Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société Argenson a demandé les 13 avril 2015 et 29 décembre 2016 au tribunal administratif de Lyon :
1°) de condamner le syndicat mixte des transports pour le Rhône et l'agglomération lyonnaise (SYTRAL) à lui verser la somme de 545 735 euros assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice économique lié aux difficultés d'accès au restaurant l'Argenson qu'elle exploite du fait de l'exécution de travaux d'extension de la ligne B du métro ;
2°) de mettre à la charge du SYTRAL la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1503420 en date du 31 janvier 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de la société Argenson.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 mars 2017 et 13 septembre 2018, la société Argenson, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1503420 en date du 31 janvier 2017 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) de condamner le syndicat mixte des transports pour le Rhône et l'agglomération lyonnaise (SYTRAL) à lui verser la somme de 545 735 euros assortie des intérêts au taux légal, au titre du préjudice anormal et spécial lié aux difficultés d'accès au restaurant l'Argenson qu'elle exploite ;
3°) de mettre à la charge du SYTRAL la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le préjudice est anormal dès lors que l'accès au restaurant a été rendu très difficile dans les faits ; si, en théorie, l'accès notamment piétonnier restait possible, dans les faits, les automobilistes avaient de très importantes difficultés d'accès dès lors que les travaux ont duré vingt-cinq mois ; il y a eu fermeture du carrefour de l'avenue Jean Jaurès et de l'allée Pierre de Coubertin, voies principales desservant le restaurant, du 9 août 2009 au 4 janvier 2010 puis du 9 janvier 2010 au 10 décembre 2010, les voies n'étaient ouvertes que les jours de match ; le maintien d'un cheminement piéton durant de tels travaux hors période du 4 au 8 janvier 2010 n'a pas été suffisant car la clientèle de cet établissement se déplace principalement en voiture ;
- le préjudice est anormal dès lors que la visibilité du restaurant a été très affectée par la fermeture de ce carrefour ; du fait de la fermeture du carrefour, les automobilistes n'avaient pas de vue sur le restaurant ; le cheminement piéton ne permettait pas d'avoir une vue sur le restaurant ; en raison de la configuration du quartier, les piétons ne circulent que peu sur la zone du restaurant, lequel est isolé d'autres commerces et restaurants ; le SYTRAL n'a pas mis en place de signalisation suffisante pour indiquer le restaurant ; a été réalisé un constat d'huissier portant sur les panneaux de signalisation installés et sur leur caractère inadapté ; des clients se sont plaints du manque de signalétique ;
- le cumul de la difficulté d'accès et du manque de visibilité a entrainé une " perte de commercialité " indéniable car l'accès à l'établissement en voiture était impossible et il était nécessaire aux piétons d'emprunter au chemin au milieu d'un chantier pour y accéder.
- le lien de causalité entre la perte de chiffre d'affaires de l'établissement et les travaux entrepris par le SYTRAL est établi dès lors que le chiffre d'affaires du restaurant l'Argenson, qui était en hausse entre 2005 et 2008, a diminué à compter de l'ouverture du chantier, en juillet 2009, et a augmenté à compter en décembre 2010, lorsque la circulation automobile a été rétablie ; par comparaison, le restaurant Jols, qui, de par sa situation, n'était pas concerné par les travaux, a vu son chiffre d'affaires augmenter parallèlement à une hausse de la fréquentation liée à un effet report de la clientèle de l'Argenson pendant la période des travaux; aucune cause étrangère, hors de tels travaux, n'est établie permettant d'expliquer une baisse du chiffre d'affaires ; contrairement à ce qu'indique le SYTRAL, la baisse de couverts a été faible entre 2007-2008 et 2008-2009 ; le contrat de restauration avec l'Olympique Lyonnais s'est arrêté à la saison 2007/2008 et non postérieurement ;
- la perte de chiffre d'affaires et de perte de marge nette pendant les travaux évaluée par l'expert-comptable judiciaire a été incorrectement été estimé; il y a lieu de prendre en compte la diminution du taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) s'appliquant à compter du 1er juillet 2009 ; la perte de marge nette doit être évaluée à 361 731 euros et en cas de comparaison avec les autres brasseries du groupe Bocuse à 545 735 euros ; elle doit être indemnisée à hauteur de 545 735 euros ;
