La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/07/2019 | FRANCE | N°17LY02939

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2019, 17LY02939


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l'Université Lumière Lyon 2 à lui verser une somme de 2 335 000 euros assortie des intérêts, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la résiliation de la convention de partenariat conclue avec l'Institut de la communication de l'Université Lumière Lyon 2.

Par un jugement n° 1406664 du 15 juin 2017, le tribunal a rejeté cette demande. >
Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2017, la SARL ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l'Université Lumière Lyon 2 à lui verser une somme de 2 335 000 euros assortie des intérêts, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la résiliation de la convention de partenariat conclue avec l'Institut de la communication de l'Université Lumière Lyon 2.

Par un jugement n° 1406664 du 15 juin 2017, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2017, la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'Université Lumière Lyon 2 à lui verser une somme totale de 2 335 000 euros, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi, avec les intérêts au taux légal à compter de la date de sa demande préalable d'indemnisation ;

3°) d'enjoindre à l'Université Lumière Lyon 2 de lui verser cette somme sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Université Lumière Lyon 2 une somme de 2 500 euros au titre des frais du litige.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, dès lors que sa requête n'était pas irrecevable pour tardiveté, un dysfonctionnement du serveur informatique du tribunal administratif de Lyon, ne lui étant donc pas imputable, ayant fait obstacle à la réception par le greffe de son courriel de dépôt de cette requête, adressé avant l'expiration du délai de recours, lequel a été confirmé et régularisé par courrier en recommandé avec accusé de réception reçu après l'expiration du délai de recours ;

- l'Université Lumière Lyon 2 a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en résiliant irrégulièrement la convention de partenariat qu'elle avait signée avec elle le 11 juillet 2011, laquelle n'était pas entachée de nullité, étant régulière, n'avait pas été dénoncée et avait été exécutée par l'université, dès lors qu'elle ne pouvait résilier unilatéralement cette convention sans recourir au juge du contrat, le vice tenant à l'incompétence du signataire d'un contrat étant un vice régularisable ;

- elle a par ailleurs commis une faute de nature à engager sa responsabilité en résiliant de manière non fondée cette convention, ne démontrant pas l'existence d'un motif d'intérêt général susceptible de justifier cette résiliation ;

- elle a également commis une faute en rompant cette convention, puisqu'elle était tenue par l'exigence de loyauté des relations contractuelles et ne pouvait valablement arguer être dans l'ignorance de cette convention, dès lors qu'elle avait accepté l'inscription d'étudiants, perçu des frais d'inscription de ces derniers et leur avait délivré des diplômes, ceux-ci étant en relation avec les services universitaires ;

- en tout état de cause, l'Université Lumière Lyon 2 a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en ayant entraîné la nullité de la convention, cette nullité, pour incompétence de son signataire, étant imputable à cette université, du fait de la faute de l'un de ses agents qui n'est pas dépourvue de tout lien avec le service, et donc non détachable de ce service ;

- aucune faute ne peut lui être reprochée pour justifier un partage de responsabilité ;

- elle est fondée, en tout état de cause, à être indemnisée sur le terrain de l'enrichissement sans cause de l'Université Lumière Lyon 2 pour les dépenses qui ont été utiles à cette dernière ;

- elle a subi un préjudice correspondant au manque à gagner du fait de la résiliation de la convention qui la liait à l'Université Lumière Lyon 2, pour l'exercice 2012-2013 et les deux exercices suivants, qui doit être évalué à la somme de 2 273 000 euros ;

- elle a également subi un préjudice correspondant à l'atteinte à son image et à sa réputation du fait des conditions dans lesquelles l'Université Lumière Lyon 2 a mis fin à la convention de partenariat qui les liait, et au comportement de cette université et de son président, qui doit être évalué à la somme de 32 000 euros ;

- elle a en outre subi un préjudice correspondant à l'atteinte à sa crédibilité du fait des conditions dans lesquelles l'Université Lumière Lyon 2 a mis fin à la convention de partenariat qui les liait, et au comportement de cette université et de son président, qui doit être évalué à la somme de 30 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2017, l'Université Lumière Lyon 2, représentée par son président en exercice, et par Me Bory, avocat, conclut, à titre principal, au rejet des conclusions dirigées contre le jugement, à titre subsidiaire, au rejet des conclusions indemnitaires, et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que :

- l'appel formé par la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes est irrecevable, celle-ci ne précisant pas quel est son représentant dans le cadre de la présente instance ;

- l'appel formé par la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes est irrecevable, celle-ci ayant fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire et n'étant pas représentée par un administrateur ad hoc nommé par le tribunal de commerce ;

- le jugement du tribunal administratif de Lyon n'est pas irrégulier, dès lors que la requête de la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes était irrecevable pour tardiveté, celle-ci ayant été enregistrée passé le délai de recours contentieux, sans que l'intéressée ne démontre avoir effectivement cherché à saisir le greffe du tribunal administratif de Lyon par voie électronique, ou avoir été dans l'incapacité de le faire ou même avoir accompli les diligences nécessaires pour déposer son recours avant l'expiration de ce délai, alors que le courriel dont elle se prévaut n'était pas susceptible de valoir saisine régulière de la juridiction ;

- le jugement du tribunal administratif de Lyon n'est pas irrégulier, dès lors que la requête de la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes était par ailleurs irrecevable du fait que celle-ci avait fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire et n'était pas représentée par un administrateur ad hoc nommé par le tribunal de commerce ;

