La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2018 | FRANCE | N°16LY03054

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2018, 16LY03054


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Dijon, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2014 des préfets de la Côte-d'Or et de la Haute-Saône portant déclaration d'utilité publique de la dérivation des eaux souterraines et instauration des périmètres de protection autour du captage " Puits d'Oisilly " exploité par le syndicat des eaux de Blagny-Oisilly en tant qu'ils ont inclus dans le périmètre de protection rapprochée les parcelles cadastrées ZC n°s 19, 20, 21 et 22, ensemble

les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux du 15 janvier 2015, ou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Dijon, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2014 des préfets de la Côte-d'Or et de la Haute-Saône portant déclaration d'utilité publique de la dérivation des eaux souterraines et instauration des périmètres de protection autour du captage " Puits d'Oisilly " exploité par le syndicat des eaux de Blagny-Oisilly en tant qu'ils ont inclus dans le périmètre de protection rapprochée les parcelles cadastrées ZC n°s 19, 20, 21 et 22, ensemble les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux du 15 janvier 2015, ou, à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté dans sa totalité.

Par un jugement n° 1501381 du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 5 septembre 2016, 25 janvier 2017 et 14 février 2018, M.C..., représenté par la SCP Chaton-Grillon-Brocard-Gire, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 28 juin 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté inter-préfectoral du 29 octobre 2014, en tant qu'il inclut les parcelles cadastrées lieu-dit " La Rochette " section ZC n°s 19, 20, 21 et 22 dans le périmètre de protection rapprochée et en tant qu'il contient des prescriptions excessives, ensemble les décisions de rejet de ses recours gracieux ;

3°) subsidiairement, d'ordonner une expertise ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'avis du commissaire-enquêteur, qui est insuffisamment motivé, méconnaît l'article R. 11-10 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- la définition du périmètre de protection rapprochée inclut inutilement un certain nombre de parcelles, en particulier les parcelles cadastrées section ZC n°s 19 à 22, pourtant insusceptibles d'affecter l'intégrité de la protection de la ressource en eau ;

- les prescriptions contenues dans l'arrêté contesté, qui sont divisibles, sont excessives au regard de l'activité agricole qu'il exerce ainsi que du contexte hydrogéologique ; il appartient à la cour, si elle l'estimait nécessaire, de prescrire une expertise.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 décembre 2017, la ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- les moyens invoqués par l'appelant, s'agissant tant de la délimitation du périmètre de protection rapprochée que des prescriptions agricoles contenues dans l'arrêté, ne sont pas fondés ;

- l'étude hydrogéologique réalisée à la demande de l'appelant n'apporte pas d'élément nouveau par rapport à l'avis rendu en 2012 par l'hydrogéologue agréé ; une nouvelle expertise n'est dans ces conditions pas nécessaire.

La procédure a été communiquée au syndicat des eaux de Blagny-Oisilly, pour observations, qui n'a pas produit de mémoire.

Par une ordonnance du 16 février 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 mars 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lesieux ;

- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

- les observations de MeA..., représentant M.C....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 29 octobre 2014, les préfets de la Côte-d'Or et de la Haute-Saône ont déclaré d'utilité publique la dérivation des eaux souterraines et l'instauration des périmètres de protection autour du captage dit " Puits d'Oisilly " exploité par le syndicat des eaux de Blagny-Oisilly. Cet arrêté autorise dans le même temps l'utilisation des eaux de ce captage pour produire et distribuer de l'eau destinée à la consommation humaine et autorise le traitement de l'eau avant mise en distribution. M. C..., propriétaire des parcelles cadastrées section ZC n°s 19 à 22 sur le territoire de la commune d'Oisilly, après avoir formé un recours gracieux auprès des préfets de la Côte-d'Or et de la Haute-Saône, a saisi le tribunal administratif de Dijon d'une demande tendant notamment à l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 2014 en tant qu'il inclut les parcelles dont il est propriétaire dans le périmètre de protection rapprochée. Par un jugement du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande. M. C... relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 1321-2 du code de la santé publique : " En vue d'assurer la protection de la qualité des eaux, l'acte portant déclaration d'utilité publique des travaux de prélèvement d'eau destinée à l'alimentation des collectivités humaines mentionné à l'article L. 215-13 du code de l'environnement détermine autour du point de prélèvement un périmètre de protection immédiate dont les terrains sont à acquérir en pleine propriété, un périmètre de protection rapprochée à l'intérieur duquel peuvent être interdits ou réglementés toutes sortes d'installations, travaux, activités, dépôts, ouvrages, aménagement ou occupation des sols de nature à nuire directement ou indirectement à la qualité des eaux et, le cas échéant, un périmètre de protection éloignée à l'intérieur duquel peuvent être réglementés les installations, travaux, activités, dépôts, ouvrages, aménagement ou occupation des sols et dépôts ci-dessus mentionnés. / Lorsque les conditions hydrologiques et hydrogéologiques permettent d'assurer efficacement la préservation de la qualité de l'eau par des mesures de protection limitées au voisinage immédiat du captage, l'acte portant déclaration d'utilité publique peut n'instaurer qu'un périmètre de protection immédiate. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le Puits d'Oisilly, exploité par le syndicat des eaux de Blagny-Oisilly, est situé dans la plaine de la Vingeanne et plus particulièrement dans une pâture, cadastrée section ZC n° 24, propriété du syndicat, située en rive droite de la rivière de la Vingeanne et en rive gauche du canal de la Marne à la Saône. Les parcelles, dont M. C... est propriétaire, sont situées en rive gauche de la rivière de la Vingeanne. L'inclusion de ces parcelles dans le périmètre de protection rapprochée a été décidée au vu du rapport de mars 2012 de l'hydrogéologue agréé, consulté en application des dispositions du 5° de l'article R. 1321-6 du code de la santé publique. Cette inclusion est justifiée par l'objectif de " préserver au voisinage du puits d'Oisilly, l'intégrité de la couche imperméable et une modification trop importante des conditions d'écoulement. " Toutefois, il ressort de ce même rapport que si l'aquifère karstique capté par le puits d'Oisilly ne bénéficie que d'une très faible protection naturelle du fait de l'absence d'une couche étanche au nord-est du puits et notamment dans le secteur de Champagne-sur-Vingeanne et de Beaumont-sur-Vingeanne, " la vulnérabilité du puits d'Oisilly au droit de sa zone immédiate et rapprochée est en revanche nulle ". Il ressort en effet de ce rapport que dans cette zone immédiate et rapprochée, le puits bénéficie d'une double couche protectrice constituée par les alluvions limoneux en surface sur une épaisseur de 11 mètres, au dessus d'un calcaire marneux d'une épaisseur de 22 mètres. Par ailleurs, l'hydrogéologue agréé a relevé le caractère captif de l'aquifère à cet endroit en notant que cette mise en charge a pour effet de " repousser " vers la surface les pollutions anthropiques provenant de la couche superficielle. L'hydrogéologue relève également qu'" au droit du puits, la Vingeanne et le canal sont d'un point de vue hydrogéologique, complètement déconnectés de l'aquifère capté par le forage d'Oisilly ". Par suite, en l'absence de tous risques avérés ou même prévisibles de pollution de la ressource en eau au droit du puits d'Oisilly et dans une zone rapprochée, l'inclusion dans son périmètre de protection rapprochée des parcelles cadastrées section ZC n°s 19, 20, 21 et 22 n'était pas justifiée au regard de l'objectif de protection de la qualité des eaux captées par le puits d'Oisilly.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ni de diligenter une expertise, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en annulation de l'arrêté interpréfectoral du 29 octobre 2014 en tant qu'il inclut les parcelles dont il est propriétaire dans le périmètre de protection rapprochée, ainsi que des décisions rejetant ses recours gracieux.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 1 500 euros, à verser à M.C..., au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1501381 du tribunal administratif de Dijon du 28 juin 2016, l'arrêté du 29 octobre 2014 des préfets de la Côte-d'Or et de la Haute-Saône en tant qu'il inclut les parcelles cadastrées section ZC n°s 19, 20, 21 et 22 dans le périmètre de protection rapprochée ainsi que les décisions implicites rejetant les recours gracieux de M.C..., sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à M. C...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et à la ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée pour information aux préfets de la Côte-d'Or et de la Haute-Saône et au syndicat des eaux de Blagny-Oisilly.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 décembre 2018.

4

N° 16LY03054


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03054
Date de la décision : 06/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

34-01-01 Expropriation pour cause d'utilité publique. Notions générales. Notion d'utilité publique.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : SCP CHATON-GRILLON-BROCARD-GIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-12-06;16ly03054 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award