- les travaux d'extension du métro n'ont pas apporté une nouvelle clientèle dès lors que les clients sont essentiellement des clients d'affaires venant en automobile ; l'effet de la station de métro n'est positif que pour les salariés et pour les étudiants et ceux-ci ne font pas partie de sa clientèle ;
- le SYTRAL n'a que peu participé à la préservation de l'accès à la brasserie ; les aménagements pour la seule clientèle de l'Argenson et les dispositifs anti-intrusion ont été financés par elle-même ;
- le caractère spécial du préjudice est nécessairement établi dès lors que le restaurant l'Argenson est le seul établissement à être concerné par les travaux.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 septembre 2017, le syndicat mixte des transports pour le Rhône et l'agglomération lyonnaise (SYTRAL), représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société l'Argenson la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- à titre principal, les premiers juges ont, à bon droit, estimé que l'anormalité du préjudice n'était pas caractérisée dès lors que l'accès à l'établissement a été maintenu tout au long de l'exécution des travaux ; l'accès piéton a été préservé durant le chantier et les travaux ont été interrompus entre 12h30 et 14h de manière à permettre un fonctionnement correct du restaurant ; la circulation automobile et l'accès au parking ont également été préservés et des aménagements spécifiques ont été réalisés par le SYTRAL notamment sur le parking réservé à la clientèle du restaurant ; la signalisation des voies d'accès était suffisante ; la gêne, à la supposer établie, constitue une charge devant être normalement supportée par les riverains d'un chantier ; aucune privation d'accès au restaurant n'a eu lieu ;
- les premiers juges ont, à bon droit, estimé qu'il n'y avait pas de lien de causalité entre les travaux et la perte de chiffre d'affaires de la société Argenson ; c'est au requérant d'établir le lien de causalité ; la baisse de chiffres d'affaires n'est pas due aux travaux mais à d'autres éléments, dont un contexte économique défavorable, des données propres au restaurant à savoir un rapport qualité/prix jugé insatisfaisant par certains clients comme mentionné sur plusieurs sites internet de référencement ; la baisse du chiffre d'affaires et du nombre de couverts est antérieure aux travaux ; la masse salariale a diminué avant les travaux parallèlement à une baisse de la qualité des prestations ; l'estimation faite par l'expert-comptable faisant peser l'intégralité de la baisse du chiffre d'affaire sur les seuls travaux n'est pas crédible ; le prix moyen du couvert ayant diminué, ceci a entrainé une baisse du chiffre d'affaires ; cette diminution du prix moyen du couvert n'a pas été prise en compte par l'expert judiciaire ; la comparaison avec le restaurant Jols n'est pas pertinente dès lors que la hausse de la fréquentation chez Jols est antérieure aux travaux car ayant commencé à compter de juin 2009 et que la structure de la clientèle n'est pas la même ; la comparaison avec les quatre autres brasseries Bocuse n'est pas pertinente car elles n'ont pas la même réputation que l'Argenson et sont positionnées sur des secteurs fortement touristiques toute l'année ;
- il n'y a pas de perte grave et anormale de chiffres d'affaires comme le montrent les chiffres d'affaires hors taxe, seul référentiel pertinent ; il y a augmentation de l'attractivité du quartier avec la nouvelle station de métro et le restaurant bénéficie d'une meilleure desserte, de meilleurs aménagements d'accès et d'un potentiel supérieur de clientèle ; le chiffre d'affaires HT, au regard d'un comparatif sur une moyenne de trois ans, a baissé seulement de 5,7% pour l'exercice 2009/2010 et de 1,9% pour l'exercice 2010/2011 ; une telle perte est largement inférieure à la jurisprudence qui admet une indemnisation au-delà de 20% ;
- à titre subsidiaire, compte tenu des effets positifs des nouvelles infrastructures dont les dessertes métro à savoir une augmentation du potentiel client et une amélioration du cadre environnemental pour le restaurant, la société requérante n'a pas été pénalisée ; l'expert-comptable judiciaire a évalué, à partir du chiffre d'affaires HT, la perte nette à 147 968 euros HT, ce qui est largement inférieur à la somme demandée par le requérant ;
Par une ordonnance du 3 septembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Cécile Cottier, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant la société Argenson, et de Me D... substituant Me B..., représentant le SYTRAL.
