a pas vérifié si les connaissances acquises au cours de son expérience professionnelle sont de nature à couvrir tout ou partie de la différence substantielle ; il justifie de son expérience et de ses compétences en matière d'activité de ski ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; en ce qui concerne sa formation, le diplôme ISIA niveau 3 correspond au niveau de qualification théorique et pratique le plus haut pour la pratique du ski de fond en Grande-Bretagne ; il a obtenu un diplôme " sécurité en montagne " de niveau 3 BASI le 30 novembre 2012 ; sa licence comportant la qualification " Level 3 moutains Safety " a été renouvelée chaque année depuis 2010 ; le BASI ne délivre pas de licence si le titulaire n'a pas fait de cours de recyclage ; il a obtenu le BASI " sécurité en montagne niveau 3 " qui comprend la connaissances des avalanches, recherches avec un détecteur de victimes en avalanches en moins de 4 minutes, la direction d'un groupe en hors-piste, l'aptitude en orientation permettant de se situer en tout temps, les performances personnelles en hors-piste, la condition physique personnelle, la connaissance de la montagne, la pratique du ski de randonnée/raquette ; la comparaison entre le contenu de l'épreuve d'aptitude et les critères d'évaluation du BASI ne permet pas d'établir une différence substantielle entre la formation britannique obtenue et la formation requise dans l'Etat membre d'accueil ; ses formations professionnelles ont représenté 23 mois, ainsi que deux autres périodes de 6 mois ; le contenu des formations et recyclage couvre la navigation dans l'air et au sol, cartographie et météorologie à un niveau plus élevé que dans le système français ; en ce qui concerne les connaissances acquises au cours de son expérience professionnelle, il a passé 23 ans dans l'armée de l'air britannique en tant que navigateur professionnel ; il démontre qu'il a participé à des courses de ski de randonnée en haute montagne et raids en ski de randonnée entre 1990 et 2014 ; il a pratiqué le ski de randonnée hors-piste ; les techniques de montagne ont été acquises dans plusieurs de ses expéditions militaires et privées ; depuis 2009, il travaille à temps plein chaque saison d'hiver en Bavière comme moniteur de ski pour une école de ski allemande ;
- si l'Etat prétend qu'il ne remplirait pas les conditions de recevabilité fixées au 2° de l'article R. 212-90 du code du sport, ce motif n'est pas visé dans la décision du 26 février 2014 ; il relève du 3° de l'article R. 212-90 du code du sport et non pas du 2° de ce même article ;
- il est titulaire d'une formation réglementée et relève du 13 paragraphe 1 e) " formation réglementée " de la directive 2005/36/CE et donc du 3° de l'article R. 212-90 du code du sport ; par suite, il n'a pas à justifier avoir exercé l'activité de ski nordique de fond pendant deux ans au cours des dix dernières années dans un pays membre autre que la France ;
- le critère de sécurité introduit par l'article A. 212-192-5 du code du sport est discriminatoire et crée une rupture d'égalité de traitement entre les candidats dès lors que le test technique de sécurité n'est pas un test de sécurité mais une épreuve de vitesse instaurée pour éliminer les candidats indésirables ;
Par des mémoires, enregistrés le 31 mai 2018 et le 4 janvier 2019, le ministre des sports déclare se désister de sa requête eu égard à la délivrance, par arrêté du 17 mai 2018, d'une attestation de libre établissement permettant à M. C... d'exercer la profession de moniteur de ski et conclut au rejet des conclusions de ce dernier tendant à ce qu'il soit mis à sa charge la somme de 13 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les traductions demandées à M. C..., dans le cadre de sa demande de libre établissement, sont prévues à l'annexe II-12-2 du code du sport ; ces frais de traduction qui participent à la procédure de reconnaissance des qualifications professionnelles européennes ne sauraient être compris dans les dépens.
Par des mémoires, enregistrés le 26 juin 2018 et le 14 janvier 2019, M. C... prend acte du désistement du ministre des sports et maintient ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 13 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens comprenant tous les frais de traduction qu'il a été contraint d'exposer dans le cadre de la procédure engagée pour un montant de 384 euros.
