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15/11/2018 | FRANCE | N°16LY01840

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 15 novembre 2018, 16LY01840


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCP Ludmer et Bouvier, agissant en qualité de mandataire du groupement constitué par la SCP Ludmer et Bouvier et l'EURL HNC Solar, a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le conseil général de Saône-et-Loire à lui verser la somme globale de 19 201,90 euros hors taxe (HT), majorée des intérêts légaux de retard à compter du 15 décembre 2014, au titre des prestations supplémentaires réalisées pour les besoins du marché de maîtrise d'oeuvre, portant sur des travaux d'installation de

panneaux photovoltaïques sur les toitures et terrasses des collèges conclu avec...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCP Ludmer et Bouvier, agissant en qualité de mandataire du groupement constitué par la SCP Ludmer et Bouvier et l'EURL HNC Solar, a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le conseil général de Saône-et-Loire à lui verser la somme globale de 19 201,90 euros hors taxe (HT), majorée des intérêts légaux de retard à compter du 15 décembre 2014, au titre des prestations supplémentaires réalisées pour les besoins du marché de maîtrise d'oeuvre, portant sur des travaux d'installation de panneaux photovoltaïques sur les toitures et terrasses des collèges conclu avec le département le 29 avril 2010.

Par un jugement n° 1501457 du 10 mars 2016, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 31 mai 2016, la SCP Ludmer et Bouvier, agissant en qualité de mandataire du groupement constitué par la SCP Ludmer et Bouvier et l'EURL HNC Solar, représentée par la SCP Mazzieri Bellon Cabanne, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2016 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) de condamner le conseil général de Saône-et-Loire à lui verser une somme de 19 201,90 euros hors taxe (HT), assortie des intérêts de retard au taux légal à compter du 15 décembre 2014 ;

3°) de mettre à sa charge une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la présence d'amiante dans les toitures du collège Saint-Exupéry de Montceau-les-Mines, révélée tardivement, a généré un alourdissement des études et du suivi de chantier ; le groupement de maîtrise d'oeuvre peut prétendre au versement d'honoraires supplémentaires d'un montant de 6 897,76 euros HT ;

- des travaux supplémentaires d'enrobé ont été réalisés à la demande du maître d'ouvrage impliquant la réalisation d'études supplémentaires par le groupement de maîtrise d'oeuvre qui peut prétendre au versement d'une somme de 2 331,03 euros HT à ce titre ;

- l'investissement du groupement de maîtrise d'oeuvre dans le développement d'un projet pédagogique apporte une plus-value au projet d'origine ; l'avenant n° 1 au marché de maîtrise d'oeuvre ne saurait rendre compte de ce travail ; le groupement peut prétendre au versement d'une somme de 673,11 euros HT à ce titre ;

- il peut prétendre également au versement d'une somme de 9 300 euros HT au titre de la prolongation de la durée du chantier dans les deux collèges, Jean Vilar de Châlon-sur-Saône et Saint-Exupéry de Montceau-les-Mines ;

- les intérêts au taux légal doivent commencer à courir à compter du 15 décembre 2014, date de son mémoire en réclamation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2016, le département de Saône-et-Loire, représenté par la SCP Riva et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement d'une somme de 3 000 euros soit mis à la charge de la SCP Ludmer et Bouvier Architectes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la réalisation de travaux de désamiantage n'a pas induit de modifications de programme conduisant à des modifications de la consistance du projet ; en tout état de cause, le groupement de maîtrise d'oeuvre a manqué à son devoir de conseil ; il lui appartenait d'appeler son attention sur la nécessité de réaliser le diagnostic technique amiante en amont de la conclusion des marchés de travaux ;

- les travaux d'enrobé sont la conséquence d'un défaut de conception imputable au maître d'oeuvre ;

- les prestations effectuées par l'équipe de maîtrise d'oeuvre dans le cadre du projet pédagogique sont comprises dans les éléments de la mission incombant au maître d'oeuvre dans le projet et dans la rémunération supplémentaire résultant de l'avenant ;

- l'allongement de la durée de chantier n'ouvre pas droit à une augmentation du forfait de rémunération en l'absence de modification de programme ou de réalisation de prestations indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics alors en vigueur ;

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;

- le décret n° 93-1238 du 29 novembre 1993 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lesieux ;

- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

- les observations de Me A...représentant le département de Saône-et-Loire.

Considérant ce qui suit :

1. La SCP Ludmer et Bouvier relève appel du jugement du 10 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la condamnation du département de la Saône-et-Loire à lui verser la somme de 19 201,90 euros HT, assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2014, au titre des prestations supplémentaires réalisées pour les besoins du marché de maîtrise d'oeuvre conclu le 29 avril 2010 portant sur des travaux d'installation de panneaux photovoltaïques sur les toitures et terrasses des collèges du département.