Une note en délibéré enregistrée le 3 septembre 2019 a été produite par la société Argenson, représentée par Me C....
Considérant ce qui suit :
1. Dans le cadre de l'extension de la ligne B du métro, le syndicat mixte des transports pour le Rhône et l'agglomération lyonnaise (SYTRAL) a fait réaliser des travaux publics à proximité du restaurant l'Argenson, situé 40 allée Pierre de Coubertin à Lyon (69007). Ces travaux ont débuté le 15 juin 2009 et se sont achevés le 20 juillet 2011. Ils ont induit une fermeture d'accès à la circulation automobile, du 9 août 2009 au 10 décembre 2010, du carrefour de cette allée et de l'avenue Jean Jaurès. La société Argenson, exploitant ce restaurant, après avoir refusé une offre d'indemnisation amiable des préjudices économiques qu'elle indiquait avoir subi du fait de ces travaux publics, a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner le SYTRAL à lui verser une somme de 545 735 euros en réparation de tels préjudices. Par un jugement du 31 janvier 2017 dont la société l'Argenson relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
2. La responsabilité du maître de l'ouvrage est engagée, même sans faute, à raison des dommages que l'ouvrage public dont il a la garde peut causer aux tiers. Il appartient toutefois au riverain d'une voie publique qui entend obtenir réparation des dommages qu'il estime avoir subis à l'occasion d'une opération de travaux publics à l'égard de laquelle il a la qualité de tiers d'établir, d'une part, le lien de causalité entre cette opération et les dommages invoqués et, d'autre part, le caractère anormal et spécial de son préjudice, les riverains des voies publiques étant tenus de supporter, sans contrepartie, les sujétions normales qui leur sont imposées dans un but d'intérêt général. Si, en principe, les modifications apportées à la circulation générale et résultant soit de changements effectués dans l'assiette, la direction ou l'aménagement des voies publiques, soit de la création de voies nouvelles, ne sont pas de nature à ouvrir droit à indemnité, il en va autrement dans le cas où ces modifications ont pour conséquence d'interdire ou de rendre excessivement difficile l'accès des riverains à la voie publique.
3. La société Argenson soutient que la baisse de son chiffre d'affaires constatée sur les exercices allant du 1er juillet 2009 au 30 juin 2010 et du 1er juillet 2010 au 30 juin 2011 serait directement imputable aux travaux publics réalisés, dans la mesure où la fermeture du carrefour au droit de son établissement aurait dissuadé la clientèle de se rendre dans son établissement. Elle allègue qu'à la date des travaux publics en cause, elle accueillait une clientèle d'affaires utilisant majoritairement la voiture et qu'elle a été confrontée à des difficultés d'accès du fait de la fermeture du carrefour Pierre de Coubertin/Jaurès et d'une signalétique inadaptée pour indiquer convenablement les possibilités d'accès en voiture à son établissement. L'ensemble de ces difficultés a provoqué, selon la société requérante, pour les deux exercices comptables allant du 1er juillet 2009 au 30 juin 2011, une baisse de sa marge brute de 545 735 euros ou a minima de 361 731 euros, attestant de la réalité d'un préjudice anormal et spécial, et non de 165 245 euros (soit 147 968 euros de perte de marge nette) comme estimé par l'expert judiciaire.
