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05/10/2017 | FRANCE | N°16LY03702

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 05 octobre 2017, 16LY03702


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 25 janvier 2016 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français, lui accordant un délai de départ volontaire de 30 jours et fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office.

Par un jugement n° 1603333 du 6 octobre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une re

quête enregistrée le 2 novembre 2016, M.D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 25 janvier 2016 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français, lui accordant un délai de départ volontaire de 30 jours et fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office.

Par un jugement n° 1603333 du 6 octobre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 novembre 2016, M.D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 octobre 2016 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 25 janvier 2016 ;

3°) d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le jugement est entaché d'une erreur de droit par contradiction de motif et d'erreur de fait ;

- le refus de titre de séjour porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants, en méconnaissance de l'article 3.1 de la convention internationale des droits de l'enfant et de l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; le jugement est entaché de contradiction de motif ;

- le refus de l'admettre exceptionnellement au séjour est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français, la décision fixant le délai de départ volontaire et la décision désignant le pays de renvoi sont illégales car elles reposent sur un refus de titre de séjour illégal ;

- l'obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des stipulations protégeant l'intérêt supérieur de ses enfants mineurs ; cette mesure d'éloignement méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la fixation du délai de départ volontaire à 30 jours est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, compte tenu de la proximité de la naissance de son second enfant, dont le préfet avait connaissance.

Par un mémoire enregistré le 26 janvier 2017, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il s'en rapporte à ses écritures de première instance, les pièces nouvelles produites par le requérant étant postérieures à la décision attaquée et sans incidence sur sa légalité.

La demande d'aide juridictionnelle de M. D...a été rejetée par décision du 30 novembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Hervé,

- les observations de Me C...pour M.D... ;

1. Considérant que M.D..., ressortissant ghanéen, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 6 octobre 2016 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de renvoi ;

2. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient le requérant, le jugement attaqué, qui retient l'existence d'une vie commune récente entre l'intéressé et sa compagne, mère de ses enfants, tout en relevant qu'il ne produit aucune pièce probante de nature à démontrer qu'il contribuerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants n'est pas, de ce seul fait, entaché de contradiction de motif ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au jour des décisions en litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République.". ;

4. Considérant qu'il est constant que M. D...est arrivé en France en septembre 2013, à l'âge de 20 ans, et qu'il ne résidait sur le territoire national que depuis deux ans à la date des décisions litigieuses ; que, s'il fait état de sa relation de concubinage avec une compatriote, titulaire d'une carte de résident en qualité d'enfant d'une ressortissante française, qui est la mère de sa fille née le 18 juillet 2014 dont elle était enceinte à la date des actes en litige, il ressort des mentions figurant sur ces décisions, qui ne sont pas contestées, que la compagne du requérant n'est entrée en France que le 2 octobre 2013 ; qu'à supposer même que l'essentiel des membres de la famille de cette dernière résiderait en France, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une vie familiale normale ne pourrait être envisagée au Ghana, pays de nationalité des deux membres du couple, et où résident les parents et la soeur du requérant, selon les précisions apportées par ce dernier lors de sa dernière demande de titre de séjour ; qu'en toutes hypothèses, les pièces du dossier sont insuffisantes pour justifier que la vie commune entre M. D...et sa compagne aurait effectivement débuté dès octobre 2013, et non en juin 2014, ainsi que l'a retenu le tribunal ; que, dans ces conditions, ni le refus de titre de séjour, ni la mesure d'éloignement dont il est assorti ne portent au droit au respect de la vie privée du requérant une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces mesures ont été prises ; qu'ainsi, les moyens tirés de la méconnaissance, d'une part, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, invoqué à l'encontre de ces deux décisions, et, d'autre part, du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, soulevé à l'encontre du refus de titre de séjour, ne peuvent qu'être écartés ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ; que, d'autre part, qu'aux termes de l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Les enfants ont droit à la protection et aux soins nécessaires à leur bien-être. Ils peuvent exprimer leur opinion librement. Celle-ci est prise en considération pour les sujets qui les concernent, en fonction de leur âge et de leur maturité. 2. Dans tous les actes relatifs aux enfants, qu'ils soient accomplis par des autorités publiques ou des institutions privées, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. 3. Tout enfant a le droit d'entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à son intérêt." ;

6. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 4, que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer hors de France, où les parents ne se sont établis que récemment, et plus particulièrement au Ghana, pays dont les deux parents ont la nationalité ; que, dans ces conditions, ni le refus de séjour, ni l'obligation de quitter le territoire français ne portent atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant du requérant, âgé d'un an à la date des décisions litigieuses ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant et de l'article 24.2 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté ; qu'en outre, la mesure d'éloignement, et, en tout état de cause, le refus de séjour n'ont ni pour objet ni pour effet de séparer les enfants de M. D...de leurs parents, et ne méconnaissent donc pas l'article 24.3 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que les circonstances de l'espèce, rappelées au point 4, ne relèvent pas de circonstances humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour qui lui a été opposé est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que, compte tenu en particulier des circonstances de fait mentionnées au point 4, l'obligation de quitter le territoire en litige n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant, en sixième lieu, qu'eu égard à ce qui précède, M. D...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de séjour ;

10. Considérant, en septième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " (...) II.- Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine [...]. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ; que si M. D...soutient que le délai de départ volontaire qui lui a été octroyé a pour effet de le priver de la possibilité d'assister à la naissance de son second enfant, il ressort au contraire des pièces du dossier que cet enfant est né plusieurs semaines avant l'expiration de ce délai ; que, compte tenu des circonstances de l'espèce, la décision lui accordant un délai de départ volontaire de 30 jours n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 14 septembre2017 à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Gondouin premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 octobre 2017.

3

N° 16LY03702


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03702
Date de la décision : 05/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Jean-Louis d'HERVE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : BESCOU

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-10-05;16ly03702 ?
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