2. Aux termes de l'article 9 de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre : " La mission de maîtrise d'oeuvre donne lieu à une rémunération forfaitaire fixée contractuellement. Le montant de cette rémunération tient compte de l'étendue de la mission, de son degré de complexité et du coût prévisionnel des travaux. ". Aux termes de l'article 30 du décret du 29 décembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé : " Le contrat de maîtrise d'oeuvre précise, d'une part, les modalités selon lesquelles est arrêté le coût prévisionnel assorti d'un seuil de tolérance, sur lesquels s'engage le maître d'oeuvre, et, d'autre part, les conséquences, pour celui-ci, des engagements souscrits. (...) III. En cas de modification de programme ou de prestations décidées par le maître de l'ouvrage, le contrat de maîtrise d'oeuvre fait l'objet d'un avenant qui arrête le programme modifié et le coût prévisionnel des travaux concernés par cette modification, et adapte en conséquence la rémunération du maître d'oeuvre et les modalités de son engagement sur le coût prévisionnel. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que le titulaire d'un contrat de maîtrise d'oeuvre est rémunéré par un prix forfaitaire couvrant l'ensemble de ses charges ainsi que le bénéfice qu'il en escompte, et que seules une modification de programme ou une modification de prestations décidées par le maître de l'ouvrage peuvent donner lieu, le cas échéant, à une augmentation de sa rémunération. Ainsi la prolongation de sa mission n'est de nature à justifier une rémunération supplémentaire du maître d'oeuvre que si elle a donné lieu à des modifications de programme ou de prestations décidées par le maître d'ouvrage. En outre, le maître d'oeuvre qui effectue des missions ou prestations non prévues au marché de maîtrise d'oeuvre et qui n'ont pas été décidées par le maître d'ouvrage n'a droit à être rémunéré de ces missions ou prestations que lorsque, soit elles ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, soit le maître d'oeuvre a été confronté dans l'exécution du marché à des sujétions imprévues présentant un caractère exceptionnel et imprévisible, dont la cause est extérieure aux parties et qui ont pour effet de bouleverser l'économie du contrat.

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les sondages réalisés avant travaux, à la demande du département de Saône-et-Loire, ont révélé la présence d'amiante dans le complexe d'étanchéité du collège Saint-Exupéry de Montceau-les-Mines, nécessitant la conclusion d'un avenant au lot n° 2 du marché de travaux pour procéder au désamiantage. La SCP Ludmer et Bouvier soutient que cette découverte, postérieurement à la notification du marché de travaux, a généré pour l'équipe d'ingénierie un alourdissement de sa charge de travail. Toutefois, elle ne justifie pas plus devant la cour que devant le tribunal, la réalité des prestations supplémentaires qu'elle dit avoir réalisées pour les besoins de l'exécution des travaux de désamiantage.

5. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que les fondations pour réaliser la structure métallique d'un préau devant accueillir de panneaux photovoltaïques, ont été plus importantes qu'initialement prévu, rendant indispensable la réfection du sol sous le préau et ce, alors que cette option avait été écartée par le maître d'ouvrage, durant la phase de consultation des entreprises, en raison de son coût. La société Ludmer et Bouvier ne conteste pas utilement que l'exécution de ces travaux est imputable à un défaut de conception du projet. Elle ne peut dès lors prétendre à aucune rémunération supplémentaire à ce titre alors, au surplus, que la solution technique initialement proposée par le groupement de maîtrise d'oeuvre consistant en la mise en place d'un béton balayé s'est révélée techniquement inadaptée.

6. En troisième lieu, la SCP Ludmer et Bouvier demande la condamnation du département de Saône-et-Loire à lui verser une rémunération supplémentaire au titre du volet pédagogique intégré dans le projet d'installation de panneaux photovoltaïques dans le collège Jean Vilar de Châlon-sur-Saône. Toutefois, en l'état de l'instruction, elle n'établit pas que ce volet pédagogique n'aurait pas été intégré dès l'origine dans son projet initial, ainsi que le fait valoir le département en défense, ni en tout état de cause, qu'une telle intégration, en cours d'exécution du marché, l'aurait été à la demande du maître d'ouvrage.

7. En dernier lieu, la SCP Ludmer et Bouvier demande l'indemnisation du coût des prestations supplémentaires réalisées par le groupement de maîtrise d'oeuvre du fait de la prolongation de la durée du chantier pour les besoins d'une reprise d'étanchéité à effectuer sur le bâtiment C du collège Jean Vilar, à raison de la présence d'amiante au collège Saint-Exupéry et du fait de l'absence de cahier des charges relatif à la réalisation de l'aspiration des graviers sur le dispositif d'étanchéité hors période d'ouverture des collèges et à la réintégration des ouvrages d'enrobés pour la réfection du sol sous préau et des intempéries. S'il résulte en effet de l'instruction que le délai d'exécution des travaux a été prolongé de six mois, la société appelante n'établit pas toutefois que cet allongement des délais d'exécution du chantier aurait conduit le groupement de maîtrise d'oeuvre à réaliser des prestations supplémentaires, soit pour tenir compte d'une modification de programme ou de modifications de prestations décidées par le maître de l'ouvrage, soit pour permettre la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ou pour faire face à des sujétions imprévues. Dans ces conditions, elle ne peut prétendre à aucune rémunération supplémentaire à ce titre.

8. Il résulte de ce qui précède que la SCP Ludmer et Bouvier n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCP Ludmer et Bouvier la somme de 1 500 euros à verser au département de Saône-et-Loire sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCP Ludmer et Bouvier est rejetée.

Article 2 : La SCP Ludmer et Bouvier versera au département de Saône-et-Loire la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCP Ludmer et Bouvier et au département de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 25 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 novembre 2018.

2

N° 16LY01840


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01840
Date de la décision : 15/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Prix - Rémunération des architectes et des hommes de l'art.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Indemnités - Travaux supplémentaires.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : SCP MAZZIERI, BELLON, CABANNE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-11-15;16ly01840 ?
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