Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. D...C...a demandé le 22 novembre 2017 au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :
1°) d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2017 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé son pays de destination ;
2°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer, sous astreinte qu'il plaira à la juridiction de fixer par jour de retard, un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ou un titre de séjour.
Par un jugement n° 1702142 en date du 28 février 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour
I. Par une requête et deux mémoires enregistrés les 18 mars, 28 juin et 14 juillet 2018, sous le n° 18LY01036, M. C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1702142 du 28 février 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2017 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé son pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet, sous astreinte, de lui délivrer, à titre principal, un certificat de résidence pluriannuel portant la mention " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire, un titre de séjour provisoire et éventuellement renouvelable.
Il soutient que :
- le jugement attaqué a méconnu le principe du contradictoire en tant qu'il n'a pas été régulièrement convoqué à l'audience et qu'il n'a donc pas pu s'exprimer oralement devant le tribunal ;
- la décision attaquée méconnait l'article 6 5° de l'accord franco-algérien, et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet a, à tort, appliqué les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire enregistré le 28 juin 2018, le préfet du Puy-de-Dôme demande à la cour de rejeter la requête introduite par M.C.en Algérie
Il fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.
Par une décision du 31 octobre 2018, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à M.C.en Algérie
II. Par une requête enregistrée le 9 octobre 2018, sous le n° 18LY03743, M. C...demande à la cour d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1702142 du 28 février 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand.
Il soutient que :
- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables au regard de sa situation ;
- l'urgence est caractérisée et que les décisions administratives attaquées portent atteinte à son droit de mener une vie privée et familiale ainsi qu'à sa liberté d'aller et venir ;
- le jugement attaqué a méconnu le principe du contradictoire en tant qu'il n'a pas été régulièrement convoqué à l'audience et qu'il n'a donc pas pu s'exprimer oralement devant le tribunal ;
- la décision attaquée méconnait l'article 6 5° de l'accord franco-algérien, et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet a, à tort, appliqué les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Pommier, président.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes susvisées concernent la situation d'un même requérant et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
2. M.C..., ressortissant algérien né le 9 novembre 1982, est entré en France le 30 novembre 2014 sous couvert d'un visa de court séjour. Le 25 juillet 2016, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence au titre de sa vie privée et familiale. Par arrêté du 25 octobre 2017, le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination. Par jugement du 28 février 2018 dont M. C...relève appel, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa requête dirigée contre cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. / L'avis d'audience reproduit les dispositions des articles R. 731-3 et R. 732-1-1. Il mentionne également les modalités selon lesquelles les parties ou leurs mandataires peuvent prendre connaissance du sens des conclusions du rapporteur public, en application du premier alinéa de l'article R. 711-3 ou, si l'affaire relève des dispositions de l'article R. 732-1-1, de la décision prise sur la dispense de conclusions du rapporteur public, en application du second alinéa de l'article R. 711-3. / L'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience. Toutefois, en cas d'urgence, ce délai peut être réduit à deux jours par une décision expresse du président de la formation de jugement qui est mentionnée sur l'avis d'audience. ". Aux termes de l'article R. 711-2-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Les parties ou leur mandataire inscrits dans l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1 peuvent être convoqués à l'audience par le moyen de cette application. / Les dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article R. 611-8-2 sont applicables. ". Aux termes des dispositions de l'article R. 611-8-2 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " (en Algérie) Les parties ou leur mandataire sont réputés avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été ainsi adressé, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de huit jours à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties ou leur mandataire sont alertés de toute nouvelle communication ou notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par eux. / Lorsque le juge est tenu, en application d'une disposition législative ou réglementaire, de statuer dans un délai inférieur ou égal à un mois, la communication ou la notification est réputée reçue dès sa mise à disposition dans l'application. (en Algérie) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que, par une ordonnance du 28 novembre 2017, le magistrat rapporteur du dossier en première instance a fixé la clôture de l'instruction au 22 janvier 2018 et a inscrit l'affaire au rôle de l'audience publique du 28 février 2018. Puis, par une ordonnance du 24 janvier 2018, l'affaire a été rayée du rôle de cette audience et a été inscrite au rôle de celle devant se tenir le 6 février 2018, à 10h30. Il ressort du dossier de première instance, d'une part, que cette ordonnance, bien qu'ayant pour effet d'avancer l'enrôlement de l'affaire, s'intitulait " avis de renvoi à une audience ultérieure ", d'autre part, que si cette ordonnance a été mise à disposition du mandataire de M.C..., MeB..., sur l'application informatique le 24 janvier 2018, celui-ci n'en a accusé réception que le 7 février 2018, le lendemain de l'audience. En application des dispositions de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative, à défaut de consulter le document communiqué par la juridiction, Me B... était réputé avoir reçu l'ordonnance du 24 janvier 2018 huit jours après sa mise à disposition, soit le 5 février 2018 au plus tard, veille de l'audience à laquelle était inscrite l'affaire.