- les autres moyens soulevés par la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 14 février 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chassagne,

- les conclusions de MmeB...,

- et les observations de Me Bory, représentant l'Université Lumière Lyon 2.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes gérait un établissement privé d'enseignement supérieur situé en Guadeloupe. Sa liquidation judiciaire a été prononcée par le tribunal de commerce mixte de Pointe-à-Pitre le 11 juillet 2013. Par un courrier du 14 mars 2014, son administrateur judiciaire a formé une réclamation préalable indemnitaire auprès du président de l'Université Lumière Lyon 2 pour obtenir une indemnité de 1 515 000 euros, en réparation du préjudice réputé causé par la rupture d'une convention de partenariat signée le 11 juillet 2011 qui liait la société selon elle, à l'Institut de la communication de cette université. Par courrier du 14 avril 2014, cette autorité a rejeté cette réclamation. La SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l'Université Lumière Lyon 2 à lui verser une somme de 2 335 000 euros assortie des intérêts, en réparation de ce préjudice qu'elle estime avoir subi. Par un jugement n° 1406664 du 15 juin 2017, dont la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification (...) de la décision attaquée. / (...). ". Aux termes de l'article R. 421-7 du même code, dans sa rédaction applicable : " Lorsque la demande est portée devant un tribunal administratif qui a son siège en France métropolitaine (...), le délai de recours prévu à l'article R. 421-1 est augmenté d'un mois pour les personnes qui demeurent..., (.... / (...."

3. Il résulte des motifs du jugement attaqué que, pour rejeter comme irrecevable pour forclusion la demande indemnitaire de la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes, le tribunal administratif de Lyon a tout d'abord relevé que la réclamation indemnitaire préalable qu'elle avait formée avait été rejetée par une décision du président de l'Université Lumière Lyon 2 du 14 avril 2014, notifiée le 23 avril 2014, avec la mention des voies et délais de recours et que le délai de recours courait ainsi jusqu'au 24 juillet 2014. Les premiers juges ont ensuite estimé que si la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes se prévalait de ce qu'elle avait saisi le tribunal administratif de Lyon d'une requête par courrier électronique du 22 juillet 2014, et alors que ce courriel n'était pas parvenu au greffe de la juridiction, et qu'un message d'erreur avait été reçu par l'expéditeur à l'occasion des deux tentatives d'envoi de ce courriel, elle ne démontrait pas qu'un dysfonctionnement imputable au serveur de la juridiction ait été à l'origine de l'absence de réception du courriel, ni qu'elle ne pouvait anticiper ce dysfonctionnement.

4. Il ressort des pièces du dossier que le délai de recours contentieux dont disposait la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes pour saisir le tribunal administratif de Lyon expirait le 24 juillet 2014. Le 22 juillet 2014, l'appelante a adressé au greffe de ce tribunal sa requête, depuis la Guadeloupe, par courrier en recommandé avec accusé de réception. Elle ne pouvait ignorer que, dans les conditions normales d'acheminement du courrier par le service postal, cet envoi n'avait pas été adressé en temps utile pour parvenir au greffe du tribunal administratif de Lyon avant l'expiration du délai de recours contentieux. La SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes se prévaut toutefois comme devant les premiers juges, de l'envoi le 22 juillet 2014, à deux reprises, d'un courriel comportant notamment sa requête, régulièrement adressé, qui n'a cependant pas été reçu en raison d'un dysfonctionnement du serveur informatique du greffe du tribunal administratif de Lyon qui ne lui est pas imputable. S'il était alors loisible à la société appelante d'user de ce mode de saisine, il lui incombait cependant de procéder à toutes les diligences nécessaires pour s'assurer que ce courriel, devant être reçu avant son envoi postal, était parvenu au greffe du tribunal administratif de Lyon avant l'expiration du délai de recours contentieux. Il résulte pourtant de l'instruction que la société a été informée le 22 juillet 2014, respectivement à 16 heures 37 et à 16 heures 43, de ce que ce courrier électronique n'avait pas pu être délivré alors que le délai de recours contentieux n'expirait que le 24 juillet 2014 et qu'il lui état loisible de pallier ces dysfonctionnements signalés. Dans ces conditions, la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes n'est, en tout état de cause, pas fondée à se prévaloir de ce que le dysfonctionnement du serveur informatique du tribunal administratif de Lyon serait seul à l'origine du défaut de réception de sa requête avant l'expiration du délai de recours contentieux. C'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont rejeté la requête de la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes comme tardive.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée.

Sur les frais liés au litige :

6. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées par la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes doivent donc être rejetées. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, pour l'application de ces même dispositions, de mettre à la charge de la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'Université Lumière Lyon 2 pour les besoins du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes est rejetée.

Article 2 : La SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes versera une somme de 1 500 euros à l'Université Lumière Lyon 2 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Institut de management et de marketing supérieur de commerce Caraïbes et à l'Université Lumière Lyon 2.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2019, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

M. Chassagne, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 juillet 2019.

2

N° 17LY02939


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02939
Date de la décision : 04/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Délais - Expiration des délais.

Procédure - Introduction de l'instance - Délais - Expiration des délais - Existence ou absence d'une forclusion.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Julien CHASSAGNE
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : DJIMI VÉRITÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-07-04;17ly02939 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award