4. En premier lieu, en ce qui concerne les possibilités d'accès au restaurant, il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté par la société requérante qu'un cheminement piétonnier a été maintenu entre le 9 août 2009, date de la fermeture du carrefour à la circulation automobile, et le 10 décembre 2010, date de réouverture du carrefour à la circulation automobile au droit de son établissement, hormis quatre jours en janvier 2010. En ce qui concerne l'accès des automobilistes, il résulte également de l'instruction et notamment des plans figurant dans le rapport de l'expert-comptable commis par le tribunal administratif que si le carrefour a effectivement été fermé pendant près de dix-sept mois à la circulation automobile avec une réouverture à la circulation publique lors des jours de match, le parking du restaurant a toujours bénéficié d'au moins un accès en venant de l'avenue Tony Garnier, la rue Jean Bouin et l'allée Pierre de Coubertin, ainsi que d'une signalisation à l'attention des usagers, comme le relève un constat d'huissier du 19 mars 2010. Il ressort aussi de ces mêmes plans que des aires et places de stationnement, en dehors du restaurant, étaient disponibles à proximité de ce dernier, à savoir sur l'allée Pierre de Coubertin (partie sud) accessible depuis la rue Jean Jaurès longeant le port Edouard Herriot mais également au niveau d'une des entrées du Parc de Gerland et des locaux du district de football en face du Palais des sports accessible par la rue Chevrot et l'allée Pierre de Coubertin (partie nord). Il résulte ainsi de ces éléments que durant la période de fermeture du carrefour, les automobilistes n'avaient, après stationnement de leurs véhicules soit sur le parking du restaurant soit sur de telles aires de stationnement, à parcourir à pied qu'un court trajet (entre 50 et 100 mètres) pour rejoindre l'établissement et ce sur un parcours piéton correctement signalé.
5. Si la société requérante fait valoir que la signalétique mise en place par le SYTRAL présentait un caractère inapproprié ou insuffisant pour guider utilement certains de ses clients vers son établissement du fait d'un lettrage trop petit des panneaux comportant son nom et de précisions insuffisantes sur sa localisation, il n'est pas contesté que cette signalétique, dont il n'apparaît pas qu'elle ne pouvait remplir sa fonction, existait et permettait notamment aux automobilistes d'accéder à de telles aires et places de stationnement. Il résulte également des données figurant dans ce même rapport d'expertise judiciaire, de la délibération portant proposition de règlement amiable et d'un procès-verbal du 28 juillet 2010 d'un huissier mandaté par le restaurant l'Argenson que, contrairement à ce qui est allégué par la société requérante, le SYTRAL a pris différentes dispositions pour diminuer la gêne occasionnée par de tels travaux publics et faciliter l'accès des clients, piétons et automobilistes, au restaurant l'Argenson, à savoir notamment une participation financière à l'achat et à la pose d'un portail automatisé et de piliers à l'entrée du parking du restaurant l'Argenson, ainsi qu'à la réalisation de deux places pour les personnes à mobilité réduite à l'intérieur du parking de ce restaurant, et l'interruption des travaux tous les jours entre 12h et 13h45. Il ressort aussi du procès-verbal du constat d'huissier établi à la demande de la société requérante et annexé au rapport d'expertise que, lors des constatations effectuées le 28 juillet 2010 entre 13h30 et 14h, la terrasse sous platane de l'établissement et l'intérieur de celui-ci étaient " plein[e]s de clients ", ce qui tend à établir son accessibilité par la clientèle. Dès lors et même si certaines difficultés ponctuelles d'accès ont pu exister pour les automobilistes cherchant à se garer à proximité immédiate du restaurant ou sur le parking du restaurant, comme indiqué dans certains témoignages de clients versés au dossier, il résulte de l'instruction que les modifications apportées à la circulation automobile du fait de la fermeture de ce carrefour allée Pierre de Coubertin/Jaurès entre le 9 août 2009, date de la fermeture du carrefour à la circulation automobile, et le 10 décembre 2010 n'ont pas été en l'espèce de nature à interdire ou à rendre excessivement difficile l'accès des riverains à la voie publique et l'accès des clients et des salariés à l'établissement en cause. Dans les conditions décrites ci-dessus, les difficultés occasionnées par les travaux n'ont pas revêtu une importance telle qu'elles doivent être regardées comme ayant excédé les sujétions que les riverains des voies publiques sont tenus de supporter sans indemnité.
