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12/07/2018 | FRANCE | N°15LY03069

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 12 juillet 2018, 15LY03069


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de MmeE... ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Poulet, avocat de M. et Mme F...et de Me Eyango, avocat de la commune de Sassenage.

1. Considérant que, le

29 octobre 2007, la halte-garderie de Sassenage gérée par le centre communal d'action sociale (CCAS) de cette commune a...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de MmeE... ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Poulet, avocat de M. et Mme F...et de Me Eyango, avocat de la commune de Sassenage.

1. Considérant que, le 29 octobre 2007, la halte-garderie de Sassenage gérée par le centre communal d'action sociale (CCAS) de cette commune a accueilli le jeune A...F...alors âgé de deux ans ; que cet enfant a été couché pour la sieste dans un lit installé à l'écart des autres enfants dans le vestiaire du personnel, à proximité d'une douche ; qu'il est entré dans cette douche et a ouvert le robinet d'eau chaude, s'exposant ainsi à un jet d'eau d'une température de 50°C qui a entraîné des brûlures au deuxième degré sur environ 7 % de la surface corporelle ; que les parents de A...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune et le CCAS de Sassenage à réparer les préjudices causés à leur fils par cet accident ainsi qu'à les indemniser de leurs préjudices propres ; que, par jugement du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a condamné le CCAS de Sassenage à verser les sommes de 44 242,79 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère et de 16 250 euros à M. et MmeF..., agissant en qualité de représentants légaux de leur fils mineur A...F... ; que, par ce même jugement, le tribunal administratif de Grenoble a condamné le CCAS de Sassenage à verser à la caisse une somme de 1 037 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ; qu'il a également mis à la charge du CCAS les frais d'expertise ; que M. et Mme F...interjettent appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de leurs demandes indemnitaires ;

Sur la recevabilité des conclusions présentées en défense par la commune de Sassenage :

2. Considérant que la commune de Sassenage n'ayant fait l'objet d'aucune condamnation par le jugement dont les requérants relèvent appel et ces derniers ne formulant au demeurant devant la cour aucune conclusion à son encontre, elle ne justifie d'aucun intérêt à défendre à l'instance ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par le CCAS de Sassenage :

3. Considérant que le CCAS de Sassenage oppose deux fins de non recevoir tirées de l'irrecevabilité, d'une part, des demandes présentées par M. et Mme F...au titre de préjudices moraux personnels et, d'autre part, des demandes formulées pour le compte de deux frères deA... ;

4. Considérant qu'il ressort des écritures de première instance qu'aucune conclusion n'avait été formulée pour les frères de A...F... ; que, dès lors, la fin de non-recevoir concernant ces conclusions indemnitaires doit être accueillie ; qu'il ressort en revanche des écritures de première instance que M. et Mme F...avaient bien invoqué leurs propres préjudices moraux et demandé à être indemnisés à ce titre, ce chef de préjudice ayant d'ailleurs été écarté par les premiers juges ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée à ces conclusions doit être écartée ;

Sur la demande d'expertise :

5. Considérant que les requérants se bornent à faire valoir que le rapport du 14 octobre 2014 du DrG..., expert désigné par l'ordonnance du 28 avril 2014 du président du tribunal administratif de Grenoble, est incomplet car celui-ci n'a pas retenu l'existence d'un déficit fonctionnel permanent après la date de consolidation qu'il a fixée au 29 septembre 2014 ; que, toutefois, les nouvelles pièces médicales produites en appel par les requérants ne font état d'aucun déficit fonctionnel permanent en lien de causalité avec cet accident ; que, dans ces conditions, et alors que la prescription d'une mesure d'expertise est subordonnée au caractère utile de cette mesure, les conclusions tendant à ce qu'il soit ordonné une nouvelle expertise avant dire droit ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions indemnitaires :

6. Considérant que le tribunal administratif de Grenoble a jugé qu'en laissant sans surveillance l'enfant A...à proximité d'une douche accessible, le CCAS de Sassenage avait fait preuve d'une négligence fautive de nature à engager son entière responsabilité ; que le CCAS de Sassenage ne conteste pas en appel sa responsabilité ;

En ce qui concerne les conclusions présentées au nom de A...F... :

S'agissant des préjudices à caractère patrimonial :

7. Considérant que, dans leurs dernières écritures, les requérants mentionnent que depuis le 29 septembre 2014, date de la consolidation deA..., ils n'ont eu à supporter aucune dépense concernant des soins médicaux ou d'orthophonie, ces frais étant intégralement pris en charge par différentes structures ; que, dès lors, leurs demandes indemnitaires relatives à une indemnisation de leurs restes à charge postérieurement à la date de consolidation deA..., ne peuvent qu'être rejetées ;

8. Considérant que M. et Mme F...demandent à être indemnisés à hauteur de 286,63 euros du coût d'une tablette ordinateur achetée pour A...en mars 2018 ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction de lien de causalité entre cet accident et d'éventuelles séquelles qui justifieraient l'achat de cette tablette ordinateur ; que, par suite, cette demande indemnitaire doit être rejetée ;

9. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'existerait un lien de causalité direct et certain entre l'accident dont a été victime A...F...le 29 octobre 2007 et les difficultés scolaires auxquels il a pu être confronté relativement à des troubles du comportement ou à des difficultés de langage avant ou après sa consolidation ; que, par suite, la demande indemnitaire formulée par M. et Mme F...au titre de l'incidence scolaire doit être rejetée ;

S'agissant des préjudices personnels :

10. Considérant que l'expert a fixé à 3,5 sur une échelle de 7 les souffrances physiques de l'enfant et à 3 sur une échelle de 7 ses souffrances psychologiques avant consolidation ; que, dans les circonstances de l'espèce et compte tenu des différents soins ayant été rendus nécessaires pour permettre la cicatrisation des brûlures de A...F...(consultations médicales, pansements, kinésithérapie, cures, ports de vêtements médicaux), il y a lieu de réformer le jugement du tribunal administratif lui allouant une somme de 4 000 euros en réparation du chef de préjudice des souffrances physiques et psychologiques subies et de la porter à 5 500 euros ;

11. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi au titre du déficit temporaire, incluant le préjudice d'agrément compte tenu des soins, des pansements compressifs et de la cicatrisation induits par cet accident, lesquels ont réduit temporairement ses activités de jeu et de loisirs avant sa consolidation, en allouant la somme de 6 500 euros à A...F...à ce titre ;

12. Considérant que M. et Mme F...font valoir sans autre précision que, contrairement à ce qu'a pu retenir l'expert, leur fils A...reste affecté d'un déficit fonctionnel permanent de 10 % en lien avec cet accident ; qu'il ne résulte toutefois pas de l'instruction et notamment des différentes pièces médicales versées au débat, dont celles transmises en avril 2018, qu'il existerait un lien de causalité direct et certain entre l'accident dont A...a été victime le 29 octobre 2007 et son état de santé actuel, post-consolidation, se traduisant par certaines difficultés comportementales, lesquelles au demeurant se sont réduites, et des problèmes de langage ; que, par suite, la demande formulée au titre de ce chef de préjudice doit être rejetée ;

13. Considérant que, contrairement à ce qu'indiquent M. et MmeF..., les premiers juges ont non seulement accordé 4 500 euros pour le préjudice esthétique temporaire subi par A...et causé par la nécessité de poser des pansements puis de porter un appareillage nuit et jour jusqu'en 2010 et la nuit jusqu'en 2013 mais également une somme de 2 000 euros en réparation du préjudice esthétique permanent correspondant à la présence de cicatrices liées à la brûlure, estimé à 2 sur une échelle de 7 ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de maintenir ces deux sommes qui n'apparaissent ni sous-évaluées ni surestimées ;

En ce qui concerne les conclusions présentées en leur nom propre par M. et Mme F... :

14. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise diligentée par le tribunal administratif, des différents bilans médicaux et du procès-verbal de police, que Mme F...a dû accompagner son fils A...à de très nombreuses reprises pour des consultations médicales et des séances de rééducation ; qu'elle a dû aussi prendre en charge le suivi de certains soins dont l'appareillage et le traitement des brûlures ; que la vie et l'organisation familiale ont été perturbées du fait de tels déplacements et soins ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence et des préjudices subis par M. et Mme F...du fait de cet accident en condamnant le CCAS de Sassenage à leur verser la somme globale de 4 000 euros à ce titre ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F...sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble leur a alloué pour le compte de leur fils A...la somme de 16 250 euros ; qu'il y a lieu par suite de réformer le jugement du tribunal administratif de Grenoble en condamnant le CCAS de Sassenage à verser à M. et Mme F... en qualité de représentants légaux de leur fils A...la somme de 18 500 euros (5 500+6 500 +6 500) et à leur verser une somme globale de 4 000 euros au titre de leurs préjudices propres ;

Sur les frais d'expertise :

16. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser les frais de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 840 euros par ordonnance en date du 18 novembre 2014 du président du tribunal administratif, à la charge du CCAS de Sassenage ;

Sur les frais liés au litige :

17. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge du CCAS de Sassenage, partie perdante, une somme globale de 1 500 euros à verser à M. et Mme F...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le CCAS de Sassenage est condamné à verser à M. et Mme F...en qualité de représentants légaux de leur fils A...la somme de 18 500 euros et au titre de leurs préjudices propres la somme globale de 4 000 euros.

Article 2 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 juillet 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 840 euros sont laissés à la charge du CCAS de Sassenage.

Article 4 : Le CCAS de Sassenage est condamné à verser à M. et Mme F...la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées en appel par la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et MmeF..., à la commune de Sassenage, au centre communal d'action sociale de Sassenage, à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2018 à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

Mme E...et MmeC..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 12 juillet 2018.

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N° 15LY03069


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03069
Date de la décision : 12/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Cécile COTTIER
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : BDL AVOCATS - ME BARIOZ ET ME PHILIP DE LABORIE

Origine de la décision
Date de l'import : 31/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-07-12;15ly03069 ?
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