La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2019 | FRANCE | N°19LY00783

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2019, 19LY00783


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 8 août 2018 par lequel le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français durant un an.

Par un jugement n° 1806536 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa dema

nde.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 février 2019, le préf...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 8 août 2018 par lequel le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français durant un an.

Par un jugement n° 1806536 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 février 2019, le préfet de l'Isère demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 31 décembre 2018 ;

2°) de rejeter la demande de Mme A... devant le tribunal administratif.

Il soutient que son arrêté ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le préfet de l'Isère ayant été régulièrement averti du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A..., ressortissante macédonienne, née le 10 août 1998, déclare être entrée en France le 28 septembre 2010 à l'âge de douze ans, accompagnée de ses parents et de ses deux frères de dix et six ans. Ses parents ont formulé une demande d'asile sous une fausse identité en se présentant comme ressortissants du Kosovo. Cette demande a été rejetée, en dernier lieu, par la Cour nationale du droit d'asile le 6 mars 2012. Devenue majeure, Mme A... a demandé la délivrance d'un titre de séjour sous le faux patronyme que son père utilisait. Ayant eu connaissance de cette fausse identité, le préfet de l'Isère a, par arrêté du 8 août 2018, refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire pendant un an. Le préfet de l'Isère interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté.

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

3. Il ressort des pièces du dossier que les parents de Mme A... ont sollicité l'asile dès le 28 septembre 2010. Si le préfet de l'Isère fait valoir que les pièces les plus anciennes présentent l'intéressée sous une fausse identité, cette circonstance ne permet pas de remettre en cause la durée de présence effective de l'intéressée en France. Dans ces conditions, la présence de Mme A... depuis huit ans en France doit être regardée comme établie. Si le préfet fait valoir que l'intéressée est célibataire sans enfants, il ressort des pièces du dossier que ses parents, dont l'arrêté portant refus d'admission au séjour a été annulé par le tribunal administratif de Grenoble, vivent en France depuis la même durée en compagnie de ses deux frères. Surtout, âgée de moins de vingt ans à la date de l'arrêté litigieux, elle est entrée en France à l'âge de douze ans et a ainsi pu nouer en France des liens qu'elle ne pourra retrouver dans son pays d'origine avec la même intensité, en dépit de la présence en République de Macédoine du Nord de ses grands parents paternels et d'une tante. Enfin, le préfet ne saurait reprocher à l'intéressée d'avoir vécu la majeure partie de son temps en France sous couvert d'une fausse identité dès lors que cette circonstance tient au choix de ses parents à une époque où elle était encore mineure. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Grenoble a fait droit au moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté litigieux du 8 août 2018.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de l'Isère est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B... A....

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2019.

4

N° 19LY00783


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 19LY00783
Date de la décision : 11/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: M. LAVAL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-07-11;19ly00783 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award