Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A...B...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 8 août 2016 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et l'a obligée à quitter le territoire français et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ou subsidiairement de réexaminer sa demande dans le même délai.
Par un jugement n° 1609148 du 20 avril 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande présentée par MmeC....
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 6 juillet 2017, MmeC..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 20 avril 2017 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 8 août 2016 du préfet du Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :
- la décision méconnaît le 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle est mariée avec un ressortissant algérien titulaire d'une carte de séjour de dix ans et qu'un enfant est né de cette union ; son époux vit en France depuis son enfance et il ne s'est pas rendu en Algérie depuis sa petite enfance ; les parents de son époux sont français ; en se rendant en Algérie pour plusieurs années, son époux mettrait en péril sa situation administrative ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen attentif et particulier de sa situation ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision est illégale en raison de l'illégalité affectant le refus de délivrance d'un titre de séjour ;
- la décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle serait sans revenu en Algérie avec son enfant, que l'exécution de cette décision entraînerait une séparation du couple et, par voie de conséquence, de l'enfant né le 18 juin 2015 et de son père ;
Par un mémoire enregistré le 25 janvier 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 500 euros soit mise à la charge de MmeC....
Il soutient que :
- il appartient à Mme C...de se soumettre à la procédure de regroupement familial ;
- Mme C...ne pouvait être admise au séjour en mettant les autorités françaises devant le fait accompli de sa présence en France ;
- elle ne pouvait ignorer la précarité de sa situation quand elle a épousé M.C... ;
- son époux a la nationalité algérienne et il a donc la possibilité de retourner vivre en Algérie avec son épouse ; celle-ci dispose d'attaches familiales dans son pays d'origine ;
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 mai 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Caraës.
1. Considérant que MmeC..., ressortissante algérienne née le 25 juin 1986, est entrée en France le 31 mars 2013 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour ; que, le 19 février 2016, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en application du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que, par décisions du 8 août 2016, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme C...fait appel du jugement du 20 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 8 août 2016 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
Sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
2. Considérant qu'il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet du Rhône a procédé à un examen particulier de la situation de MmeC..., notamment au regard de ses attaches familiales et de la présence de son enfant en France, et ce alors même qu'il a retenu que sa situation pouvait relever de la procédure de regroupement familial ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de son refus (...) " ;
4. Considérant qu'en sa qualité de conjoint d'un ressortissant étranger séjournant régulièrement en France depuis plusieurs années sous couvert d'un titre de séjour, Mme C... entre dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial ; qu'elle ne peut dès lors utilement se prévaloir des stipulations précitées du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance " ;
6. Considérant que Mme C...fait valoir qu'elle s'est mariée le 1er mars 2014 avec un compatriote titulaire d'une carte de résident de dix ans et que de cette union est né, le 18 juin 2015, un enfant ; que, toutefois, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne garantit pas à l'étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer sa vie privée et familiale ; qu'en l'espèce, il est constant que Mme C...était en situation irrégulière lorsqu'elle a développé sa vie privée et familiale en France ; qu'elle ne pouvait ignorer par suite qu'elle était susceptible de faire l'objet d'un refus de délivrance d'un titre de séjour accompagné d'une mesure d'éloignement ; que l'union dont elle se prévaut est récente et la communauté de vie avec son époux ne présente pas une durée importante ; que, par ailleurs, rien ne s'oppose à ce que les épouxC..., eu égard à leur nationalité commune, puissent développer, s'ils le désirent, leur vie familiale en Algérie nonobstant la circonstance que son époux ne serait pas retourné en Algérie depuis son enfance ; qu'il n'est pas établi que leur enfant, eu égard notamment à son jeune âge, ne puisse vivre dans de bonnes conditions en Algérie quand bien même il est né en France ; qu'en outre, Mme C... n'est pas dépourvue de toute attache dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à la durée et aux conditions de séjour de l'intéressée en France, le préfet en adoptant la décision attaquée n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel ladite décision a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant que les moyens invoqués à l'encontre du refus de délivrance d'un titre de séjour ayant été écartés, Mme C...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ;
8. Considérant que si Mme C...se prévaut de ce que la décision attaquée induirait une séparation d'avec leur enfant alors que son époux réside en France depuis sa naissance avec sa famille, ce risque de séparation résulte du maintien du domicile familial en France malgré la situation irrégulière de l'intéressée, et alors qu'aucune circonstance impérieuse de nature à faire obstacle à la reconstitution de la cellule familiale en Algérie n'est établie ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée a été prise en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
9. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été précédemment énoncés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour, la décision portant obligation pour Mme C...de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit de l'avocat de MmeC..., au titre des frais exposés à l'occasion du litige ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme C...le paiement à l'Etat de la somme de 500 euros qu'il demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Etat tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...épouse C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 1er février 2018, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Carrier, président-assesseur,
Mme Caraës, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er mars 2018.
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N° 17LY02625