Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 7 mai 2015 par laquelle l'inspecteur du travail de la 8ème section de la Savoie a autorisé son licenciement pour motif économique.
Par un jugement n° 1504199 du 23 janvier 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 7 mai 2015 de l'inspecteur du travail.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 22 mars 2017, présentée pour la SAS Patiprestige Rhône-Alpes, il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1504199 du 23 janvier 2017 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Grenoble.
Elle soutient que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur l'absence de contrôle par l'inspecteur du travail de la réalité du motif économique, alors que la décision de l'inspecteur est motivée au regard de la nécessité de réorganiser l'entreprise pour faire face à des difficultés économiques et afin d'éviter un dépôt de bilan et un redressement judiciaire.
Par un mémoire, enregistré le 21 juillet 2017, présenté pour M. A..., il conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée au ministre du travail, qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Seillet, président assesseur ;
- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public ;
- les observations de Me Artis, avocat de M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., qui exerce depuis septembre 2008 les fonctions de chauffeur livreur puis de chef du parc de véhicules de la SAS Patiprestige Rhône-Alpes, qui a pour activité la production industrielle de pâtisserie fraîche, a été élu membre titulaire du comité d'entreprise de cette société en octobre 2014. La société souhaitant externaliser partiellement la livraison de ses marchandises, en raison de difficultés économiques, a décidé de la suppression de deux emplois de chauffeur livreur et de chef du parc de véhicules, et proposé une modification du contrat de travail de M. A..., le 24 novembre 2014 puis, suite au refus de ce dernier, a engagé une procédure de licenciement pour motif économique à son encontre. L'inspecteur du travail de la 8ème section de la Savoie a autorisé le licenciement de M. A... par une décision du 7 mai 2015. La SAS Patiprestige Rhône-Alpes interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ladite décision du 7 mai 2015.
2. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière. En outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence.
3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 1233-3 du code du travail : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ". Lorsque l'employeur sollicite une autorisation de licenciement pour motif économique fondée sur le refus du salarié d'accepter une modification de son contrat de travail, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si cette modification était justifiée par un motif économique.
4. Il ressort des pièces du dossier que l'inspecteur du travail de la 8ème section de la Savoie, saisi par une lettre du 19 mars 2015 adressée par la SAS Patiprestige Rhône-Alpes, d'une " demande d'autorisation de licenciement pour motif économique " de M. A..., après le refus par ce dernier d'une modification de son contrat de travail, s'est borné, pour accorder à cette entreprise l'autorisation de licenciement sollicitée, après avoir fait état d'une réorganisation du service livraison " en vue d'en diminuer le coût ", à constater " la réalité de la réorganisation du service livraisons et de ses conséquences sur l'emploi tenu par M. A... " et la " réalité de la proposition de reclassement au poste de magasinier et du fait que M. A... ne l'a pas acceptée ", sans qu'il ait été procédé au contrôle de la réalité du motif économique, ni même au demeurant fait état d'un tel motif, alors que la SAS Patiprestige Rhône-Alpes avait seulement évoqué, dans sa demande, des " problèmes financiers ". Dès lors, l'inspecteur du travail a commis une erreur de droit en autorisant le licenciement de M. A....
5. Il résulte de ce qui précède que la SAS Patiprestige Rhône-Alpes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 7 mai 2015 par laquelle l'inspecteur du travail de la 8ème section de la Savoie a autorisé le licenciement de M. A....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Patiprestige Rhône-Alpes est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Patiprestige Rhône-Alpes, au ministre du travail et à M. B... A....
Délibéré après l'audience du 5 juillet 2018 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 juillet 2018.
1
4
N° 17LY01323