5. Si le mandataire du requérant, à qui il appartenait, quel que soit l'intitulé du titre du document figurant sur la notification d'envoi, de faire preuve de la vigilance nécessaire et de prendre connaissance de son contenu, est ainsi réputé reçu notification de la convocation à l'audience antérieurement au déroulement de celle-ci, toutefois, et ainsi qu'il vient d'être dit, le délai de sept jours prévu par l'article R. 711-2 du code de justice administrative n'a pas été respecté. Il ressort des mentions du jugement que ni le requérant ni son conseil n'a été présent à l'audience. Par conséquent, M. C...est fondé à soutenir que le caractère contradictoire de la procédure n'a pas été respecté en tant qu'il n'a pas été régulièrement convoqué à l'audience et qu'il n'a donc pu s'exprimer oralement ou être représenté devant le tribunal administratif et que le jugement rendu est ainsi entaché d'irrégularité.
6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. C...devant le tribunal administratif.
Sur la légalité de l'arrêté du 25 octobre 2017 :
7. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précitées ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier que M. C...est entré en France le 30 novembre 2014, à l'âge de 32 ans, sous couvert d'un visa de court séjour. Le 18 décembre 2014, il a sollicité son admission au séjour comme demandeur d'asile. Par une décision du 8 septembre 2015, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 15 avril 2016. Il est établi, d'une part, que les parents de M.C..., ses deux soeurs et deux de ses frères, tous quatre titulaires de la nationalité française, résident en France, tout comme son troisième et dernier frère, titulaire d'un certificat de résidence, d'autre part, qu'il intervient comme bénévole au sein de l'association caritative " Mains ouvertes " depuis 2015, enfin, qu'il est aidé financièrement par sa famille. Toutefois, et alors qu'il n'est pas établi ni même allégué que la présence de M. C... auprès de ses parents leur serait indispensable pour l'accomplissement des actes de la vie quotidienne, il ressort des pièces du dossier que l'épouse du requérant et l'enfant mineur dont il est le père demeurent.en Algérie S'il soutient être séparé de son épouse depuis plusieurs années, il ne l'établit nullement. Par ailleurs, s'il démontre que son frère, M. A...C..., lui verse mensuellement la somme de 150 euros pour l'aider financièrement, il n'établit pas l'intensité des liens familiaux qui l'unissent à l'ensemble de ses frères et soeurs résidant en France. Dans ces conditions, la décision contestée ne méconnaît pas les stipulations précitées de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
9. En second lieu, M. C...soutient que le préfet aurait, à tort, appliqué les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cependant, et même si la décision attaquée vise ces dispositions, il ressort clairement de ses motifs que le préfet du Puy-de-Dôme n'a pas entendu en faire application et s'est fondé sur les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien pour examiner la situation de M. C.en Algérie
10. Il résulte de ce qui précéde que M. C...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 25 octobre 2017. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction doivent être également rejetées.
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :
11. La cour statuant par le présent arrêt sur la requête n° 18LY01036 de M. C...tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de sa requête n° 18LY03743 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a donc pas lieu d'y statuer.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 18LY03743.
Article 2 : Le jugement n° 1702142 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 28 février 2018 est annulé.
Article 3 : La demande de première instance et le surplus des conclusions de la requête n° 18LY01036 présentée par M. C...sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2019 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président-assesseur,
Mme Cottier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 juillet 2019.
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N° 18LY01036...