6. En second lieu, la société requérante soutient que compte tenu de la baisse de la TVA au 1er juillet 2009, laquelle est passée de 19,6% à 5,50% pour les composants solides et les liquides non alcoolisés, " le chiffre d'affaires comptable des périodes de référence ayant été augmenté artificiellement et automatiquement par la baisse du taux de TVA doit être réduit pour être comparé à la moyenne des trois exercices ", et qu'il y a lieu de ce fait, pour évaluer le véritable impact des travaux publics sur les chiffres d'affaires des exercices 2009/2010 et 2010/2011, d'appliquer à de tels chiffres un correctif à la baisse de 10,2% et de les comparer ainsi modifiés à la moyenne des chiffres d'affaires des trois exercices précédant les travaux. Toutefois, et même à supposer exacte la nécessité de procéder à un redressement des chiffres d'affaires pour tenir compte d'une évolution du chiffre d'affaires en lien avec une baisse du taux de la TVA sur certains produits, d'une baisse du prix de vente de certains plats et d'un changement de comportement de clients en lien avec cette baisse des prix de vente, la société requérante qui n'explique pas la part respective de ces paramètres ni ne fournit d'éléments pour les exercices 2006 à 2009 sur la part respective du chiffre d'affaires entre les produits ayant bénéficié de la baisse de TVA et les produits n'en ayant pas bénéficié, ne justifie pas du bien-fondé de ce coefficient de réduction de 10,2% sur l'ensemble du chiffre d'affaires. Si la société requérante se prévaut également d'une intégration, à l'époque des travaux publics en cause, dans le groupe de restauration Bocuse, laquelle induisait une politique de gestion commune entre plusieurs établissements, cette circonstance ne saurait davantage permettre de justifier l'existence d'un lien de causalité entre ces travaux publics et les chiffres allégués de pertes de marge brute de 545 735 euros sur ces deux exercices qui ont été calculés par la société requérante sur "des chiffres potentiels de croissance du chiffre d'affaires" de 3,26% en 2009/2010 et de 10,99% en 2010/2011 par rapport à la moyenne des trois exercices précédents alors qu'il résulte de l'expertise judiciaire que le restaurant l'Argenson connaissait depuis janvier 2009, soit avant les travaux en cause, une baisse de son chiffre d'affaires et que la société requérante ne justifie pas que la baisse du prix moyen du couvert constaté par l'expert-comptable judiciaire soit imputable auxdits travaux publics. Par suite, comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges, l'argumentation de la société requérante relative à une sous-évaluation par l'expert judiciaire de la baisse du chiffre d'affaires et par suite de la perte de marge brute et de la perte de marge nette pour les deux exercices allant du 1er juillet 2009 au 30 juin 2010 et du 1er juillet 2010 au 30 juin 2011 n'est pas suffisamment étayée pour contredire utilement le chiffrage de l'expert judiciaire et les éléments figurant dans ce rapport relativement à une baisse du chiffre d'affaires de cet établissement ayant débuté à compter de janvier 2009, soit avant les travaux publics en cause, liée à une baisse du nombre de couverts, et à une baisse du prix moyen du couvert sur l'exercice allant 1er juillet 2009 au 30 juin 2010. Dès lors, eu égard aux estimations de l'expert judiciaire faisant état d'une moyenne de référence de chiffre d'affaires pour les trois exercices précédant les travaux de 2 994 119 euros, d'une perte comparée pour l'exercice 2009/2010 de chiffre d'affaires de 173 304 euros soit 5,7% et d'une perte comparée pour l'exercice 2010/2011 de 57 679 euros soit 1,9%, ainsi que d'une perte de marge nette de 111 053 euros pour l'exercice 2009/2010 par rapport à la moyenne du chiffre d'affaire des trois exercices précédant les travaux soit un différentiel de 3,7% par rapport à cette moyenne et d'une perte de marge nette de 36 915 euros pour l'exercice 2010/2011 par rapport à la même moyenne de référence de chiffre d'affaires soit un différentiel de 1,2%, la société requérante n'établit pas l'existence d'un préjudice anormal en lien avec les travaux publics en cause susceptible d'être indemnisé.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la responsabilité sans faute du SYTRAL n'est pas engagée. La société Argenson n'est en conséquence pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le SYTRAL, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse quelque somme que ce soit à la société Argenson au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Argenson, qui est la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Argenson est rejetée.
Article 2 : La société Argenson versera la somme de 1 500 euros au SYTRAL au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Argenson et au syndicat mixte des transports pour le Rhône et l'agglomération lyonnaise (SYTRAL). Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2019 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président-assesseur,
Mme Cottier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 août 2019.
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N° 17LY01351