Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la l'arrêté du 28 mars 2019 par lequel le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.
Par un jugement n° 1902137 du 6 mai 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 août 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1902137 du 6 mai 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 mars 2019 du préfet de l'Isère l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination de la reconduite et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Sur l'interdiction de retour pour une durée d'un an :
- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
- il n'est pas impliqué dans les faits de vols retenus à son encontre par le préfet ; sa présence sur le territoire français ne représente pas une menace à l'ordre public ;
- la mesure contestée est disproportionnée ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par ordonnance du 4 décembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 20 décembre 2019.
Par une décision du 26 juin 2019 la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. B... a été constatée.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Pin, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 3 août 1986, qui déclare être entré en France en 2016, relève appel du jugement du 6 mai 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 28 mars 2019 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement et lui faisant interdiction de retour pour une durée d'un an.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. M. B... fait valoir qu'il réside depuis 2016 en France où il vit avec sa compagne. Toutefois, le requérant, qui ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire français et qui s'y est maintenu de façon irrégulière, n'établit pas l'ancienneté de la relation de concubinage avec une ressortissante française qu'il allègue en se bornant à produire une attestation peu circonstanciée et des documents antérieurs de quelques semaines de la décision contestée mentionnant l'adresse du couple. M. B... n'établit ni même n'allègue être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu, selon ses dires, jusqu'à l'âge de trente ans. Il ne fait valoir aucune intégration notamment professionnelle en France. Dans ces conditions, en prenant à son encontre une décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, le préfet de l'Isère n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels elle a été prise et n'a, dès lors, pas méconnu, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs doit être écarté le moyen tiré de l'erreur manifeste commise par le préfet dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
4. En premier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle doivent être écartés par les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3.
5. En deuxième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...). La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
6. Le préfet de l'Isère a fondé sa décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an sur les circonstances qu'alors même que M. B... ne s'est pas soustrait à une précédente mesure d'éloignement, il représente une menace pour l'ordre public justifiée par son interpellation le 28 mars 2019 pour des faits de vol par effraction, que sa durée de présence en France est faible et qu'il n'y justifie d'aucune attache familiale.
7. M. B... fait valoir, sans être contredit, que le préfet de l'Isère a commis une erreur de fait en retenant à tort dans son arrêté qu'il a été interpellé par les services de police en raison de son implication dans des faits de vol par effraction alors qu'il a seulement été auditionné par ces services et n'a pas été mis en cause. Toutefois, alors qu'il s'est vu refuser tout délai de départ volontaire pour exécuter l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre, le requérant ne fait état d'aucune circonstance humanitaire qui aurait pu justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour sur le territoire français. Dès lors, le préfet aurait pris la même décision d'interdiction de retour en l'absence de toute implication de M. B... dans les faits de vol en cause. Par suite, une telle erreur n'est pas de nature à entacher la décision du préfet d'illégalité.
8. En troisième lieu, le requérant, célibataire et sans enfant, entré récemment en France où il se maintient irrégulièrement, ne justifie pas de l'intensité de ses liens personnels et familiaux en France et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a passé la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, alors même que son comportement ne constitue pas une menace pour l'ordre public, le préfet de l'Isère a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, prononcer à l'encontre de M. B..., en se fondant sur les autres considérations qu'il a pris en compte, une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 6 février 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 27 février 2020.
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N° 19LY03283