La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/10/2017 | FRANCE | N°17LY00081

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 26 octobre 2017, 17LY00081


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, d'une part, d'annuler la décision du 20 avril 2015, par laquelle le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Moulins a refusé de procéder à l'effacement des données le concernant, inscrites au fichier de traitement des antécédents judiciaires, et d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de procéder à l'effacement de ces données.

Par une ordonnance n° 1501173 du 2 novembre 2016, le président du tribun

al administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande comme portée devant un ordre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, d'une part, d'annuler la décision du 20 avril 2015, par laquelle le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Moulins a refusé de procéder à l'effacement des données le concernant, inscrites au fichier de traitement des antécédents judiciaires, et d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de procéder à l'effacement de ces données.

Par une ordonnance n° 1501173 du 2 novembre 2016, le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 3 janvier 2017, le garde des Sceaux, ministre de la justice, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1501173 du 2 novembre 2016 du président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...A...devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand.

Il soutient que :

- par application de l'article 112-3 du code pénal, les lois supprimant ou modifiant les voies de recours sont inapplicables aux instances en cours et ne s'appliquent qu'aux recours formés contre les décisions prononcées postérieurement à leur entrée en vigueur ; si l'article 68 de la loi n° 2016-731 donne compétence au juge judiciaire pour connaître des litiges concernant le contentieux des fichiers du traitement des antécédents judiciaires, ces dispositions ne sont applicables qu'aux décisions rendues par le procureur de la République postérieurement à leur entrée en vigueur, ainsi que le précise la circulaire du 17 juin 2016 ;

- la demande de M. A...doit être rejetée pour les motifs présentés dans le cadre des écritures produites en première instance.

M.A..., à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

Les parties ont été informées le 8 septembre 2017, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que l'entrée en vigueur des dispositions du troisième alinéa de l'article 230-8 du code de procédure pénale, issues du 1° de l'article 68 de la loi du 3 juin 2016 était conditionnée par la publication du décret en Conseil d'Etat prévu au 3° de cet article 68, modifiant l'article 230-11 du même code.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 ;

- le décret n°2017-1217 du 2 août 2017 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Hervé, président rapporteur,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de procéder à l'effacement des données le concernant inscrites au fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ) ; que, par une ordonnance du 2 novembre 2016, le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ; que le garde des Sceaux, ministre de la justice relève appel de cette ordonnance devant la cour ;

2. Considérant que le 1° b) de l'article 68 de la loi du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale, a modifié l'article 230-8 du code de procédure pénale en y ajoutant un troisième alinéa selon lequel " Les décisions du procureur de la République en matière d'effacement ou de rectification des données personnelles sont susceptibles de recours devant le président de la chambre de l'instruction " ;

3. Considérant que si le droit de former un recours contre une décision est définitivement fixé au jour où cette décision est rendue, les règles qui régissent les formes dans lesquelles le recours doit être introduit et jugé, y compris celles relatives à la compétence des juridictions et aux pouvoirs des juges, ne sont pas, à la différence des voies selon lesquelles ce droit peut être exercé ainsi que des délais qui sont impartis à cet effet aux intéressés, des éléments constitutifs de ce droit ; qu'ainsi, et à moins qu'une décision expresse y fasse obstacle, un texte modifiant les règles qui déterminent la juridiction compétente s'applique, dès son entrée en vigueur, aux recours introduits avant cette date ;

4. Considérant que si les dispositions législatives mentionnées au point 2 modifient la répartition des compétences entre les ordres administratif et judiciaire de juridiction, leur entrée en vigueur a cependant été différée dès lors que ces mêmes dispositions subordonnent expressément leur exécution à une condition déterminée ; que l'article 230-11 du code de procédure pénale, complété par le 3° de l'article 68 de la loi du 3 juin 2016, dispose en effet qu'un " décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, fixe les modalités d'application de la présente section. Il précise notamment (...) les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent (...) contester les décisions prises par le procureur de la République ou le magistrat mentionné à l'article 230-9 " ; que dès lors, l'intervention de ce décret était nécessaire à la détermination des conditions dans lesquelles les intéressés peuvent exercer leur droit au recours devant l'ordre de juridiction judiciaire ;

5. Considérant que les modalités d'exercice du recours ouvert contre les décisions du procureur de la République en matière d'effacement ou de rectification des données personnelles ont été définies par l'article 8 du décret du 2 août 2017 susvisé, publié au journal officiel le 3 août 2017 et codifié à l'article R. 40-31 du code de procédure pénale ; qu'ainsi à la date de l'ordonnance attaquée, le troisième alinéa de l'article 230-8 du code de procédure pénale n'était pas applicable et la juridiction administrative demeurait compétente pour connaître de la demande de M.A... ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le garde des Sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M. A...présentée devant ce tribunal au motif qu'elle était portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ; qu'il y a donc lieu d'annuler cette ordonnance ;

7. Considérant que s'il y a lieu pour la cour d'évoquer ladite demande, celle ci doit cependant être rejetée dès lors qu'à la date du présent arrêt, ainsi qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5, la juridiction administrative n'est plus compétente pour connaître du litige qui oppose M. A...au procureur de la République de Moulins ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1501173 du 2 novembre 2016 du président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulée.

Article 2 : La demande de M. A...est rejetée

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et à la garde des Sceaux, ministre de la justice.

Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Moulins.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Gondouin premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 octobre 2017.

4

N° 17LY00081


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00081
Date de la décision : 26/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Application dans le temps - Entrée en vigueur - Entrée en vigueur subordonnée à l'intervention de mesures d'application.

Compétence - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction - Compétence déterminée par des textes spéciaux - Attributions légales de compétence au profit des juridictions judiciaires.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Jean-Louis d'HERVE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-10-26;17ly00081 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award