Il soutient que les dispositions du code du sport invoquées ne sont pas applicables dès lors que les frais de traduction se rapportent à des factures des 21 et 23 mai 2014 au titre de la traduction des pièces annexées à la requête introductive d'instance ; ces factures de mai 2014 ne participent pas aux frais de traduction qu'il a exposés pour les besoins de la reconnaissance de qualifications européennes mais aux frais de de traduction rendus nécessaires pour faire valoir ses droits devant la juridiction administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du sport ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant britannique né le 5 mai 1964, indique être installé en France depuis 2008. Il est titulaire du diplôme " Level 3 mountain safety " délivré le 30 novembre 2012 et du diplôme " Nordic Level 3 ISIA National Ski Teacher " délivré le 27 mai 2013 par la British Association Of Snowsport Instructors (BASI). Le 5 août 2013, il a adressé au préfet de la région Rhône-Alpes le formulaire de déclaration d'activités des ressortissants de l'Union européenne afin d'être autorisé à exercer sur le territoire français la profession réglementée de moniteur de ski nordique de fond. Par une décision du 26 février 2014, le préfet de la région Rhône-Alpes a informé M. C... qu'il devait se soumettre à l'épreuve d'aptitude définie à l'article A. 212-192-5 du code du sport. Le ministre des sports relève appel du jugement du 27 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 26 février 2014 et a enjoint au préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes de prendre une nouvelle décision dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement.
2. Postérieurement à l'introduction de son recours, le ministre des sports a déclaré s'en désister. Ce désistement étant pur et simple, rien ne s'oppose en ce qu'il en soit donné acte.
3. Eu égard à la portée de ses écritures, M. C... doit être regardé comme ayant renoncé à ses conclusions à fin de condamnation de l'Etat pour résistance abusive.
Sur les conclusions de M. C... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
4. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
5. Aux termes de l'annexe II-12-1 du code du sport fixant les pièces nécessaires à la déclaration d'activité des ressortissants d'un Etat membre de la communauté européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'espace économique européen souhaitant s'établir en France, doivent être joints notamment à la déclaration " 4. Copie de l'attestation de compétences ou du titre de formation accompagnée de documents décrivant le cursus de formation (programme, volume horaire, nature et durée des stages effectués), le tout traduit en français par un traducteur ou un organisme assermentés. 5. Le cas échéant (1), copie de toutes pièces justifiant de l'expérience professionnelle, traduites en français par un traducteur ou un organisme assermentés. 6. Dans le cas où le titre de formation a été acquis dans un Etat tiers, copies des pièces attestant que ce titre a été admis en équivalence dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen qui réglemente l'activité. 7. L'un des trois documents suivants justifiant d'une connaissance suffisante de la langue française ".
6. Postérieurement à la décision du préfet de la région Rhône-Alpes du 26 février 2014 rejetant sa demande présentée le 5 août 2013 tendant à ce que lui soit délivrée une carte professionnelle lui permettant d'exercer la profession de moniteur de ski nordique de fond et au recours gracieux introduit par M. C... le 11 mars 2014, celui-ci a sollicité, auprès de la société AET-Alter Ego, la traduction en français de documents en langue anglaise ainsi qu'en attestent deux factures des 21 mai et 23 mai 2014 et le cachet du traducteur assorti de la mention " traduction certifiée conforme à l'original " apposé sur les documents produits devant le tribunal administratif de Grenoble. Il résulte de l'instruction que la facture du 23 mai 2014 pour un montant de 108 euros correspond à la traduction en français d'un certificat de service à la Royal Navy et les critères d'évaluation du diplôme " Nordic Level 3 ISIA National Ski Teacher " et que la facture du 21 mai 2014 d'un montant de 276 euros correspond à la traduction en langue française d'une attestation du président et de l'ancien président de la Royal Air Force Mountaineering Association présentant l'expérience de M. C... et de deux attestations relatives à la participation de M. C... à des semaines de ski de randonnée. Si ces documents pouvaient permettre au service du ministre des sports d'apprécier la formation et l'expérience professionnelle de M. C... dans le cadre de l'instruction de la déclaration d'activité présentée par M. C... le 5 août 2013, ils ont été également utiles à la solution du litige alors pendant devant le tribunal administratif de Grenoble. Il s'ensuit que M. C... établit que ces frais de traduction d'un montant de 108 et de 276 euros présentent le caractère de frais exposés et non compris dans les dépens. Par suite, il y a lieu d'inclure ces dépenses dans le montant de la somme due au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dès lors, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme totale de 2 384 euros à verser à M. C... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Il est donné acte du désistement du recours du ministre des sports.
Article 2 : L'Etat versera à M. C... la somme de 2 384 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des sports et à M. C.... Copie en sera adressé au préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Délibéré après l'audience du 20 février 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président assesseur,
Mme B..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 12 mars 2020.
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N° 17LY02522